Fichier des personnes recherchées : 9 juin 2022 Cour d’appel de Rennes RG n° 22/00334

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9 juin 2022
Cour d’appel de Rennes
RG n°
22/00334

COUR D’APPEL DE RENNES

N° 178/22

N° N° RG 22/00334 – N° Portalis DBVL-V-B7G-S2BS

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Nous, Hélène CADIET, conseiller à la cour d’appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Morgane LIZEE, greffière,

Statuant sur l’appel formé le 07 Juin 2022 à 15H01 par la CIMADE pour :

M. [T] [N]

né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 3]

de nationalité Albanaise

ayant pour avocat Me Emmanuelle BEGUIN, avocat au barreau de RENNES

d’une ordonnance rendue le 04 Juin 2022 à 20H07 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiaire de RENNES qui a rejeté les exceptions de nullité soulevées, le recours formé à l’encontre de l’arrêté de placement en rétention administrative, et ordonné la prolongation du maintien de M. [T] [N] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-huit jours à compter du 4 juin 2022 à 17h10;

En présence de Madame [H] [I] représentant du préfet de L’ ILLE ET VILAINE, munie d’un pouvoir dûment convoqué,

En l’absence du procureur général régulièrement avisé, (avis écrit )

En présence de [T] [N], assisté de Me Emmanuelle BEGUIN, avocat,

Après avoir entendu en audience publique le 08 Juin 2022 à 10 H 30 l’appelant assisté de M. Madame [D] [X], interprète en langue albanais, et son avocat et le représentant du préfet en leurs observations,

Avons mis l’affaire en délibéré et le 09 Juin 2022 à 10h00, avons statué comme suit :

M. [T] [N] a fait l’objet d’un arrêté du préfet d’Ille-et-Vilaine du 2 juin 2022 prononçant une obligation de quitter le territoire avec interdiction de retour de deux ans.

Il a été ensuite placé en rétention administrative par décision du 2 juin 2022.

Statuant sur requête de l’intéressé et sur celle du préfet reçue au greffe le 3 juin 2022 à 18 heures 51, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes, par ordonnance rendue le 4 juin 2022, rejeté le recours de M. [T] [N] et prolongé sa rétention pour un délai de 28 jours à compter du 4 juin 2022 à 17 heures 10.

Par déclaration de la CIMADE reçue au greffe de la cour le 7 juin 2022 à 15 heures 01 M. [T] [N] a interjeté appel de cette ordonnance notifiée le 4 juin 2022 à 20 heures 40.

M. [T] [N] fait valoir au soutien de sa demande d’infirmation de la décision entreprise et de remise en liberté immédiate les moyens suivants :

– annulation de l’arrêté de placement pour défaut d’examen de sa sitution et erreur manifeste d’appréciation par la préfecture en raison d’un hébergement stable au centre communal d’action sociale de [Localité 2] dont il a communiqué l’adresse à la préfecture;

– erreur de procédure en raison de l’absence d’habilitation des agents consultant le fichier FPR ;

– irrégularité du placement direct en rétention à l’issue du contrôle d’identité effectué dans le cadre des réquisitions du procureur de la république ;

Le préfet représenté par Mme [I] munie d’un pouvoir à cet effet demande de confirmer la décision.

Le Procureur Général, suivant avis écrit du 7 juin 2022, sollicite la confirmation de la décision entreprise.

M. [T] [N] assisté d’un interprète en langue albanaise Mme [D] assermentée et de son conseil Me BEGUIN maintient les termes de son mémoire d’appel et s’en rapporte sur le dernier moyen.

SUR QUOI,

L’appel est recevable pour avoir été formé dans les formes et délais prescrits.

Sur les garanties de représentation de M. [T] [N] et le risque de fuite

L’article L741-1 du CESEDA énonce que : «’L’autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l’étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision. Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l’article L. 612-3’».

Ce dernier texte précise : «’Le risque mentionné au 3° de l’article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière,

dans les cas suivants :

1° L’étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n’a pas sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;

2° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s’il n’est pas soumis à l’obligation du visa, à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;

3° L’étranger s’est maintenu sur le territoire français plus d’un mois après l’expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;

4° L’étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;

5° L’étranger s’est soustrait à l’exécution d’une précédente mesure d’éloignement ;

6° L’étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l’un des États avec lesquels s’applique l’acquis de Schengen, fait l’objet d’une décision d’éloignement exécutoire prise par l’un des États ou s’est maintenu sur le territoire d’un de ces États sans justifier d’un droit de séjour ;

7° L’étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d’identité ou de voyage ou a fait usage d’un tel titre ou document ;

8° L’étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu’il ne peut présenter des documents d’identité ou de voyage en cours de validité, qu’il a refusé de communiquer les renseignements permettant d’établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu’il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d’empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l’article L. 142-1, qu’il ne justifie pas d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu’il s’est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5’».

Enfin, l’article 15-1 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil dispose que : «’À moins que d’autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d’un pays tiers qui fait l’objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l’éloignement, en particulier lorsque :

a) il existe un risque de fuite, ou

b) le ressortissant concerné d’un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement.

Toute rétention est aussi brève que possible et n’est maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise’».

C’est à juste titre que le premier juge a considéré que M. [T] [N] ne présentait pas de garanties de représentation propres à prévenir un risque de fuite dès lors qu’il n’établissait pas le caractère pérenne de sa domiciliation, en ne versant aux débats aucun justificatif de domicile dans un lieu fixe ayant déclaré en audition le 2 juin 2022 une adresse postale et disant changer toutes les ssemaines en sorte que la préfecture ne pouvait envisager une assignation à résidence; il sera ajouté que l’intéressé ne dispose pas de passeport ni de document d’identité.

Il résulte de ce qui précéde que le placement en rétention est l’unique moyen de prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement qu’une assignation à résidence est insuffisante à pallier.

Le moyen sera rejeté.

Sur le moyen tiré de la consultation des fichiers par les agents

L’article 5 I du décret n°2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées dispose : « Peuvent seuls avoir accès aux données à caractère personnel et informations enregistrées dans le fichier des personnes recherchées, dans le cadre de leurs attributions légales et pour les besoins exclusifs des missions qui leur sont confiées :

1° Les agents des services de la police nationale individuellement désignés et spécialement habilités soit par les chefs des services territoriaux de la police nationale, soit par les chefs des services actifs à la préfecture de police ou, le cas échéant, par le préfet de police, soit par les chefs des services centraux de la police nationale ou, le cas échéant, par le directeur général dont ils relèvent ;

2° Les militaires des unités de la gendarmerie nationale individuellement désignés et spécialement habilités soit par les commandants de groupement, soit par les commandants de la gendarmerie dans les départements et collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie, soit par les commandants de région, soit par les commandants des gendarmeries spécialisées, soit par le sous-directeur de la police judiciaire ou, le cas échéant, par le directeur général de la gendarmerie nationale ;

3° Les agents des services des douanes individuellement désignés et spécialement habilités soit par les directeurs régionaux des douanes, soit par le chef du service national de douane judiciaire ou, le cas échéant, par le directeur général des douanes et droits indirects ;

4° Les agents des services centraux du ministère de l’intérieur et des préfectures et sous-préfectures individuellement désignés et spécialement habilités, respectivement, par leur chef de service ou par le préfet, et chargés :

a) De l’application de la réglementation relative aux étrangers, aux titres d’identité et de voyages, aux visas, aux armes et munitions et aux permis de conduire ;

b) De la mise en ‘uvre des mesures prises en application du 3° de l’article 5 et de l’article 6 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 modifiée relative à l’état d’urgence ;

c) De la mise en ‘uvre des mesures prises en application des articles L. 225-1 à L. 225-3 du code de la sécurité intérieure.

5° Les agents du ministère des affaires étrangères, chargés du traitement des titres d’identité et de voyage et de l’instruction des demandes de visa, individuellement désignés et spécialement habilités par le directeur général dont ils relèvent ;

6° Les agents du Conseil national des activités privées de sécurité, individuellement désignés et spécialement habilités par le préfet compétent en application de l’article R. 632-14 du code de la sécurité intérieure ;

7° Les agents du service à compétence nationale dénommé  » Unité Information Passagers  » et rattaché au ministère chargé du budget, individuellement désignés et spécialement habilités par le directeur de l’unité ;

8° Les agents du service mentionné à l’article L. 561-23 du code monétaire et financier, individuellement désignés et spécialement habilités par le directeur du service ;

9° Les agents du service à compétence nationale dénommé ‘ service national des enquêtes administratives de sécurité ‘, individuellement désignés et spécialement habilités par le directeur général de la police nationale ;

10° Les agents du service à compétence nationale dénommé ‘ Commandement spécialisé pour la sécurité nucléaire ‘, individuellement désignés et spécialement habilités par le directeur général de la gendarmerie nationale.’»

Il doit résulter des pièces de la procédure soumise au juge des libertés et de la détention aux fins de prolongation de la rétention administrative que, en cas de consultation du fichier des personnes recherchées, l’agent ayant consulté ce fichier était expressément habilité à cet effet.

Le juge doit vérifier s’il résulte des actes de la procédure, notamment des mentions, faisant foi jusqu’à preuve contraire, du procès-verbal contenant le résultat de la consultation du fichier, que le fonctionnaire de police qui a procédé à la consultation était expressément habilité à cet effet. Mais aucune disposition législative ou réglementaire n’impose qu’il soit justifié, par une autre pièce de la procédure, de cette habilitation.

En l’espèce, le ‘procès-verbal n°22/395 dressé le 2 juin 2022 à 11 h rapporte que M. [W] [V], brigadier de police, en fonction à ST JACQUES DE LA LANDE , a procédé à un contrôle d’identité, que la personne contrôlée, sans document d’identité autre q’une carte de bus KORRIGO, ayant déclaré se nommer [N], le brigadier de police a consulté le fichier des personnes recherchées où une fiche de recherche le concernait.

Le procès-verbal mentionne que l’agent est  »individuellement désigné et spécialement habilité par le Directeur central de la police aux frontières donnant accès au fichier des personnes recherchées et au fichier national des étranger’, ce qui renvoie au 1° de l’article 5 visé ci-dessus.

Il convient de constater la régularité de la consultation du fichier par M [V] qui résulte expressément des mentions du procès-verbal précité.

La consultation étant régulière, le moyen sera rejeté.

Sur le moyen tiré de l’irrégularité du placement direct en rétention à l’issue du contrôle d’identité effectué dans le cadre des réquisitions du procureur de la république ;

l’appelant n’explicite pas davantage ce moyen ; dès lors que les réquisitions du parquet sur le contrôle d’identité sont régulières et non contestées, la personne s’est trouvée en situation irrégulière justifiant le recours au placement en rétention.

En conséquence l’ordonnance sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

statuant publiquement,

Déclarons l’appel recevable ;

Confirmons l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes du 4 juin 2022 ;

Laissons la charge des dépens au Trésor Public.

Fait à [Localité 2], le 9 juin 2022 à 10 heures

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [T] [N], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier

 

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