Contrefaçon de plans d’aménagement extérieurs

Notez ce point juridique

Aux termes de l’article L112-2 12°, sont considérées comme oeuvres de l’esprit, notamment, les “plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture et aux sciences”.

S’approprier purement et simplement des plans d’aménagement originaux proposés par une société pour faire réaliser les travaux correspondants par une société concurrente est une contrefaçon.

En l’espèce, la société invoque les caractères suivants pour justifier l’originalité de sa création :

– une structuration originale selon une ligne directrice diagonale, non parallèle à la maison, créant une démarcation nette avec le bâti existant,

– l’insertion d’un bac de plantation surélevé à côté de la piscine conférant un aspect “cocon” à cet espace, protégé de l’extérieur et confortable,

– une différenciation nette des deux terrasses par l’utilisation de revêtements de sol distincts et par le choix de forme disparates (carré pour l’une et en escalier pour l’autre) afin de créer des ambiances différentes (détente d’un côté et repas de l’autre),

– la création d’escaliers et de bacs de plantations positionnés de façon harmonieuse pour gérer les différences de niveau existant dans le jardin.

Ces différentes caractéristiques se retrouvent dans le plan valant avant-projet que la société JARDIN DECOR a présenté à ses clients. Elles confèrent une véritable singularité au projet proposé en créant, au sein du jardin à aménager, plusieurs espaces de vie bien différenciés dédiés à des activités distinctes (repas, détente, repos) avec, pour chacun, une esthétique particulière résidant dans le choix de matériaux différenciés et/ou l’emplacement des plantations et autres éléments décoratifs.

Ce faisant, ce plan valant avant-projet révèle de réels choix créatifs et partis pris esthétiques qui ne sont pas dictés par les seules contraintes techniques.

En vertu de l’article L111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial, qui sont déterminés par les livres I et III du présent code.

L’article L112-1 précise que les dispositions du présent code protègent les droits des auteurs sur toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination.

Il s’en déduit qu’une oeuvre peut bénéficier d’une protection au titre du droit d’auteur quels que soient le genre auquel elle appartient, sa forme d’expression ou sa destination, dès lors qu’elle présente un caractère original, fruit de l’effort créateur de son auteur, expression de ses choix créatifs et reflet de sa personnalité.

Résumé de l’affaire

L’affaire concerne un litige entre la société JARDIN DECOR et Madame [M] [O] et Monsieur [E] [N]. La société JARDIN DECOR accuse ces derniers d’avoir utilisé son plan d’aménagement sans autorisation pour réaliser des travaux avec une autre société, ce qui constituerait une contrefaçon de droits d’auteur et des agissements parasitaires. La société réclame des dommages et intérêts pour le manque à gagner, le préjudice moral et l’économie réalisée indûment. De leur côté, Madame [O] et Monsieur [N] contestent toute contrefaçon, affirmant que le plan litigieux n’est pas original et qu’ils ont conçu leur propre visuel pour les travaux. Ils soutiennent également qu’ils n’ont pas causé de préjudice à la société JARDIN DECOR, qui n’a pas respecté l’enveloppe budgétaire initialement prévue. L’affaire a été plaidée en audience et est en attente du délibéré du tribunal.

Les points essentiels

Sur la contrefaçon de droits d’auteur :

En vertu de l’article L111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial, qui sont déterminés par les livres I et III du présent code.

L’article L112-1 précise que les dispositions du présent code protègent les droits des auteurs sur toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination.

Aux termes de l’article L112-2 12°, sont considérées comme oeuvres de l’esprit, notamment, les “plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture et aux sciences”.

Il s’en déduit qu’une oeuvre peut bénéficier d’une protection au titre du droit d’auteur quels que soient le genre auquel elle appartient, sa forme d’expression ou sa destination, dès lors qu’elle présente un caractère original, fruit de l’effort créateur de son auteur, expression de ses choix créatifs et reflet de sa personnalité.

C’est à la société JARDIN DECOR de rapporter la preuve de l’originalité du plan litigieux.

En l’espèce, la société invoque les caractères suivants pour justifier l’originalité de sa création :
– une structuration originale selon une ligne directrice diagonale, non parallèle à la maison, créant une démarcation nette avec le bâti existant,
– l’insertion d’un bac de plantation surélevé à côté de la piscine conférant un aspect “cocon” à cet espace, protégé de l’extérieur et confortable,
– une différenciation nette des deux terrasses par l’utilisation de revêtements de sol distincts et par le choix de forme disparates (carré pour l’une et en escalier pour l’autre) afin de créer des ambiances différentes (détente d’un côté et repas de l’autre),
– la création d’escaliers et de bacs de plantations positionnés de façon harmonieuse pour gérer les différences de niveau existant das le jardin.

Effectivement, ces différentes caractéristiques se retrouvent dans le plan valant avant-projet que la société JARDIN DECOR a présenté à Madame [O] et Monsieur [N] (sa pièce 5). Elles confèrent une véritable singularité au projet proposé en créant, au sein du jardin à aménager, plusieurs espaces de vie bien différenciés dédiés à des activités distinctes (repas, détente, repos) avec, pour chacun, une esthétique particulière résidant dans le choix de matériaux différenciés et/ou l’emplacement des plantations et autres éléments décoratifs.

Ce faisant, ce plan valant avant-projet révèle de réels choix créatifs et partis pris esthétiques qui, contrairement aux affirmations de Madame [O] et Monsieur [N], ne sont pas dictés par les seules contraintes techniques.

Si ces derniers affirment que l’avant-projet ne fait que reprendre leurs instructions, ils ne le démontrent nullement. Ils ne fournissent aucune pièce à l’appui de leurs allégations.

La seule pièce utile est un courriel adressé par Monsieur [N] à la société JARDIN DECOR le 24 avril 2020 (pièce 4 de la société JARDIN DECOR) ainsi libellé :
“(…) Pour faire suite à nos échanges téléphonique tu trouveras ci-joint quelques éléments te permettant d’avoir une approche sur notre projet autour de la cuisine d’été.

Objet de la demande :
– Traiter un aménagement paysagé sur l’angle Sud de la parcelle.
– Plantations fruitières, type framboisier…
– Plantations exotiques, cactus, palmier…
– Un petit coin jardinière pour plantes aromatiques, tomates cerise, fraises…

– Faire une proposition pour la mise en place d’un arrosage automatique sur l’ensemble de la parcelle façade avant comprise.

La piscine (d’un format d’environ 4m/8m) n’est pas un projet et son implantation n’est pas arrêtée mais le fait d’avoir une réflexion sur une éventuelle future mise en place est importante. De manière à réfléchir un projet global sur l’arrière de la maison maintenant que le devant à été magnifiquement réalisé 🙂

Nous comptons sur tes conseils et bonnes idées… (…)” (sic).

Les seules indications portées dans ce courriel sont très succinctes et ne portent pas sur les caractéristiques analysées ci-dessus. Ce courriel confirme au contraire que le projet de Madame [O] et Monsieur [N], lorsqu’ils ont sollicité la société JARDIN DECOR, n’était nullement abouti, mais uniquement à l’état de réflexion. L’idée même d’y intégrer une pisicine n’était pas encore arrêtée : a fortiori, son implantation ne pouvait pas l’être.

La structuration du jardin selon une ligne directrice diagonale, non parallèle à la maison, est une caractéristique qui se retrouve dans la partie avant de la propriété de Madame [O] et Monsieur [N].

Néanmoins, dès lors que la société JARDIN DECOR justifie être à l’origine de cet aménagement (ses pièces 2 et 3), la seule reprise de cette caractéristique pour l’arrière de la propriété n’est pas de nature à démentir l’effort créateur qu’elle a fourni.

En définitive, les observations qui précèdent sont suffisantes pour retenir le caractère original du plan valant avant-projet établi par la société JARDIN DECOR. Partant, ce plan est protégé par le droit d’auteur.

Sur la matérialité de la contrefaçon :

Selon l’article L122-4 du code de la propriété intellectuelle, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.

En l’espèce, pour la réalisation de leur projet d’aménagement par une société tierce, Madame [O] et Monsieur [N] ont utilisé un “visuel” qui est produit au débat (la pièce 10 de la société JARDIN DECOR).

Force est de constater que ce visuel reproduit à l’identique les caractéristiques reprises dans le plan valant avant-projet de la société JARDIN DECOR qui en font l’originalité.

Ce visuel est un calque parfait de cet avant-projet : les différents espaces imaginés par la société JARDIN DECOR y sont repris et implantés exactement aux mêmes endroits, avec les mêmes contrastes s’agissant du choix des matériaux.

La contrefaçon est avérée et doit être retenue. Reste à déterminer l’indemnisation à laquelle la société JARDIN DECOR peut prétendre.

Sur les préjudices subis :

En vertu de l’article L331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1° Les conséquences économiques négatives de l’atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l’atteinte aux droits.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.

En l’espèce, pour chiffrer son manque à gagner, la société JARDIN DECOR fait état de la marge nette correspondant au devis soumis le 13 novembre 2020 à Madame [O] et Monsieur [N] qu’elle évalue à la somme de 19 205,40 euros pour des travaux d’un coût total de 76 822,62 euros TTC.

Néanmoins, cette marge nette ne peut pas être considérée comme acquise à la société JARDIN DECOR, dès lors qu’à ce stade, le prix de sa prestation n’était pas définitivement arrêté et restait soumis à négociation en vertu du principe de liberté contractuelle.

Le manque à gagner tel qu’invoqué par la société JARDIN DECOR ne peut donc pas être considéré comme certain.

De plus, la société ne précise nullement la manière dont elle a calculé sa marge nette. Partant, elle ne met pas le tribunal en mesure de vérifier la réalité du manque à gagner invoqué.

Il faut donc rejeter la demande présentée de ce chef faute de preuve.

En revanche, le préjudice moral invoqué est avéré.

Il se déduit en effet des faits litigieux que Madame [O] et Monsieur [N] ont permis à un concurrent de la société JARDIN DECOR d’utiliser son travail de création.

Ce faisant, ils ont contribué à dévaloriser l’image et la réputation de la société JARDIN DECOR.

Il convient d’évaluer le préjudice moral subi par celle-ci à la somme de 2 000 euros.

Par ailleurs, en utilisant le plan établi par la société JARDIN DECOR pour la réalisation effective de leurs travaux par une société tierce, Madame [O] et Monsieur [N] ont réalisé une économie d’investissement en ne rémunérant pas le travail d’étude, de conception et, plus généralement, de création réalisé par ladite société.

Ce faisant, ils causent un préjudice patrimonial à la société JARDIN DECOR qu’il convient de réparer à hauteur de 2 250 euros, soit un montant équivalent au bénéfice réalisé par Madame [O] et Monsieur [N].

A l’inverse, si ces derniers invoquent une attitude fautive de la société JARDIN DECOR et un préjudice moral, ils n’en rapportent nullement la preuve.

Leur demande de dommages et intérêts doit être rejetée.

Sur les demandes accessoires :

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, Madame [O] et Monsieur [N], parties perdantes, doivent supporter les dépens.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société JARDIN DECOR les frais non compris dans les dépens qu’elle a été contrainte d’exposer pour la défense de ses intérêts en justice. En compensation partielle, il convient de lui allouer une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire et aucune circonstance ne justifie de déroger à ce principe.

Les montants alloués dans cette affaire: – 2 000 euros en réparation du préjudice moral subi
– 2 250 euros en réparation de l’économie indûment réalisée
– 5 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

Réglementation applicable

– Code de la propriété intellectuelle

Article L111-1 : L’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial, qui sont déterminés par les livres I et III du présent code.

Article L112-1 : Les dispositions du présent code protègent les droits des auteurs sur toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination.

Article L112-2 12° : Sont considérées comme œuvres de l’esprit, notamment, les “plans, croquis et ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture et aux sciences”.

Article L122-4 : Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.

Article L331-1-3 : Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement : 1° Les conséquences économiques négatives de l’atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ; 2° Le préjudice moral causé à cette dernière ; 3° Et les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l’atteinte aux droits. Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.

– Code de procédure civile

Article 696 : Les dépens sont constitués par les frais de justice, taxés et liquidés par le juge.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Maître Pierre LANGLAIS de la SELARL SOLVOXIA AVOCATS
– Maître Gilles DAUGAN de la SCP DEPASSE, DAUGAN, QUESNEL, DEMAY

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