Évaluation des conditions d’expertise dans le cadre d’un préjudice corporel suite à un accident survenu en magasin : 10 Questions / Réponses juridiques

Résumé de cette affaire : Monsieur [X] [D] a assigné la SAS [Localité 5] DISTRIBUTION et la CPAM du Hainaut en référé pour obtenir une expertise judiciaire concernant son préjudice corporel suite à un accident survenu le 23 janvier 2023 dans le magasin LECLERC. Il a subi un traumatisme aux membres inférieurs et a été hospitalisé, entraînant un arrêt de travail. La SAS a contesté la demande, arguant d’un défaut d’intérêt légitime, tandis que la CPAM a fourni un état de ses débours. Le tribunal a ordonné une expertise médicale, désignant le docteur [O] [T] pour évaluer les lésions, les traitements, et les conséquences sur la vie de Monsieur [D]. L’expert devra examiner divers aspects du préjudice, y compris les soins, l’incapacité fonctionnelle, et les répercussions sur la vie professionnelle et personnelle. Les frais d’expertise seront avancés par le trésor public, et Monsieur [D] a été condamné aux dépens.

1. Quelles sont les conditions pour ordonner une expertise judiciaire en référé ?

Pour ordonner une expertise judiciaire en référé, il est nécessaire de se référer à l’article 145 du Code de procédure civile. Cet article stipule que les mesures d’instruction peuvent être ordonnées en référé s’il existe un motif légitime d’établir, avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige.

Ainsi, une mesure d’expertise peut être ordonnée si :

– L’action éventuelle au fond n’est pas manifestement vouée à l’échec.

– La mesure demandée est légalement admissible, utile et améliore la situation probatoire des parties.

– Elle ne porte pas atteinte aux intérêts légitimes du ou des défendeurs.

Il est également important de noter que les règles d’administration de la preuve devant le juge du fond, prévues par l’article 146, ne s’appliquent pas pour une demande d’expertise présentée devant le juge des référés.

2. Quelles sont les conséquences d’une expertise ordonnée en référé sur les dépens ?

L’article 491 alinéa 2 du Code de procédure civile précise que le juge des référés statue sur les dépens. Dans le cas où l’expertise est décidée dans le seul intérêt de la demanderesse, aucune partie ne peut être considérée comme perdante à ce stade de la procédure.

Ainsi, dans l’affaire en question, Monsieur [D] a été condamné à supporter seul les dépens, car l’expertise a été ordonnée pour établir des faits en sa faveur. Il est essentiel de rappeler que cette décision n’a pas l’autorité de la chose jugée, et le juge du fond pourra éventuellement statuer différemment sur les dépens lors d’une saisine ultérieure.

3. Quelles sont les missions de l’expert désigné par le juge des référés ?

Le juge des référés a désigné un expert, le docteur [O] [T], avec une mission précise. Cette mission inclut plusieurs étapes essentielles :

– Se faire communiquer tous documents utiles à sa mission par le demandeur ou son représentant légal.

– Fournir des renseignements sur l’identité de la partie demanderesse, ses conditions d’activités professionnelles et de vie.

– Recueillir toutes informations orales ou écrites des parties, y compris le dossier médical.

– Décrire en détail les lésions initiales, les modalités du traitement, et évaluer les soins nécessaires.

– Analyser l’imputabilité entre les faits dommageables, les lésions initiales et les séquelles invoquées.

– Évaluer le préjudice esthétique et les souffrances physiques, psychiques ou morales endurées.

Ces missions visent à établir un rapport détaillé sur l’état de santé de la partie demanderesse et les conséquences de l’accident.

4. Quelles sont les obligations des parties envers l’expert ?

Les parties ont plusieurs obligations envers l’expert désigné. Elles doivent :

– Communiquer tous les documents de toute nature qu’elles adresseront à l’expert pour établir le bien-fondé de leurs prétentions.

– Permettre à l’expert de se faire communiquer tous les documents médicaux qu’il jugerait utiles, notamment par les médecins et les établissements hospitaliers concernés.

– S’assurer que l’expert ne communique pas directement aux parties les documents médicaux obtenus sans l’accord de la partie demanderesse.

Ces obligations garantissent que l’expert dispose de toutes les informations nécessaires pour mener à bien sa mission.

5. Quelle est la durée de la mission de l’expert et comment se déroule-t-elle ?

L’expert doit déposer son rapport en un exemplaire original au greffe du tribunal dans un délai de quatre mois à compter de l’avis de consignation, sauf prorogation de ce délai.

Dès réception de l’avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, l’expert convoquera les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l’expiration d’un délai de deux mois.

Cette réunion permettra à l’expert de présenter la méthodologie envisagée, d’interroger les parties et d’établir un calendrier de ses opérations. À l’issue de cette réunion, un compte-rendu sera adressé aux parties et au juge chargé du contrôle.

6. Quelles sont les conséquences d’un état antérieur sur l’expertise ?

Lors de l’expertise, si un état antérieur est identifié, l’expert doit :

– Fixer la part imputable à l’état antérieur et celle imputable au fait dommageable.

– Si aucun déficit fonctionnel antérieur n’est constaté, il devra déterminer si le traumatisme a été la cause déclenchante du déficit fonctionnel actuel.

Cette analyse est cruciale pour évaluer l’impact de l’accident sur la santé de la partie demanderesse et pour déterminer les responsabilités.

7. Comment l’expert évalue-t-il le préjudice esthétique ?

L’expert doit donner un avis sur l’existence, la nature et l’importance du préjudice esthétique. Cette évaluation se fait indépendamment de l’éventuelle atteinte fonctionnelle prise en compte au titre du déficit.

L’expert doit préciser si le préjudice est temporaire ou définitif et l’évaluer selon une échelle habituelle de sept degrés. Cette évaluation est essentielle pour déterminer les compensations financières dues à la partie demanderesse.

8. Quelles sont les implications de l’expertise sur les activités professionnelles de la partie demanderesse ?

L’expert doit recueillir les doléances de la partie demanderesse concernant l’impact de l’accident sur ses activités professionnelles. Il analysera les séquelles retenues et précisera les activités rendues plus difficiles ou impossibles.

Il devra également déterminer si un changement de poste ou d’emploi est lié aux séquelles. Cette analyse est cruciale pour évaluer les pertes de revenus et les impacts sur la carrière de la partie demanderesse.

9. Quelles sont les obligations de l’expert en matière de communication des résultats ?

L’expert doit adresser aux parties une note de synthèse dans laquelle il rappellera l’ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et proposera une réponse à chacune des questions posées par la juridiction.

Il doit également fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations, conformément à l’article 276 du Code de procédure civile.

Cette communication est essentielle pour garantir la transparence et permettre aux parties de réagir aux conclusions de l’expert.

10. Quelles sont les conséquences de la décision du juge des référés ?

La décision du juge des référés, qui ordonne une expertise, a plusieurs conséquences. Elle est exécutoire provisoirement, ce qui signifie qu’elle peut être mise en œuvre immédiatement, même si elle peut faire l’objet d’un appel.

De plus, cette décision n’a pas l’autorité de la chose jugée, ce qui permet au juge du fond de statuer différemment sur les questions soulevées lors d’une éventuelle saisine ultérieure.

Cela souligne l’importance de l’expertise comme étape préliminaire dans le processus judiciaire, permettant d’éclairer le juge sur des faits techniques ou médicaux.