Pour empêcher qu’une œuvre ne tombe dans le domaine public, les titulaires de droits n’ont pas la faculté de recourir au droit des marques (par exemple par le dépôt à titre de marque du nom de personnages). En application du principe général de droit selon lequel la fraude corrompt toute chose, un dépôt à titre de marque du nom des personnages d’une œuvre tombée dans le domaine public, est nul s’il ne se cantonne pas à certaines classes de marques et vise à nuire aux autres acteurs du marché concerné.
Dans cette affaire, le spectre étendu des produits et services visés lors du dépôt, allié à la généralité du signe représentant la marque et au fait qu’il s’agit d’une marque verbale, visait manifestement à empêcher quiconque d’adapter l’oeuvre de Louis Forton (Les Pieds Nickelés, 1908, Bibi Fricotin, 1928) dans tous les domaines de l’édition, de la culture et de l’art, y compris de manière audiovisuelle ou en ligne, et à accorder au déposant un monopole d’exploitation d’une oeuvre qui aurait pourtant dû être accessible à tous puisque tombée dans le domaine public.
Toutefois, aucune disposition du Code de la propriété intellectuelle n’interdit à l’auteur d’une oeuvre littéraire ou à ses ayants droit de déposer de bonne foi, en tant que marque, soit le titre de cette oeuvre, soit le nom d’un ou de plusieurs personnages y apparaissant, soit encore, comme c’est le cas en l’espèce, la désignation du groupe formé par les trois personnages principaux. En outre, la liberté d’expression trouve sa limite dans le champ d’application des droits d’autrui, de sorte qu’aucune atteinte à l’article 10 de la Convention européenne ne peut résulter du dépôt de ces marques.
A noter qu’en matière d’oeuvres tombées dans le domaine public, une disposition particulière trouve toujours à s’appliquer. L’article L. 112-4 du Code de la propriété intellectuelle dispose que « Nul ne peut, même si l’oeuvre n’est plus protégée dans les termes des articles L. 123-1 à L. 123-3, utiliser ce titre pour individualiser une oeuvre du même genre, dans les conditions susceptibles de créer une confusion ».
Mots clés : Domaine public – Droits d’auteur
Thème : Domaine public – Droits d’auteur
A propos de cette jurisprudence : juridiction : Tribunal de Grande instance de Paris | Date : 1 juillet 2011 | Pays : France