Fichier des personnes recherchées : 12 juillet 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 23/00356

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12 juillet 2023
Cour d’appel de Rennes
RG n°
23/00356

COUR D’APPEL DE RENNES

N° 167/23

N° RG 23/00356 – N° Portalis DBVL-V-B7H-T5WH

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Nous, Philippe BRICOGNE, Président à la cour d’appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Julie FERTIL, greffière,

Statuant sur l’appel formé le 10 Juillet 2023 à 15h38 par :

M. [L] [K]

né le 13 Janvier 2003 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

ayant pour avocat Me Elodie PRAUD, avocat au barreau de RENNES

d’une ordonnance rendue le 07 Juillet 2023 à 18h15 par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiaire de RENNES qui a rejeté les exceptions de nullité soulevées, le recours formé à l’encontre de l’arrêté de placement en rétention administrative, et ordonné la prolongation du maintien de M. [L] [K] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée maximale de vingt-huit jours à compter du 6 juillet 2023 à 20h30 ;

En l’absence de représentant du préfet de [Localité 4], dûment convoqué (mémoire écrit du 11/07/2023),

En l’absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur FICHOT, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 10 juillet 2023, lequel a été mis à disposition des parties,

En présence de [L] [K], assisté de Me Elodie PRAUD, avocat,

Après avoir entendu en audience publique le 11 Juillet 2023 à 11 H 00 l’appelant assisté de M. [I] [S], interprète en langue arabe ayant au préalable prêté serment, et son avocat en leurs observations,

Avons mis l’affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :

M. [L] [K], né le 13 janvier 2003 à [Localité 3] (Algérie), de nationalité algérienne, a été interpellé le 4 juillet 2023 par la police de [Localité 5] dans le cadre d’une enquête ouverte pour des faits de vol dans un magasin FNAC.

Il est démuni de tout document d’identité mais il s’avère qu’il est inscrit au fichier des personnes recherchées et est donc placé en retenue pour vérification. Il indique avoir quitté l’Algérie en 2019 pour retrouver sa mère qui vivrait en Italie et être hébergé [Adresse 1] chez Mme [M] [R] qui serait enceinte de lui.

Il s’avère que M. [L] [K] avait fait l’objet d’un arrêté portant obligation de quitter le territoire français pris le 15 juin 2022 par le préfet de la Sarthe et qu’il a été assigné à résidence au [Localité 6] par arrêtés du 3 septembre 2022 puis du 26 novembre 2022.

Le 4 juillet 2023, le préfet de [Localité 4] a prononcé une obligation de quitter le territoire français et décidé du placement de M. [L] [K] en rétention administrative, dans l’attente de l’exécution de l’OQTF.

M. [L] [K] a été admis au centre de rétention administrative de [Localité 7].

Le 6 juillet 2023, le préfet de [Localité 4] a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Rennes en vue d’une première prolongation de la rétention administrative de M. [L] [K].

Par ordonnance du 7 juillet 2023 à 18h15, le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation du maintien de M. [L] [K], dans des locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 28 jours à compter du 6 juillet 2023 à 20h30.

Le 10 juillet 2023 à 12h01, M. [L] [K] a interjeté appel de cette ordonnance.

À l’audience du 11 juillet 2023 à 11h00, M. [L] [K], assisté de son avocat, fait valoir un défaut d’examen approfondi de sa situation et une erreur manifeste d’appréciation, l’irrégularité de son contrôle d’identité et l’absence de perspective raisonnable d’éloignement.

Le préfet de [Localité 4] ne comparaît pas mais adresse un mémoire dans lequel il sollicite la confirmation de l’ordonnance en indiquant que M. [L] [K] s’est soustrait aux précédentes assignations à résidence et qu’une demande de laissez-passer est en cours auprès du consulat d’Algérie. Il considère que M. [L] [K] ne rapporte aucune preuve de la situation de famille qu’il allègue, qu’il a été légitimement interpellé dans le cadre d’une affaire de vol et que les autorités consulaires algériennes étaient disposées en dernier lieu à délivrer un laissez-passer.

Le ministère public requiert l’infirmation de l’ordonnance en l’absence de perspectives raisonnables d’éloignement.

DISCUSSION

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel de M. [L] [K] a été fait dans des conditions de forme et de délais régulières. Il sera donc jugé recevable.

Sur la procédure

1 – le défaut d’examen approfondi de la situation du retenu et l’erreur manifeste d’appréciation :

Aux termes de l’article L. 741-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, ‘l’autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l’étranger qui se trouve dans l’un des cas prévus à l’article L. 731-1 lorsqu’il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement et qu’aucune autre mesure n’apparaît suffisante à garantir efficacement l’exécution effective de cette décision.

Le risque mentionné au premier alinéa est apprécié selon les mêmes critères que ceux prévus à l’article L. 612-3’.

L’article 612-3 dispose que ce risque peut être regardé comme établi dans les cas suivants :

– l’étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n’a pas sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;

– l’étranger s’est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s’il n’est pas soumis à l’obligation du visa, à l’expiration d’un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d’un titre de séjour ;

– l’étranger s’est maintenu sur le territoire français plus d’un mois après l’expiration de son titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de son autorisation provisoire de séjour, sans en avoir demandé le renouvellement ;

– l »étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ;

– l’étranger s’est soustrait à l’exécution d’une précédente mesure d’éloignement ;

– l’étranger, entré irrégulièrement sur le territoire de l’un des États avec lesquels s’applique l’acquis de Schengen, fait l’objet d’une décision d’éloignement exécutoire prise par l’un des États ou s’est maintenu sur le territoire d’un de ces États sans justifier d’un droit de séjour ;

– l’étranger a contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d’identité ou de voyage ou a fait usage d’un tel titre ou document ;

– l’étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu’il ne peut présenter des documents d’identité ou de voyage en cours de validité, qu’il a refusé de communiquer les renseignements permettant d’établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu’il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d’empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au 3° de l’article L. 142-1, qu’il ne justifie pas d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu’il s’est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 721-6 à L. 721-8, L. 731-1, L. 731-3, L. 733-1 à L. 733-4, L. 733-6, L. 743-13 à L. 743-15 et L. 751-5.

L’article L. 741-4 impose de tenir compte de l’état de vulnérabilité et de tout handicap de l’étranger.

En l’espèce, d’une part, M. [L] [K] répond à plusieurs de ces critères puisqu’il n’est pas rentré régulièrement sur le sol français, n’a pas fait de démarches en vue de l’obtention d’un titre de séjour, ne dispose pas d’un passeport en cours de validité, a explicitement indiqué son intention de ne pas retourner en Algérie et s’est délibérément soustrait à ses obligations tenant à son assignation à résidence.

Le fait qu’il justifie maintenant d’un hébergement au [Adresse 2] chez une compagne qui serait enceinte de lui ne peut pas être regardé comme une garantie suffisante interdisant, ab initio, la mesure de rétention opérée par le préfet.

D’autre part, les affections dont souffre M. [L] [K] ne constituent pas une situation de handicap ni n’entraîne un état de vulnérabilité.

Le moyen tiré du défaut d’examen approfondi de sa situation et d’une erreur manifeste d’appréciation sera donc écarté.

2 – le contrôle d’identité :

L’article 78-2 du code de procédure pénale prévoit que ‘les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux articles 20 et 21-1° peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l’égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction’.

En l’espèce, les policiers ont été requis par la FNAC pour un individu ayant commis un vol dans le magasin quelques jours auparavant et qui se trouve à nouveau dans le magasin. M. [L] [K] a été interpellé hors du magasin qu’il venait de quitter sur la base de la description faite et ont été amenés à vérifier son identité.

Le fait que M. [L] [K] n’ait finalement pas été interrogé sur les soupçons de vol durant sa garde à vue n’enlève rien au cadre de la flagrance qui justifiait le contrôle d’identité opéré.

Ce moyen, inopérant, sera écarté.

Sur le fond

L’article L. 741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pose en principe qu’ ‘un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet’.

L’article L. 751-9 dispose que ‘l’autorité administrative peut placer en rétention, pour une durée de quarante-huit heures, l’étranger faisant l’objet d’une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge pour prévenir un risque non négligeable de fuite tel que défini à l’article L. 751-10, dans la mesure où le placement en rétention est proportionné et si les dispositions de l’article L. 751-2 ne peuvent être effectivement appliquées.

L’étranger faisant l’objet d’une requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge ne peut être placé et maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à la détermination de l’État responsable de l’examen de sa demande d’asile.

Lorsqu’un État requis a refusé de prendre en charge ou de reprendre en charge l’étranger, il est immédiatement mis fin à la rétention de ce dernier, sauf si une demande de réexamen est adressée à cet État dans les plus brefs délais ou si un autre État peut être requis.

En cas d’accord d’un État requis, la décision de transfert est notifiée à l’étranger dans les plus brefs délais et la rétention peut se poursuivre, dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités, pour le temps strictement nécessaire à l’exécution du transfert, si l’étranger ne peut quitter immédiatement le territoire français mais que l’exécution de la décision de transfert demeure une perspective raisonnable.

L’étranger faisant l’objet d’une décision de transfert peut également être placé en rétention en application du présent article, même s’il n’était pas retenu lorsque la décision de transfert lui a été notifiée’.

L’article 15 de la directive 2008/115/CE prévoit notamment que :

– Toute rétention est aussi brève que possible et n’est maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise.

– Le ressortissant concerné d’un pays tiers est immédiatement remis en liberté si la rétention n’est pas légale et, lorsqu’il apparaît qu’il n’existe plus de perspective raisomable d’éloignement pour des considérations d’ordre juridique ou autres ou que

les conditions énoncées au paragraphe 1 ne sont plus réunies, la rétention ne se justifie

plus et la personne concernée est immédiatement remise en liberté.

– La rétention est maintenue aussi longtemps que les conditions préalables en sont réunies et il est nécessaire de garantir que l’éloignement puisse être mené à bien.

– Chaque État membre fixe une durée déterminée de rétention, qui ne peut pas dépasser six mois.

En l’espèce, le préfet justifie avoir sollicité un laissez-passer auprès des autorités consulaires algériennes.

Les diligences nécessaires ont donc été faites et il est parfaitement vain de préjuger des suites qui y seront données en raison de la tension diplomatique supposée entre la France et l’Algérie.

Ce moyen, inopérant, sera écarté.

Par ailleurs, M. [L] [K], qui n’est détenteur d’aucun passeport en cours de validité, n’offre aucune garantie de représentation.

Sur les dépens

Il conviendra de laisser les dépens à la charge de l’Etat.

PAR CES MOTIFS :

Nous, Philippe BRICOGNE, président de chambre délégué par le premier président, assisté de Julie FERTIL, greffière, statuant publiquement et en dernier ressort,

Déclarons recevable l’appel interjeté par M. [L] [K],

Confirmons l’ordonnance entreprise,

Laissons les dépens à la charge de l’Etat.

Fait à Rennes, le 12 Juillet 2023 à 10h30

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE PRESIDENT,

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [L] [K], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier

 

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