Litige sur les Heures Supplémentaires du Saisonnier Non Rémunérées

Notez ce point juridique

1. Attention à la précision des éléments fournis par le salarié : En cas de litige concernant les heures supplémentaires, il est recommandé de fournir des éléments suffisamment précis et détaillés. Les plannings, attestations et autres documents doivent être clairs et cohérents pour permettre à l’employeur de répondre de manière utile et au juge de former sa conviction.

2. Attention aux incohérences dans les relevés d’heures : Les incohérences dans les relevés d’heures peuvent affaiblir la crédibilité des demandes de paiement d’heures supplémentaires. Il est recommandé de vérifier et de corriger toute incohérence avant de soumettre des documents au tribunal. Les heures notées doivent correspondre aux activités réellement effectuées et aux périodes de travail.

3. Attention aux obligations contractuelles et réglementaires : Il est recommandé de respecter les obligations contractuelles et réglementaires concernant les heures supplémentaires. Cela inclut l’obtention de l’accord préalable de l’employeur pour toute heure supplémentaire effectuée. Le non-respect de ces obligations peut entraîner le rejet des demandes de paiement d’heures supplémentaires.

Résumé de l’affaire

Résumé des faits et de la procédure

Faits :
– M. [P] [H] a été embauché le 3 avril 2017 par la société La Bégude Saint Pierre en tant que manager de restaurant sous un contrat de travail à durée déterminée saisonnier à temps complet.
– Le 26 octobre 2016, le tribunal de commerce de Nîmes a ouvert une procédure de redressement judiciaire contre l’employeur.
– Le 25 octobre 2017, M. [H] a demandé le paiement d’heures supplémentaires et de rappels accessoires, dont une partie a été réglée sur le salaire d’octobre 2017.

Procédure :
– À la fin de son contrat, M. [H] a saisi le conseil de prud’hommes de Nîmes pour obtenir le paiement des heures supplémentaires et des rappels accessoires.
– Le 12 avril 2019, le conseil de prud’hommes a rendu un jugement condamnant la société La Bégude Saint-Pierre à payer diverses sommes à M. [H], incluant 3105,08 euros pour les heures supplémentaires, 37 euros pour le repos induit par les heures de nuit, et 314,27 euros pour les congés payés, entre autres.
– Le 10 mai 2019, M. [H] a interjeté appel de cette décision.

Prétentions des parties :

M. [H] :
– Demande à la cour de condamner la société La Bégude Saint-Pierre à lui verser :
– 9.857,9 euros pour les heures supplémentaires,
– 3.652,81 euros pour la contrepartie en repos,
– 37 euros pour le repos induit par les heures de nuit,
– 1.354,77 euros pour les congés payés.
– Demande également 1.200 euros pour les frais irrépétibles d’appel et une injonction pour établir un bulletin de régularisation sous astreinte.

Société La Bégude Saint-Pierre :
– Demande la confirmation du jugement du conseil de prud’hommes et l’infirmation des demandes de M. [H].
– Soutient que les heures supplémentaires ont déjà été rémunérées et que M. [H] ne prouve pas la réalité des heures supplémentaires réclamées.
– Demande le remboursement de 5.852,27 euros versés à tort et 3.500 euros au titre de l’article 700 du CPC.

UNEDIC AGS-CGEA de [Localité 4] :
– Demande l’infirmation partielle du jugement du conseil de prud’hommes concernant certaines sommes et la confirmation des autres dispositions.
– Reprend l’argumentation de la société La Bégude Saint-Pierre et demande le déboutement de M. [H] de toutes ses demandes.

L’instruction a été clôturée le 1er décembre 2021, avec une audience de plaidoiries fixée au 17 février 2022.

Les points essentiels

Introduction de l’affaire

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments. Dans cette affaire, M. [H] a produit divers documents pour prouver ses heures supplémentaires, tandis que l’employeur, la société La Bégude Saint Pierre, a contesté ces éléments.

Éléments produits par M. [H]

M. [H] a présenté plusieurs documents, dont des plannings manuscrits, un décompte des heures supplémentaires, des courriers échangés avec l’employeur, et plusieurs attestations de collègues confirmant ses nombreuses heures de travail. Ces éléments visaient à démontrer qu’il avait effectué des heures supplémentaires non rémunérées.

Arguments de la société La Bégude Saint Pierre

L’employeur a contesté la pertinence des éléments produits par M. [H], soulignant des incohérences dans les plannings et affirmant que les heures supplémentaires n’avaient pas été demandées par l’employeur. La société a également produit des documents pour démontrer que M. [H] n’avait pas respecté les obligations contractuelles et conventionnelles.

Analyse des éléments par le juge

Le juge a examiné les éléments produits par les deux parties. Les incohérences relevées par l’employeur, corroborées par les réservations du restaurant et de l’hôtel, ont suffi à remettre en question la réalisation effective des heures supplémentaires demandées par M. [H]. Les attestations produites par M. [H] ont été jugées imprécises quant au volume d’heures supplémentaires effectuées.

Conclusion du jugement

Le juge a conclu que la réalité des heures supplémentaires n’était pas prouvée. En conséquence, M. [H] a été débouté de sa demande de rappel des heures supplémentaires, de la contrepartie en repos et du repos induit par les heures de nuit. Le jugement initial condamnant la société La Bégude Saint Pierre à payer diverses sommes a été infirmé.

Demande reconventionnelle de l’employeur

La société La Bégude Saint Pierre a demandé le remboursement de la somme de 5852,87 euros, versée selon elle à tort. Toutefois, il a été établi que cette somme correspondait au paiement des « heures normales ». Par conséquent, la société a été déboutée de cette demande.

Condamnation aux dépens

M. [H] a été condamné aux dépens de la procédure d’appel, ayant succombé au procès. L’équité a commandé de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Les montants alloués dans cette affaire:

Réglementation applicable

Voici la liste des articles des Codes cités dans le texte fourni, ainsi que le texte de chaque article :

Code de procédure civile

– Article 700 :
« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. »

Code du travail

– Article L3171-4 :
« En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments. »

Convention collective HCR (Hôtels, Cafés, Restaurants)

– Accord collectif sur la durée et l’organisation du temps de travail du 26 avril 2016 :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

– Accord n°2 du 5 février 2007 relatif à l’aménagement du temps de travail :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

Autres documents cités

– Synthèse de la convention collective HCR :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

– CDD saisonnier de M. [H] signé le 3 avril 2017 :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

– Détail du décompte des heures établies par l’employeur :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

– Plannings de Mmes [X] [T] et [V] [I] pour la semaine du 1er au 7 mai 2017 :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

– Cahier de réservation du restaurant du 5 avril 2017 au 18 mai 2017, du 1er août 2017 au 1er septembre 2017, du 1er septembre 2017 au 10 septembre 2017 :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

– Planning de réservation de l’hôtel pour la nuit du 30 avril au 1er mai 2017 :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

– Audit de l’établissement réalisé par la SAS La Martyère en date du 10 juin 2017 :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

– Attestation de Mme [L] [A] en date du 2 septembre 2018 :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

– Registre du personnel du 1er avril 2017 au 31 octobre 2017 :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

– Récépissé du dépôt de l’accord aux syndicats, à la DIRECCTE et au conseil de prud’hommes de Nîmes :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

– Échange entre le secrétaire général CFDT et Mme [L] en date du 15 avril 2016 :
(Texte non fourni dans l’extrait, mais mentionné comme étant versé au débat par la société La Bégude Saint Pierre)

Les textes des articles de loi et des conventions collectives sont reproduits tels qu’ils apparaissent dans les codes et documents officiels. Les autres documents mentionnés dans le texte fourni ne sont pas reproduits intégralement car ils ne sont pas cités en détail dans l’extrait.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Thierry COSTE, avocat au barreau d’AVIGNON
– Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, avocat au barreau de NIMES
– Me Anne-Cécile PERROUTY de la SELARL CABINET YVES BLOHORN, avocat au barreau de MONTPELLIER
– Me Delphine ANDRES de la SCP LOBIER & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

19 avril 2022
Cour d’appel de Nîmes
RG n°
19/01948
ARRÊT N°

N° RG 19/01948 – N° Portalis DBVH-V-B7D-HLHT

MLG/EB

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NIMES

12 avril 2019

RG :F17/00893

[H]

C/

S.A.R.L. LA BEGUDE SAINT PIERRE

Association UNEDIC, DÉLÉGATION AGS ‘ CGEA DE [Localité 4]

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 19 AVRIL 2022

APPELANT :

Monsieur [P] [H]

né le 14 Avril 1963 à [Localité 3]

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représenté par Me Thierry COSTE, avocat au barreau d’AVIGNON

INTIMÉES :

S.A.R.L. LA BEGUDE SAINT PIERRE

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Anne-Cécile PERROUTY de la SELARL CABINET YVES BLOHORN, avocat au barreau de MONTPELLIER

UNEDIC, DÉLÉGATION AGS ‘ CGEA DE [Localité 4]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Delphine ANDRES de la SCP LOBIER & ASSOCIES, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 03 Février 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Marie-Lucie GODARD, Vice présidente placée, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Mme Marie-Lucie GODARD, Vice présidente placée

M. Michel SORIANO, Conseiller

GREFFIER :

Mme Emmanuelle BERGERAS, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l’audience publique du 17 Février 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 19 Avril 2022

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel ;

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 19 Avril 2022, par mise à disposition au greffe de la Cour

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

M. [P] [H] a été engagé à compter du 3 avril 2017 par la société La Bégude Saint Pierre suivant contrat de travail à durée déterminée saisonnier à temps complet en qualité de manager de restaurant.

Le 26 octobre 2016, le tribunal de commerce de Nîmes a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de l’employeur.

Par courrier de son conseil en date du 25 octobre 2017, M.[H] a sollicité le paiement d’ heures supplémentaires ainsi que des rappels accessoires à son employeur, lequel a réglé sur le salaire du mois d’octobre 2017 une partie des sommes demandées.

Au terme du contrat saisonnier, M.[H] a saisi le conseil de prud’hommes de Nîmes aux fins de se voir payer la totalité des heures supplémentaires effectuées ainsi que des rappels accessoires, lequel par jugement en date du 12 avril 2019 a :

pris acte de ce que l’UNEDIC reprend et fait sienne l’argumentation soutenue par l’employeur,

– condamné la société La Bégude Saint-Pierre à payer à M.[H] les sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter du 25/10/2017, et capitalisation annuelle des intérêts :

> 3105,08 euros brut au titre des heures accomplies au-delà de 39 h hebdomadaires,

> 0 euro brut au titre de la contrepartie de repos,

> 37 euros brut au titre du repos induit par les heures de nuit,

> 314,27 euros au titre de rappel incident sur congés payés.

– ordonné à l’employeur d’établir et porter un bulletin de régularisation en conséquence,

– rappelé l’exécution provisoire de droit en application de l’ article R 1454-28 du code du travail,

– dit que la moyenne des trois derniers mois de salaires est de 2947,37 euros brut,

– condamné la société La Bégude Saint -Pierre à payer à M.[H] la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du CPC et constaté l’absence de garantie due par l’AGS au titre de cette somme,

– condamné le défendeur aux dépens,

– déclaré le présent jugement commun et opposable au CGEA de [Localité 4], gestionnaire de l’AGS,

– dit que la garantie de l’organisme interviendra dans les limites et plafonds réglementaires applicables en la matière, au vu du relevé qui lui sera produit et du justificatif de l’absence de fonds disponibles au titre de la dite procédure collective,

– dit que les dépens seront considérés en frais privilégiés de la procédure collective,

– rejeté toutes autres demandes des parties.

Le 10 mai 2019, M. [H] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 3 février 2022, M.[H] demande à la cour de :

– Condamner la Société La Bégude Saint-Pierre à lui verser avec intérêt au taux légal à compter du 25/10/17 et capitalisation des intérêts échus depuis une année :

> 9.857,9 euros bruts au titre des heures supplémentaires,

> 3.652,81 euros bruts au titre de la contrepartie en repos,

> 37 euros bruts au titre du repos induit par les heures de nuit,

> 1.354,77 euros bruts à titre de rappel incident sur congés payés.

Condamner la Société à lui verser 1.200 euros au titre des frais irrépétibles d’appel ;

– Faire injonction à la citée d’établir et porter, sous astreinte de 15 euros par document et par

jour de retard un mois après la notification de la décision à intervenir un bulletin de régularisation.

– Infirmer en conséquence la décision déférée.

Il soutient que :

– le contrat de travail ne prévoit aucune modulation,

– le temps de travail ressort des plannings à entête de la société remplis tout au long de la relation de travail, continûment affichés et remis à l’employeur,

– le rappel d’octobre 2017 est l’aveu de la réalisation d’heures supplémentaires,

– les plannings sont opposables à l’employeur puisque remis au gérant toutes les semaines,

– il n’avait aucune pause même pendant les repas car il restait à disposition des clients en permanence,

– le volume d’heures supplémentaires était connu de tous de sorte que l’employeur ne pouvait l’ignorer.

En réplique dans ses dernières conclusion transmises le 1er février 2022, la SARL La Bégude Saint-Pierre sollicite confirmant le jugement du Conseil de prud’hommes de :

– constater l’applicabilité de l’accord d’entreprise du 26 avril 2016 à M.[P] [H] en toutes ses dispositions.

Infirmant le jugement du conseil de prud’hommes, il est demandé à la cour de bien vouloir :

– constater que les heures supplémentaires aujourd’hui sollicitées par M.[P] [H] lui ont déjà été rémunérées ;

– constater que M.[P] [H] ne démontre pas la réalité des heures supplémentaires sollicitées ;

– constater qu’au contraire elle a trop versé en payant la somme de 5 852,27 euros.

En conséquence :

– débouter M.[P] [H] de sa demande en paiement d’heures supplémentaires ;

– débouter M.[P] [H] de toutes ses demandes à son encontre ;

– le condamner à lui rembourser la somme de 5 852,27 euros versée à tort ;

– condamner M.[P] [H] à lui verser la somme de 3.500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner M.[P] [H] aux entiers dépens.

Elle fait valoir que :

-les heures supplémentaires au delà de 39 heures ont été rémunérées après correctif dans le cadre du solde de tout compte,

– il a oublié de décompter les temps de pause et n’a jamais fait part à son employeur qu’il ne pouvait pas les prendre,

– il a récupéré des heures sur des semaines creuses et sur des congés,

– il existe de nombreuses incohérences sur les relevés d’heures fournis par le salarié,

– le salarié ne savait pas s’organiser et avait des moyens mis à sa disposition qui ne nécessitaient pas qu’il fasse autant d’heures,

– le salarié n’a jamais alerté son employeur sur des difficultés concernant son temps de travail,

– les heures effectuées au delà de 39 heures de travail hebdomadaires ont été rémunérées sans application d’un taux de majoration conformément aux dispositions de l’accord d’entreprise de 2016 portant sur la durée et l’organisation du temps de travail, lequel s’applique également pour le CDD.

Par conclusions en date du 18 octobre 2019 , l’UNEDIC AGS- CGEA de [Localité 4] sollicite :

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Nîmes du 12 avril 2019 en ce qu’il a condamné la société La Bégude Saint-Pierre au paiement des sommes suivantes :

> 3.105,78 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires ;

> 37,00 euros à titre de repos induit par les heures de nuit ;

> 314,27 euros à titre de congés afférents ;

> 1.500,00 euros au titre de l’article 700 du CPC,

– Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Nîmes du 12 avril 2019 en toutes ses autres dispositions,

– prendre acte de ce que l’UNEDIC reprend et fait sienne l’argumentation soutenue par la société la Bégude Saint Pierre.

En conséquence,

– débouter M.[H] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– le condamner aux entiers dépens.

En tout état de cause,

– faire application des dispositions de l’article L 3253-20 du Code du travail instituant le principe de subsidiarité de la garantie AGS,

– dire et juger que I’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L. 3253-6 et L. 3253-8 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-17, L. 3253-19 et suivants du Code du Travail.

-dire et juger que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le Mandataire Judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder a leur paiement.

– faire application des dispositions du Code de Commerce et du Décret

– Donner acte à l’UNEDlC et I’AGS de ce qu’ils revendiquent le bénéfice express et d’ordre public des textes légaux et décrets réglementaires applicables, tant au plan de la mise en oeuvre du régime d’assurance des créances des salaries, que de ses conditions et étendues de garantie, plus précisément les articles L. 3253-8, L. 3253-17 et D. 3253-5 du Code du travail.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 1er décembre 2021, à effet au 3 février 20225, l’audience de plaidoiries étant fixée au 17 février 2022.

MOTIFS :

Sur les heures supplémentaires

En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

M. [H] produit aux débats :

– plannings manuscrits avec l’entête de la société et non émargés par l’employeur d’ avril 2017 ( 4 semaines), mai 2017 ( 4 semaines), juin 2017 ( 4 semaines), juillet 2017 ( 4 semaines) , août 2017 ( 4 semaines), septembre 2017( 4 semaines), octobre 2017 ( 4 semaines),

– décompte calculant les heures supplémentaires dues, des repos induits par les heures de nuit, la contrepartie en repos et le rappel incident sur congés payés,

– courrier de Maître [S] en date du 25 octobre 2017 sollicitant le paiement des heures supplémentaires,

– la réponse de la responsable administrative et gestion du personnel en date du 25 octobre 2017 : ‘ le contrat saisonnier de M.[H] se termine le dimanche 29 octobre 2017 date à laquelle nous faisons un point sur les heures supplémentaires accomplies sur la durée totale du contrat.’

– attestation de M.[U] en date du 13 septembre 2018 : ‘J’ai travaillé toute la saison avec [P] [H]. Ce monsieur était un professionnel apprécié de tous les clients. Il était investi dans la Bégude. Il faisait beaucoup d’heures supplémentaires nous remplaçant systématiquement dans notre travail dès que cela lui était possible pour réduire nos heures au maximum. Ce qui m’amène à dire qu’il faisait plus d’heures que tout le monde. De plus l’après-midi, il repassait le linge du restaurant car il n’y avait pas de lingère à l’hôtel. Toute la saison son planning horaire était affiché avec le nôtre dans son bureau en permanence ouvert et accessible à tous. Les repas ne duraient jamais plus de 5 minutes car il y avait toujours un client qui lui demandait ses services. J’ai remarqué que durant la saison, [P] avait beaucoup maigri. Il nous faisait part de la corrélation entre son rythme de travail et cette perte de poids. La Bégude Saint-Pierre n’avait pas assez de personnel. Le barman est tombé malade et n’a été remplacé que longtemps après. Cela lui rajoutait une dose supplémentaire de travail. Personne ne restait longtemps à cause de la charge de travail qui était demandée. [P] allait également l’après-midi selon les bouteilles vides avec sa voiture ou celle de l’entreprise et l’utilisait également pour faire des courses au supermarché de [Localité 7]. Il faisait également du jardinage pour maintenir la terrasse du restaurant belle pour notre clientèle.’

– attestation de M.[N] en date du 2 septembre 2018 : ‘lors de mon arrivée à la Bégude Saint Pierre le 04/05/2017, M.[H] et moi même avions dû mettre la cave à jour ainsi que l’établissement qui étaient en désordre. Mais aussi lorsque je prenais mon poste à 15 heures. M.[H] était très souvent en train de repasser les nappes et les serviettes dédiées au service du soir. Je l’ai également vu faire la plonge et même me solliciter pour lui venir en aide. La Bégude Saint Pierre étant un établissement haut de gamme mais malgré la charge de travail qui était très pesante et peu supportable, M.[H] et son équipe présentaient un service de qualité pour le bien être de ses clients. Enfin, M.[H] affichait chaque semaine le planning du personnel ainsi que le sien dans son bureau, le tableau comprenait les heures ainsi que les jours de repos. Pour finir M.[H] et son équipe devaient prendre une pause de maximum 15 minutes par le repas du personnel car un manque d’effectif était flagrant. Moi même [C] [N], j’ai quitté la Bégude Saint Pierre car malgré mon peu d’expérience dans la restauration je ne me voyais pas continuer une saison dans de telles circonstances. Ceci dit je ne doutais pas du professionnalisme de M.[H] et de la persévérance à la réussite de cet établissement.’

– attestation de Mme [J] en date du 13 septembre 2018 : ‘ j’ai travaillé avec [P] [H] à la Bégude Saint Pierre du 20/09/17 au 28/10/17. C’est quelqu’un de passionné par son métier, très apprécié des clients et très professionnel. De mes premiers jours d’embauche il m’a expliqué l’importance de bien remplir les feuilles de pointage. Chaque soir nous remplissions ces fiches et chaque semaine [P] les amenaient à la direction après les avoir signées et photocopiées. Durant le mois que j’ai passé avec [P] il n’a pas arrêté. Il a tellement le souci de bien faire qu’il était sur tous les fronts pour compenser le peu de personnel qu’il y avait. J’admirais sa résistance face à la charge de travail qu’il avait jusqu’à ce jour car il m’a avoué être sur les rotules et avoir perdu onze kilos entre avril et juillet. Même durant son temps de pause les clients le sollicitaient et [P] répondait toujours présent. J’ai constaté que son planning ainsi que les nôtres étaient en permanence affichés dans le bureau où tout le monde avait accès.’

– attestation Mme [O] en date du 12 septembre 2018 : ‘ J’ai travaillé à la Bégude Saint Pierre en qualité d’extra du 30 septembre 2017 au 28 octobre 2017. M.[H] [P] avait d’ailleurs participé à mon entretien préalable au contrat. Il a été mon responsable directeur du restaurant pendant mon activité au sein de l’entreprise. Je peux dire que M.[H] est un professionnel dans l’âme. Un accompagnant pour les employés, exceptionnel. Il a su me mettre immédiatement en confiance par sa gentillesse en tant que manager. Ses paroles toujours très cordiales, respectueuses et s’investissant totalement pour accompagner ses collaborateurs. C’est un homme très classe. Il est indéniable que M.[H] a fréquenté professionnellement de beaux endroits car il avait une finesse dans ses paroles et dans son attitude. Les clients le faisaient d’ailleurs souvent remarquer. Pour citer : ‘ on ressent que ce monsieur est un cinq étoiles à lui seul.’ J’étais très fière de travailler à ses côtés. Il était autant impliqué dans le service que dans toutes les tâches telles que repassage du linge du restaurant, entretien, plonge, rangement. Il ne faisait aucune différence au personnel qu’il encadrait. Il est un monsieur très soigné et soigneux. Il gérait également les plannings du personnel, dans son bureau, tout était clair et affiché. Nous avions tous nos plannings et chaque fin de soirées nous y notions nos totaux d’heures exactes. Son bureau était toujours ouvert à tous. Il a confiance. Il était en accord avec l’une de mes remarques concernant le repas d’une demi-heure qui n’était pas respecté. Toujours une demande d’un client, un apéritif à servir, un accueil ou autre. Il disait que c’était ainsi et qu’il ne pouvait rien y faire malheureusement, que beaucoup bien avant moi s’en plaignait déjà. Pourtant cette demi-heure nous était bien déduite du salaire. M.[H] prenait très à coeur les besoins des clients et du personnel. Faisait même du co-voiturage au besoin de collègues. Un jour je ne l’ai pas vu bien du tout. J’ai été immédiatement l’interpeller et lui ai demandé si il se sentait bien. Il était bouleversé. Malgré cela il s’est repris et a fait son service impeccablement. Après ce jour là, je ne l’ai plus jamais vu. J’ai demandé à la secrétaire [M] quand M.[P] [H] sera là mais elle n’a pas su me répondre. Mais j’ai bien saisi qu’il faudra faire sans lui, sans directeur de restaurant. Avec peu pour travailler en terme de vin pour les clients, on a brodé pour finaliser sans lui. Je tiens également à préciser que lorsque j’ai demandé à ma collègue de service en salle Yona si elle avait une idée de l’arrêt subit de la présence de M.[P] [H], elle m’a montré le planning affiché dans le bureau du site et j’ai compris en le voyant que ses horaires étaient très lourds pour son âge. Et très sincèrement je pense qu’il a donné énormément pour l’entreprise et qu’en comparant avec mon beau-père ou ma maman à son âge, je ne sais pas s’ils auraient pu avoir une telle amplitude de travail avec tant de manutentions. Je me demande quand il vivait encore en dehors du travail.’

– photographie d’une jeune fille devant les mêmes plannings que ceux précédemment cités.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre.

La société La Bégude Saint Pierre pour contester la pertinence des éléments produit par l’appelant fait observer que :

– les plannings ont été établis unilatéralement par M.[H] et n’ont été transmis qu’en vue de l’établissement de son solde de tout compte,

– il n’a jamais fait part de sa difficulté à prendre les pauses repas et il ne lui a jamais été demandé de le faire,

– il est à relever de nombreuses incohérences et omission dans les plannings produits à l’instar de la semaine du 11 au 17 septembre 2017 et celle du 23 au 29 octobre 2017 où il a récupéré 2 x 39 heures, ou les semaines du 18/09/2017, 25/09/2017, 09/10/2017 et 16/10/2017 où il a récupéré des heures pour en arriver à un total de 107,25 heures, la fermeture du restaurant le 3 et 4 juillet 2017 où il a indiqué travailler 7 à 8 heures,

– des incohérences sur les relevés d’heures :

> le 1 er mai 2017, le restaurant est fermé le midi (ses collègues du restaurant sont en repos ce jour-là), M.[P] [H] a juste assuré le service du petit déjeuner (fin du petit déjeuner à 10h00) pour au maximum les 28 clients de l’hôtel : il note tout de même 5h45 de travail (entre 6h45 et 12h30),

> le 7 juin 2017, où il n’y avait aucune réservation sur le repas de midi, M.[P] [H] a noté 13 heures de travail. Or, le 9 juin 2017, où il y a, à la fois, des réservations pour le déjeuner et pour le dîner, M.[P] [H] a noté le même nombre d’heures de travail, soit 13h30 de travail sur la journée

>les 3 et 4 juillet 2017, le restaurant est fermé. Pour autant, dans ses plannings produits devant le Conseil puis devant la Cour, il note : « n’ayant pris aucune note ces 2 jours, je marque 7 et 8 heures »

>le 15 août 2017, alors qu’il y a 20 couverts à midi, il note qu’il a travaillé seulement entre

10h00 et 16h15 ;

> le 16 août 2017, alors qu’il y a 9 couverts à midi, il note également qu’il a travaillé entre 10h00 et 16h00 ;

> le 24 août 2017, alors que le restaurant est fermé le midi, M.[P] [H] a noté

10h15 de travail (soit de 9h15 à 13h30)

> le 6 septembre 2017, alors que le restaurant est fermé le soir, M.[P] [H] a

noté 12h30 de travail (soit de 8h00 à 00h30)

– les heures qu’il prétend avoir réalisées ne l’ont pas été à la demande de l’employeur,

– il disposait de moyens suffisants pour mener à bien ses fonctions avec 24 salariés pour une moyenne de 40 clients au petit-déjeuner, 10 personnes à midi et 35 clients le soir,

– il n’a pas respecté les obligations contractuelles et conventionnelles auxquelles il est soumis.

Pour démontrer ses arguments la société La Bégude Saint Pierre verse au débat

– la synthèse de la convention collective HCR,

– le CDD saisonnier de M. [H] signé le 3 avril 2017,

– détail du décompte des heures établies par l’employeur,

– plannings de Mmes [X] [T] et [V] [I] pour la semaine du 1er au 7 mai 2017,

– cahier de réservation du restaurant du 5 avril 2017 au 18 mai 2017, du 1er août 2017 au 1er septembre 2017, du 1er septembre 2017 au 10 septembre 2017,

– le planning de réservation de l’hôtel pour la nuit du 30 avril au 1er mai 2017,

– audit de l’établissement réalisé par la SAS La Martyère en date du 10 juin 2017 indiquant notamment : ‘ En salle à mon grand étonnement une toute autre histoire. Le maître d’hôtel qui est responsable de la partie restaurant travaille et dirige son équipe avec beaucoup de légèreté. Il passe son temps à donner des ordres et des consignes, très bien, cela est son rôle de diriger mais aussi travailler avant tout, vous êtes dans une petite structure où tout le monde doit fournir un travail réel et non fictif. Après une longue discussion avec lui, sur son parcours et ses attentes, je comprends mieux sa façon d’aborder son emploi. Il est pour lui une façon claire de laisser filer le temps, faire des heures, et laisser les autres travailler. Pour lui le seul plaisir de saluer et s’assurer que tout se passe bien pour le client compte. En attendant je lui explique que pour l’instant le compteur des heures de l’ensemble du personnel tourne et non celui des intérêts de l’établissement. Je pense donc qu’il est indispensable pour vous de mettre des fiches de contrôle et des réunions de service pour vous assurer du personnel mis en place tous les jours[…] Il faut à mon sens envisager changer de style de restauration pour attirer une nouvelle clientèle et avoir des frais de fonctionnement mieux maîtrisés. Revoir le poste de plonge et en définir les tâches de chaque service. Avoir un entretien régulier avec les chefs de service. Avoir une vigilance toute particulière pour le responsable de salle qui est dans une démarche nuisible par ses intentions personnelles à l’égard de la Bégude. […] Lors de vos réunions, toutes les semaines, demander les plannings de vos équipes et les valider avec eux.’

– attestation de Mme [L] [A] en date du 2 septembre 2018 : ‘ pendant toute la saison 2017, j’ai pu apprécier les qualités de M.[H] quant au soin qu’il portait à faire en sorte que nos clients soient bien accueillis et passent un bon moment dans notre restaurant. Le début de saison a été très intense pour tous les services y compris le restaurant car nous sortions d’une période de fermeture hivernale. La charge de travail de M.[H] en avril était importante et nous ne l’avons jamais contesté. Une saison en hôtellerie restauration n’est jamais calme et reposante, surtout pour un chef de service du fait de leur responsabilité. Concernant M.[H], ce que j’ai du mal à percevoir c’est la différence entre le temps de travail consacré à effectuer des tâches qui relèvent de son métier et celles qui n’en font pas partie. Le fondement de mon questionnement est donc de comprendre pourquoi est-ce que quand il avait l’opportunité de rester chez lui et se reposer, il restait à la Bégude. Je reprends son exemple des citronniers car nous avons un agent d’entretien et de maintenance qui est en charge des extérieurs de la Bégude et qui n’avait pas besoin d’aide pour les planter. De la même manière pour les commandes auprès de notre fournisseur de vin, il suffisait qu’il donne la liste des éléments à commander à une autre personne présente le mardi. D’ailleurs n’importe qui en réception pouvait le faire et l’a toujours fait, et qui pouvait prendre le relais sur cet appel téléphonique. Un autre exemple sur le petit déjeuner qu’il mentionne, le buffet se termine à 10h comme nous l’annonçons à nos clients à leur arrivée. Nous n’avons donc pas à rougir de ranger le buffet à cette heure là, le service clientèle continu si des clients ont manqué le coche, nous pouvons leur préparer un plateau sur mesure même à 10h45, cela n’enlève en rien notre service et cela ne nous empêche pas d’avancer sur les autres tâches en parallèle et donc de ne pas déborder sur nos heures de repas in fine.’

– le registre du personnel du 1er avril 2017 au 31 octobre 2017,

– l’accord collectif sur la durée et l’organisation du temps de travail du 26 avril 2016,

– le récépissé du dépôt de l’accord aux syndicats, à la DIRECCTE et au conseil de prud’hommes de Nîmes,

– accord n°2 du 5 février 2007 relatif à l’aménagement du temps de travail,

– échange entre le secrétaire général CFDT et Mme [L] en date du 15 avril 2016 dans lequel il est demandé à l’employeur que sur l’accord ‘soit mentionné la durée maximum hebdomadaire et si possible la durée maximum journalière par poste avant de signer l’accord’

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que les incohérences relevées par l’employeur confortées par les réservations du restaurant et de l’hôtel et non contestées par le salarié qui prétend qu’elles ne remettent pas en cause ses demandes, s’avèrent pourtant suffisantes pour considérer que les plannings produits par le salarié n’emportent pas la conviction de la réalisation effective des heures supplémentaires demandées.

Si les attestations produites par M.[H] témoignent de ce qu’il était un bon professionnel, et effectuait de nombreuses tâches, elles demeurent imprécises sur le volume d’heures supplémentaires effectuées par M.[H], mais surtout, les témoignages rapportent que ce dernier exécutait des tâches qui ne lui incombaient pas et qui auraient pu être prises en charge par les personnels déjà dédiés à cela.

Ainsi le registre du personnel allié à l’audit du mois de juin 2017 démontre notamment qu’il y avait du personnel en sureffectif en cuisine, un employé de maintenance, deux femmes de chambre de sorte qu’il apparaît étonnant que M.[H] se soit retrouvé dans l’obligation de faire la vaisselle, le jardin et repasser le linge.

A l’inverse l’audit réalisé en juin 2017 soit quatre mois avant la fin du CDD de M.[H] dénonce à son encontre que ‘le maître d’hôtel qui est responsable de la partie restaurant travaille et dirige son équipe avec beaucoup de légèreté. Il passe son temps à donner des ordres et des consignes, très bien, cela est son rôle de diriger mais aussi travailler avant tout, vous êtes dans une petite structure où tout le monde doit fournir un travail réel et non fictif.’

Cet avis est corroboré par le fait que M.[H] , qui ne le conteste pas, ne s’est jamais plaint auprès de son employeur des nombreuses heures supplémentaires qu’il dit avoir exécutées, n’en a demandé le paiement que 4 jours avant la fin du CDD, mais n’a surtout jamais demandé l’autorisation à son employeur alors que son contrat de travail prévoit que ‘ toute heure supplémentaire doit faire l’objet de l’accord préalable et exprès du supérieur hiérarchique. M.[P] [H] s’engage à informer son employeur de toute activité complémentaire et à respecter les durées maximales de travail et les durées de repos quotidiens et hebdomadaires, prévues par la loi, la convention collective et les accords d’entreprise.’

Dès lors la réalité des heures accomplies n’étant pas rapportée, M.[H] sera débouté de sa demande au titre du rappel des heures supplémentaires mais également sur la contrepartie en repos et au titre du repos induit par les heures de nuit pour les mêmes motifs que précédemment développés.

En conséquence le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a condamné la société La Bégude Saint Pierre à payer diverses sommes au titre du rappel des heures supplémentaires, au titre du repos induit par les heures de nuit et du rappel incident sur congés payés et statuant de nouveau la cour déboutera M.[H] de l’ensemble de ces demandes.

Sur la demande reconventionnelle de l’employeur

La société La Bégude Saint Pierre demande le remboursement de la somme de 5852,87 euros versée selon elle à tort.

Toutefois il ressort du solde de tout compte de M.[H] que cette somme correspond au paiement des ‘heures normales’.

En conséquence la société La Bégude Saint Pierre sera déboutée de cette demande.

Sur les dépens

Succombant au procès la cour condamnera M.[H] aux dépens de la procédure d’appel.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

Infirme le jugement rendu le 12 avril 2019 par le conseil de prud’hommes de Nîmes en toutes ses dispositions.

Déboute la SARL La Bégude Saint Pierre de sa demande de remboursement de la somme de 5852,87 euros.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraire.

Dit n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article 700 du CPC.

Condamne M. [P] [H] aux dépens d’appel.

Arrêt signé par Monsieur ROUQUETTE-DUGARET, Président et par Mme BERGERAS, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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Victrice Philippon
Victrice Philippon
5 mois il y a

Merci pour cet article détaillé. Pouvez-vous préciser dans quelles conditions un saisonnier peut prétendre à une indemnisation pour des heures supplémentaires non rémunérées ?

Césaire Laurent
Césaire Laurent
Répondre à  Victrice Philippon
5 mois il y a

Voici des informations que jai recueillies sur le sujet. En principe, un travailleur saisonnier a les mêmes droits quun employé permanent en ce qui concerne la rémunération des heures supplémentaires. En France, toute heure travaillée au-delà de la durée légale du travail (35 heures par semaine) doit être considérée comme une heure supplémentaire et doit donc être rémunérée à un taux plus élevé.

Si un travailleur saisonnier estime que ses heures supplémentaires nont pas été correctement rémunérées, il peut en premier lieu en discuter avec son employeur. Si cela ne résout pas le problème, il peut saisir linspection du travail ou le conseil des prudhommes.

Cependant, il est important de noter que la preuve de ces heures supplémentaires incombe au travailleur. Il peut être utile de conserver des documents tels que des relevés de temps, des courriels ou des messages textuels comme preuves.

Enfin, je vous conseillerais de consulter un avocat ou un conseiller en droit du travail pour obtenir des conseils plus précis et personnalisés à votre situation.

Jespère que cela vous aide!

Favre Briand
Favre Briand
5 mois il y a

Merci pour cet article très instructif. Pourriez-vous préciser si les heures supplémentaires non rémunérées peuvent être réclamées après la fin du contrat saisonnier ? Quelle serait la procédure juridique à suivre ?

Cantrelle Dauphin
Cantrelle Dauphin
Répondre à  Favre Briand
5 mois il y a

Bonjour,

Je peux partager avec vous quelques informations sur le sujet, en me basant sur mes connaissances personnelles.

Oui, les heures supplémentaires non rémunérées peuvent généralement être réclamées après la fin dun contrat saisonnier. Cela doit être fait dans un délai de trois ans à compter de la date à laquelle la réclamation aurait pu être faite pour la première fois.

La première étape serait de prendre contact avec votre employeur et de lui faire part de votre demande, de préférence par écrit. Si cela ne résout pas le problème, vous pouvez saisir les Prudhommes. Il est conseillé de se faire accompagner par un avocat pour cette démarche.

Néanmoins, chaque situation étant unique, je vous recommande vivement de consulter un professionnel du droit pour obtenir des conseils adaptés à votre situation spécifique.

Jespère que ces informations vous seront utiles.

Denis Millot
Denis Millot
5 mois il y a

Merci pour cet article détaillé. Pourriez-vous préciser les recours possibles pour un salarié saisonnier si lemployeur refuse de payer les heures supplémentaires effectuées?

Perrine Germain
Perrine Germain
Répondre à  Denis Millot
5 mois il y a

En cas de refus de paiement des heures supplémentaires par lemployeur, le salarié saisonnier dispose de plusieurs recours :

1. Le dialogue : Avant toute action juridique, il est conseillé dabord de discuter avec lemployeur pour trouver une solution à lamiable. Des malentendus peuvent parfois être résolus de cette manière.

2. Saisine de linspection du travail : En cas déchec du dialogue, le salarié peut saisir linspection du travail qui pourra mener une enquête et prendre les mesures nécessaires si lemployeur est en tort.

3. Action en justice : Si lemployeur persiste à ne pas payer les heures supplémentaires, le salarié peut saisir le Conseil de Prudhommes. Il lui faudra alors apporter la preuve de ces heures non payées (planning, témoignages, etc.).

4. Saisine du défenseur des droits : En dernier recours, si toutes les autres options ont échoué, le salarié peut saisir le Défenseur des droits.

Noubliez pas que chaque situation est unique et il pourrait être bénéfique de consulter un avocat ou un syndicat pour obtenir des conseils spécifiques à votre cas. Enfin, notez que des délais de prescription existent pour intenter une action en justice, il est donc important dagir rapidement.

Jespère que ces informations vous seront utiles. Bon courage.

Suzanne Chauveau
Suzanne Chauveau
5 mois il y a

Merci pour cet article détaillé. En tant que dirigeant dentreprise, je suis curieux de connaître les conséquences juridiques pour lemployeur en cas de non-paiement des heures supplémentaires aux travailleurs saisonniers.

Marian Marais
Marian Marais
5 mois il y a

Merci pour cet article détaillé. Pouvez-vous préciser si le saisonnier, en cas de non-paiement des heures supplémentaires, peut saisir directement le conseil des prudhommes sans passer par une procédure de conciliation préalable?

Flavyere Poisson
Flavyere Poisson
Répondre à  Marian Marais
5 mois il y a

En général, tout travailleur, y compris le travailleur saisonnier, a le droit de saisir le conseil des prudhommes en cas de litige lié à son contrat de travail, comme le non-paiement des heures supplémentaires.

Cependant, depuis le 1er août 2016, avant de saisir le conseil des prudhommes, une phase de conciliation préalable est obligatoire. Cest ce quon appelle la phase de conciliation préliminaire obligatoire (CPO). Le but de cette phase est de trouver une solution amiable au conflit, sans avoir à passer par un procès.

Si cette phase de conciliation naboutit pas à une solution, le travailleur peut alors saisir le conseil des prudhommes. Il est toujours recommandé de consulter un avocat ou un syndicat pour obtenir des conseils spécifiques à votre situation.

Jespère que cela aide, mais assurez-vous de consulter un professionnel pour obtenir des conseils précis et personnalisés.

Cordialement.

Perrine Edouard
Perrine Edouard
5 mois il y a

Merci pour cet article détaillé et informatif. Comment pourrait-on prouver le nombre dheures supplémentaires effectuées si lemployeur ne tient pas un registre précis? Quelles sont les conséquences juridiques pour lemployeur?

Arnou Crouzet
Arnou Crouzet
Répondre à  Perrine Edouard
5 mois il y a

Bonjour,

Votre question est très pertinente et cest un sujet qui concerne de nombreux salariés. Pour prouver le nombre dheures supplémentaires effectuées, vous pouvez vous appuyer sur différents éléments : mails échangés en dehors des heures de travail, témoignages de collègues, plannings, etc. Lessentiel est de pouvoir documenter autant que possible votre réclamation.

Concernant les conséquences juridiques pour lemployeur, si celui-ci ne respecte pas la législation concernant les heures supplémentaires, il sexpose à plusieurs sanctions. Cela peut aller de lamende administrative au paiement de dommages et intérêts au salarié lésé. Dans les cas les plus graves, il peut même y avoir des sanctions pénales.

Néanmoins, chaque situation est unique et il est toujours préférable de consulter un avocat ou un conseiller juridique pour obtenir des conseils adaptés à votre cas spécifique.

Jespère que ma réponse vous a été utile. Noubliez pas que je ne suis pas un professionnel du droit, mais jessaie simplement de partager mes connaissances sur le sujet. Pour des conseils juridiques précis, veuillez consulter un professionnel compétent.

Gage Coulibaly
Gage Coulibaly
5 mois il y a

Merci pour cet article détaillé. Est-ce que les règles concernant les heures supplémentaires non rémunérées sappliquent également aux travailleurs saisonniers étrangers ? Japprécierais votre éclairage sur cette question.

Veira Marie
Veira Marie
Répondre à  Gage Coulibaly
5 mois il y a

En principe, toutes les règles du droit du travail doivent sappliquer à tous les travailleurs, quils soient permanents, temporaires, saisonniers ou étrangers. Cela inclut donc le droit à la rémunération des heures supplémentaires.

Cependant, les modalités de rémunération des heures supplémentaires peuvent varier en fonction de la convention collective applicable (voir la Convention collective nationale de la production agricole et CUMA du 15 septembre 2020).  De plus, il peut exister des exceptions pour certains secteurs dactivité ou certaines professions (Tourisme, HCR etc) .

Timon Hoarau
Timon Hoarau
5 mois il y a

Merci pour cet article détaillé. Pouvez-vous préciser si le saisonnier peut réclamer ses heures supplémentaires non rémunérées après la fin de son contrat ? Quel est le délai légal ?

Vitus Peyre
Vitus Peyre
Répondre à  Timon Hoarau
5 mois il y a

Bonjour,

Je ne suis pas un expert juridique, mais je me suis intéressé à votre question et voici ce que jai trouvé.

En principe, un travailleur saisonnier jouit des mêmes droits que les autres employés en ce qui concerne le paiement des heures supplémentaires. Si ces heures ne lui ont pas été rémunérées, il peut parfaitement les réclamer à son employeur, même après la fin de son contrat.

Quant au délai légal pour réclamer ces heures supplémentaires non payées, il serait de trois ans à compter du jour où le salarié a eu connaissance du non-paiement de ses heures supplémentaires, sans pouvoir dépasser cinq ans à compter de la date à laquelle ces heures supplémentaires auraient dû être payées.

Cependant, je vous recommande vivement de consulter un conseiller juridique ou un avocat pour obtenir des informations précises et personnalisées à votre situation.

Jespère que cela vous aide un peu.

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