Propriété intellectuelle : Preuve de la qualité d’auteur : pas de preuve préconstituée

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Démontrer sa qualité d’auteur

Le collaborateur d’une société a revendiqué être l’auteur de 55 créations graphiques qu’il dit avoir créées pour les produits et le matériel commercialisés par la société Metal Boxe.

Pour démontrer sa qualité d’auteur, il a fourni tout d’abord aux débats un inventaire desdites créations graphiques ainsi qu’une pièce nintitulée ‘Détail du travail de création pour chaque design et graphisme’ dans laquelle figurent les photographies de chaque création alléguée avec un commentaire décrivant les ‘démarches de recherche’ effectuées par celui-ci.

Preuve préconstituée

Or, ces pièces, que le demandeur s’est constitué à lui-même, n’établissent nullement qu’il serait l’auteur des oeuvres alléguées, les pièces ne mentionnant aucune date quant aux prétendus travaux de recherche menés ni aucun croquis des étapes intermédiaires.

Preuve de l’originalité  

Faute d’établir l’originalité des créations et faute de démontrer en être le créateur, c’est à bon droit que le tribunal a débouté le demandeur de ses demandes au titre de l’action en contrefaçon.

Périmètre des droits d’auteur

Pour rappel, aux termes de l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle, ‘l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial (…)’.

L’article L. 122-4 du même code prévoit que toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite.

En application des articles L. 335-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle, applicables à l’ensemble des oeuvres de l’esprit, la contrefaçon se caractérise par l’atteinte portée aux droits exclusifs de l’auteur par, notamment, la reproduction, la représentation ou la diffusion, sans son autorisation, des éléments qui caractérisent l’originalité de son oeuvre.

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
 
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2022
 
BV
 
N° RG 19/05913 – N° Portalis DBVJ-V-B7D-LJXO
 
[G] [V]
 
c/
 
SARL METAL BOXE & ATTITUDE FIGHT
 
Nature de la décision : AU FOND
 
Grosse délivrée le :
 
aux avocats
 
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 24 septembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 1, RG : 17/09311) suivant déclaration d’appel du 08 novembre 2019
 
APPELANT :
 
[G] [V]
 
né le 02 Février 1976 à [Localité 4] (30)
 
de nationalité Française
 
demeurant [Adresse 3] – [Localité 1]
 
représenté par Maître Romain CORBIER-LABASSE, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assisté de Maître Sophie LALANDE de la SARL SOPHIE LALANDE – AVOCAT-CONSEIL, avocat plaidant au barreau de BAYONNE
 
INTIMÉE :
 
SARL METAL BOXE & ATTITUDE FIGHT, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 2] – [Localité 6]
 
représentée par Maître Marc FRIBOURG de la SELARL FRIBOURG & ASSOCIES, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître LAURIOL substituant Maître Béatrice RAVINA-THULLIEZ, avocats plaidants au barreau de TOULOUSE
 
COMPOSITION DE LA COUR :
 
En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 juin 2022 en audience publique,en double rapporteur, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Roland POTEE, président, et Bérengère VALLEE, conseiller, chargée du rapport,
 
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
 
Roland POTEE, président,
 
Vincent BRAUD, conseiller,
 
Bérengère VALLEE, conseiller,
 
Greffier lors des débats : Véronique SAIGE
 
ARRÊT :
 
— contradictoire
 
— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
 
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
 
La SARL Métal Boxe & Attitude Fight est une société spécialisée dans la vente d’articles de sport et loisirs, arts martiaux et sports de combat.
 
M. [G] [V] travaillait, jusqu’en 2012, pour l’Armée française en tant que ‘formateur de formateurs’ en sports de combat et notamment de ‘TIOR’ (Techniques d’Intervention Opérationnelles Rapprochées).
 
Souhaitant vivre de sa passion en dehors de l’Armée, M. [V] a sollicité son départ à la retraite anticipée le 1er août 2012, affirmant qu’il espérait travailler en suivant pour le compte de la société Métal Boxe & Attitude Fight en qualité de salarié de cette entreprise, pour laquelle il a, entre 2012 et 2014, effectué diverses prestations de services en matière de dessin, designs et logos.
 
Reprochant toutefois à la société Métal Boxe & Attitude Fight, d’une part, d’avoir décliné sans son autorisation ses dessins et designs en divers produits contrefaisants et d’autre part, de ne pas avoir respecté à son égard une promesse d’embauche à durée indéterminée tout en profitant de travaux qu’il aurait réalisés pour leur compte (au point de remporter en 2014 un appel d’offre de l’Armée grâce à son intervention) mais sans le rétribuer en contrepartie, M. [V], après des tentatives infructueuses de règlement amiable du conflit, l’a assignée devant le tribunal de grande instance de Bordeaux par exploit d’huissier du 10 octobre 2017.
 
Par jugement du 24 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :
 
— débouté M. [G] [V] de l’ensemble de ses demandes,
 
— débouté la SARL Métal Boxe Attitude Fight de sa demande de dommages-et-intérêts,
 
— condamné M. [G] [V] à verser à la SARL Métal Boxe Attitude Fight une somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
 
— condamné M. [G] [V] aux dépens,
 
— dit ne pas y avoir lieu d’ordonner l’exécution provisoire du jugement.
 
Pour statuer ainsi, le tribunal a estimé que M. [V] ne démontrait pas être le créateur des oeuvres litigieuses ni ne rapportait la preuve de l’originalité de celles-ci. S’agissant de la rupture des pourparlers, le tribunal a retenu qu’il n’existait aucune preuve de ce que la société Métal Boxe & Attitude Fight se serait engagée à l’embaucher en tant que salarié à durée indéterminée ni que cette prétendue promesse d’embauche l’engageait à une rémunération complémentaire.
 
M. [V] a relevé appel de ce jugement par déclaration du 8 novembre 2019 et par conclusions déposé le 16 mai 2022, il demande à la cour de :
 
— réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :
 
* débouté M. [V] de l’ensemble de ses demandes,
 
* condamné M. [V] à verser à la SARL Métal Boxe Attitude Fight une somme de 2.000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, * condamné M. [V] aux dépens.
 
— recevoir M. [V] en toutes ses demandes et le dire bien fondé,
 
— débouter la SARL Métal Boxe Attitude Fight de sa demande reconventionnelle.
 
SUR LA CONTREFAÇON DU DROIT D’AUTEUR DE M. [V]
 
— dire que les créations listées dans la pièce n°13 sont des ‘uvres de l’esprit au sens de l’article L112-2 du code de la propriété intellectuelle et que M. [V] en est l’auteur en ce qu’elles portent son empreinte,
 
— dire qu’en conséquence la société Métal Boxe Attitude Fight les exploite sans droit ni titre,
 
EN CONSÉQUENCE
 
— enjoindre la société Métal Boxe – Attitude Fight à cesser la commercialisation de tout produit contrefaisant les créations originales de M. [V] sous astreinte de 500 € par jour de retard et par infraction constatée passée l’expiration d’un délai de 10 jours suivant la signification de la décision à intervenir ; astreinte dont la Cour se réservera la liquidation le cas échéant,
 
— condamner la société Métal Boxe – Attitude Fight à verser entre les mains de M. [V] une indemnité de 75.600€ au titre de la contrefaçon de ses créations originales (somme à parfaire au jour de la décision à intervenir),
 
SUR LA MAUVAISE FOI ET LE MANQUE DE LOYAUTE DE LA PART DE L’INTIMEE AU STADE [5]
 
— dire que l’intimée a manqué à l’égard de M. [V] aux obligations de loyauté et de bonne foi au stade des pourparlers,
 
EN CONSÉQUENCE, AVANT DIRE DROIT :
 
— désigner tel expert qu’il plaira à la Cour et le charger de la mission suivante :
 
APRES :
 
* Avoir pris connaissance du dossier de la procédure,
 
* S’être fait remettre par les parties toutes pièces utiles,
 
* S’être fait remettre par M. [V] le détail du matériel optimisé et/ou développé par ses soins au profit de la société METAL BOXE ;
 
* S’être fait remettre par la société Métal Boxe – Attitude Fight les pièces comptables de la société depuis 2009 nécessaires à l’évaluation du chiffre d’affaires des ventes issues du matériel développé par M. [V] ;
 
* S’être fait remettre par la société Métal Boxe – Attitude Fight le détail du matériel vendu au Ministère de la Défense tel que présenté dans l’avis d’attribution de Marché n°201400220150050000 en date du 17/03/2015 ;
 
DE :
 
* Calculer le montant d’une gratification mensuelle représentant 7% du chiffre d’affaires des ventes issues du matériel susmentionné depuis 2009 ;
 
* Calculer le montant d’une gratification représentant 15% du chiffre d’affaires des ventes issues de ce Marché n°201400220150050000 ;
 
* Confirmer le montant des avantages perdus par M. [V] et liés au statut de militaire et plus précisément :
 
— La valeur d’un logement de fonction à [Localité 6] correspondant à un appartement de type T1 pour une période de 3 ans et préciser le montant sur un période de 2012 à 2014 ;
 
— La valeur de primes non imposables et autres indemnités de sujétion pour service à l’étranger (ISSE) ;
 
— La valeur des frais de déplacement à prix réduit en train sur un période de 2012 à 2014.
 
— La valeur de la pension de retraite effectivement perdue.
 
— dire, d’une manière générale,
 
* Que l’Expert devra :
 
— Accomplir sa mission personnellement et contradictoirement en présence des parties et de leurs conseils ou ceux-ci dûment convoqués conformément aux dispositions de l’article 160 du code de procédure civile,
 
— Recueillir leurs observations et recevoir leurs dires,
 
— Annexer à son rapport les documents ayant servi à sa mission, ceux qui le complètent ou contribuent à sa compréhension et restituer les autres contre récépissé aux personnes les ayant fournis ;
 
— Demander communication aux parties et aux tiers de tous documents nécessaires à l’accomplissement de sa mission,
 
— Adresser aux parties à la fin de ses opérations, une note de synthèse pour les informer du résultat de ses travaux, les parties disposant alors d’un délai de 4 (QUATRE) semaines pour faire parvenir leurs observations récapitulatives, le tout devant être consigné dans le rapport d’expertise,
 
— Sera informé de la mission ci-dessus à la diligence du greffe, qu’il devra en retour faire connaître son acceptation dans un délai de 8 jours à partir de la notification faite par le Greffe ;
 
* Qu’en cas d’empêchement de l’expert désigné ou d’inobservation par lui des délais prescrits, il pourra être pourvu à son remplacement par ordonnance rendue par le magistrat chargé du contrôle des expertises, sur requête ou d’office ;
 
* Que l’expert déposera son rapport écrit au Greffe de la Cour d’Appel de Bordeaux dans un délai de 3 (trois) mois à compter de la date figurant sur l’avis de consignation de la provision, sauf prorogation du délai par le Juge chargé du contrôle des expertises dans les conditions prévues par l’article 279 du Code de Procédure Civile ;
 
* Que lors du dépôt de son rapport, accompagné de sa demande de rémunération, l’expert devra adresser un exemplaire de celle-ci à chacune des parties par le moyen de son choix permettant d’en établir la date de réception ;
 
* Qu’en cas de refus, d’empêchement ou de négligence de l’expert désigné, il sera procédé à son remplacement par ordonnance à la requête de la partie la plus diligente ;
 
* Que l’Expert pourra recourir à tout sapiteur de son choix et recueillir tant l’avis de tous techniciens – dans une spécialité distincte de la sienne – que des informations orales ou écrites, sauf à ce que soient précisés leurs nom, prénom, demeure et profession, ainsi que, s’il y a lieu, leurs liens de parenté, d’alliance, de subordination ou de communauté d’intérêts avec l’une ou l’autre des parties ;
 
— Sur la consignation à valoir sur la rémunération de l’expert :
 
* Dire que la société Métal Boxe Attitude Fight devra consigner auprès du Régisseur d’Avances et de Recettes du Greffe de la Cour d’Appel de Bordeaux, la somme, à valoir sur la rémunération de l’expert, dans un délai maximal de 1 (UN) mois à compter du jugement à intervenir ;
 
* Dire qu’à défaut de consignation par la société Métal Boxe Attitude Fight, dans le délai susvisé :
 
— Il sera tiré toutes conséquences de cette abstention ou du refus de consigner et qu’en cas d’absence d’élément probant permettant de justifier une impossibilité de la part de la société Métal Boxe Attitude Fight , il sera appliqué une astreinte de 500€ par jour de retard pour ladite consignation, à compter du terme du délai susvisé ; astreinte que le Juge chargé du contrôle des expertises pourra liquider le cas échéant ;
 
— Et, passé le délai de 1 mois susvisé, autoriser M. [V] à consigner la somme mise à la charge de société Métal Boxe Attitude Fight ;
 
* Dire que l’expert sera informé de cette consignation, sa mission débutant à compter de cette date,
 
* Dire qu’en cas d’insuffisance manifeste de la provision allouée, au vu des diligence faites ou à venir, l’expert en fera sans délai rapport au magistrat chargé de suivre les opérations, qui, s’il y a lieu, ordonnera la consignation d’une provision complémentaire à la charge de la partie qu’il déterminera ;
 
* Dire que les parties pourront, s’il y a lieu, adresser à l’expert et au magistrat chargé du contrôle des opérations leurs observations écrites sur la demande de rémunération faite par l’expert dans un délai de 15 jours à compter de la réception de la copie de la demande de rémunération,
 
* Dire que l’expert prendra en considération les observations ou réclamations des parties, les joindra à ses avis, et fera mention de la suite qu’il leur aura donnée.
 
— Et plus généralement encore sur le déroulement de l’expertise :
 
* Dire que le magistrat chargé du contrôle des expertises à la Cour d’Appel de Bordeaux, ou son délégataire, est désigné à l’effet de suivre l’exécution des mesures d’instruction susvisées ;
 
* Dire que sous le contrôle du magistrat chargé du contrôle des expertises auprès de la Cour d’Appel, l’expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 155 à 174, 232 à 248, 263 à 284 du code de procédure civile ;
 
* Dire qu’il appartiendra à l’expert désigné de solliciter en temps utile auprès du magistrat chargé de suivre l’expertise, les prorogations de délai nécessaires à l’exécution de sa mission ;
 
* Dire que conformément aux dispositions de l’article 153 du code de procédure civile, le dossier sera renvoyé à toute audience de la mise en état utile pour un nouvel examen en lecture du rapport d’expertise.
 
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
 
— condamner la société Métal Boxe Attitude Fight à verser entre les mains de M. [V] 25.000€ à titre de provision à valoir sur l’indemnité destinée à compenser le préjudice lié à la perte subie,
 
— condamner la société Métal Boxe Attitude Fight à verser entre les mains de M. [V] 357 292,00€ au titre de l’indemnisation de sa perte de chance de toucher une retraite à taux plein,
 
— condamner la société Métal Boxe Attitude Fight à payer à M. [V] la somme de 10.000€ au titre de l’indemnisation de son préjudice moral,
 
— condamner la société Métal Boxe Attitude Fight à payer à M. [V] la somme de 8.000€ à titre de provision à valoir sur l’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
 
— réserver les frais et dépens de l’instance.
 
Par conclusions déposées le 31 mai 2022, la société Métal Boxe & Attitude Fight demande à la cour de :
 
— déclarer M. [G] [V] irrecevable et mal fondé en toutes ses demandes, et l’en débouter,
 
— confirmer le jugement du tribunal de grande instance en date du 24 septembre 2019 en ce qu’il a :
 
* débouté Mr [V] de l’ensemble de ses prétentions ;
 
* condamné Mr [V] au paiement d’une somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
 
— déclarer la société Métal Boxe Attitude Fight recevable et bien fondée en son appel incident,
 
* En conséquence, déclarer recevable et bien fondée la demande reconventionnelle présentée par la société METAL BOXE et ce faisant, condamner M. [V] au paiement de dommages intérêts à concurrence de 10 000 € pour procédure abusive ;
 
* le condamner au paiement d’une somme de 7 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en sus de la somme allouée en première instance sur ce même fondement;
 
* le condamner aux entiers dépens.
 
L’affaire a été fixée à l’audience collégiale du 21 juin 2022.
 
L’instruction a été clôturée par ordonnance du 7 juin 2022.
 
MOTIFS DE LA DÉCISION
 
Sur l’action en contrefaçon
 
Reprochant au tribunal d’avoir rejeté ses demandes au titre de la contrefaçon, M. [V] soutient qu’il est l’auteur de 55 créations graphiques réalisées pour les produits et le matériel commercialisés par la société Metal Boxe entre 2012 et 2014, les intitulés des factures honorées par l’intimée faisant expressément référence à des prestations de ‘créations de textiles et design’ ou de ‘créations design logo’. Il ajoute qu’il suffit, pour identifier les créations dont il est l’auteur, de comparer les produits avant son intervention sur les catalogues de 2010 et 2011 et ceux proposés à la suite de son intervention à partir de 2012. Il se prévaut d’une attestation de la société Pakzen qui confirme selon lui avoir développé et fabriqué sous sa seule direction la collection de shorts Métal MMA. Il affirme que l’originalité des oeuvres résulte d’éléments graphiques spécifiques, associés à des couleurs précises qui confèrent à chaque produit un caractère singulier propre et témoignent d’une recherche esthétique portant l’empreinte de la personnalité de son auteur. Enfin, il conteste la qualification d’oeuvres collectives dont la société Metal Boxe pourrait s’arroger la paternité alors qu’elle ne démontre pas le rôle prétendument prépondérant qu’elle aurait joué à tous les stades de leur conception, sauf à alléguer que son travail se serait limité à la simple maîtrise d’un ordinateur qu’elle lui aurait mis à disposition. Sur le fait qu’une des factures vise la SARL ‘LILSPIRIT’, il s’agit selon lui d’une simple erreur comptable ne remettant pas en question sa paternité sur l’ensemble de ses oeuvres. Dès lors, rappelant qu’aucun contrat de cession de droits d’auteur ou d’autorisation d’exploitation n’a été conclu, il considère que 378 produits déclinés de ces créations dans le catalogue de la société Metal Boxe seraient contrefaisants.
 
La société Metal Boxe réplique que les pièces n°13-1 et 13-2 versées aux débats par la partie adverse ne démontrent nullement que M. [V] serait l’auteur des créations graphiques qui y sont représentées, ajoutant que les factures établies par M. [V] lui-même et faisant état de créations, ne permettent pas non plus de prouver l’existence d’un quelconque droit d’auteur. Il fait valoir que l’appelant ne se donne même pas la peine de décrire en quoi les oeuvres dont il prétend être l’auteur seraient originales, sauf à se référer à des allégations générales relatives à des ‘éléments graphiques spécifiques’ (sans décrire en quoi consiste ces prétendues spécificités) ‘associés à des couleurs précises’, lesquelles ne sont que les couleurs traditionnelles de la société Metal Boxe, M. [V] ne précisant pas sur quoi porteraient ses prétendus droits d’auteur (dessins, vêtements, matériel d’entraînement), pas plus que le nombre d’oeuvres revendiquées qui, s’il s’agirait de 55 ‘créations graphiques’, porteraient en réalité sur l’ensemble de ses déclinaisons potentielles soit 378 au total sans qu’il soit possible d’identifier précisément lesdites créations. Enfin, elle conteste le contenu des attestations produites par M. [V], qui sont, selon elle, de pure complaisance.
 
A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la cour considérerait que les produits sur lesquels M. [V] prétend détenir des droits sont constitutifs d’oeuvres de l’esprit au sens du code de la propriété intellectuelle, la société Metal Boxe soutient qu’il s’agirait alors d’oeuvres collectives prévues aux articles L. 113-2 alinéa 3 et L. 113-5 du même code, soulignant que l’appelant n’a fait que répondre à des commandes sans disposer d’autonomie réelle, se contentant de réaliser les produits selon les instructions de la société Metal Boxe grâce au logiciel de dessin et à l’ordinateur mis à sa disposition. A titre infiniment subsidiaire, elle constate que M. [V] inclut dans les créations qu’il revendique certaines qui seraient l’oeuvre de la société ‘LILSPIRIT’, l’intéressé ne pouvant dès lors exercer des droits au nom de cette société.
 
Aux termes de l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle, ‘l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial (…)’.
 
L’article L. 122-4 du même code prévoit que toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite.
 
En application des articles L. 335-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle, applicables à l’ensemble des oeuvres de l’esprit, la contrefaçon se caractérise par l’atteinte portée aux droits exclusifs de l’auteur par, notamment, la reproduction, la représentation ou la diffusion, sans son autorisation, des éléments qui caractérisent l’originalité de son oeuvre.
 
En l’espèce, M. [V] revendique être l’auteur de 55 créations graphiques estampillées ‘Métal’, ‘Métal Boxe’, ‘Métal Brasil’, ‘MB’, ‘Dojo Master’, ‘Kombat Shop’ qu’il dit avoir créées entre 2012 et 2014 pour les produits et le matériel commercialisés par la société Metal Boxe.
 
Pour démontrer sa qualité d’auteur, il fournit tout d’abord aux débats une pièce n°13-1 constituant un inventaire desdites créations graphiques ainsi qu’une pièce n°13-2 intitulée ‘Détail du travail de création de M. [V] pour chaque design et graphisme’ dans laquelle figurent les photographies de chaque création alléguée avec un commentaire décrivant les ‘démarches de recherche’ effectuées par M. [V].
 
Or, ces pièces, que l’appelant s’est constituées à lui-même, n’établissent nullement qu’il serait l’auteur des oeuvres alléguées, la pièce n°13-1 étant une simple planche photographique desdites créations et la pièce n°13-2 ne mentionnant aucune date quant aux prétendus travaux de recherche menés par M. [V] ni aucun croquis des étapes intermédiaires.
 
S’agissant des factures établies par M. [V] entre 2012 et 2014, visant un travail de ‘créations textiles et design’ et ‘création design logo’ (pièce n°6), il est exact et non contesté qu’elles ont été rémunérées par la société Metal Boxe. Comme le souligne toutefois justement le tribunal, aucun autre renseignement n’est donné sur les caractéristiques de ces créations ni même sur le nombre de celles-ci, de sorte que la cour n’est pas en mesure d’identifier les créations dont M. [V] serait l’auteur. Contrairement à ce que soutient ce dernier, la simple comparaison des catalogues 2010- 2011 et 2012 de la société Metal Boxe, à laquelle renvoie l’appelant sans autre précision, est insuffisante à déterminer les créations en question.
 
M. [V] produit également deux attestations établies le 17 février 2020 par M. [F], dirigeant de la société Pakzen (pièce n°45). L’attestation dactylographiée et non signée sera écartée des débats comme ne remplissant pas les conditions prévues à l’article 202 du code de procédure civile. S’agissant de l’attestation manuscrite et signée, M. [F] atteste ‘avoir en 2012 développé et fabriqué sous les consignes exclusives de M. [G] des articles types shorts body guards pour le sport de combat. J’atteste que M. [G] est venu dans notre usine de Casablanca pour développer et contrôler l’aboutissement d’une gamme spécialisée sous la marque Metal Boxe.’
 
Cette seule attestation est cependant insuffisante à démontrer que M. [V] est bien le créateur des shorts évoqués, cette allégation étant au surplus contredite par l’attestation, produite par l’intimée, de Mme [W], employée de la société Metal Boxe entre 2012 et 2020, qui indique que ‘M. [V] produisait des dessins et design que Messieurs [N] et [N] – gérants de Metal Boxe – lui soumettaient car il avait une belle maîtrise de l’informatique’ (pièce n°40)
 
Au surplus, M. [V] ne rapporte pas non plus la preuve qui lui incombe de l’originalité des oeuvres revendiquées. Comme justement souligné par l’intimée, l’appelant se borne à faire état, par des allégations générales et non étayées, d’ ‘éléments graphiques spécifiques’, de ‘dessins et visuels originaux’, sans caractériser en quoi les créations dont il prétend -sans en justifier- être l’auteur, porteraient l’empreinte de la personnalité de celui-ci.
 
Faute d’établir l’originalité des créations et faute de démontrer en être le créateur, c’est à bon droit que le tribunal a débouté M. [V] de ses demandes au titre de l’action en contrefaçon.
 
Sur la rupture fautive des pourparlers et les manoeuvres dolosives
 
M. [V] soutient que la société Metal Boxe s’était engagée à l’embaucher dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée une fois effective sa mise à la retraite de l’armée et à lui payer, outre un revenu mensuel, des gratifications liées à son investissement pour l’intégration de la société dans les marchés très fermés des forces de l’ordre, de l’armée et des entreprises de sécurité, engagements qu’elle n’a finalement pas honorés.
 
A l’appui de ses allégations, il fait valoir que :
 
— son dossier de reconversion transmis en juillet 2010 à son adjudent-chef faisait déjà état de sa prochaine intégration dans la société Metal Boxe,
 
— un des dirigeants de cette société avait attesté en octobre 2010 de sa volonté de l’intégrer,
 
— son supérieur hiérarchique, le lieutenant-colonel [M], a attesté avoir rencontré les gérants de la société Metal Boxe,
 
— le cogérant de la société Metal Boxe a attesté le 10 janvier 2012 de cette volonté de l’intégrer ‘à la fin de son contrat militaire (…) ceci sous un contrat à durée indéterminée.’
 
— dans son courrier du 17 janvier 2012 adressé au chef de corps du CNSD, le cogérant de la société Metal Boxe assure qu’il intégrera la société ‘comme salarié sous un contrat à durée indéterminé suite à son stage de reconversion’,
 
— M. [Y], ancien collaborateur des gérants de la société Metal Boxe dans leur société Yamatsuki Ichiban, atteste que ces derniers ‘avaient réussi à convaincre [G] de quitter l’armée pour les rejoindre (…). Ils considéraient [G] [V] comme leur futur associé.’
 
Il ajoute qu’il ne peut lui être reproché d’avoir créé sa propre société ‘LILSPIRIT » dès lors qu’il s’agissait pour lui, en juillet 2013 soit plus d’un an et demi après sa mise à la retraite de l’armée, de pallier la carence de la société Metal Boxe qui s’obstinait à ne pas honorer sa promesse d’embauche.
 
Il se prévaut d’une attestation d’une ex-salariée de la société Metal Boxe témoin de la scène, selon laquelle l’intimée s’était engagée à lui verser une rémunération complémentaire pour son investissement dans le développement commercial de cette entreprise, à savoir :
 
—  7% du chiffre d’affaires des ventes issues du matériel développé par M. [V] depuis 2009,
 
—  15% du chiffre d’affaires des ventes issues de l’appel d’offre remporté en 2014.
 
M. [V] reproche en outre à la société Metal Boxe d’avoir adopté des manoeuvres dolosives destinées à profiter de son expérience et de son réseau pour acquérir des parts de marché sans respecter ses engagements. Ainsi, il affirme avoir optimisé et/ou développé du matériel technique aujourd’hui commercialisé par la société Metal Boxe auprès auprès des marchés de l’armée, des forces de l’ordre et des entreprises de sécurité (paire de gants MMA MB520, casque MB423, coquille femme MB 2008), alors que sans son intervention, ces produits n’intéressaient pas ceux-ci, faute de fiabilité suffisante en termes de qualité et de sécurité.
 
Enfin, il soutient que, sans son intervention, la société Metal Boxe n’aurait jamais pu remporter l’appel d’offre national relatif aux lots ‘TIOR’ de l’armée française puisque, sans lui, le cahier des charges de l’appel d’offre du 30 août 2013 manifestement inadapté, n’aurait pas fait l’objet d’une modification et n’aurait pas permis à l’intimée de l’emporter in fine, ce sur quoi elle s’était engagée à lui reverser 15% du chiffre d’affaires réalisé en suivant.
 
De son côté, la société Metal Boxe conteste catégoriquement avoir promis à M. [V] de l’embaucher en qualité de salarié, quand bien même reconnaît-elle avoir voulu l’aider dans son projet de quitter l’armée et avoir rédigé des attestations pour lui permettre de constituer son dossier de reconversion. Elle précise que M. [V], qui a toujours exprimé sa volonté de jouir d’une totale autonomie incompatible avec un contrat de travail, n’a en réalité jamais envisagé un statut de salarié comme en témoigne la création de son entreprise individuelle ‘LILSPIRIT’ dès le 1er juin 2012 alors qu’il travaillait encore pour l’armée, et non en juillet 2013 comme il le prétend. Elle souligne qu’elle a donné la possibilité à M. [V] d’effectuer diverses prestations de service moyennant rémunération puisqu’elle lui a réglé – à lui directement ou à sa société ‘LILSPIRIT’ – entre février 2012 et avril 2014, la somme totale de 58.500 euros.
 
Elle conteste s’être engagée à lui verser une quelconque rémunération complémentaire calculée sur son chiffre d’affaires, aucune convention en ce sens n’ayant été signée, considérant que l’attestation adverse est dépourvue de toute force probante.
 
Elle dément que ses produits auraient été optimisés par M. [V] pour les besoins de l’armée française tout comme les affirmations selon lesquelles ses produits auraient été, avant sa prétendue contribution, considérés comme dangereux en terme de qualité et de sécurité.
 
Enfin, elle nie avoir eu besoin des services de M. [V] pour remporter l’appel d’offres de l’armée du 30 août 2013.
 
Sur ce, il est constant qu’en vertu du principe de liberté contractuelle, il existe un droit de rupture unilatérale des pourparlers précontractuels, de sorte que les négociateurs conservent tout au long des discussions la liberté de contracter ou de les rompre.
 
Il s’ensuit que la rupture des pourparlers ne peut être en soi considérée comme fautive.
 
La rupture ne devient fautive que lorsqu’elle est abusive. La responsabilité encourue lors de pourparlers, servant de fondement à la caractérisation d’un abus, est de nature délictuelle en application des articles 1382 et suivants anciens du code civil.
 
Un abus dans la rupture est notamment caractérisé dès lors que son auteur a rompu brutalement et unilatéralement des négociations engagées et manqué aux règles de bonne foi dans les relations commerciales. La faute peut également résulter du fait de maintenir volontairement son partenaire dans une incertitude prolongée en lui laissant croire que l’affaire allait être conclue à son profit.
 
Enfin, le préjudice réparable en cas de rupture abusive des pourparlers se limite à la perte subie, soit les frais occasionnés par la négociation et les études préalables, et exclut le gain espéré de la conclusion du contrat.
 
En l’espèce, si M. [V] soutient que la société Metal Boxe s’était engagée à l’embaucher en tant que salarié dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée, il n’en rapporte pas la preuve.
 
En effet, s’il ne peut être contesté au vu des pièces versées aux débats que des discussions ont eu lieu entre les parties et qu’a été évoquée la possibilité ‘d’intégrer’ M. [V] dans la société Metal Boxe, ces discussions n’ont nullement débouché sur un engagement ferme de cette dernière d’embaucher M. [V] en qualité de salarié, les attestations émanant du cogérant de la société intimée ne constituant pas une promesse d’embauche, faute de tout élément concernant la date d’embauche, le poste proposé, la rémunération, la durée de travail, la période d’essai, le lieu de travail.
 
Comme le relève justement le premier juge, l’attestation isolée d’une ex-salariée de l’intimée se disant témoin d’un engagement, dont il n’est précisé ni la date ni le lieu, de la société Metal Boxe de verser une rémunération complémentaire à M. [V], n’est étayée par aucune autre pièce, de sorte qu’elle revêt un caractère insuffisamment probant, étant observé que dans son attestation, Mme [O] [E] affirme que les dirigeants souhaitaient intégrer M. [V], non pas en tant que salarié, mais en qualité d’associé, ce qui diffère d’une promesse de conclure un contrat de travail.
 
Si les discussions entre les parties relatives à l’ ‘intégration’ de M. [V] dans la société Metal Boxe peuvent être qualifiées de négociations précontractuelles, aucune faute n’est établie à l’encontre de cette dernière alors qu’il est acquis que M. [V] a effectué plusieurs prestations de service pour le compte de la société intimée entre 2012 et 2014 et qu’il a été rémunéré à ce titre.
 
En outre, à supposer que M. [V] ait optimisé certains produits aujourd’hui commercialisés par la société Metal Boxe, il n’est nullement démontré que celle-ci aurait usé de manoeuvres dolosives pour profiter de son expérience et de son réseau pour acquérir des parts de marché et sans le rémunérer en retour.
 
De même, il n’est pas rapporté la preuve que l’intervention de M. [V] aurait permis à la société Metal Boxe de remporter l’appel d’offres lancé en 2013 par le ministère de la défense, l’appelant ne justifiant pas être l’auteur de la fiche d’expression des besoins de l’armée (pièce n°37).
 
Au regard de l’ensemble de ces éléments, aucune faute n’étant établie à l’encontre de la société Metal Boxe, il convient de débouter M. [V] de l’ensemble de ses demandes.
 
Le jugement sera confirmé en ce sens.
 
Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive
 
L’exercice d’une action en justice de même que la défense à une telle action constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à l’octroi de dommages et intérêts que lorsque est caractérisée une faute en lien de causalité directe avec un préjudice.
 
En l’espèce, un tel comportement de la part de M. [V] n’est pas caractérisé. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la société Metal Boxe de sa demande de ce chef.
 
Sur les dépens et les frais irrépétibles
 
Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.
 
Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. L’appelant en supportera donc la charge.
 
En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, M. [V] sera condamné à payer à la société Metal Boxe la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.
 
PAR CES MOTIFS
 
LA COUR,
 
Confirme le jugement,
 
Y ajoutant,
 
Condamne [G] [V] à payer à la société Metal Boxe & Attitude Fight la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
 
Condamne [G] [V] aux dépens d’appel.
 
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
 
Le Greffier,Le Président,
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