Les effets du pourvoi en cassation

Notez ce point juridique

Il résulte des articles 624 et 631 à 633 du code de procédure civile, que la cassation qui atteint un chef de dispositif n’en laisse rien subsister, quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation, et que par l’effet de la cassation partielle intervenue, aucun des motifs de fait ou de droit ayant justifié la disposition annulée ne subsiste, de sorte que la cause et les parties sont remises de ce chef dans le même état où elles se trouvaient avant l’arrêt précédemment déféré.

Dans la limite des chefs atteints par la cassation, la juridiction de renvoi est investie de la connaissance de l’entier litige dans tous ses éléments de fait et de droit, de sorte que la cour de renvoi est tenue d’examiner tous les moyens soulevés devant elle, quels que fussent le ou les moyens qui ont entraîné la cassation, précision étant également faite que la cour de renvoi n’est pas liée par les motifs de l’arrêt cassé.

Devant la cour d’appel de renvoi après cassation, les prétentions nouvelles sont recevables si elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique diffère, ou si elles en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

Il appartient dès lors à la cour d’appel de renvoi de rechercher, au besoin d’office, si les demandes qui lui sont soumises ne tendent pas aux mêmes fins que la demande initiale sur laquelle il avait été statué par le chef de l’arrêt atteint par la cassation ou n’en constituent pas l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

Enfin, les parties disposent de la liberté de formuler de nouveaux moyens devant la cour d’appel, à l’appui de leurs prétentions.

Résumé de l’affaire

L’affaire concerne un litige entre Mme [F] et M. [S] d’une part, la Macif et Swisslife d’autre part, suite au vol et à l’incendie d’un véhicule BMW X5 financé par un contrat de location avec option d’achat. La Macif a refusé la prise en charge du sinistre en raison d’une déchéance de garantie, ce qui a conduit à des poursuites pénales pour tentative d’escroquerie contre M. [S]. Après plusieurs jugements, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la cour d’appel d’Amiens et renvoyé l’affaire devant la cour d’appel de Douai. Les parties ont formulé des demandes contradictoires, notamment sur la validité de la clause de déchéance de garantie, la connaissance des conditions générales du contrat par M. [S], et la responsabilité de Swisslife dans l’indemnisation du sinistre. La décision finale reviendra à la cour d’appel de Douai.

Les points essentiels

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’effet dévolutif de l’appel devant la cour de renvoi est exclusivement appréciée au regard de la saisine de la cour d’appel par la cassation prononcée par la Cour de cassation et de la déclaration d’appel initiale.

S’agissant de l’étendue de la cassation

La mention « sauf sur ce point » ne renvoie pas à l’absence de mise hors de cause de la Macif et de Swisslife, laquelle n’a pas été prononcée au fond par la Cour de cassation, mais seulement au visa de l’article 625 du code de procédure civile dès lors que la présence de ces assureurs est nécessaire devant la cour de renvoi. En réalité, le point exclu de la cassation concerne la seule condamnation de Mme [F] à payer à la Macif la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts. En revanche, à l’égard de M. [S], la cassation est étendue à ce chef en considération de son lien de dépendance avec les chefs ayant été cassés sur son pourvoi.

Si M. [S] a formé appel de tous les chefs du dispositif du jugement critiqué

Il ne formule toutefois devant la cour de renvoi aucune demande de réformation du jugement en ce qu’il l’a également condamné à payer à la Macif une somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral. La présente cour de renvoi n’est ainsi saisie par M. [S] d’aucune demande de réformation de ce chef.

Sur l’irrecevabilité de demandes nouvelles

M. [S] demande de juger irrecevables les demandes de la Macif, « tendant à faire juger qu’il n’apporte pas la preuve de l’étendue de la garantie due par la Macif, ou encore que la déclaration de sinistre de M. [S] doit être considérée comme inopposable ». Il résulte des articles 624 et 631 à 633 du code de procédure civile que la cassation qui atteint un chef de dispositif n’en laisse rien subsister, quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation, et que par l’effet de la cassation partielle intervenue, aucun des motifs de fait ou de droit ayant justifié la disposition annulée ne subsiste, de sorte que la cause et les parties sont remises de ce chef dans le même état où elles se trouvaient avant l’arrêt précédemment déféré.

Sur le retrait de passages dans les conclusions de la Macif

L’article 41 alinéa 4 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse dispose que « ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux ». Ces dispositions, qui sont d’ordre public, trouvent leur fondement dans la sauvegarde des droits de la défense.

Sur la garantie de la Macif

Si, conformément à l’article 1315 du code civil, devenu l’article 1353 alinéa 1 depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, il appartient d’abord à l’assuré d’établir l’existence du sinistre, objet du contrat, donc de prouver que les circonstances et les conséquences rentrent dans le champ de la garantie et, le cas échéant, que la ou les conditions de cette garantie sont réunies, c’est à l’assureur, qui entend ensuite s’exonérer de son obligation de garantie, de rapporter la preuve, conformément à l’alinéa 2 du même article, de ce que le sinistre tombe sous le coup d’une clause d’exclusions de risque ou d’une clause de déchéance du droit à indemnisation.

Sur l’absence de preuve des conditions de garantie par M. [S]

La Macif invoque « incidemment » l’absence de production par M. [S] d’un document contractuel qui permettrait de « déterminer l’étendue de sa couverture du litige, et partant de sa demande indemnitaire », pour prétendre que le rejet des demandes indemnitaires formées à son encontre s’impose.

Les montants alloués dans cette affaire: – La Macif est condamnée à payer à M. [S] la somme de 72 994,50 euros
– La Macif est condamnée à payer à M. [S] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
– Les dépens de première instance et d’appel sont à la charge de la Macif
– La distraction des dépens est autorisée au profit de l’avocat de M. [S]

Réglementation applicable

– Code des assurances
– Code de procédure civile
– Code civil

Article L. 112-2 du code des assurances:
« Les dispositions des articles L. 112-1 et L. 122-4 du code des assurances, pour avoir rejeté la demande d’exécution du contrat en retenant la mauvaise foi de M. [S] sur le principe général « la fraude corrompt tout », alors qu’elle retenait par ailleurs que la Macif ne démontrait pas, en l’absence de production des conditions générales du contrat signées par l’assuré ou d’un renvoi à celles-ci dans les conditions particulières, que ce dernier avait eu connaissance, avant le sinistre, de la clause de déchéance de garantie et qu’il l’avait acceptée, et que l’assureur ne pouvait l’opposer à M. [S] et à Mme [F] »

Article L. 122-4 du code des assurances:
« Les dispositions des articles L. 112-1 et L. 122-4 du code des assurances, pour avoir rejeté la demande d’exécution du contrat en retenant la mauvaise foi de M. [S] sur le principe général « la fraude corrompt tout », alors qu’elle retenait par ailleurs que la Macif ne démontrait pas, en l’absence de production des conditions générales du contrat signées par l’assuré ou d’un renvoi à celles-ci dans les conditions particulières, que ce dernier avait eu connaissance, avant le sinistre, de la clause de déchéance de garantie et qu’il l’avait acceptée, et que l’assureur ne pouvait l’opposer à M. [S] et à Mme [F] »

Article 700 du code de procédure civile:
« condamné in solidum Mme [F] et M. [S] à payer à la Macif la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile »

Article 16 du code de procédure civile:
« de l’article 16 du code de procédure civile, pour avoir soulevé d’office l’absence de justification par M. [S] et Mme [F] qu’ils avaient mobilisé l’assurance Swisslife avant le 2 septembre 2015, soit avant l’expiration du délai de deux jours prévus par le contrat, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur un tel moyen »

Article 41 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse:
« ordonner la suppression des passages diffamatoires suivants des conclusions de la Macif en date du 28 juin 2023 »

Article 1134 du code civil:
« la nullité du contrat souscrit auprès de la Macif ne peut être fondée sur l’article L. 113-8 du code des assurances, qui sanctionne les fausses déclarations avant la souscription du contrat, et non celles intervenant sur les circonstances du sinistre, qui ne relève que de la déchéance. »

Article 1382 du code civil:
« la fausse déclaration sur les circonstances a « inéluctablement porté préjudice à son assureur en altérant frauduleusement la description des circonstances ayant entouré le vol du véhicule ». »

Article 1134 et 1382 du code civil:
« les prétentions nouvelles de la Macif sont irrecevables, en application de l’article 564 du code de procédure civile : il résulte de l’arrêt de cassation, que la « Macif ne peut plus soulever d’autres prétentions que celle tendant à voir juger que la clause de déchéance est opposable aux demandeurs », de sorte que ses « demandes nouvelles » « tendant à faire juger que M. [S] n’apporte pas la preuve de l’étendue de la garantie due par la Macif ou encore que sa déclaration de sinistre doit être considérée comme inopposable, devront être jugées irrecevables ». »

Avocats

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