Même en présence de manquements d’une partie suffisamment graves pour justifier la rupture immédiate d’une relation commerciale, il est toujours loisible à l’autre partie de lui accorder un préavis. En conséquence, un fabricant est en droit de rompre le contrat de distribution à la date de sa reconduction. En présence de fautes graves du distributeur rien n’oblige le fabricant à rompre sans délai le contrat.
Affaire Annick Goutal
La société Annick Goutal a, par contrat, confié à la société Dispar la distribution exclusive des produits de sa marque sur le territoire italien. Conclu pour une durée de trois ans à compter du 1er septembre 1998, ce contrat était renouvelable par tacite reconduction pour des périodes successives d’une année, sauf dénonciation, par l’une ou l’autre des parties, trois mois avant son échéance.
La société Annick Goutal, invoquant une mauvaise gestion des stocks, a notifié à la société Dispar sa décision de ne pas poursuivre le contrat et d’y mettre un terme à compter du 31 août 2013. Estimant que la rupture de la relation avait été brutale et abusive, la société Dispar a assigné la société Annick Goutal en réparation de son préjudice et lui a également réclamé le paiement de la valeur du stock à reprendre et de frais de stockage.
Conditions de la rupture brutale de relations commerciales
Au sens de l’article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce, engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale. Cette règle ne souffre d’exception qu’en cas de force majeure ou d’inexécution par l’autre partie de ses obligations, suffisamment grave pour justifier la rupture unilatérale immédiate de la relation.
Pour juger que la société Annick Goutal avait brutalement rompu la relation commerciale établie avec la société Dispar et la condamner à réparer le préjudice en résultant, les juges du fond ont considéré à tort que la société Annick Goutal n’a pas résilié le contrat mais a choisi de ne pas le renouveler à son échéance et qu’en conséquence.
Liberté de concéder un préavis même en présence d’une faute grave
Or, selon les juges suprêmes, attendre la date anniversaire du contrat avant de le rompre n’implique pas ipso facto que la société Annick Goutal ne considérait pas ces fautes comme présentant une gravité suffisante pour justifier une rupture immédiate sans préavis.
En d’autres termes, le fabricant est en droit de concéder un préavis à son distributeur même en présence de manquements suffisamment graves pour justifier la rupture immédiate de la relation commerciale.