Fichier des personnes recherchées : 8 juin 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 23/00602

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8 juin 2023
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
23/00602

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

Minute 2023/605

N° RG 23/00602 – N° Portalis DBVI-V-B7H-PPYE

O R D O N N A N C E

L’an DEUX MILLE VINGT TROIS et le 08 juin à 10h10

Nous A. MAFFRE, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 7 DECEMBRE 2022 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Vu l’ordonnance rendue le 06 Juin 2023 à 18H09 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse statuant sur la régularité du placement en rétention et ordonnant la prolongation du maintien au centre de rétention de

[K] [B]

né le 02 Mai 2023 à [Localité 2] (MAROC)

de nationalité Marocaine

Vu l’appel formé le 07/06/2023 à 09 h 08 par courriel, par Me Majouba SAIHI, avocat au barreau de TOULOUSE;

A l’audience publique du 07 juin 2023 à 15h30, assisté de P.GORDON, adjoint administratif faisant fonction de greffier, avons entendu :

[K] [B]

assisté de Me Majouba SAIHI, avocat au barreau de TOULOUSE

qui a eu la parole en dernier ;

avec le concours de [K] [D], interprète, qui a prêté serment,

En l’absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;

En présence de M. [U] représentant la PREFECTURE DES PYRENEES ORIENTALES ;

avons rendu l’ordonnance suivante :

M. [K] [B], âgé de 18 ans et de nationalité marocaine, a été interpellé le 4 juin 2023 à 7h30 à [Localité 3] et a été placé en garde à vue à 8h25 pour vols.

Le 4 juin 2023, le préfet des Pyrénées-Orientales a pris à son encontre un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai et avec interdiction de retour pendant 2 ans avec placement en rétention administrative, notifiés à 17h50 à l’issue de la garde à vue. M. [B] a été conduit au centre de rétention administrative de [Localité 1] (31) en exécution de cette décision.

1) Indiquant n’avoir pu l’éloigner dans le délai de rétention initial de quarante huit heures, le préfet des Pyrénées-Orientales a sollicité du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse, la prolongation du maintien de M. [K] [B] en rétention pour une durée de vingt huit jours suivant requête du 5 juin 2023 parvenue au greffe du tribunal le même jour à 16h31.

2) M. [K] [B] a pour sa part saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse par requête parvenue au greffe le 6 juin 2023 à 11h51 pour contester la régularité de la procédure et de l’arrêté en placement en rétention.

Ce magistrat a ordonné la jonction des requêtes, rejeté les exceptions de procédure, déclaré recevable la requête et régulier l’arrêté de placement en rétention administrative, et ordonné la prolongation de la mesure de rétention par ordonnance du 6 juin 2023 à 18h09.

M. [K] [B] a interjeté appel de cette décision, par courriel de son conseil adressé au greffe de la cour le 7 juin 2023 à 9h08.

A l’appui de sa demande d’infirmation de l’ordonnance entreprise et de mise en liberté, le conseil de M. [B] a principalement soutenu que :

– à titre liminaire, sur la procédure :

. l’article 78-2 du code de procédure pénale n’a pas été respecté faute d’éléments objectifs permettant de le soupçonner de cambriolage,

. aucun procès-verbal ne mentionne que MM. [F] et [Y] ont personnellement consulté FAED, FPR et FNE et y sont habilités, il est à nouveau demandé au juge de contrôler leur habilitation : si ce contrôle est impossible, la procédure doit être considérée comme irrégulière,

. il n’est pas établi que le procureur de la République a reçu l’avis de placement en rétention administrative,

– sur l’arrêté de placement en rétention administrative,

. il n’a pas été invité à faire des observations sur une éventuelle mesure d’éloignement et de placement en rétention administrative,

. il y a un défaut de motivation puisqu’il n’a jamais dit vouloir se maintenir sur le territoire français et n’a pas été interrogé sur une vulnérabilité, il n’y a pas eu d’examen sérieux d’un éventuel état de vulnérabilité en l’absence de formulaire, et il y a une erreur manifeste d’appréciation puisqu’il n’a jamais fait l’objet d’une mesure d’éloignement et ne veut pas rester sur le territoire français.

À l’audience, Maître Sailhi a repris oralement les termes de son recours et souligné que :

. l’interpellation de ‘personnes en situation irrégulière’ s’est faite au faciès,

. la demande de contrôle de l’habilitation des deux gendarmes est réitérée en cause d’appel,

. le formulaire de renseignements administratifs ne comprend que deux pages sur trois,

. un placement en rétention administrative est une mesure d’exécution disproportionnée pour une première mesure d’éloignement.

M. [B] qui a demandé à comparaître, indique qu’il n’a rien fait et n’avait pas l’intention de rester en France et il demande pourquoi on le garde..

Le préfet des Pyrénées-Orientales, régulièrement représenté à l’audience, a sollicité la confirmation de la décision entreprise en s’en remettant à la motivation de celle-ci et en soulignant que

Le ministère public, avisé de la date d’audience, est absent et n’a pas formulé d’observations.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la procédure antérieure à la rétention administrative

le contrôle

L’article78-2 du code de procédure pénale dispose en son alinea 1 que les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux articles 20 et 21-1° peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l’égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction.;

Au cas d’espèce, c’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a relevé que l’interpellation de M. [B] parmi les 4 personnes identifiées comme étant en situation irrégulière s’est faite sur la base des photos des personnes soupçonnées de vol dont disposaient les policiers, éléments objectifs permettant de le soupçonner de ces faits.

L’interpellation de M. [B] s’avère donc régulière.

la consultation des fichiers

L’article 15-5 du code de procédure pénale dispose que seuls les personnels spécialement et individuellement habilités à cet effet peuvent procéder à la consultation de traitements au cours d’une enquête ou d’une instruction.

La réalité de cette habilitation spéciale et individuelle peut être contrôlée à tout moment par un magistrat, à son initiative ou à la demande d’une personne intéressée. L’absence de la mention de cette habilitation sur les différentes pièces de procédure résultant de la consultation de ces traitements n’emporte pas, par elle-même, nullité de la procédure.

Au cas d’espèce, et contrairement à ce qui est soutenu, il ressort de la procédure que :

. le FNE a été consulté par les services de la préfecture dont l’habilitation à le faire n’est pas ici contestée,

. le nom et le numéro de M. [F] figurent sur le compte-rendu de consultation du fichier,

. et c’est M. [E] qui a consulté le fichier des personnes recherchées, précisant être expressément habilité à le faire.

Dès lors, en l’absence d’élément en faveur d’une irrégularité, la demande d’un contrôle supplémentaire par le juge, insuffisamment étayée, sera rejetée.

l’avis de placement en rétention

L’article L741-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prescrit que le procureur de la République est informé immédiatement de tout placement en rétention.

Au cas d’espèce, c’est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a rappelé la force probante des procès-verbaux, lesquels mentionnent ici l’accomplissement effectif de cette formalité, et rejeté à bon droit ce moyen de nullité.

Sur l’arrêté de placement en rétention administrative

l’absence d’observation préalable

L’appelant critique le fait de n’avoir pas été invité à faire des observations sur une éventuelle mesure d’éloignement et de placement en rétention administrative, préalablement à ces décisions.

Cependant, comme rappelé à juste titre par le premier juge, ni les garanties procédurales du chapitre III de la directive 2008/115/CE ni les articles L. 121-1, L. 211-2 et L. 121-2, 3°, du code des relations entre le public et l’administration ne s’appliquent à la décision de placement en rétention, seule soumise au contrôle du juge judiciaire, de sorte que le moyen doit être écarté.

la motivation

En application des articles L741-1 et 4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l’étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l’article L. 612-3.

La décision de placement en rétention prend en compte l’état de vulnérabilité et tout handicap de l’étranger.

Le handicap moteur, cognitif ou psychique et les besoins d’accompagnement de l’étranger sont pris en compte pour déterminer les conditions de son placement en rétention.

Il résulte de l’article L741-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que la décision de placement en rétention administrative doit être écrite et motivée. Pour satisfaire à l’exigence de motivation, la décision doit comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision.

En l’espèce, l’arrêté critiqué met en avant la situation irrégulière de l’appelant sur le territoire français comme dans l’espace Schengen, et l’absence de résidence ou d’attaches familiales stables en France, de ressources et de document d’identité. L’obligation de motivation n’est pas celle de l’exhaustivité et s’agissant du caractère provisoire ce séjour en France qu’allègue l’appelant, force est de relever que deux autres procédures ont pu néanmoins être dressées à son encontre en 2021.

En revanche, aucune question n’a été posée à l’intéressé au sujet de sa santé en audition, et si un formulaire dit de ‘renseignements administratifs’ a été complété de façon partielle, succincte et stéréotypée, il n’a pas été signé par M. [S] et aucune mention ne porte sur les questions de santé ni ne permet de discerner si le policier signataire l’a rempli d’après les éventuelles réponses de ce dernier ou d’après sa propre connaissance ou appréciation de la situation.

Dès lors, le préfet n’établit pas qu’il a pris les mesures adaptées pour s’enquérir de l’état de santé de l’appelant et qu’il s’est donné les moyens véritables d’en apprécier la compatibilité avec la rétention administrative .

Il s’ensuit que la décision de placement en rétention administrative n’est pas régulière.

Partant, la décision déférée doit être infirmée et la mise en liberté de M. [B], ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,

Infirmons l’ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse le 6 juin 2023,

Ordonnons la mainlevée de la mesure de maintien en rétention sans délai de M. [K] [B],

Rappelons à M. [K] [B] qu’il a l’obligation de quitter le territoire français,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture des Pyrénées-Orientales, service des étrangers, à M. [K] [B], ainsi qu’à son conseil et communiquée au ministère public.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE

P.GORDON A. MAFFRE.

 

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