Deal Memo : quelle valeur juridique ?

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Un distributeur audiovisuel ayant signé un Deal Memo avec un producteur a été condamné pour n’avoir pas respecté les dispositions contractuelles du Deal Memo. Cette décision reconnaît pleinement la valeur juridique du Deal Memo en tant que contrat.

Deal Memo contraignant

Une société de production audiovisuelle a soutenu avec succès le « deal mémo » ne constitue pas un contrat mais « un simple intérêt pour une affaire » qui en outre est devenu caduc du fait qu’une de ses conditions essentielles, à savoir la signature au plus tard le 31 mars 2011 d’un contrat de distribution, n’a pas été remplie.

Le Deal memo précis, un contrat

L’article 1101 du Code civil énonce : « Le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent, envers une ou plusieurs autres à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose ». Le deal memo en cause portait sur un accord par lequel une société confiait à une autre société la distribution exclusive cinématographique commerciale et non commerciale, de vidéogramme, et de la vidéo à la demande, en tous formats et sur tous supports, d’une œuvre audiovisuelle (le film SHANGHAI-BELLEVILLE). Le deal memo définissait le territoire concerné par l’accord, la durée de la licence d’exploitation concédée, la répartition des recettes entre les parties selon les différents types d’exploitation, ainsi que l’imputation des frais de distribution. Le deal memo prévoyait également le montant et les étapes du paiement du minimum garanti dû au producteur. Il définissait précisément le matériel que le producteur devait livrer au distributeur et énonçait les modalités de reddition des comptes.

Le contenu de ce document manifestait clairement l’accord de la volonté des parties pour créer des obligations réciproques en vue de la distribution du film. Il n’est dès lors pas contestable que malgré l’appellation ambiguë « deal mémo », il s’agissait bien d’un contrat, comme l’indiquait du reste explicitement la clause qui énonçait « Le présent contrat sera régi et interprété conformément au droit français ». En outre, il définissait même si c’est sous une forme simplifiée, l’essentiel des rapports qui, habituellement, lient un producteur à un distributeur. En conséquence, le « deal mémo » n’était pas la manifestation d’une intention mais un contrat pleinement opposable. Le « Deal mémo » comportait des engagements réciproques détaillés qui obligeaient les parties.

Rupture fautive de Deal Memo

L’article 1134 du Code civil dispose « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel pour les causes que la loi autorise. » L’article 1184 de ce même code prévoit que : « La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas ou l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts. La résolution doit être demandée en justice, et il peut âtre accordé au défendeur un délai selon les circonstances. »

La partie qui avait signé le Deal memo ne pouvait donc se désengager unilatéralement sans engager sa responsabilité contractuelle (le Deal mémo ne contenait aucune clause de résiliation ni aucune clause de caducité).

Peu importe, dès lors, les motifs que la société à l’origine de la rupture invoquait pour se justifier de ne pas avoir signé le contrat de distribution. En réalité, la société avait décidé de rompre les relations contractuelles à la suite du retard pris dans l’achèvement du film et de divergence d’appréciation sur le montage voulu par la réalisatrice et ce dans le but de retirer son engagement financier. Il était donc manifeste que la société à l’origine de la rupture du Deal memo a rompu unilatéralement la convention pour échapper au respect de ses engagements et a ainsi commis une faute engageant sa responsabilité contractuelle.

Préjudice du producteur

La société fautive a été condamnée à payer au producteur la somme de 30.000 euros en réparation du préjudice matériel.

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