Conflit de valeurs entre préemption urbaine et droits des propriétaires : enjeux et implications

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Contexte de l’affaire

La Société Civile Immobilière (SCI) [C] des Roses, gérée par M. [Q] [C], est propriétaire d’un appartement situé dans un immeuble en copropriété à l’adresse [Adresse 4]. Le 30 juin 2014, la SCI a exprimé son intention de vendre cet appartement pour un montant de 150 000 euros. Cependant, la ville de Paris a formulé une offre d’acquisition à 75 000 euros le 26 août 2014, qui a été refusée par la SCI. En tant que titulaire du droit de préemption, la ville a saisi le juge de l’expropriation pour faire fixer le prix du bien.

Décision du juge de l’expropriation

Le 4 juin 2015, le juge de l’expropriation a fixé le prix de l’appartement à 78 245 euros. En outre, la ville de Paris a été condamnée à verser 1 000 euros à la SCI sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’à supporter les dépens. Suite à cette décision, la SCI a changé de nom pour devenir la SCI [C] des Rases. Deux appels ont été enregistrés sous les noms successifs de cette société.

Arrêt de la cour d’appel de Paris

Le 26 mai 2016, la cour d’appel de Paris a ordonné la jonction des procédures et a décidé de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité à la Cour de cassation. Cette question portait sur la conformité de l’alinéa 2 de l’article L 211-5 du Code de l’urbanisme à l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. La cour a également sursis à statuer sur le surplus des demandes jusqu’à la décision de la Cour de cassation.

Décision de la Cour de cassation

Le 13 juillet 2016, la Cour de cassation a décidé de ne pas renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, considérant que la question n’était pas nouvelle et ne présentait pas un caractère sérieux. La Cour a souligné que le droit de délaissement au profit des propriétaires de biens situés dans le périmètre d’un droit de préemption urbain ne portait pas atteinte à la liberté contractuelle.

Arguments des parties

La SCI [C] des Rases a soutenu que le prix de 150 000 euros, mentionné dans le compromis de vente, constituait une créance et un bien au sens de l’article 1er du premier protocole additionnel à la CEDH. Elle a argué que l’application de cet article entraînerait une perte significative de valeur. En réponse, la ville de Paris a contesté la légitimité du prix de 150 000 euros, affirmant qu’aucun terme de référence ne soutenait ce montant et que la légalité de la décision de préemption était acquise.

Analyse des motifs de l’arrêt

Le tribunal a rappelé que la privation de propriété doit être justifiée et respecter un juste équilibre entre l’intérêt général et les droits fondamentaux de l’individu. Il a également souligné que le pouvoir de préemption des collectivités publiques est justifié par des actions d’intérêt général, telles que la réalisation de logements sociaux. La cour a noté que la SCI avait la possibilité de faire évaluer la valeur de son bien par le juge, en produisant des comparaisons pertinentes.

Fixation du prix du bien

La cour a finalement fixé le prix du bien à 85 000 euros, tenant compte de la vétusté de l’immeuble et de l’occupation du bien. Cette décision a été justifiée par une étude de marché qui a établi une valeur moyenne de 3 466 euros le m², avec un abattement pour occupation. La cour a conclu que cette somme était supérieure au prix d’achat initial de 60 000 euros, permettant ainsi à la SCI de réaliser une plus-value.

Conclusion sur les frais et dépens

Le jugement a été confirmé, sauf en ce qui concerne le prix d’acquisition. Chaque partie a été condamnée à supporter ses propres frais irrépétibles et dépens exposés en cause d’appel.

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