Les effets de l’absence du défendeur lors d’une audience en référé en 10 Questions / Réponses

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Résumé de cette affaire : La société par actions simplifiée (SAS) Réseau Ouest est locataire d’une parcelle de terre où elle possède un pylône et du matériel de radio diffusion. Un accord verbal a été établi entre le propriétaire de la parcelle, Monsieur [G], et Monsieur [J] [U], défendeur, pour que ce dernier fasse paître son bétail sur la parcelle. Le 4 mai 2022, une intervention a conduit à la chute du pylône de Réseau Ouest, causée par une remorque de la SARL Jouanolle & fils. Réseau Ouest a demandé des indemnités à cette société pour les travaux de reconstruction et la perte d’exploitation. Après une expertise qui a relevé un défaut d’entretien du pylône, Réseau Ouest a assigné en référé la SARL Jouanolle & fils, son assureur CRAMA Bretagne-Pays de la Loire, et Monsieur [J] [U] pour obtenir une expertise judiciaire et une provision. Le tribunal a ordonné une expertise contradictoire, désigné un expert, et fixé une provision à verser par Réseau Ouest, tout en condamnant in solidum les défenderesses à payer une provision ad litem. Les demandes de modification de mission d’expertise et d’association à l’expertise ont été rejetées.

Quels sont les effets de l’absence du défendeur lors d’une audience en référé ?

L’article 472 du Code de procédure civile stipule que « si le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée ».

Cela signifie que même en l’absence du défendeur, le juge peut rendre une décision. Toutefois, il doit s’assurer que la demande de la partie présente est conforme aux exigences de régularité, de recevabilité et de fondement.

En pratique, cela implique que le juge examinera les éléments de preuve et les arguments présentés par la partie qui se présente. Si ces éléments sont jugés suffisants, le juge peut statuer en faveur de cette partie, même sans entendre le défendeur.

Il est donc crucial pour le défendeur de se présenter ou de se faire représenter, car son absence peut entraîner une décision défavorable sans qu’il ait eu l’opportunité de défendre ses intérêts.

Quelles sont les conditions pour demander une expertise judiciaire en référé ?

L’article 145 du Code de procédure civile précise que « s’il existe un motif légitime d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé en référé ».

Pour qu’une demande d’expertise soit recevable, il faut donc :

1. **Un motif légitime** : Cela peut inclure la nécessité de prouver des faits avant un procès, ce qui est souvent le cas dans des litiges complexes où les preuves peuvent disparaître ou se dégrader.

2. **Un lien avec le litige** : Les faits à prouver doivent être directement liés à la solution du litige envisagé.

3. **Une demande formée par un intéressé** : Cela signifie que toute personne ayant un intérêt à la résolution du litige peut demander une expertise.

Dans le cas présent, la société Réseau Ouest a justifié sa demande d’expertise en raison des dommages causés par la chute d’un pylône, ce qui constitue un motif légitime pour établir la preuve des faits avant le procès.

Comment se déroule la mission d’un expert judiciaire ?

L’article 265 du Code de procédure civile confie à la juridiction qui ordonne l’expertise le soin de déterminer les chefs de sa mission. La juridiction dispose d’un pouvoir souverain pour définir les modalités de l’expertise.

En pratique, l’expert doit :

– Se rendre sur les lieux concernés et convoquer les parties.
– Recueillir tous les documents et pièces utiles à sa mission.
– Décrire les travaux effectués et vérifier leur conformité aux règles de l’art.
– Identifier les causes des désordres et évaluer leur impact sur la solidité de l’ouvrage.

L’expert doit également fournir un rapport détaillé de ses constatations, qui sera déposé au greffe du tribunal. Ce rapport doit être communiqué aux parties, leur permettant de formuler des observations avant la rédaction du rapport définitif.

Ainsi, la mission de l’expert est cruciale pour établir les faits et les responsabilités dans le cadre d’un litige.

Quelles sont les conditions pour obtenir une provision ad litem ?

Selon l’article 835 alinéa 2 du Code de procédure civile, le Président du tribunal judiciaire, statuant comme juge des référés, peut accorder une provision au créancier dès lors que l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Pour qu’une provision soit accordée, il faut :

1. **Une obligation claire** : L’obligation de paiement doit être clairement établie et non contestée.

2. **Absence de contestation sérieuse** : Si le débiteur soulève des contestations qui semblent fondées, la demande de provision peut être rejetée.

Dans le cas présent, la société Réseau Ouest a demandé une provision de 10 000 € pour couvrir les frais d’expertise, et les sociétés défenderesses ont reconnu leur responsabilité, ce qui a conduit à l’octroi d’une provision de 2 000 €.

Quelles sont les conséquences de la demande d’expertise sur la prescription des recours ?

La jurisprudence, notamment l’arrêt de la Cour de cassation du 14 décembre 2022 (Civ. 3ème, n° 21-21305), établit que l’assignation en référé aux fins d’expertise, si elle n’est pas accompagnée d’une demande de paiement ou d’exécution en nature, ne fait pas courir la prescription des recours en garantie des constructeurs.

Cela signifie que si une partie demande une expertise sans demander de paiement, cela n’interrompt pas le délai de prescription pour d’autres actions en justice.

Dans le cas présent, les sociétés CRAMA et Jouanolle & fils ont tenté de s’associer à la demande d’expertise pour interrompre la prescription, mais leur demande a été rejetée car le délai de prescription n’avait pas encore commencé à courir.

Quelles sont les obligations de l’expert en matière de rapport ?

L’expert a l’obligation de dresser un rapport de ses opérations, qui doit être déposé au greffe du tribunal dans un délai déterminé, généralement de huit mois à compter de l’avis de consignation.

Ce rapport doit inclure :

– Un état prévisionnel détaillé des frais et honoraires.
– Une description des travaux effectués et leur conformité.
– Une analyse des causes des désordres et leur impact sur l’ouvrage.

Avant de finaliser son rapport, l’expert doit transmettre un pré-rapport aux parties, leur permettant de formuler des observations. L’expert est tenu de répondre à ces observations dans son rapport définitif.

Cette procédure garantit la transparence et l’équité dans le processus d’expertise.

Quelles sont les conséquences des dépens dans une procédure d’expertise ?

L’article 491 du Code de procédure civile stipule que le juge des référés « statue sur les dépens ». Cela signifie que les frais liés à la procédure, y compris les frais d’expertise, sont à la charge de la partie perdante.

Dans le cadre d’une expertise, la partie défenderesse ne peut pas être considérée comme perdante simplement parce qu’elle a été assignée à une expertise.

Ainsi, dans le cas présent, les sociétés Jouanolle & fils et CRAMA, qui ont succombé dans leur demande, ont été condamnées in solidum aux entiers dépens de l’instance.

Cela souligne l’importance de la gestion des coûts dans les procédures judiciaires.

Quelles sont les implications de la loi Badinter sur les dommages matériels ?

La loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, souvent appelée loi Badinter, vise à protéger les victimes d’accidents de la circulation. Elle établit un régime de responsabilité civile pour les dommages causés par des véhicules terrestres à moteur.

Cependant, la jurisprudence a précisé que cette loi ne s’applique pas aux dommages matériels dans certaines situations. Dans le cas présent, les sociétés défenderesses ont contesté l’application de la loi Badinter, arguant qu’elle ne s’appliquait pas aux dommages matériels.

La société Réseau Ouest a répliqué en soutenant que la loi Badinter s’appliquait également aux personnes morales victimes de dommages matériels. Cette question de l’application de la loi Badinter est cruciale pour déterminer la responsabilité et les obligations de paiement.

Quelles sont les conséquences d’une demande de complément de mission d’expertise ?

La demande de complément de mission d’expertise doit être justifiée par un intérêt légitime. L’article 265 du Code de procédure civile confie à la juridiction le soin de déterminer les chefs de mission de l’expert.

Dans le cas présent, les sociétés Jouanolle & fils et CRAMA ont demandé un complément de mission, arguant que le rapport d’expertise amiable contenait des incohérences. Cependant, la société Réseau Ouest a contesté cette demande, affirmant que les éléments demandés étaient déjà couverts par la mission initiale.

Le tribunal a finalement rejeté la demande de complément de mission, considérant qu’elle était sans objet, car les éléments demandés étaient déjà intégrés dans la mission de l’expert. Cela souligne l’importance de la clarté et de la précision dans les demandes d’expertise.

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