Cesser de faire appel à un prestataire s’analyse bien comme une rupture partielle de relations commerciales.
En la cause, la société Afibel ne pouvait se dispenser de notifier à son partenaire commercial, la société Danieli (studio photo), son intention de rupture au moins partielle de la relation commerciale et ce avec un délai raisonnable. L’article L.442-1 II du code de commerce dispose qu’engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, en l’absence d’un préavis écrit qui tienne compte notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou aux accords interprofessionnels. Ces dispositions ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d’inexécution par l’autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure. Le délai de préavis doit s’entendre du temps nécessaire à l’entreprise délaissée pour se réorganiser en fonction de la durée, de la nature et des spécificités de la relation commerciale établie, du produit ou du service concerné. Il résulte de l’article L. 442-1 II du code de commerce que le préjudice principal résultant du caractère brutal de la rupture est constitué par la perte de la marge dont la victime pouvait escompter bénéficier pendant la durée du préavis qui aurait dû lui être accordé. La référence à retenir est la marge sur coûts variables, définie comme la différence entre le chiffre d’affaires dont la victime a été privée sous déduction des charges qui n’ont pas été supportées du fait de la baisse d’activité résultant de la rupture |
→ Résumé de l’affaireL’affaire oppose la société Danieli, un studio de photographie, à la société Afibel, une entreprise de vente à distance d’articles de mode. La relation commerciale entre les deux parties a débuté en 1990, avec la réalisation de photographies pour les catalogues d’Afibel. En 2008, Afibel a notifié à Danieli la fin de leur collaboration, mais un nouveau contrat a été signé en 2009. Cependant, en 2019, aucune prestation n’a été effectuée par Danieli pour Afibel, ce qui a conduit à un litige.
Le tribunal de commerce de Lille a jugé en faveur d’Afibel, déboutant Danieli de ses demandes de dommages-intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale. Danieli a interjeté appel, demandant à la Cour de confirmer certains points du jugement et d’infirmer d’autres. Afibel, de son côté, demande à la Cour de confirmer le jugement du tribunal de commerce. Les parties s’opposent sur la responsabilité de la rupture de la relation commerciale, les demandes de dommages-intérêts et les frais de justice. La décision finale de la Cour reste à être rendue. |
→ Les points essentielsSur l’intérêt à agir de la société DanieliLa société Afibel conteste l’intérêt à agir de la société Danieli dans le cadre de la rupture de leur relation commerciale établie. Cependant, la Cour confirme que la société Danieli dispose bien d’un intérêt légitime au succès de ses prétentions, malgré l’absence de démonstration préalable du bien-fondé de l’action. Sur la rupture de la relation commercialeLes parties s’opposent sur la rupture de la relation commerciale établie entre elles. La Cour confirme que la relation commerciale est établie depuis 1990 et que la rupture intervenue en 2008 n’a pas interrompu les relations. De plus, la société Afibel est jugée responsable de la rupture brutale de la relation commerciale. Sur la durée du préavisLa société Danieli réclame un préavis de 36 mois compte tenu de la longue relation commerciale entre les parties. Cependant, la Cour estime qu’un préavis de 12 mois était suffisant pour rompre la relation commerciale établie. Sur l’évaluation du préjudice économiqueLa société Danieli réclame des dommages-intérêts pour le préjudice économique subi suite à la rupture brutale de la relation commerciale. La Cour évalue le préjudice à 41 708 euros, correspondant à la perte de marge sur coûts variables. Sur le préjudice moralLa société Danieli réclame des dommages-intérêts pour préjudice moral, mais la Cour estime que les dispositions légales visent à réparer la brutalité de la rupture et non le préjudice moral. Sur les demandes de la société Danieli visant à sanctionner les discours diffamatoires de la société AfibelLa société Danieli réclame la suppression des accusations diffamatoires de la société Afibel. La Cour confirme que la demande a été formulée dans les délais et déboute la société Afibel de ses demandes à ce titre. Sur la demande de la société Afibel de dommages-intérêts pour abus de droit d’ester en justiceLa demande de la société Afibel de dommages-intérêts pour abus de droit d’ester en justice est rejetée par la Cour. Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civileLa société Afibel est condamnée aux dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’à verser la somme de 8 000 euros à la société Danieli au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Les montants alloués dans cette affaire: – Somme allouée à la société Danieli : 41 708 euros en réparation du préjudice économique résultant de la rupture brutale de la relation commerciale établie
– Somme allouée à la société Afibel : 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile – Somme allouée à la société Afibel pour les dépens de première instance et d’appel : montant non spécifié – Somme allouée à la société Afibel au titre de l’article 700 du code de procédure civile : 5 000 euros |
→ Réglementation applicable– Code de procédure civile
– Code de commerce – Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse Article du Code de procédure civile cité : Article du Code de commerce cité : Article de la Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse cité : |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Anne Grappotte-Benetreau de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU
– Me Sarah Madi – Me Frédéric Ingold de la SELARL INGOLD & THOMAS – Me Jean-Louis Lagarde |
→ Mots clefs associés & définitions– Intérêt à agir
– Relation commerciale établie – Rupture brutale – Préavis écrit – Imputabilité de la rupture – Durée du préavis – Préjudice économique – Marge sur coûts variables – Préjudice moral – Discours diffamatoires – Abus de droit d’ester en justice – Dépens – Article 700 du code de procédure civile – Intérêt à agir : La légitimité d’une partie à engager une action en justice.
– Relation commerciale établie : Une relation entre deux parties dans le cadre d’activités commerciales. – Rupture brutale : La cessation soudaine et unilatérale d’une relation commerciale établie. – Préavis écrit : Notification écrite préalable à la fin d’un contrat ou d’une relation commerciale. – Imputabilité de la rupture : La responsabilité de la partie ayant mis fin à la relation commerciale. – Durée du préavis : La période de temps entre la notification de la fin d’un contrat et sa cessation effective. – Préjudice économique : Les dommages financiers subis par une partie à la suite d’une rupture brutale. – Marge sur coûts variables : La différence entre le prix de vente d’un produit et ses coûts variables de production. – Préjudice moral : Les dommages non financiers subis par une partie, tels que la réputation ou le bien-être psychologique. – Discours diffamatoires : Des propos mensongers ou diffamatoires tenus à l’encontre d’une personne ou d’une entreprise. – Abus de droit d’ester en justice : L’utilisation abusive du droit d’engager des actions en justice. – Dépens : Les frais engagés lors d’une procédure judiciaire, tels que les honoraires d’avocat ou les frais de justice. – Article 700 du code de procédure civile : Un article permettant au juge de condamner la partie perdante à verser une somme d’argent à l’autre partie pour ses frais de justice. |