Cession des droits du salarié : affaire Van Cleef et Arpels

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Refus de cession de droits

Plus de 10 années de procédure et deux saisines de la Cour de cassation ont donné à cette affaire une dimension hors normes. Un ouvrier joaillier / dessinateur du groupe Van Cleef et Arpels a finalement été débouté de son action en revendication de droits d’auteur mais a obtenu gain de cause sur le terrain social. Les relations de travail entre les parties n’avaient été  formalisées par aucun écrit jusqu’à ce que l’employeur propose au salarié de conclure un contrat de travail à durée indéterminée auquel était annexé un contrat de cession de droits d’auteur, contrats que le salarié a refusé de signer.

Licenciement censuré

Le salarié a été licencié pour faute grave pour avoir refusé de signer lesdits contrats. Ce  licenciement a été annulé et sanctionné au titre d’un harcèlement moral. La maison de joaillerie avait alors écopé de 50 000 euros de dommages-intérêts en réparation des agissements de harcèlement moral et 200 000 euros pour licenciement abusif (CC. ch. soc., 26 mars 2014, pourvoi n° 12-22505). Les juges suprêmes avaient retenu qu’en dépit de dix-neuf ans d’ancienneté sans antécédent disciplinaire, le salarié n’avait pas de contrat écrit de travail et que sa conduite résultait d’un différend sur la propriété des droits intellectuels sur les créations du fait de la volonté de son employeur d’obtenir la signature d’un avenant imposant une clause d’exclusivité, une clause de mobilité, une qualification inférieure à celle figurant sur ses bulletins de salaire et une renonciation à tous ses droits d’auteur sur ses oeuvres individuelles passées et futures. L’existence de pressions incessantes dont a été l’objet le salarié qui refusait de signer une modification de son contrat de travail était établie.

Qualification d’œuvre collective

Sur le volet de la cession des droits, l’œuvre collective a été appliquée aux créations du salarié. Au sens de l’article L.113-2 du CPI,  est dite collective l’oeuvre créée sur l’initiative d’une personne physique ou morale qui l’édite, la publie et la divulgue sous sa direction et son nom, et dans laquelle la contribution se fond dans l’ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu’il soit possible d’attribuer à chacun d’eux un droit distinct sur l’ensemble réalisé. L’oeuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée, cette personne étant investie des droits d’auteur (L.113-5 du CPI).

Cadre de création contraignant

Si le dessinateur avait un rôle important dans le processus de création des modèles de joaillerie, son travail s’inscrivait dans un cadre contraignant qui l’obligeait à se conformer aux instructions esthétiques qu’il recevait de ses supérieurs hiérarchiques dans le cadre d’un Comité de Création. Le dessinateur pouvait ainsi être amené à puiser son inspiration dans le fonds d’archive de la société Van Cleef & Arpels. Les dessins litigieux étaient en tant que tels dépourvus de valeur lorsqu’ils ne servaient pas à concrétiser un modèle de bijou. Les dessins en cause ont été réalisés dans le respect du style Van Cleef & Arpels en appliquant les codes de la société (création dans le cadre d’un travail collectif associant de nombreuses personnes).

La société disposait donc du pouvoir d’initiative sur la création des dessins et en contrôlait le processus jusqu’au produit finalisé en fournissant à l’équipe créatrice des directives et des instructions esthétiques afin d’harmoniser les différentes contributions. De fait, elle était titulaire ab initio des droits patrimoniaux.

Restitution des supports

Il est acquis que la propriété incorporelle est indépendante de la propriété de l’objet matériel (L.111-3 du CPI) de sorte qu’il n’était pas nécessaire au salarié de retenir les dessins litigieux pour faire valoir des droits de propriété intellectuelle. Le fait d’avoir conservé ces supports a été qualifié de comportement malicieux initié pour faire contre-poids dans le cadre de négociation à une proposition de contrats. A ce titre, le salarié a été condamné à payer la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts.

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