Contrefaçon de brevet : la référence entre revendications

Notez ce point juridique

S’il ressort des directives de l’Office européen des brevets (OEB) qu’une revendication peut comporter une référence à une autre revendication, même si elle n’est pas une revendication dépendante (Partie F 3.8), il s’agit de revendication se référant à une revendication de catégorie différente ou d’une revendication portant sur une pièce et comportant une référence à l’autre pièce avec laquelle il y a coopération. 

La règle 43 (2) du règlement d’exécution de la Convention sur la délivrance de brevets européens (CBE) prévoit que ‘Sans préjudice de l’article 82, une demande de brevet européen ne peut contenir plus d’une revendication indépendante de la même catégorie (produit, procédé, dispositif ou utilisation) que si l’objet de la demande se rapporte :

a) à plusieurs produits ayant un lien entre eux,

b) à différentes utilisations d’un produit ou d’un dispositif, ou

c) à des solutions alternatives à un problème particulier dans la mesure où ces solutions ne peuvent pas être couvertes de façon appropriée par une seule revendication.

Selon la règle 43 (4) de ce même règlement d’exécution, toute revendication qui contient l’ensemble des caractéristiques d’une autre revendication (revendication dépendante) doit comporter une référence à cette autre revendication, si possible dans le préambule, et préciser les caractéristiques additionnelles. Une revendication dépendante peut également se référer directement à une autre revendication dépendante. Toutes les revendications dépendantes qui se réfèrent à une ou plusieurs revendications antérieures doivent, dans toute la mesure du possible, être groupées de la façon la plus appropriée.

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRÊT DU 26 MARS 2021

(n°57, 20 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 19/04282 – n° Portalis 35L7-V-B7D-B7MRV

Décision déférée à la Cour : jugement du 25 janvier 2019 – Tribunal de grande instance de PARIS – 3e chambre 2e section – RG n°15/08695

APPELANTE AU PRINCIPAL et INTIMEE INCIDENTE

S.A.S. SPONTEX, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[…]

[…]

Immatriculée au rcs de Nanterre sous le numéro 309 552 040

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocate au barreau de PARIS, toque D 1119

Assistée de Me Emmanuel DE MARCELLUS plaidant pour la SELARL DE MARCELLUS & DISSER, avocat au barreau de PARIS, toque A 341

INTIMEE AU PRINCIPAL et APPELANTE INCIDENTE

Société LEIFHEIT A.G., société de droit allemand, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

Leifheitstrasse 1

[…]

ALLEMAGNE

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocate au barreau de PARIS, toque K 111

Assistée de Me Laure COLIN plaidant pour le Cabinet CMS FRANCIS LEFEBVRE LYON AVOCATS et substituant Me Xavier VAHRAMIAN, avocate au barreau de LYON, case 659

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été

débattue le 4 février 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme X Y, Présidente, en présence de Mme Z A, Conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport

Mmes X Y et Z A ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme X Y , Présidente

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mme Z A, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Karine ABELKALON

ARRET :

Contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme X Y, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement contradictoire rendu le 25 janvier 2019 par le tribunal de grande instance de Paris ;

Vu l’appel interjeté le 22 février 2019 par la société Spontex ;

Vu les dernières conclusions (conclusions n°3) remises au greffe, et notifiées par voie électronique le 1er octobre 2020 par la société Spontex, appelante et intimée incidente ;

Vu les dernières conclusions (conclusions n°2) remises au greffe, et notifiées par voie électronique le 7 septembre 2020 par la société Leifheit AG, intimée et appelante à titre incident ;

Vu l’ordonnance de clôture du 26 novembre 2020.

SUR CE, LA COUR

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

La société de droit allemand Leifheit se présente comme l’un des principaux fabricants européens de produits d’entretien et de nettoyage pour la maison.

Elle est notamment titulaire du brevet européen désignant la France déposé le 24 avril 2006 et publié le 27 février 2008 sous le n°EP 1890583 B1 (EP’583), délivré le 12 décembre 2012, revendiquant la priorité des demandes de brevet DE 10 2005019624 du 26 avril 2005 et DE 102005023084 du 13 mai 2005. Ce brevet a pour intitulé « dispositif servant à essorer une tête d’essuyage ».

Ce titre est maintenu en vigueur par le paiement régulier des annuités.

La société Leifheit indique exploiter ce brevet dans le cadre de la fabrication et de la commercialisation d’un système de nettoyage sous la dénomination « Clean twist ».

La société Spontex, créée en 1932, se présente comme le spécialiste des éponges grattantes et non grattantes, des lavettes, des serpillières, des chiffons et de la brosserie.

Estimant qu’un produit dit « Express System » commercialisé par la société Spontex reproduisait les caractéristiques de plusieurs revendications du brevet EP’583, la société Leifheit l’a, par lettre du 18 juin 2014, informée des atteintes que lui paraissaient constituer ces agissements. Elle a également fait dresser le 19 mai 2015 des procès-verbaux de constat par huissier de justice sur les sites spontex.fr et YouTube, et à un constat d’achat du produit litigieux dans un supermarché a’ l’enseigne E.LECLERC au prix de 38,04 euros.

Par lettre du 29 juillet 2014, la société Spontex a répondu qu’elle contestait les actes de contrefaçon allégués, et plusieurs échanges ont ensuite eu lieu entre les parties sans qu’une issue amiable ne puisse être trouvée au litige les opposant.

La contrefaçon alléguée du brevet EP’583 a opposé les parties dans d’autres Etats tels l’Allemagne, l’Autriche et la République Tchèque.

Par décisions rendues les 11 août 2016 et 26 mai 2017, le tribunal puis la cour d’appel régionale de Düsseldorf ont jugé que le produit incriminé contrefaisait certaines revendications du brevet EP’583 dont la validité était parallèlement contestée devant le Bundespatentgericht. Le 13 septembre 2016, cette juridiction a rejeté la demande en nullité de la partie allemande du brevet qui a été maintenue dans sa version initiale sans modification. Par décision du 28 août 2018, la cour suprême fédérale a rejeté l’appel formé contre le jugement du Bundespatentgericht.

En Autriche, le tribunal de Vienne par décision du 26 juin 2017 confirmée par la cour d’appel de Vienne le 14 mars 2018, a jugé que le produit de la société Spontex reproduisait les caractéristiques de la variante 1 de la revendication 1 et celles de la revendication 5 du brevet de la société Leifheit, étant précisé que l’expert désigné en première instance avait conclu à la ‘probable’ nullité des revendications 1 à 7 et 9 à16 dans la variante 2 du brevet EP 583. L’office des brevets autrichien a rejeté la demande de nullité de la partie autrichienne du brevet EP’583 par décision du 28 août 2019.

En République Tchèque, le brevet EP’583 de la société Leifheit a en revanche été annulé pour défaut d’activité inventive par l’office de la propriété industrielle tchèque le 13 novembre 2019. La société Leifheit a interjeté appel de cette décision.

Par acte en date du 28 mai 2015, la société Leifheit a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris la société Spontex en contrefaçon des revendications 5, 13 et 16 de la partie française du brevet EP’583. La société Spontex a quant à elle reconventionnellement sollicité la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 13 et 16 de la partie française de ce brevet.

Le jugement déféré a :

— débouté la société Spontex de ses demandes tendant à la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 13 et 16 de la partie française du brevet européen n° EP 1890583 pour absence de nouveauté et d’activité inventive ;

— dit que le produit nommé « Express System » commercialisé par la société Spontex constitue la contrefaçon de la revendication 5 de la partie française du brevet européen n° EP 1890583 dont la société Leifheit AG est titulaire ;

— ordonné à la société Spontex de produire, passé un délai de 3 mois à compter de la signification du présent jugement, tous documents certifiés par son commissaire aux comptes relatifs au nombre de produits « Express System » litigieux vendus ainsi que les prix des dits produits et les bénéfices réalisés par ces ventes depuis leur lancement en période non prescrite ;

— fait interdiction à la société Spontex de poursuivre ou reprendre la commercialisation du produit « Express System » ;

— ordonné à la société Spontex la destruction de l’intégralité des stocks des produits « Express System » en sa possession ou détenus pour son compte, sous contrôle d’un huissier de justice et à ses frais ;

— condamné la société Spontex à payer à la société Leifheit une indemnité de 20.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l’atteinte à la valeur patrimoniale du brevet résultant des actes de contrefaçon ;

— condamné la société Spontex à payer à la société Leifheit une indemnité provisionnelle de 80.000 euros à valoir sur la réparation des conséquences économiques résultant des actes de contrefaçon ;

— renvoyé les parties à la détermination amiable du préjudice autre que résultant de l’atteinte à la valeur patrimoniale du brevet sur le fondement des pièces dont la production est ordonnée et à défaut par voie judiciaire après assignation ;

— débouté la société Spontex de ses demandes au titre de la procédure abusive ;

— rejeté les demandes de publication ;

— condamné la société Spontex à verser à la société Leifheit la somme de 30.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné la société Spontex aux dépens de l’instance qui seront recouvrés par Maître Bénédicte Hattier, avocat, selon les modalités prévues à l’article 699 du code de procédure civile ;

— ordonné l’exécution provisoire en ce qui concerne la mesure d’interdiction et le paiement des dommages et intérêts provisionnels.

La société Spontex a relevé appel de cette décision et par ses dernières conclusions sollicite de la cour à titre principal de :

— infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en ce qu’il :

— l’a déboutée de ses demandes de nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 13 et 16 de la partie française du brevet européen n° EP 1890583 pour absence de nouveauté et d’activité inventive ;

— dit que le produit nommé ‘Express System’ qu’elle commercialise constitue la contrefaçon de la revendication 5 de la partie française du brevet européen n°EP 1890583 dont la société Leifheit est titulaire ;

— prononcé les mesures d’interdiction et de condamnation à son encontre,

— en conséquence, prononcer la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 13 et 16 de la partie française du brevet européen n° EP 1 890 583 pour absence de nouveauté ;

— prononcer la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 13 et 16 de la partie française du brevet européen n°EP 1 890 583 pour absence d’activité inventive ;

— dire que mention de ces annulations sera inscrite auprès du registre national des brevets, tenu par l’Institut national de la propriété industrielle, sur le fondement de l’article R. 613-54 du code de la propriété intellectuelle ;

— débouter la société Leifheit de ses demandes en contrefaçon et plus généralement de toutes ses demandes, fins et prétentions, comme étant, si ce n’est irrecevables, a’ tout le moins mal fondées ;

— en tout état de cause, débouter la société Leifheit de ses demandes de réparations qui ne sont pas fondées ;

— en tout état de cause, condamner, la société Leifheit à lui payer la somme de 60.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner, la société Leifheit aux entiers dépens, lesquels seront recouvrés en application de l’article 699 du code de procédure civile.

La société Leifheit sollicite dans ses dernières écritures de la cour de :

— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

— débouté la société Spontex de ses demandes tendant à la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 13 et 16 de la partie française du brevet européen EP 1890583 pour absence de nouveauté et d’activité inventive,

— dit que le produit Express System commercialisé par la société Spontex constitue la contrefaçon de la revendication 5 de la partie française du brevet EP 1890583 dont elle est titulaire,

A titre incident, statuant à nouveau ou y ajoutant :

— dire que les produits ‘Express System’ de la société Spontex constituent la contrefaçon des revendications 13 et 16 du brevet européen EP 1 890 583 dont elle est titulaire ;

— ordonner à la société Spontex de produire, sous astreinte de 3.000 euros par jour de retard passé un délai d’un (1) mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, tous documents certifiés par son commissaire aux comptes relatifs au nombre de produits « Express System » litigieux importés, fabriqués, vendus ainsi que les prix desdits produits et les bénéfices réalisés par ces ventes depuis leur lancement en période non prescrite ;

— interdire à la société Spontex la poursuite des agissements de contrefaçon de brevet, et en particulier d’importer, fabriquer, promouvoir, et/ou commercialiser les produits ‘Express System’ ainsi que tout autre produit portant atteinte au brevet européen EP 1 890 583 B1 et ce, sous astreinte de 500 euros par appareil à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;

— ordonner à la société Spontex la destruction de l’intégralité des stocks des produits ‘Express System’ ainsi que tout autre produit portant atteinte au brevet européen EP 1 890 583 en sa possession ou détenu pour son compte, sous contrôle d’un huissier de justice, et ce, à ses frais exclusifs et avancés, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter du jour de la signification de l’arrêt à intervenir ;

— condamner la société Spontex à lui payer une indemnité de 550.000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon,

— l’autoriser à titre de complément de réparation, à faire publier, dans cinq journaux ou périodiques de son choix par extrait ou par résumé, le dispositif de l’arrêt à intervenir, aux frais avancés de la société Spontex dans la limite de 5.000 euros hors taxes, par publication ;

— ordonner la publication de la décision à intervenir sur le site internet www.Spontex.fr de la société Spontex accessible par un bandeau situé en haut de la page d’accueil rédigé en majuscule, en

caractère « Times New Roman » de taille 24 et en format « image » «Condamnation de la société Spontex pour contrefacon d’un brevet de la société Leifheit AG », la publication devant intervenir dans les 8 jours à compter de la signification de la décision à intervenir, pour une période de 6 mois, et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard ou de non-exécution dans la période de 6 mois ;

— en tout état de cause :

— rejeter l’ensemble des demandes de la société Spontex visant à voir prononcer la nullité de ces revendications pour absence de nouveauté et/ou absence d’activité inventive ;

— plus généralement, rejeter l’ensemble des demandes fins et conclusions de la société Spontex

— condamner la société Spontex à lui verser la somme de 50.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la société Spontex aux entiers dépens de l’instance dont distraction en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Le débat devant la cour se présente dans les mêmes termes que devant le tribunal sauf pour la société Spontex à tirer argument de la décision de l’Office tchèque des brevets, qui annule le brevet en cause en ce qu’il désigne la République tchèque pour défaut d’activité inventive en présence du brevet CN 2582532Y, et à invoquer cette antériorité dans le cadre de la présente instance.

Le brevet EP’583 est intitulé ‘dispositif servant à essorer une tête d’essuyage’.

Selon la description, l’invention concerne un dispositif permettant de sécher des serpillières, housses de balais, serpillières à franges, plaques de balai, tête de balai d’un dispositif de serpillières et comprenant un dispositif d’essorage supporté par un récipient de liquide de nettoyage, le dispositif d’essorage comportant un logement monté sous forme rotative dans lequel ou peut introduire une serpillières ou équivalent.

L’art antérieur cité aux paragraphes [0002] à [0009] de la description, composé des brevets DE 10223074, présentant un dispositif pour essorer du liquide contenu dans le corps de balayage humide qui est supporté par une tête de balai de nettoyage de surfaces, JP 2000350691, présentant un dispositif de séchage de serpillières à franges, DE 10311812 et 10311799 présentant un dispositif qui permet de laver et d’essorer un corps de balayage, WO 9214934 et DE 1628858 présentant un dispositif permettant de sécher un dispositif de serpillières par essorage, a pour inconvénients de comporter un mécanisme d’entraînement électrique ou manuel qui nécessite que l’utilisateur tienne le dispositif de serpillières et mette en marche les dispositifs de séchage, ce qui est peu commode. Il est précisé que les documents GB 235684, US 2777144, DE 583311, US 1 818948 et US 3197394 présentent des dispositifs de balayage humide comportant une tête de balai du dispositif de serpillières qui peut être entraînée par rotation ou dans un mouvement rotatif et les documents DE 583311 et US 3197794 divulguent la possibilité d’introduire le tête de balai du dispositif de serpillières dans un récipient permettant de collecter les particules de salissures ou l’humidité projetée du processus de nettoyage ou de séchage. Enfin, le document US 4642832 présente un dispositif de séchage selon le préambule de le revendication 1.

Le but de l’invention [0010] est de fournir un dispositif qui permet de sécher les serpillières ou équivalent et d’obtenir un bon résultat de séchage tout en étant d’un maniement facile et d’ajuster le degré de séchage d’une manière simple.

L’avantage de l’invention [0011] est que l’utilisateur n’est pas obligé de toucher d’autres pièces que le dispositif de serpillière.

Le brevet comporte 16 revendications dont seules les revendications 5, 13 et 16 sont invoquées par la société Leifheit à l’appui de son action en contrefaçon.

La société Spontex sollicite quant à elle la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 13 et 16 en estimant que le préambule de la revendication 5 inclut les revendications 1 à 4 et qu’elle est donc dépendante de la revendication 1, ce que la société Leifheit conteste, estimant que la revendication 5 est une revendication indépendante. La société Leifheit ne discute toutefois pas la recevabilité de la société Spontex à solliciter la nullité des revendications 1 à 4.

Les revendications en débat devant la cour se lisent ainsi selon la traduction qui en a été faite par un traducteur juré et fournie au débat par le titulaire du brevet :

Revendication n° 1 :

Dispositif pour sécher (1) des serpillières et/ou des housses à serpillier et/ou des serpillières à franges et/ou des plaques à serpillier et/ou des têtes à serpillier (29) d’un dispositif de serpillière (31) avec un dispositif d’essorage (3), le dispositif d’essorage (3) étant porté par un récipient (15) pour du liquide de lavage (17) ou étant disposé au moins en partie dans un boîtier (9) que l’on peut disposer sur et/ou dans un récipient (15) pour du liquide de lavage (17) et le dispositif d’essorage comportant un récepteur (5) monté de manière rotative dans le boîtier (9) ou dans le récipient (15) dans lequel peut s’introduire une serpillière et/ou une housse à serpillier et/ou une serpillière à franges et/ou un dispositif de serpillière (31) et/ou une plaque à serpillier, caractérisé en ce que le dispositif pour sécher est installé de telle sorte que lors du séchage par essorage selon sa vocation, la force d’entraînement et/ou l’énergie d’entraînement pour l’essorage soit transmise au dispositif d’essorage (3) par l’intermédiaire d’un dispositif de serpillière (31) et/ou d’un composant d’un dispositif de serpillière.

Revendication n°2 :

Dispositif selon la revendication 1, caractérisé en ce qu’un dispositif de serpillière (31) peut s’accoupler mécaniquement sur le dispositif pour sécher (1) pour transmettre les forces d’entraînement.

Revendication n° 3 :

Dispositif selon l’une quelconque des revendications 1 ou 2, caractérisé en ce que le récepteur (5) est conçu au moins en partie en tant que tamis (7).

Revendication n° 4 :

Dispositif selon l’une quelconque des revendications 1 à 3, caractérisé en ce qu’il est prévu au moins un dispositif de freinage (à fonctionnement de préférence automatique) pour freiner des éléments montés de manière rotative.

Revendication n°5 :

Système de nettoyage comprenant un dispositif (1) pour sécher selon l’une quelconque des revendications précédentes, ainsi qu’un dispositif de serpillière (31) avec une tête à serpillier montée de manière rotative, pouvant être entraînée par l’intermédiaire d’un dispositif d’entraînement (39) prévu sur le dispositif de serpillière (31), lors du séchage par essorage, la force d’entraînement et/ou l’énergie d’entraînement pour l’essorage étant transmise par l’intermédiaire du dispositif de serpillière et/ou d’un composant du dispositif de serpillière au dispositif d’essorage prévu sur le dispositif pour sécher (1).

Revendication n°13 :

Système de nettoyage selon l’une quelconque des revendications 5 à 11, caractérisé en ce que le dispositif d’entraînement comporte un entraînement en toupie et/ou un entraînement basé sur le principe de la toupie et/ou en ce que le dispositif d’entraînement comporte une barre de torsion et/ou une broche.

Revendication n°16 :

Système de nettoyage selon l’une quelconque des revendications 5 à 15, caractérisé en ce que le dispositif d’entraînement comporte une roue libre.

Sur la dépendance de la revendication 5 par rapport à la revendication 1

La règle 43 (2) du règlement d’exécution de la Convention sur la délivrance de brevets européens (CBE) prévoit que ‘Sans préjudice de l’article 82, une demande de brevet européen ne peut contenir plus d’une revendication indépendante de la même catégorie (produit, procédé, dispositif ou utilisation) que si l’objet de la demande se rapporte :

a) à plusieurs produits ayant un lien entre eux,

b) à différentes utilisations d’un produit ou d’un dispositif, ou

c) à des solutions alternatives à un problème particulier dans la mesure où ces solutions ne peuvent pas être couvertes de façon appropriée par une seule revendication.

Selon la règle 43 (4) de ce même règlement d’exécution, toute revendication qui contient l’ensemble des caractéristiques d’une autre revendication (revendication dépendante) doit comporter une référence à cette autre revendication, si possible dans le préambule, et préciser les caractéristiques additionnelles. Une revendication dépendante peut également se référer directement à une autre revendication dépendante. Toutes les revendications dépendantes qui se réfèrent à une ou plusieurs revendications antérieures doivent, dans toute la mesure du possible, être groupées de la façon la plus appropriée.

Ainsi que le fait pertinemment valoir la société Spontex, la revendication 5 se réfère à la revendication 1 et aux revendications dépendantes 2 à 4. En effet, et comme l’a retenu à juste titre le tribunal, l’essentiel de l’invention est contenu dans la partie caractérisante de la revendication 1 selon laquelle ‘le dispositif pour sécher est installé de telle sorte que lors du séchage par essorage selon sa vocation, la force d’entraînement et/ou l’énergie d’entraînement pour l’essorage soit transmise au dispositif d’essorage par l’intermédiaire d’un dispositif de serpillière et/ou d’un composant d’un dispositif de serpillière’, la revendication 5 ajoutant que le dispositif de serpillières comporte une tête à serpillier montée de manière rotative et supporte le dispositif d’entraînement.

S’il ressort des directives de l’Office européen des brevets (OEB) qu’une revendication peut comporter une référence à une autre revendication, même si elle n’est pas une revendication dépendante (Partie F 3.8), il s’agit de revendication se référant à une revendication de catégorie différente ou d’une revendication portant sur une pièce et comportant une référence à l’autre pièce avec laquelle il y a coopération. Il résulte de ce qui précède que la revendication 5 qui se réfère à la revendication 1 contient l’ensemble des caractéristiques de celle-ci, la revendication 5 concernant un système de nettoyage comprenant le dispositif d’essorage porté par un seau de la revendication 1 et un dispositif à serpillier et non le dispositif à serpillier seul qui ferait référence au dispositif d’essorage avec lequel il serait destiné à coopérer.

De même, l’intimée ne soutient pas utilement que les revendications 1 et 5 ne portent pas sur le

même objet, la revendication 1 portant sur un dispositif et la revendication 5 portant sur un ‘système’ qui selon les directives d’examen de l’OEB sont des catégories différentes. En effet, selon ces mêmes directives (Partie F 3.1 Catégories), il n’existe que deux types fondamentaux de revendications, à savoir les revendications portant sur une entité physique (produit, dispositif) et les revendications portant sur une activité (procédé, utilisation) et un système doit être appréhendé comme appartenant à la catégorie des dispositifs.

Le caractère dépendant de la revendication 5 par rapport à la revendication 1 ressort également de la réponse faite par le mandataire de la société Leifheit aux objections de la division d’examen de l’OEB qui lui opposait un manque de clarté des revendications, un défaut de nouveauté et d’activité inventive en écrivant dans une lettre du 9 mai 2011 ‘Toutes les sous-revendications relatives au système d’entraînement (sous-revendications 10-22) ont été soit supprimées sans remplacement soit ‘ dans la mesure où cela nous a semblé judicieux ‘ formellement rattachées à la nouvelle sous-revendication 5 et, en ce qui concerne leur contenu, axées sur le fait que le dispositif de serpillière comprend le dispositif d’entraînement (nouvelles sous-revendications 12 à 16).’

Le tribunal doit être approuvé en ce qu’il a retenu que la revendication 5 est une revendication dépendante de la revendication 1.

Sur la traduction du brevet

La langue de dépôt et de procédure devant l’OEB du brevet EP’583 est l’allemand.

L’article L. 614-7, alinéa premier, du code de la propriété intellectuelle dispose que le texte rédigé dans la langue de procédure est le texte qui fait foi.

La société Leifheit a fourni en application de l’article L. 614-7, second alinéa, de ce code une traduction complète du brevet en français à l’occasion de la présente procédure.

La société Leifheit, s’appuyant sur le rapport d’expertise établi dans le cadre de la procédure qui a opposé les parties en Autriche, considère que les termes allemands ‘drehbar gelagerten’ de la revendication 5 ont été traduits par ‘montée de manière rotative’ s’agissant de la tête à serpillier du dispositif de serpillières, qui n’est pas totalement exacte, le terme ‘gelagerten’, impliquant une notion d’appui, de sorte qu’elle fait valoir que ces termes doivent être traduits par ‘montée de manière rotative et en appui’ et qu’il en est de même pour la revendication 1. Elle ajoute que s’agissant de la revendication 1 les termes ‘getragen ist’ traduits par ‘étant porté’ auraient dû être traduits par ‘étant supporté’.

Elle en déduit qu’il convient de lire le brevet comme concernant un dispositif d’essorage supporté par un récipient pour du liquide de lavage ou disposé en moins en partie dans un logement et que le dispositif d’essorage comporte un récepteur monté de manière rotative et en appui dans le logement ou dans le récipient.

La société Spontex oppose que la société titulaire du brevet tente de réécrire les revendications dont elle a pourtant elle-même fourni la traduction établie par un traducteur juré, pour échapper aux antériorités qu’elle oppose aux revendications dont il a été fait le choix de donner une large portée.

Néanmoins ainsi que l’a pertinemment relevé le tribunal par des motifs que la cour adopte, ce débat sémantique est sans incidence sur 1’interprétation susceptible d’être faite de la revendication 5, l’appelante se référant à une caracteristiques non pas structurelle mais fonctionnelle, celle de transmettre par contact la force d’entraînement, laquelle ressort clairement du texte tel que reproduit ci-dessus de cette revendication.

Sur la nullité du brevet

Sur la nouveauté

Selon l’article 54 de la CBE, ‘une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique’.

Pour être comprise dans l’état de la technique et être privée de nouveauté, l’invention doit s’y trouver toute entière dans une seule antériorité au caractère certain, avec les éléments qui la constituent dans la même forme, le même agencement, le même fonctionnement en vue du même résultat technique.

La société Spontex sollicite la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 13 et 16 de la partie française du brevet EP’583 détenu par la société Leifheit pour absence de nouveauté.

Elle se fonde en premier lieu sur le brevet chinois CN 2522 532 déposé le 29 octobre 2003 intitulé ‘serpillière séchée par centrifugation’ qui divulgue selon elle toutes les caractéristiques de la revendication 5 en combinaison avec la revendication 1.

Pour rappel, les revendications 1 et 5 se lisent comme suit :

Revendication n°1 :

Dispositif pour sécher (1) des serpillières et/ou des housses à serpillier et/ou des serpillières à franges et/ou des plaques à serpillier et/ou des têtes à serpillier (29) d’un dispositif de serpillière (31) avec un dispositif d’essorage (3) (A1), le dispositif d’essorage (3) étant porté par un récipient (15) pour du liquide de lavage (17) ou étant disposé au moins en partie dans un boîtier (9) que l’on peut disposer sur et/ou dans un récipient (15) pour du liquide de lavage (17) (A2) et le dispositif d’essorage comportant un récepteur (5) monté de manière rotative dans le boîtier (9) ou dans le récipient (15) dans lequel peut s’introduire une serpillière et/ou une housse à serpillier et/ou une serpillière à franges et/ou un dispositif de serpillière (31) et/ou une plaque à serpillier (A3), caractérisé en ce que le dispositif pour sécher est installé de telle sorte que lors du séchage par essorage selon sa vocation, la force d’entraînement et/ou l’énergie d’entraînement pour l’essorage soit transmise au dispositif d’essorage (3) par l’intermédiaire d’un dispositif de serpillière (31) et/ou d’un composant d’un dispositif de serpillière (A4).

Revendication n°5 :

Système de nettoyage comprenant un dispositif (1) pour sécher selon l’une quelconque des revendications précédentes (CA), ainsi qu’un dispositif de serpillière (31) avec une tête à serpillier montée de manière rotative (CB), pouvant être entraînée par l’intermédiaire d’un dispositif d’entraînement (39) prévu sur le dispositif de serpillière (31) (CC), lors du séchage par essorage, la force d’entraînement et/ou l’énergie d’entraînement pour l’essorage étant transmise par l’intermédiaire du dispositif de serpillière et/ou d’un composant du dispositif de serpillière au dispositif d’essorage prévu sur le dispositif pour sécher (1) (CD).

Le brevet CN 2522 532 (CN 532) dont la traduction libre qu’en a faite la société Spontex n’est pas discutée par la société Leifheit, décrit un balai déshydraté par centrifugation constitué d’une tige de vadrouille, une tête de balai, un chiffon de vadrouille, un cylindre de maintien, une corde et un seau de lavage. ‘La tige de balai de lavage (3) est un tuyau en acier inoxydable, deux paliers (4) sont installés à son extrémité inférieure, l’extrémité supérieure de la tête de balai est installée dans les paliers et est fixée, et le milieu de la tête de balai est le lieu de la corde à remontage automatique (5). Après que la corde est enroulée et est dessinée à la main, la vadrouille va tourner à une vitesse élevée. De cette manière, un système de rotation est formé. L’extrémité inférieure de la tête de balai est bien connectée avec le chiffon de balai (10). Le cylindre de support (1) est un tube en plastique, dont le diamètre intérieur est si grand qu’il peut couvrir tout le tissu de balai de lavage, et de petits trous sont percés dans la surface du cylindre de maintien pour permettre à l’eau d’écouler. Deux

plaques planes sont installées dans la partie supérieure du cylindre de maintien, un trou est situé au centre des deux plaques planes respectivement, et le cylindre de maintien passe à travers la tige de balai de lavage à partir de l’extrémité supérieure et est fixée à la tête de balai de lavage de telle sorte que le tissu de balai est maintenu dans le cylindre de maintien. Sur la figure 4, un support (7) est installé dans la partie supérieure du seau de lavage (8), et le support est un tuyau en plastique ou un tuyau en acier inoxydable. Le balai est accroché sur le support (7) quand il est déshydraté ou après son utilisation.’

La société Leifheit ne discute pas que cette antériorité divulgue la caractéristique A1 de la revendication 1 soit un dispositif pour sécher des serpillières ou équivalent d’un dispositif de serpillières avec un dispositif d’essorage.

En revanche, l’intimée conteste que cette antériorité décrit les branches de l’alternative de la caractéristique A2.

La revendication 1 couvre en effet deux options selon la caractéristique A2, une option 1 dans laquelle le dispositif d’essorage est porté par le récipient pour le liquide de lavage et une option 2 dans laquelle le dispositif d’essorage est disposé au moins en partie dans le boîtier qui peut lui-même être disposé sur ou dans le récipient du liquide de lavage.

La société Spontex soutient que si le document antérieur divulgue toutes les caractéristiques de la revendication 1 à l’exception de l’une des options, alors la revendication entière doit être déclarée nulle et considère que dans le brevet CN 532 le dispositif d’essorage ainsi que le dispositif de serpillière sont portés par un récipient pour le liquide de lavage (seau) par l’intermédiaire d’un support. Elle critique le jugement déféré en ce qu’il a considéré que ‘le brevet CN 532 ne divulgue pas un récepteur monté de manière rotative et constituant une composante d’un dispositif d’essorage porté par un récipient ou disposé dans un boîtier de telle sorte qu’il est solidaire au seau…’ alors que la rédaction de la revendication est large et que selon l’option 1 la manière (directe ou indirecte) dont le dispositif d’essorage est porté par le récipient pour le liquide de lavage est indifférent et le fait que ce soit par l’intermédiaire d’un support comme dans le brevet CN 532 n’y change rien.

Néanmoins, il ressort du brevet CN 532 que le cylindre en plastique percé de trous constituant le dispositif d’essorage est porté par le balai, celui-ci étant passé à travers la tige du balai de lavage à partir de l’extrémité supérieure et fixé à la tête de balai de lavage pour couvrir tout le tissu du balai de lavage et que ce tissu soit maintenu dans ce cylindre troué pour améliorer l’essorage, l’ensemble formé par le balai et le dispositif d’essorage étant alors accroché à un support installé dans la partie supérieure du seau de lavage.

Aussi, ainsi que l’a considéré à juste titre le tribunal, l’antériorité CN 532 ne divulgue pas la caractéristique A2 – option 1 – qui exige que le dispositif d’essorage soit porté ou supporté par le seau contenant du liquide de lavage qui n’inclut pas le dispositif d’essuyage, ce quelle que soit la rédaction large de la revendication. La société Spontex ne peut être suivie lorsqu’elle affirme en se fondant sur la décision non définitive de l’office des brevets tchèque, qu’il est indifférent que le dispositif d’essorage soit porté par le seau par l’intermédiaire d’un support. En effet, le dispositif d’essorage est porté par la tête d’essuyage dans l’antériorité CN 532 et non par le support.

De même, la caractéristique A2 – option 2 – qui prévoit que le dispositif d’essorage est disposé au moins en partie dans un boîtier que l’on peut disposer sur et/ou dans un récipient pour le liquide de lavage n’est pas plus divulguée par l’antériorité CN 532, le support installé dans la partie supérieure du seau de lavage peu explicité dans cette invention et dont il ne peut être déterminé qu’il s’agit d’un boîtier contrairement à ce que soutient la société Spontex, ce support n’étant pas destiné à recevoir le dispositif d’essorage mais à accrocher la tête d’essuyage supportant elle-même le dispositif d’essorage quand il est déshydraté ou après son utilisation.

En outre, ainsi que le relève à juste titre la société Leifheit, l’ensemble balai/dispositif d’essorage du brevet CN 532 est suspendu et non posé dans le seau de sorte qu’aucune coopération mécanique n’existe entre le seau et le balai d’essuyage au sens de la caractéristique A4 de la revendication 1 reprise à la caractéristique CD de la revendication 5.

Cette antériorité ne peut donc être considérée comme destructrice de la nouveauté de la revendication principale 1 et partant de la revendication dépendante 5 du brevet EP’583.

La société Spontex oppose également le brevet EP 0119 964 (EP’964) pour contester la nouveauté des revendications 1 et 5 du brevet EP 583.

Le brevet EP’964 a été déposé le 10 décembre 1984 et concerne un balai à laver à auto-essorage selon son intitulé. Ce brevet européen a abouti en Autriche au brevet AT E 23 792 cité dans le rapport de l’expert autrichien pour considérer que la revendication 1 dans sa variante 2 n’est probablement pas nouvelle ce qui amène la société Spontex à invoquer l’absence de nouveauté des revendications 1 et 5.

L’invention objet de ce brevet EP’964 comporte selon la description : ‘un manche à balai, un logement monté sur le manche du balai et pourvu d’une ouverture à l’intérieur, un panier monté pour tourner dans le logement, le panier ayant une paroi perforée qui s’étend en direction axiale et une bouche adjacente à l’ouverture dans le logement, un élément d’essuyage monté de manière à pouvoir être déplacé sélectivement entre une position avancée à l’extérieur du logement, où au moins une portion de l’élément d’essuyage est située en position propre à laver le sol et une position escamotée dans le logement où l’élément d’essuyage est situé à l’intérieur du panier, des moyens d’actionnement pour déplacer sélectivement l’élément d’essuyage entre la position avancée et la position escamotée et un moteur à l’intérieur du logement et relié à l’élément d’essuyage pour la rotation de ce dernier et du panier quand l’élément d’essuyage est forcé contre la paroi perforée du panier et le contenu de l’élément d’essuyage est enlevé de celui-ci à travers la paroi perforée du panier’. Le dispositif objet de l’invention dispose dans la chambre inférieure du logement, d’un ensemble d’essorage de l’élément d’essuyage comprenant un panier perforé. L’élément d’essuyage est rétracté dans le panier de l’ensemble d’essorage. Lors de la rétractation complète de l’élément d’essuyage dans le panier et du contact entre les éléments du connecteur électrique, le moteur électrique est alimenté et ainsi actionne pour faire tourner l’arbre en faisant ainsi tourner et en projetant l’élément d’essuyage radialement vers l’extérieur contre la paroi perforée, le panier étant ainsi relié pour rotation à l’arbre et à l’élément d’essuyage, le liquide de nettoyage extrait passant par les trous étant recueilli dans la chambre inférieure du logement et s’écoulant hors de l’ouverture vers le bas.

La société Leifheit ne discute pas le fait que la caractéristique A1 de la revendication 1 est divulguée par le brevet EP’964 qui concerne un système de nettoyage pour sécher des serpillières à franges avec un dispositif d’essorage.

Selon la société Spontex, dans le brevet EP’964, le dispositif d’essorage est disposé dans un logement muni d’une paroi cylindrique et ce logement peut être disposé sur ou dans un récipient pour le liquide de lavage.

Cette antériorité ne divulgue pas la caractéristique A2 – option 1 – qui exige que le dispositif d’essorage soit porté ou supporté par le seau contenant du liquide de lavage, le compartiment inférieur de l’invention objet du brevet EP’964 étant ouvert vers le bas et ne peut être considéré comme un récipient pour le liquide de nettoyage.

S’il peut être considéré, malgré l’absence de description d’un récipient dans le brevet EP’964, que le compartiment inférieur du logement dans lequel est disposé le dispositif d’essorage de l’invention objet de ce brevet constitue un boîtier qui peut être disposé sur un récipient du liquide de lavage et divulgue la caractéristique A2 – option 2 – selon laquelle le dispositif d’essorage est disposé au moins

en partie dans le boîtier qui peut lui-même être disposé sur ou dans le récipient du liquide de lavage, et que le dispositif d’essorage comportant un récepteur est monté de manière rotative dans le boîtier dans lequel peut s’introduire une serpillières (caractéristique A3), il n’en demeure pas moins que dans le brevet EP’964 le mouvement de rotation est provoqué par un moteur électrique qui fait tourner l’arbre et l’élément d’essuyage contre la paroi perforée du panier qui est relié pour rotation à l’arbre et à l’élément d’essuyage. Ainsi que l’a pertinemment retenu le tribunal sans dénaturer le brevet EP’964, l’entraînement pour l’essorage n’est pas, dans cette invention, transmis par l’intermédiaire du seul dispositif de serpillières mais aussi par un moteur électrique, le panier étant relié pour rotation à l’arbre et à l’élément d’essuyage (p.6 lignes 19 et 20 de la description du brevet EP’964). La partie caractérisante (A4) de la revendication 1 n’est donc pas divulguée par le brevet EP’964.

Cette antériorité ne peut donc être considérée comme destructrice de la nouveauté de la revendication principale 1 et partant de la revendication dépendante 5 du brevet EP’583.

Sur l’activité inventive

Selon les dispositions de l’article 56 de la CBE, une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique.

Les parties s’accordent pour définir l’homme du métier comme un ingénieur spécialisé dans la conception et la fabrication d’équipements de nettoyage connaissant de ce fait l’existence de systèmes comprenant un dispositif de serpillières et un seau contenant du liquide de lavage, dont l’utilisation nécessite d’imbiber la serpillière et de l’essorer, définition qu’a retenue le tribunal.

Le problème posé à cet homme du métier est la fourniture d’un dispositif qui permet d’obtenir un bon résultat de séchage de serpillières ou équivalents tout en étant d’un maniement facile, et d’ajuster le degré de séchage d’une manière simple.

La solution apportée par l’invention est la réalisation d’un dispositif pour sécher installé de telle sorte que lors du séchage par essorage selon sa vocation, la force d’entraînement et/ou l’énergie d’entraînement pour l’essorage soit transmise au dispositif d’essorage par l’intermédiaire d’un dispositif de serpillière et/ou d’un composant d’un dispositif de serpillière.

Il appartient en conséquence à la société Spontex de démontrer au moment de la mise au point de l’invention qu’elle critique, le cheminement de l’homme du métier en partant du problème posé pour arriver à la solution trouvée.

La société Spontex oppose pour démontrer le défaut d’activité inventive des revendications 1 à 5 le brevet EP’964 précédemment exposé estimant que la caractéristique essentielle du brevet EP’583 contenue dans la partie caractérisante de la revendication 1 selon laquelle l’énergie d’entraînement mobilisant le dispositif d’essorage est communiquée ‘par l’intermédiaire d’un dispositif de serpillières et/ou d’un composant d’un dispositif de serpillières’ est divulguée par l’art antérieur et que l’ajout du seau et l’utilisation de ce récipient est une manipulation évidente pour l’homme du métier qui sera incité à le prévoir et ne rencontrera aucun obstacle.

Néanmoins, ainsi qu’il a été précédemment exposé, dans l’invention objet du brevet EP’964, l’entraînement pour l’essorage n’est pas, dans cette invention, transmis par l’intermédiaire du dispositif de serpillières mais par un moteur électrique qui entraîne le dispositif d’essorage, l’énergie d’entraînement pour le séchage par essorage étant transmise du dispositif d’essorage à la serpillière et non l’inverse ainsi que l’a relevé le Bundespatentgericht dans sa décision du 12 mai 2016.

Aussi, la société Spontex ne démontre pas la démarche de l’homme du métier qui, partant de l’invention objet du brevet EP’964 qui présente comme inconvénient de recourir à un moteur

électrique pour l’essorage et de ne pas prévoir de réceptacle pour l’évacuation du liquide, pour arriver à la solution trouvée et objet de l’invention critiquée.

La société Spontex échoue à démontrer le défaut d’activité inventive de la revendication principale 1 du brevet EP’583 et partant de la revendication 5 sur le fondement du brevet EP’964.

Il n’y a dès lors pas lieu d’examiner le défaut d’activité inventive invoqué par l’appelante des revendications dépendantes 13 et 16 basé sur la combinaison du brevet EP’064 et GB 742 ou GB 684.

L’appelante considère ensuite pour contester l’activité inventive des revendications 1 à 5, qu’en partant du brevet CN 532, l’homme du métier aboutira à l’invention contestée en utilisant ses propres connaissances. Elle invoque à ce titre la décision non définitive de l’office tchèque précitée.

Toutefois, la société Spontex ne peut être suivie lorsqu’elle affirme que les différences entre le brevet CN 532 et le brevet EP’583 sont des détails d’exécution que l’homme du métier sera amené à résoudre sans difficulté, ce quand bien même la force motrice pour l’essorage est transférée à l’unité d’essorage par l’intermédiaire d’un composant d’un dispositif d’essuyage dans le brevet CN 532 comme dans l’invention objet du brevet dont la validité est contestée.

Il convient en effet de rappeler que selon l’invention objet du brevet CN 532, le cylindre en plastique percé de trous constituant le dispositif d’essorage est porté par le balai, ce cylindre étant passé à travers la tige du balai de lavage à partir de l’extrémité supérieure et fixé à la tête de balai de lavage pour couvrir tout le tissu du balai de lavage et que ce tissu soit maintenu dans ce cylindre troué pour améliorer l’essorage, l’ensemble formé par le balai et le dispositif d’essorage étant alors accroché à un support installé dans la partie supérieure du seau de lavage.

En outre, ainsi que le relève la société Leifheit, dans le brevet CN 532, le cylindre rotatif d’essorage est maintenu à la tête du balai par deux plaques planes fermant la partie supérieure de ce cylindre et percées au centre d’un trou pour faire passer le manche du balai.

C’est donc à tort que la société Spontex soutient que dans cette antériorité le dispositif d’essorage est porté par un récipient.

Ce cylindre rotatif d’essorage doit donc être placé sur le balai à chaque essorage afin de le positionner autour de la tête à serpillier ce qui constitue le principal inconvénient de l’invention objet du brevet CN 532 ainsi que le reconnaît la société Spontex, ce dispositif n’étant pas d’un maniement facile, le cylindre devant être manipulé manuellement à chaque essorage.

Or, la société Spontex ne soutient pas utilement que sur la base de ses connaissances, il est évident pour l’homme du métier qui connaît les paliers rotatifs et le principe du panier tournant (panier à salade), de résoudre ce problème technique en retournant le cylindre pour y introduire le balai par le haut et permettre sa rotation, ce qui ne constitue pas une simple adaptation.

La société Leifheit fait à cet égard pertinemment remarquer qu’il est également nécessaire de redimensionner le cylindre par rapport au récipient pour qu’il ne soit pas en équilibre instable, revoir le support supérieur prévu pour faire passer le manche du balai devenu inutile, et l’adapter pour le poser sur un palier rotatif placé au fond du seau, ces aménagements n’étant ni décrits ni suggérés et allant au-delà de la simple adaptation de l’art antérieur évidente pour l’homme du métier.

L’appelante échoue à démontrer le défaut d’activité inventive de la revendication principale 1 du brevet EP’513 et partant de la revendication 5 sur le fondement du brevet CN 532

Il n’y a dès lors pas lieu d’examiner le défaut d’activité inventive invoqué par l’appelante des

revendications dépendantes 13 et 16 basé sur la combinaison du brevet CN 532 et GB 742 ou GB 684.

La société Spontex oppose alors le brevet GB 235 684 (GB 684) déposé le 17 avril 1924 comme l’art antérieur le plus proche en combinaison avec les brevets WO 2005/027707 A1 (WO 707) déposé le 14 août 2004, ou WO 9214394 A1 (WO 394) déposé le 13 février 1992 ou DE 10311812 B3 (DE 812) déposé le 12 mars 2003, pour contester l’activité inventive du brevet EP’583.

Le brevet GB 684 décrit un balai à franges de nettoyage ayant une pièce de préhension animable d’un mouvement de va-et-vient et un écrou mis en prise avec un arbre raccordé par un engrenage à cliquet et rochet avec la tête de balai à franges de sorte qu’en faisant un mouvement de va-et-vient à la pièce de préhension, la tête de balai à frange peut être amenée à tourner lorsqu’il est nécessaire de débarrasser le balai à frange de son humidité. L’objet de cette invention est de proposer une construction perfectionnée et compacte d’un tel balai à franges dans laquelle le mécanisme prévu pour effectuer la rotation de la tête de balai est contenu à l’intérieur et dissimulé par le manche du balai.

L’appelante considère que cette invention permet d’ajuster le degré de séchage en ajustant la vitesse de rotation et permet d’obtenir un bon résultat de séchage en évacuant l’humidité du balai. Elle ajoute que ce brevet divulgue toutes les caractéristiques relatives au dispositif de serpillières.

Elle fait alors valoir que l’homme du métier qui a lu le brevet GB 684 cherchera un récipient approprié pour la tête de balai permettant de recueillir l’eau et de maintenir la tête de balai durant l’essorage, récipients qu’il trouvera dans les brevets WO 707, WO 394, DE 812.

Le brevet WO 707 concerne un dispositif d’essorage d’un revêtement de nettoyage d’un dispositif de nettoyage de surface, dans lequel le dispositif de nettoyage de surface comprend une tête de nettoyage maintenue sur un manche et ayant deux bras de support contre lesquels est maintenu le revêtement de nettoyage et qui peuvent pivoter d’avant en arrière entre une position opérationnelle, où ils sont perpendiculaires au manche, et une position de rabattement, où ils sont parallèles ou obliques au manche, le dispositif comprenant un récipient, où est disposé un support de tête de nettoyage entraînable en rotation autour d’un axe de rotation et ayant une zone de réception où peut être mise en place la tête de nettoyage avec le revêtement de nettoyage. Afin d’extraire l’humidité du revêtement de nettoyage, le support de tête de nettoyage avec un revêtement de nettoyage mis en place peut être entraîné en rotation autour de l’axe de rotation du support de tête de nettoyage, et la force centrifuge agissant sur le revêtement de nettoyage provoquera l’extraction de gouttes de liquide hors du revêtement de nettoyage, celui-ci étant ainsi essoré. Le dispositif d’essorage centrifuge porté par un récipient pour liquide de nettoyage comprend une chambre d’entraînement dans laquelle est logée un moteur électrique.

Le brevet WO 394 concerne des moyens pour l’essorage de la tête d’un balai, ces moyens selon le résumé comprennent, en combinaison: une cuve (5), présentant une ouverture vers le haut permettant l’introduction de la tête (3) du balai (4), et un berceau tournant (6) disposé dans le fond de la cuve (5), apte a recevoir la tête (3) du balai (4) et à l’entraîner en rotation pour réaliser son essorage centrifuge, sans séparation de la tête (3) du balai (4) et du manche (20); et un balai (4) dont la tête (3) est articulée multidirectionnellement sur l’extrémité du manche (20). Selon la description, grâce à cette articulation, il n’est plus nécessaire de prévoir une tête amovible et des moyens de maintien de cette tête en position adéquat lors de la centrifugation. Il suffit à l’utilisateur d’introduire la tête du balai dans la cuve, de maintenir le manche en position plus ou moins verticale durant l’essorage et de retirer le balai une fois l’essorage réalisé. Grâce à ces moyens combinés, près des deux tiers de l’eau absorbée par le tampon lors de son rinçage est éliminée, contre seulement un tiers avec les presses de la technique antérieure. Un tel essorage est obtenu avec des vitesses de rotation relativement faibles, de l’ordre de 400 à 600 tours par minute, et avec un bref temps d’essorage, de l’ordre de trois et huit secondes, l’entraînement de la tête peut donc être réalisé au moyen d’un petit moteur électrique de

faible puissance alimenté par des batteries à accumulateurs de faible capacité, rechargeables la nuit.

Le brevet DE 812 concerne un dispositif pour le rinçage et l’essorage d’un corps d’essuyage maintenu contre la tête d’essuyage d’un appareil de nettoyage des sols, comprenant un récipient, lequel comporte une partie de rinçage et une partie d’essorage, un support de tête d’essuyage étant maintenu de manière rotative dans la partie d’essorage, où la tête d’essuyage peut être mise en place avec le corps d’essuyage et qui peut être entraînée en rotation autour d’un axe de rotation au moyen d’un dispositif d’entraînement pour la déshumidification du corps d’essuyage, la partie de rinçage recevant un liquide de nettoyage et la tête d’essuyage pouvant être introduite dans la partie de rinçage avec le corps d’essuyage. Cette invention vise à présenter par rapport à l’état de la technique antérieure une forme de construction compacte, le récipient étant réalisé à la manière d’un seau qui entoure la partie de rinçage et la partie d’essorage, en ce que le récipient forme une paroi intercalaire en dessous de la partie d’essorage, laquelle recouvre un compartiment d’entraînement où est logé le dispositif d’entraînement, et en ce que la partie de rinçage s’étend latéralement à côté de la partie d’essorage et du compartiment d’entraînement, en formant une section d’introduction à hauteur de la partie d’essorage et une partie de collecte de liquide à hauteur du compartiment d’entraînement. A l’intérieur du compartiment d’entraînement, l’arbre d’entraînement sera préférentiellement accouplé à un moteur d’entraînement au moyen d’éléments mécanique d’accouplement, tels qu’une transmission par courroie.

Néanmoins, outre qu’il n’est ni décrit, ni suggéré à l’homme du métier par ces antériorités que la force d’entraînement et/ou l’énergie d’entraînement pour l’essorage peut être transmise au dispositif d’essorage par le dispositif de serpillières (caractéristique A4 de la revendication 1 du brevet EP’583), les dispositifs d’essorage des brevets WO 707, WO 394 et DE 812 sont équipés d’un moteur ou préférentiellement d’un moteur et l’homme du métier ne sera pas incité en partant du brevet GB 684 dont la tête de balai est entraînée en rotation par un dispositif intégré à son manche, à l’associer à ces dispositifs d’essorage pour que la tête de balai les mette en rotation alors qu’ils sont eux-même mis en rotation au moyen d’un moteur ou manuellement. En effet, l’homme du métier qui part du dispositif de serpillières comportant un dispositif d’entraînement et qui souhaite résoudre le problème de la collecte des particules de saleté ou de liquide extraits lors de l’actionnement de la tête à serpillier aura recours de manière évidente à un seau avec récepteur rigide et non un seau comportant un dispositif d’essorage comportant lui-même des moyens d’entraînement de rotation.

La société Spontex oppose enfin le brevet DE 812 susvisé comme l’art antérieur le plus proche en combinaison avec les brevets GB 190800742 (GB 742) déposé le 13 janvier 1908 ou GB 684 ou CN 532, pour contester l’activité inventive du brevet EP’583.

Le brevet GB 742 concerne des perfectionnements pour des balais à franges du type dans lequel la tête est montée sur un arbre sur lequel elle n’est pas serrée, avec un élément d’accouplement pour lui permettre de tourner dans une direction, et qui est amenée à tourner grâce à un boulon traversant une vis. Pour essorer ou sécher le balai à franges, le collier desserré est placé dans la fente h dans la plaque H, l’agrafe ou broche g1 est retirée et le tube E et l’écrou F effectuent un mouvement de va – et – vient vers le haut et le bas grâce au manche du balai à franges qui communique un mouvement rotatif au balai à franges lorsque le manche est propulsé vers le bas et que les éléments d’accouplement b et d se mettent en prise, et permettant au balai à franges de continuer à tourner dans une direction uniquement lorsque le manche est à nouveau levé. Ce mouvement rotatif peut continuer jusqu’à ce que le balai à franges soit tout à fait sec.

La société Spontex ne peut être suivie lorsqu’elle affirme que l’invention objet du brevet DE 812 divulgue la caractéristique A4 de la revendication 1 du brevet EP’583 alors que cette antériorité ne divulgue nullement que l’installation du dispositif pour sécher permet que la force d’entraînement ou l’énergie d’entraînement pour l’essorage soit transmise au dispositif d’essorage par l’intermédiaire d’un dispositif de serpillières alors que dans cette antériorité, le dispositif d’essorage est entraîné en rotation au moyen d’un moteur ou un dispositif manuel placé dans le compartiment d’entraînement

lui même placé dans le récipient.

Les développements qui précèdent pour écarter le défaut d’activité inventive de l’invention objet du brevet EP 583 s’appliquent à la combinaison des brevets DE 812 et GB 684 ou GB 742 ou CN 532 prévoyant tout trois un palier rotatif pour la tête de balai.

En effet, aucun élément ne vient démontrer en quoi il est évident pour l’homme du métier qui connaît l’invention objet du brevet DE 812 comportant un dispositif d’essorage entraîné en rotation au moyen d’un moteur ou manuellement, de recourir au dispositif de balai objet des brevets GB 684 ou GB 742 ou CN 532 également équipés d’un dispositif d’entraînement, pour que la force d’entraînement du dispositif d’essorage provienne du balai et ainsi aboutir à l’invention critiquée.

En conséquence, ainsi que l’a pertinemment retenu le tribunal, aucune des antériorités présentées par la société Spontex prises seules ou en combinaison, ne détruisent l’activité inventive de la revendication principale 1 du brevet EP’583 et partant des revendications dépendantes 2 à 5, 13 et 16 qui n’encourent pas la nullité.

Le jugement entrepris mérite confirmation en ce qu’il a rejeté les demandes de la société Spontex tendant à la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 13 et 16 de la partie française du brevet EP’583.

Sur la contrefaçon

La société Leifheit reproche à la société Spontex de commercialiser les produits ‘Express System’ qui reproduisent selon elle les caractéristiques de revendications 5, 13 et 16 du brevet EP’583 dont elle est titulaire.

Pour rappel ces revendications sont ainsi rédigées :

Revendication n°5 :

Système de nettoyage comprenant un dispositif (1) pour sécher selon l’une quelconque des revendications précédentes (CA), ainsi qu’un dispositif de serpillière (31) avec une tête à serpillier montée de manière rotative (CB), pouvant être entraînée par l’intermédiaire d’un dispositif d’entraînement (39) prévu sur le dispositif de serpillière (31) (CC), lors du séchage par essorage, la force d’entraînement et/ou l’énergie d’entraînement pour l’essorage étant transmise par l’intermédiaire du dispositif de serpillière et/ou d’un composant du dispositif de serpillière au dispositif d’essorage prévu sur le dispositif pour sécher (1) (CD).

Revendication n°13 :

Système de nettoyage selon l’une quelconque des revendications 5 à 11, caractérisé en ce que le dispositif d’entraînement comporte un entraînement en toupie et/ou un entraînement basé sur le principe de la toupie et/ou en ce que le dispositif d’entraînement comporte une barre de torsion et/ou une broche.

Revendication n°16 :

Système de nettoyage selon l’une quelconque des revendications 5 à 15, caractérisé en ce que le dispositif d’entraînement comporte une roue libre.

Pour ce qui concerne la revendication 5, la société Leifheit invoque la reproduction de l’ensemble caractéristiques de la revendication 5 en ce compris les références aux revendications 1 à 4.

Selon les procès-verbaux dressés le 19 mai 2015 par huissier de justice sur le site Youtube.com et de

constat d’achat dans un supermarché à l’enseigne E.LECLERC, il ressort que la société Spontex commercialise un produit dénommé ‘Express System’ composé d’un dispositif pour sécher des serpillières ou équivalent d’un dispositif de serpillières avec un dispositif d’essorage porté par un récipient pour du liquide de lavage, le dispositif d’essorage comportant un récepteur monté de manière rotative dans le récipient dans lequel peut s’introduire la serpillière, le dispositif étant installé de telle sorte que, lors du séchage par essorage la force d’entraînement pour l’essorage est transmise au dispositif d’essorage par l’intermédiaire du dispositif de serpillières dont la tête de serpillière est entraînée par un dispositif d’entraînement compris dans son manche.

La société Spontex conteste le caractère contrefaisant du produit qu’elle commercialise aux motifs que le panier d’essorage du produit est monté sur un support faisant saillie depuis le fond du seau, agencement qui n’est pas nouveau et que la caractéristique de la revendication 5 selon laquelle ‘la tête à serpillier est montée de manière rotative’ n’est pas reproduite, la tête de balai du produit Spontex étant montée de manière fixe et non de manière rotative, le manche et la tête étant solidaires.

Il apparaît des procès-verbaux de constat versés au débat et du produit ‘Express system’ commercialisé par la société Spontex que le dispositif d’essorage est porté par le récipient contenant le liquide de lavage, la société intimée indiquant à ce titre dans ses écritures que le panier d’essorage du produit est monté sur un support faisant saillie depuis le fond du seau, montage ressortant dans le brevet opposé de la figure 10 montrant que le dispositif d’essorage est porté par une saillie partant du fond du récipient. Les discussions sémantiques tenant à la différence de signification entre les termes ‘porté’ et ‘supporté’ voire ‘soutenu’ qui sont synonymes, et correspondant à la traduction du terme allemand ‘getragen’ étant indifférentes.

Le droit du breveté porte sur l’invention telle qu’elle est revendiquée selon les dispositions de l’article L. 612-6 du code de la propriété intellectuelle. Il est toutefois admis la possibilité d’interpréter les revendications pour en étendre la portée. A cet égard, le protocole d’interprétation de l’article 69, alinéa 1er, de la CBE indique qu’il ne s’agit pas d’interpréter des revendications dans un sens étroit ou littéral sans toutefois prendre les revendications comme lignes directrices pour étendre trop largement le périmètre des droits du breveté. L’interprétation doit à la fois assurer une protection équitable au demandeur et un degré raisonnable de certitude aux tiers.

S’agissant du ‘dispositif de serpillières avec une tête à serpillier montée de manière rotative’ (caractéristique CB) de la revendication 5, il ressort de la description que cette rédaction peut inclure deux possibilités, une tête de balai montée en rotation par rapport au manche et une tête de balai solidaire du manche mais en rotation par rapport à la douille. En effet, ainsi que l’a relevé le tribunal, la description du brevet EP 583 précise à la fin du [0034] que ‘De préférence, le mécanisme d’entraînement fait tourner une tête de balai, laquelle fait partie d’un dispositif de serpillière et laquelle est montée rotative’ et au [0035], ‘selon une autre variante, le mécanisme d’entraînement fait tourner à la fois la tête de balai et le manche d’un dispositif de serpillière. Avantageusement, le dispositif de serpillière peut comporter à cet effet au moins une poignée, laquelle est préférentiellement montée de manière à pouvoir tourner par rapport audit manche’. Au [0037] ‘selon un mode de réalisation très privilégié, le mécanisme d’entraînement entraîne tout d’abord une tête de balai, la tête de balai ainsi mise en rotation entraînant alors le logement et/ou le tamis et/ou le puits d’introduction.

De même, au [0051] de la description, il est mentionné que ‘selon une variante particulièrement avantageuse, un élément de préhension est préférentiellement monté rotatif par rapport au manche. Ainsi, on assure qu’un manche, après sa mise en rotation en association avec la tête de balai dans le cadre d’un processus de déshumification, pourra tourner librement. L’invention permet alors d’éviter que le manche ne tourne dans la main entrouverte de l’utilisateur (…)’. Et selon le [0054] ‘Le dispositif de serpillière comporte un mécanisme d’entraînement en rotation. Selon un mode de réalisation, le mécanisme d’entraînement en rotation fait tourner la tête de balai par rapport au manche. Selon un autre mode de réalisation, le mécanisme d’entraînement en rotation fait tourner la

tête de balai par rapport à l’élément de préhension. Selon une variante, le mécanisme d’entraînement en rotation fait tourner la tête de balai par rapport au support’.

Aussi, c’est sans élargir la portée de la revendication 5 que le tribunal l’a interprétée comme n’exigeant pas obligatoirement que le palier rotatif soit situé entre le manche et la tête de serpillière, le dispositif à serpillier pouvant être doté d’un palier rotatif qui mette en rotation la tête à serpillier qui peut être solidaire du manche qui tourne avec la tête.

Ainsi qu’il a été précédemment indiqué, la société Leifheit oppose à la société Spontex les caracteristiques des revendications 1 à 4 en ce qu’elles sont visées dans la revendication 5, et l’appelante ne conteste pas utilement que le produit qu’elle commercialise est muni d’un dispositif permettant de freiner les éléments de manière rotative, la présence de ce frein ressortant de l’examen du dispositif de balayage fourni au débat.

En conséquence, c’est à raison que le tribunal a considéré que le produit commercialisé par la société Spontex qui comporte un balai avec une tête montée de manière fixe par rapport au manche, le tout étant entraîné en rotation, contrefait la revendication 5 du brevet EP 583.

S’agissant des revendications 13 et 16, c’est également à raison que le tribunal n’a pas retenu leur contrefaçon, ces revendications impliquant d’être en présence d’un système de nettoyage selon l’une quelconque des revendications 5 à 11, qui renvoie au mode de réalisation de la revendication 6 à savoir un système de nettoyage selon la revendication 5 caractérisé en ce que le dispositif de serpillières comporte une tête à serpillière montée de manière rotative de préférence par rapport au manche.

Le jugement entrepris est en conséquence confirmé en ce qu’il a reconnu que le produit nommé ‘express system’ commercialisé par la société Spontex constitue la contrefaçon de la revendication 5 de la partie française du brevet européen EP 583 dont la société Leifheit est titulaire.

Sur les mesures réparatrices

Les mesures d’interdiction et de destruction prononcées par le jugement déféré seront confirmées sans qu’il soit besoin de les assortir d’une astreinte qui n’est pas justifiée en l’espèce. De même le jugement mérite confirmation en ce qu’il a débouté la société Leifheit de sa demande de publication judiciaire qui n’apparaît pas justifiée ni proportionnée aux faits de l’espèce.

S’agissant de l’indemnisation du préjudice, les premiers juges ont condamné la société Spontex à payer à la société Leifheit la somme de 20.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l’atteinte à la valeur patrimoniale du brevet et la somme provisionnelle de 80.000 euros à valoir sur la réparation des conséquences économiques résultant des actes de contrefaçon, accueillant par ailleurs la demande de droit à l’information de la société Leifheit.

La société Leifheit sollicite à titre incident la condamnation de la société Spontex à lui verser la somme globale de 550.000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon tout en maintenant sa demande au titre du droit à l’information sollicitant que cette mesure soit assortie d’une astreinte.

Néanmoins et ainsi qu’il avait déjà été relevé par le tribunal et la société Spontex, la société Leifheit se contente pour estimer son préjudice et réclamer cette somme provisionnelle, d’affirmer qu’elle a réalisé en France, en 2014, 927.000 euros de chiffre d’affaires avec ses produits, sans fournir un quelconque élément comptable pour en justifier et opère des calculs à partir de cette somme pour chiffrer son manque à gagner à la somme de 456.637 euros sur une période de 17 mois et les bénéfices réalisés par le contrefacteur à une somme de 393.975 euros. Elle évalue en outre son préjudice moral, sans autre précision de nature à l’étayer, à la somme de 100.000 euros.

Aussi, au vu des éléments dont dispose la cour, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a alloué à la société Leifheit la somme de 20.000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral.

L’intimée persistant devant la cour à procéder par affirmations et à s’abstenir de fournir un quelconque élément comptable permettant d’établir le manque à gagner qu’elle estime avoir subi, la cour considère comme le tribunal qu’elle ne peut prétendre à une indemnité provisionnelle à ce titre.

En outre, aucune circonstance ne vient justifier la mesure de droit à l’information ordonnée par le tribunal et la somme de 80.000 euros accordée à titre d’à valoir sur la réparation des conséquences économiques résultant des actes de contrefaçon sera allouée à titre définitif.

Il sera en conséquence alloué à la société Leifheit la somme totale et définitive de 100.000 euros de dommages et intérêts en indemnisation de l’entier préjudice de contrefaçon.

Le jugement entrepris est infirmé de ces chefs.

Sur les autres demandes

Le sens de l’arrêt conduit à confirmer les dispositions du jugement concernant les dépens et les frais irrépétibles.

Partie perdante, la société Spontex est condamnée aux dépens d’appel et à payer à la société Leifheit en application de l’article 700 du code de procédure civile, une indemnité complémentaire qui sera, en équité, fixée à la somme de 20.000 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement entrepris sauf en celles de ses dispositions ayant :

— ordonné à la société Spontex de produire, passé un délai de 3 mois à compter de la signification du présent jugement, tous documents certifiés par son commissaire aux comptes relatifs au nombre de produits « Express System » litigieux vendus ainsi que les prix desdits produits et les bénéfices réalisés par ces ventes depuis leur lancement en période non prescrite,

— condamné la société Spontex à payer à la société Leifheit AG une indemnité de 20.000 euros en réparation du préjudice subi du fait de l’atteinte à la valeur patrimoniale du brevet résultant des actes de contrefaçon,

— condamné la société Spontex à payer à la société Leifheit AG une indemnité provisionnelle de 80.000 euros à valoir sur la réparation des conséquences économiques résultant des actes de contrefaçon et renvoyé les parties à la détermination amiable du préjudice autre que résultant de l’atteinte à la valeur patrimoniale du brevet sur le fondement des pièces dont la production est ordonnée et à défaut par voie judiciaire après assignation,

Et statuant à nouveau sur ces chefs,

Condamne la société Spontex à payer à la société Leifheit AG la somme de 100.000 euros de dommages et intérêts en réparation de son entier préjudice au titre de la contrefaçon de la partie française du brevet EP 1890583,

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Spontex à payer à la société Leifheit AG la somme complémentaire de 20.000 euros,

Condamne la société Spontex aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente

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