Procédure collective : l’indemnisation de l’employée de toilettage

Notez ce point juridique

1. Attention à bien documenter et justifier toutes les demandes de remboursement de frais professionnels : Il est recommandé de conserver des preuves tangibles et détaillées pour justifier les dépenses professionnelles, comme des factures et des bordereaux de prestations. Dans le cas de Mme [B], l’absence de preuves suffisantes concernant l’achat de la tondeuse a conduit au rejet de sa demande de remboursement.

2. Il est recommandé de rappeler régulièrement aux salariés leurs obligations administratives : Les employeurs doivent veiller à rappeler fréquemment aux salariés leurs obligations, notamment en matière de transmission de documents nécessaires pour le traitement des indemnités. Dans cette affaire, l’employeur n’a rappelé cette obligation qu’une seule fois avant le 14 avril 2019, ce qui a contribué à la décision de confirmer l’allocation de dommages et intérêts à Mme [B].

3. Attention à la distinction des contrats et des références de dossiers : Lorsqu’il s’agit de prestations versées par des organismes de prévoyance, il est crucial de vérifier que les références de contrats et de dossiers correspondent exactement aux périodes et montants en question. Dans ce cas, la confusion entre les contrats FLE 3 et FLE 4 a été un point déterminant pour établir que Mme [F] avait bien perçu la somme totale de 2 219,18 euros.

Résumé de l’affaire

Résumé des faits, de la procédure et des prétentions des parties

Faits :
– Mme [B] a été employée par Mme [F] sous l’enseigne O Cabochic, d’abord en contrat à durée déterminée (CDD) à temps partiel du 5 mai 2015 au 5 novembre 2016, puis en contrat à durée indéterminée (CDI) en tant qu’employée de toilettage.
– Le 5 avril 2019, le tribunal de commerce du Havre a ouvert une procédure de redressement judiciaire contre Mme [F] et désigné Mme [Y] [E] comme mandataire judiciaire.
– Le 28 octobre 2019, Mme [B] a saisi le conseil de prud’hommes du Havre pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail et le paiement de divers rappels de salaires et indemnités.

Procédure :
– Le 18 février 2020, le conseil de prud’hommes a jugé que Mme [F] n’avait pas exécuté le contrat de travail de bonne foi, qualifiant la rupture du contrat de travail de Mme [B] de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
– Le tribunal a ordonné à Mme [F] et Mme [E], ès qualités, de verser diverses indemnités à Mme [B], de fixer ces sommes au passif du redressement judiciaire, et de fournir les documents nécessaires (bulletin de salaire récapitulatif, attestation Pôle emploi).
– Le tribunal a également ordonné à l’AGS de garantir le paiement des sommes allouées à Mme [B] dans les limites légales.

Jugement :
– Le tribunal a fixé les sommes dues à Mme [B] pour diverses indemnités et dommages et intérêts, incluant notamment :
– Prévoyance : 2 219,18 euros
– Indemnités Klésia : 10,62 euros par jour du 15 avril 2019 au 18 février 2020
– Dommages et intérêts pour préjudice subi : 500 euros
– Remboursement pour l’achat d’une tondeuse : 109,99 euros
– Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 1 814,73 euros
– Indemnité légale de licenciement : 1 378,52 euros
– Indemnité compensatrice de préavis : 3 229,46 euros
– Congés payés afférents : 322,95 euros
– Le tribunal a débouté Mme [B] de certaines demandes (rappel de prime d’ancienneté, attestation CPAM rectifiée) et Mme [F] de sa demande en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Appel :
– L’Unedic délégation AGS-CGEA de Rouen a interjeté appel total de la décision le 10 mars 2020, demandant à la cour de réformer le jugement concernant la garantie de l’AGS.
– Mme [F] a demandé à la cour de confirmer le jugement sauf pour certaines condamnations (dommages et intérêts pour défaut de paiement, remboursement de la tondeuse, indemnités de prévoyance Klésia).
– Mme [B] a demandé à la cour de confirmer le jugement sauf pour le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu’elle souhaite voir augmenter à 9 789,48 euros.

Ordonnance de clôture :
– La procédure a été clôturée le 19 mai 2022.

Les points essentiels

Introduction et contexte de l’affaire

A titre liminaire, il doit être relevé qu’aux termes du dispositif de ses conclusions, le CGEA ne demande la réformation du jugement qu’en ce qu’il a retenu sa garantie. Aussi, et s’il sollicite, pour le surplus, le débouté de Mme [B], il ne peut être considéré qu’il demanderait l’infirmation du jugement en ses autres dispositions, d’autant qu’il n’invoque aucun moyen de droit ou de fait tendant à les critiquer, si ce n’est pour celles dont l’infirmation est expressément demandée par Mme [F] elle-même.

Demande de remboursement des indemnités prévoyance Klésia

Mme [B] explique qu’en tant que bénéficiaire de prestations de prévoyance auprès de la société Klésia, Mme [F] a perçu 2 219,18 euros pour diverses périodes entre octobre 2018 et avril 2019. Mme [F] conteste avoir reçu cette somme, affirmant n’avoir perçu que 1 274,30 euros. Cependant, les documents fournis par Mme [B] démontrent que Mme [F] a bien reçu la somme totale de 2 219,18 euros. Le jugement initial allouant cette somme à Mme [B] est donc confirmé.

Demande de dommages et intérêts

Mme [B] soutient avoir subi un préjudice en raison de la carence de l’employeur qui n’a plus transmis ses arrêts maladie à l’organisme de prévoyance après le 14 avril 2019. Mme [F] argue que ce préjudice est dû à la propre carence de Mme [B]. Le tribunal confirme que l’employeur avait l’obligation de rappeler cette transmission à Mme [B], ce qu’il n’a fait qu’une seule fois. Le jugement allouant 500 euros de dommages et intérêts à Mme [B] est confirmé.

Demande de remboursement de la tondeuse

La facture produite pour l’achat d’une tondeuse pour chien, chat et cheval, datée du 21 novembre 2018, ne justifie pas que cet achat était nécessaire pour l’activité professionnelle de Mme [B]. Le tribunal infirme le jugement initial et déboute Mme [B] de sa demande de remboursement de 109,99 euros pour cet achat.

Montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Conformément à l’article L. 1235-3 du code du travail, le tribunal confirme le jugement initial allouant 1 814,73 euros à Mme [B] pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Mme [B] ne justifie pas de sa situation professionnelle postérieure à la résiliation judiciaire du contrat de travail.

Garantie de l’AGS

Selon l’article L. 3253-8 du code du travail, les indemnités prévoyance versées par Klésia étaient dues en vertu du contrat de travail de Mme [B] et doivent être garanties par l’AGS jusqu’à la date d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire. L’AGS doit garantir les sommes versées par Klésia du 15 octobre 2018 au 5 avril 2019, soit 2 123,70 euros. Cependant, les indemnités dues après le 14 avril 2019 ne peuvent être mises à la charge de l’AGS.

Dépens et frais irrépétibles

En qualité de partie succombante, Mme [E], ès qualités, est condamnée aux entiers dépens, y compris ceux de première instance. Cependant, chaque partie bénéficiant de l’aide juridictionnelle, leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile sont rejetées.

Les montants alloués dans cette affaire:

Réglementation applicable

Articles des Codes cités et leur texte

Code du travail

– Article L. 1235-3
« Si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer sa réintégration dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est fixé par le juge. Cette indemnité ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Lorsque le salarié est licencié dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, l’indemnité ne peut être inférieure aux salaires des trois derniers mois. »

– Article L. 3253-8
« L’assurance mentionnée à l’article L. 3253-6 couvre :

1° Les sommes dues aux salariés à la date du jugement d’ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, ainsi que les contributions dues par l’employeur dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle ;

2° Les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant :

a) Pendant la période d’observation ;

b) Dans le mois suivant le jugement qui arrête le plan de sauvegarde, de redressement ou de cession ;

c) Dans les quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi est élaboré, suivant le jugement de liquidation ;

d) Pendant le maintien provisoire de l’activité autorisé par le jugement de liquidation judiciaire et dans les quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi est élaboré, suivant la fin de ce maintien de l’activité ;

3° Les créances résultant de la rupture du contrat de travail des salariés auxquels a été proposé le contrat de sécurisation professionnelle, sous réserve que l’administrateur, l’employeur ou le liquidateur, selon le cas, ait proposé ce contrat aux intéressés au cours de l’une des périodes indiquées au 2°, y compris les contributions dues par l’employeur dans le cadre de ce contrat et les salaires dus pendant le délai de réponse du salarié ;

4° Les mesures d’accompagnement résultant d’un plan de sauvegarde de l’emploi déterminé par un accord collectif majoritaire ou par un document élaboré par l’employeur, conformément aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-4, dès lors qu’il a été validé ou homologué dans les conditions prévues à l’article L. 1233-58 avant ou après l’ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ;

5° Lorsque le tribunal prononce la liquidation judiciaire, dans la limite d’un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail, les sommes dues :

a) Au cours de la période d’observation ;

b) Au cours des quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi est élaboré, suivant le jugement de liquidation ;

c) Au cours du mois suivant le jugement de liquidation pour les représentants des salariés prévus par les articles L. 621-4 et L. 631-9 du code de commerce ;

d) Pendant le maintien provisoire de l’activité autorisé par le jugement de liquidation et au cours des quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi est élaboré, suivant la fin de ce maintien de l’activité.

La garantie des sommes et créances mentionnées aux 1°, 2° et 5° inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d’origine légale, ou d’origine conventionnelle imposée par la loi, ainsi que la retenue à la source prévue à l’article 204 A du code général des impôts. »

Code de procédure civile

– Article 700
« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. »

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Etienne LEJEUNE de la SCP SAGON LOEVENBRUCK LESIEUR LEJEUNE, avocat au barreau du HAVRE
– Me Nathalie MICHEL, avocat au barreau du HAVRE
– Me Pierre-Hugues POINSIGNON, avocat au barreau de ROUEN
– Me Christophe ROGER, avocat au barreau du HAVRE
– Me Nicolas BODINEAU, avocat au barreau de ROUEN

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 juillet 2022
Cour d’appel de Rouen
RG n°
20/01154
N° RG 20/01154 – N° Portalis DBV2-V-B7E-IOCS

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 07 JUILLET 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DU HAVRE du 18 Février 2020

APPELANTE :

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE ROUEN

[Adresse 4]

[Localité 5]

représentée par Me Etienne LEJEUNE de la SCP SAGON LOEVENBRUCK LESIEUR LEJEUNE, avocat au barreau du HAVRE

INTIMEES :

Madame [Z] [F], exerçant sous l’enseigne O CABOCHIC

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par Me Nathalie MICHEL, avocat au barreau du HAVRE substitué par Me Pierre-Hugues POINSIGNON, avocat au barreau de ROUEN

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/005405 du 13/10/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Rouen)

Me [E] [Y] – en qualité de commissaire au plan de Madame [F] [Z] exerçant sous l’enseigne O CABOCHIC

[Adresse 1]

[Localité 5]

n’ayant pas constitué avocat

régulièrement assignée le 05/06/2020

Madame [C] [B]

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentée par Me Christophe ROGER, avocat au barreau du HAVRE substitué par Me Nicolas BODINEAU, avocat au barreau de ROUEN

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/003257 du 01/09/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Rouen)

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 08 Juin 2022 sans opposition des parties devant Madame BACHELET, Conseillère, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère

Madame BERGERE, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

M. GUYOT, Greffier

DEBATS :

A l’audience publique du 08 Juin 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 07 Juillet 2022

ARRET :

REPUTE CONTRADICTOIRE

Prononcé le 07 Juillet 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme [B] a été engagée par Mme [F] exerçant sous l’enseigne O Cabochic en contrat à durée déterminée à temps partiel du 5 mai 2015 au 5 novembre 2016, puis en contrat à durée indéterminée en qualité d’employée toilettage.

Par jugement du 5 avril 2019, le tribunal de commerce de terre et de mer du Havre a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de Mme [F] et désigné Mme [Y] [E] mandataire judiciaire.

Par requête du 28 octobre 2019, Mme [B] a saisi le conseil de prud’hommes du Havre en résiliation judiciaire de son contrat de travail, ainsi qu’en paiement de rappel de salaires et indemnités.

Par jugement du 18 février 2020, le conseil de prud’hommes, avec le bénéfice de l’exécution provisoire, a :

– dit que Mme [F] n’avait pas exécuté le contrat de travail de bonne foi et que la rupture du contrat de travail de Mme [B], fixée au 18 février 2020, produisait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– ordonné à Mme [F] et Mme [E], ès qualités, de procéder au nécessaire afin de permettre à Mme [B] de percevoir les indemnités Klésia pour la période du 15 avril 2019 au jour de la rupture du contrat de travail de Mme [B],

– ordonné à Mme [F] et Mme [E], ès qualités, de fixer au passif du redressement judiciaire de Mme [F] les sommes suivantes :

sommes dues au titre de la prévoyance du 15 octobre 2018 au 14 avril 2019 : 2 219,18 euros

indemnités Klésia dues par jour du 15 avril 2019 au 18 février 2020 : 10,62 euros

dommages et intérêts pour préjudice subi en raison du défaut de paiement des sommes dues au titre de la garantie de salaire : 500 euros

remboursement pour l’achat de la nouvelle tondeuse : 109,99 euros

dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 1 814,73 euros

indemnité légale de licenciement : 1 378,52 euros

indemnité compensatrice de préavis : 3 229,46 euros

congés payés afférents : 322,95 euros

– fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire de Mme [B] à 1 613,88 euros,

– ordonné à Mme [F] et Mme [E], ès qualités, d’envoyer à Mme [B] un bulletin de salaire récapitulant les sommes payées et une attestation Pôle emploi,

– dit qu’il convenait pour Mme [E], ès qualités, d’appeler l’AGS représentée par le CGEA, l’AGS étant tenue de garantir le paiement des sommes allouées à Mme [B] dans les limites légales et réglementaires de sa garantie résultant des dispositions des articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail, le paiement des dommages et intérêts auxquels l’employeur a été condamné en réparation du préjudice moral causé au salarié à l’occasion de son licenciement dans la mesure où il a manqué d’exécuter le contrat de bonne foi, à l’exclusion des sommes allouées sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens et sous réserve de l’absence de fonds disponibles entre les mains du commissaire à l’exécution du plan,

– débouté le CGEA de Rouen d’étendre la décision de la Cour de cassation n° 16-19-517 à la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [B],

– dit que le présent jugement était opposable au CGEA de Rouen et qu’il devrait garantir les frais professionnels de Mme [B], les sommes dues au titre des dommages et intérêts, de la prévoyance et de la rupture du contrat de travail,

– dit n’y avoir lieu à intérêts légaux,

– mis à la charge de Mme [F] et Mme [E], ès qualités, les entiers dépens et frais de la présente instance,

– débouté Mme [B] de sa demande de rappel de prime d’ancienneté et congés payés afférents et de celle d’attestation CPAM rectifiée,

– débouté Mme [F] de sa demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile et dit qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le présent jugement et en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier de justice instrumentaire en application des dispositions de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996, devraient être supportées par Mme [F] et Mme [E], ès qualités.

L’Unedic délégation AGS-CGEA de Rouen a interjeté appel total de cette décision le 10 mars 2020.

Par conclusions remises le 2 juin 2020, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, l’Unedic délégation AGS-CGEA de Rouen demande à la cour de réformer le jugement en ce qu’il a retenu la garantie de l’AGS, pour le surplus, débouter Mme [B] de ses demandes, lui donner acte de sa qualité de représentant de l’AGS, lui dire l’arrêt à intervenir opposable, dire que la garantie de l’AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail, dire que l’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-6 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-8 et suivants du code du travail.

Par conclusions remises le 13 mai 2022, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, Mme [F] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il l’a condamnée à payer à Mme [B] les sommes de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de paiement des sommes dues au titre de la garantie des salaires, 109,99 euros en remboursement de l’achat de la nouvelle tondeuse et 2 219,18 euros au titre des indemnités de prévoyance Klésia, l’infirmer de ces chefs et juger que les indemnités de prévoyance Klésia s’élèvent en réalité à la somme de 1 203,91 euros, juger que l’Unedic délégation CGEA-AGS devra garantir le paiement de l’intégralité des sommes allouées à Mme [B], rejeter toutes demandes plus amples ou contraires, juger que chacun supportera ses propres frais et dépens de première instance et d’appel.

Par conclusions remises le 4 août 2020, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, Mme [B] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a limité le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 1 814,73 euros, l’infirmer de ce chef et condamner Mme [F] à lui payer la somme de 9 789,48 euros, y ajoutant, condamner Mme [E], ès qualités, à appeler l’AGS représentée par le CGEA de Rouen, l’AGS étant tenue de garantir le paiement de l’intégralité des sommes allouées, y compris les condamnations résultant de la rupture du contrat de travail et condamner Mme [F] au paiement de 1 500 euros au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

L’ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 19 mai 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il doit être relevé qu’aux termes du dispositif de ses conclusions, le CGEA ne demande la réformation du jugement qu’en ce qu’il a retenu sa garantie. Aussi, et s’il sollicite, pour le surplus, le débouté de Mme [B], il ne peut être considéré qu’il demanderait l’infirmation du jugement en ses autres dispositions, d’autant qu’il n’invoque aucun moyen de droit ou de fait tendant à les critiquer, si ce n’est pour celles dont l’infirmation est expressément demandée par Mme [F] elle-même.

Sur la demande de remboursement des indemnités prévoyance Klésia

Mme [B] explique qu’en tant que bénéficiaire de prestations de prévoyance auprès de la société Klésia, Mme [F] a perçu 944,88 euros pour la période du 15 octobre au 15 décembre 2018, 10,62 euros pour la période du 16 décembre 2018, 159,30 euros du 17 au 31 décembre 2018 et 1 104,48 euros du 1er janvier au 14 avril 2019, soit un total de 2 219,18 euros et produit pour en justifier quatre bordereaux de prestation incapacité de travail ou invalidité délivrés par l’organisme Klésia faisant état du versement de ces sommes sur le compte de Mme [F].

En réponse, sans contester ne pas avoir reversé les sommes provenant de cet organisme, Mme [F] soutient néanmoins n’avoir perçu de sa part que la somme de 1 274,30 euros correspondant aux prestations versées du 16 décembre 2018 au 14 avril 2019 et produit à cet effet un relevé de l’organisme Klésia faisant état d’une absence de toute prestation versée pour la période du 15 octobre au 16 décembre 2018.

Néanmoins, comme justement relevé par Mme [B], il résulte clairement de ces bordereaux que ceux émis pour les périodes du 15 octobre au 15 décembre 2018 et du 16 décembre 2018 concernent un contrat FLE 4 avec une référence dossier 2019 49007 alors que le relevé produit par Mme [F] faisant état de l’absence de versement de toute somme pour cette même période vise un contrat FLE 3 avec une référence dossier 2019 S44009.

Il est ainsi suffisamment établi par Mme [B] que Mme [F] a perçu la somme de 2 219,18 euros de la part de l’organisme de prévoyance et, alors qu’il n’est pas contesté l’absence de reversement, et a fortiori qu’il n’est pas justifié d’un reversement, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a alloué cette somme à Mme [B].

Sur la demande de dommages et intérêts

Alors que Mme [B] soutient avoir subi un préjudice en raison de la carence de l’employeur qui n’a plus transmis ses arrêts maladie à l’organisme de prévoyance après le 14 avril 2019, Mme [F] fait valoir quant à elle que ce préjudice n’est lié qu’à la propre carence de Mme [B] qui n’a plus adressé ses bordereaux d’indemnités journalières de la sécurité sociale à l’organisme de prévoyance à compter du 14 avril 2019.

S’il n’est effectivement pas justifié par Mme [B] qu’elle aurait transmis ses relevés d’indemnités journalières à l’organisme de prévoyance, il appartient néanmoins à l’employeur de rappeler cette obligation au salarié, ce qu’elle n’a fait qu’à une seule reprise antérieurement au 14 avril 2019.

Aussi, alors qu’au surplus, Mme [F] ne justifie pas avoir transmis les arrêts maladie à cet organisme et qu’il ressort des attestations de proches de Mme [B] qu’elle a rencontré des difficultés financières au regard des retards de paiement, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a alloué à Mme [B] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts, le préjudice ayant été justement évalué.

Sur la demande de remboursement de la tondeuse

Alors que la facture produite relative à l’achat d’une tondeuse pour chien, chat et cheval démontre que la commande est intervenue le 21 novembre 2018 alors que Mme [B] était en arrêt maladie, au surplus au nom de Mme [S], sa mère, il ne peut être retenu qu’elle justifierait suffisamment que cet achat aurait été rendu nécessaire pour les besoins de son activité professionnelle, aucune autre pièce ne venant corroborer le fait qu’elle aurait dû utiliser sa tondeuse personnelle durant le cours de la relation contractuelle et que cet achat aurait été rendu nécessaire par la panne de la précédente.

Il convient en conséquence d’infirmer le jugement et de débouter Mme [B] de sa demande de remboursement d’une somme de 109,99 euros au titre de frais professionnels liés à l’achat d’une tondeuse pour chien.

Sur le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Conformément à l’article L. 1235-3 du code du travail, alors que Mme [F] employait moins de onze salariés au moment du licenciement, que Mme [B] avait plus de quatre ans d’ancienneté au moment de la résiliation judiciaire du contrat de travail et un salaire de l’ordre de 1 613 euros, il convient, alors qu’elle ne justifie nullement de sa situation professionnelle postérieurement à cette date mais produit uniquement des attestations de proches faisant état des difficultés financières qu’elle a rencontrées durant l’exécution du contrat, et non depuis la rupture, de confirmer le jugement sur le montant alloué, le préjudice ayant été justement évalué à 1 814,73 euros.

Sur la garantie de l’AGS

Selon l’article L. 3253-8 du code du travail, l’assurance mentionnée à l’article L. 3253-6 couvre :

1° Les sommes dues aux salariés à la date du jugement d’ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, ainsi que les contributions dues par l’employeur dans le cadre du contrat de sécurisation professionnelle ;

2° Les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant :

a) Pendant la période d’observation ;

b) Dans le mois suivant le jugement qui arrête le plan de sauvegarde, de redressement ou de cession ;

c) Dans les quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi est élaboré, suivant le jugement de liquidation ;

d) Pendant le maintien provisoire de l’activité autorisé par le jugement de liquidation judiciaire et dans les quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi est élaboré, suivant la fin de ce maintien de l’activité ;

3° Les créances résultant de la rupture du contrat de travail des salariés auxquels a été proposé le contrat de sécurisation professionnelle, sous réserve que l’administrateur, l’employeur ou le liquidateur, selon le cas, ait proposé ce contrat aux intéressés au cours de l’une des périodes indiquées au 2°, y compris les contributions dues par l’employeur dans le cadre de ce contrat et les salaires dus pendant le délai de réponse du salarié ;

4° Les mesures d’accompagnement résultant d’un plan de sauvegarde de l’emploi déterminé par un accord collectif majoritaire ou par un document élaboré par l’employeur, conformément aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-4, dès lors qu’il a été validé ou homologué dans les conditions prévues à l’article L. 1233-58 avant ou après l’ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ;

5° Lorsque le tribunal prononce la liquidation judiciaire, dans la limite d’un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail, les sommes dues :

a) Au cours de la période d’observation ;

b) Au cours des quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi est élaboré, suivant le jugement de liquidation ;

c) Au cours du mois suivant le jugement de liquidation pour les représentants des salariés prévus par les articles L. 621-4 et L. 631-9 du code de commerce ;

d) Pendant le maintien provisoire de l’activité autorisé par le jugement de liquidation et au cours des quinze jours, ou vingt et un jours lorsqu’un plan de sauvegarde de l’emploi est élaboré, suivant la fin de ce maintien de l’activité.

La garantie des sommes et créances mentionnées aux 1°, 2° et 5° inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d’origine légale, ou d’origine conventionnelle imposée par la loi, ainsi que la retenue à la source prévue à l’article 204 A du code général des impôts.’

En l’espèce, si le contrat à durée déterminée n’est pas produit aux débats et qu’il n’est fourni que l’avenant relatif au contrat à durée indéterminée, sans mentions particulières quant à l’affiliation de Mme [B] à un régime de prévoyance, il ressort néanmoins de ses bulletins de salaire que l’employeur cotisait mensuellement à une complémentaire incapacité, invalidité et décès.

Il en ressort que les indemnités prévoyance versées par l’organisme Klésia étaient dues en vertu du contrat de travail de Mme [B] et doivent donc être garanties par l’AGS et ce, jusqu’à la date d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, conformément à l’article L. 3253-8 1° du code du travail.

Il convient en conséquence de dire que l’AGS doit sa garantie à hauteur des sommes versées par l’organisme de prévoyance Klésia du 15 octobre 2018 au 5 avril 2019, date d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, soit à hauteur de 2 123,70 euros.

Au contraire, l’indemnité due en réparation du préjudice subi par le salarié du fait du non-paiement de ces indemnités postérieurement au 14 avril 2019 ne peut être mise à la charge de l’AGS dès lors que cette créance, certes due en exécution du contrat de travail, est née postérieurement à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire.

Enfin, les créances résultant de la rupture du contrat de travail visées par l’article L. 3253-8 2° du code du travail s’entendent d’une rupture à l’initiative de l’administrateur judiciaire ou du mandataire liquidateur.

Aussi, dès lors que la rupture du contrat de travail résulte d’une résiliation judiciaire prononcée le 18 février 2020, il ne peut être considéré que la rupture serait intervenue à l’initiative de l’employeur ou de l’administrateur judiciaire et il convient en conséquence d’infirmer le jugement en ce qu’il a dit que l’AGS serait tenue à garantie pour les sommes résultant de la rupture du contrat de travail.

Sur les dépens et frais irrépétibles

En qualité de partie succombante, il y a lieu de condamner Mme [E], ès qualités, aux entiers dépens, y compris ceux de première instance. L’équité commande néanmoins, alors que chacune des parties bénéficie de l’aide juridictionnelle, de débouter chacune d’elle de leur demande formulée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant contradictoirement,

Dans les limites de la saisine, infirme le jugement en ce qu’il a alloué la somme de 109,99 euros à Mme [B] au titre de frais professionnels et en ses dispositions relatives à la garantie de l’AGS;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déboute Mme [C] [B] de sa demande de remboursement de frais professionnels à hauteur de 109,99 euros ;

Dit que l’AGS n’est tenue à garantie que pour la somme de 2 123,70 euros due au titre des indemnités de prévoyance dans les termes des articles L. 3253-8 et suivants du code du travail, en l’absence de fonds disponibles ;

Confirme le jugement pour le surplus ;

Y ajoutant,

Déboute les parties de leur demande formulée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [E], en qualité de mandataire judiciaire de Mme [Z] [F], aux entiers dépens.

La greffièreLa présidente

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