1. Attention à la requalification des contrats de professionnalisation : Lorsque vous concluez un contrat de professionnalisation à durée déterminée, veillez à respecter strictement les conditions de renouvellement prévues par l’article L6325-7 du Code du travail. Un second contrat ne peut être considéré comme un renouvellement que s’il vise une qualification supérieure ou complémentaire, ou si le bénéficiaire n’a pas pu obtenir la qualification initiale pour des raisons spécifiques. En l’absence de ces conditions, le second contrat pourrait être requalifié en contrat à durée indéterminée (CDI).
2. Il est recommandé de vérifier les mentions contractuelles : Lors de la rédaction ou de la validation d’un contrat de professionnalisation, assurez-vous que toutes les mentions nécessaires sont correctement indiquées. Par exemple, le type de contrat doit être clairement spécifié avec le code approprié (code 11 pour un contrat initial, code 24 pour un renouvellement). Une erreur ou une omission dans ces mentions peut entraîner des conséquences juridiques, telles que la requalification du contrat. 3. Attention à la procédure de licenciement : En cas de rupture d’un contrat de travail requalifié en CDI, il est impératif de suivre la procédure de licenciement prévue par la loi. Cela inclut la notification écrite de la cause réelle et sérieuse de licenciement. Le non-respect de cette procédure peut entraîner des condamnations pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des dommages et intérêts pour le salarié. |
→ Résumé de l’affaireRésumé des faits de l’affaire
Madame [V] [P] a été employée par l’Office municipal de tourisme de [Localité 1] Office de Pôle [Localité 2] à divers titres et sous différents contrats à durée déterminée (CDD) et contrats de professionnalisation entre 2013 et 2016. Les relations de travail étaient régies par la convention collective nationale des organismes de tourisme. Le 26 septembre 2017, Madame [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Bastia pour diverses demandes contre l’Office de tourisme intercommunal de [Localité 1]-[Localité 2], qui avait succédé à son employeur initial. Le 27 juillet 2021, le conseil de prud’hommes a rendu un jugement en faveur de Madame [P], requalifiant son second contrat de professionnalisation en contrat à durée indéterminée (CDI) à compter du 2 mars 2015, en raison de l’illégalité du contrat et de la violation du délai de carence entre ce contrat et le CDD suivant. L’Office de tourisme a été condamné à payer diverses indemnités à Madame [P] et à rectifier les documents légaux sous astreinte. L’Office de tourisme intercommunal a interjeté appel de ce jugement le 16 août 2021, contestant notamment la requalification du contrat et les indemnités accordées. L’Office a demandé à la cour d’infirmer le jugement et de juger la succession des contrats de professionnalisation comme licite, ainsi que l’inapplicabilité du délai de carence entre le contrat de professionnalisation et le contrat saisonnier. En cas de rejet de ces demandes, l’Office a demandé de réduire les indemnités réclamées par Madame [P]. Madame [P], dans ses dernières écritures du 29 septembre 2021, a demandé la confirmation du jugement du 27 juillet 2021 et la condamnation de l’Office de tourisme à lui payer une somme supplémentaire au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’instruction a été clôturée le 4 janvier 2022, et l’affaire a été fixée pour plaidoirie le 8 mars 2022, avec une décision mise en délibéré pour le 1er juin 2022. |
→ Les points essentielsRenouvellement des contrats de professionnalisationEn vertu de l’article L6325-7 du code du travail, un contrat de professionnalisation à durée déterminée peut être renouvelé une fois sous certaines conditions. Ces conditions incluent la préparation à une qualification supérieure ou complémentaire, ou l’incapacité d’obtenir la qualification initiale pour des raisons spécifiques telles que l’échec aux épreuves, la maternité, la maladie, ou la défaillance de l’organisme de formation. Il est admis qu’un seul renouvellement est possible et que deux contrats successifs avec le même employeur sont interdits. Analyse des contrats en questionDans cette affaire, les parties ont été liées par deux contrats de professionnalisation à durée déterminée, du 17 mars au 31 décembre 2014, puis du 2 mars au 31 décembre 2015. Le second contrat ne mentionne pas explicitement qu’il s’agit d’un renouvellement du premier contrat pour une qualification complémentaire ou supérieure. De plus, le code utilisé dans le second contrat indique qu’il s’agit d’un contrat initial, et non d’un renouvellement. Par conséquent, la cour a constaté la succession illégale de deux contrats de professionnalisation à durée déterminée et a requalifié le second contrat en CDI à compter du 2 mars 2015. Violation du délai de carenceLe jugement initial a constaté une violation du délai de carence entre le second contrat de professionnalisation et le CDD subséquent. Cependant, la cour a infirmé cette partie du jugement, car le délai de carence n’est pas applicable dans ce cas particulier, notamment pour un contrat à durée déterminée saisonnier. Madame [P] a donc été déboutée sur ce point. Indemnité de requalificationConformément à l’article L1245-2 du Code du travail, la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en CDI entraîne le versement d’une indemnité d’au moins un mois de salaire. Les parties ont sollicité la confirmation du jugement sur ce point, et la cour a confirmé le jugement initial en ce qui concerne l’indemnité de requalification. Licenciement sans cause réelle et sérieuseL’employeur n’a pas respecté la procédure de licenciement pour le contrat requalifié en CDI, ce qui constitue un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Madame [P] a été indemnisée à hauteur de 2.500 euros pour ce licenciement, en tenant compte de son ancienneté, de son âge, et de sa situation postérieure au licenciement. Le jugement initial a été infirmé quant au montant des dommages et intérêts, mais confirmé en ce qui concerne la condamnation de l’employeur. Non-respect de la procédure de licenciementL’employeur a également été condamné à verser des dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement. Le montant de 1.615,66 euros a été jugé exact par la cour, et le jugement initial a été confirmé sur ce point. Indemnité compensatrice de préavis et congés payésL’employeur a été condamné à verser une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, car l’inexécution du préavis est imputable à l’employeur. Le jugement initial a été confirmé sur ce point, avec la précision que les sommes doivent être fixées en brut. Remise des documents légaux de ruptureLa cour a ordonné à l’Office de tourisme intercommunal de remettre à Madame [P] les documents légaux de rupture rectifiés, conformément à la présente décision, dans un délai de deux mois. Madame [P] a été déboutée du surplus de ses demandes à cet égard. Condamnation aux dépens et frais irrépétiblesL’Office de tourisme intercommunal a été condamné aux dépens de première instance et d’appel. La cour a également condamné l’Office de tourisme à verser à Madame [P] une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel. Le jugement initial a été confirmé en ce qu’il a ordonné son exécution provisoire. Rejet des demandes supplémentairesLes parties ont été déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires à ces égards, et le jugement initial a été confirmé dans ses dispositions querellées. Les montants alloués dans cette affaire:
|
→ Réglementation applicableArticles des Codes cités et leur texte
– Article L6325-7 du Code du travail – Article L1244-4 du Code du travail (version applicable aux données de l’espèce) – Article L1245-2 du Code du travail – Article 700 du Code de procédure civile Résumé des motifs – Renouvellement du contrat de professionnalisation – Violation du délai de carence – Requalification en CDI – Licenciement sans cause réelle et sérieuse – Indemnité compensatrice de préavis et congés payés – Frais irrépétibles et dépens – Documents légaux de rupture Conclusion – Le jugement initial est confirmé sur plusieurs points, notamment la requalification du contrat en CDI et les indemnités associées. |
→ AvocatsBravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Claudia LUISI, avocat au barreau de BASTIA, représentant l’Office de Tourisme Intercommunal [Localité 1]-[Localité 2]
– Me Olivier CARDI, avocat au barreau de BASTIA, représentant Mademoiselle [V] [P], substitué par Me Stella LEONI, avocat au barreau de BASTIA |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Cour d’appel de Bastia
RG n°
21/00176
———————–
01 Juin 2022
———————–
N° RG 21/00176 – N° Portalis DBVE-V-B7F-CBYM
———————–
Organisme OFFICE DE TOURISME INTERCOMMUNAL [Localité 1]-[Localité 2]
C/
[V] [P]
———————-
Décision déférée à la Cour du :
27 juillet 2021
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BASTIA
19/00062
——————
COUR D’APPEL DE BASTIA
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU : PREMIER JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX
APPELANTE :
OFFICE DE TOURISME INTERCOMMUNAL [Localité 1]-[Localité 2] prise en la personne de son représentant légal en exercice audit siège
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représenté par Me Claudia LUISI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEE :
Mademoiselle [V] [P]
[Adresse 5]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Olivier CARDI, avocat au barreau de BASTIA substitué par Me Stella LEONI, avocat au barreau de BASTIA
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2021/002130 du 18/10/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BASTIA)
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 mars 2022 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame BETTELANI, Vice-présidente placée auprès Monsieur le premier président, chargée du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur JOUVE, Président de chambre,
Madame COLIN, Conseillère
Madame BETTELANI, Vice-présidente placée auprès Monsieur le premier président
GREFFIER :
Madame CARDONA, Greffière lors des débats.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 01 juin 2022
ARRET
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
– Signé par Monsieur JOUVE, Président de chambre et par Madame CARDONA, Greffière présente lors de la mise à disposition de la décision.
EXPOSE DU LITIGE
Madame [V] [P] a été liée à l’Office municipal de tourisme de [Localité 1] Office de Pôle [Localité 2] en qualité de conseiller en séjour, suivant contrat de travail à durée déterminée saisonnier à effet du 2 mai 2013 au 30 septembre 2013, prorogé par avenant jusqu’au 8 novembre 2013, puis dans le cadre d’un contrat de professionnalisation à durée déterminée du 17 mars 2014 au 31 décembre 2014, avant un second contrat de professionnalisation à durée déterminée à effet du 2 mars 2015 au 31 décembre 2015.
Elle a été ensuite embauchée par le même employeur, en qualité de conseiller en séjour dans le cadre d’un contrat à durée déterminée saisonnier à effet du 15 mars 2016 au 31 octobre 2016.
Les rapports entre les parties étaient soumis à la convention collective nationale des organismes de tourisme.
Madame [V] [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Bastia, par requête reçue le 26 septembre 2017, de diverses demandes, dirigées contre l’Office de tourisme intercommunal de [Localité 1]-[Localité 2], venant aux droits de l’employeur initial.
Selon jugement du 27 juillet 2021, le conseil de prud’hommes de Bastia a :
-dit que le second contrat de professionnalisation ne vise pas une qualification différente ou supérieure et qu’il est donc entaché d’illégalité,
-constaté la violation du délai de carence entre le second contrat de professionnalisation et le CDD subséquent,
-ordonné la requalification du second contrat de professionnalisation en CDI à effet au 2 mars 2015,
En conséquence,
-condamné l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] à payer à Madame [V] [P] les sommes suivantes :
*dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement : 1.615,66 euros
*indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 9.693,66 euros
*indemnités de préavis : 1.615,66 euros
*indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 161,56 euros
*indemnité de requalification en CDI : 1.615,66 euros
-ordonné la rectification des documents légaux sous astreinte de 10 euros par jours de retard, à compter de quinze [mot manquant] à compter du présent jugement pour une durée de trois mois,
-condamné l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du CPC,
-débouté l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] de l’ensemble de ses demandes,
-condamné l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] aux dépens.
Par déclaration du 16 août 2021 enregistrée au greffe, l’Office de tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] a interjeté appel de ce jugement en ce qu’il a : dit que le second contrat de professionnalisation ne vise pas une qualification différente ou supérieure et qu’il est donc entaché d’illégalité, constaté la violation du délai de carence entre le second contrat de professionnalisation et le CDD subséquent, ordonné la requalification du second contrat de professionnalisation en CDI à effet au 2 mars 2015, en conséquence, condamné l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] à payer à Madame [V] [P] les sommes suivantes : dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement : 1.615,66 euros, indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 9.693,66 euros, indemnités de préavis : 1.615,66 euros, indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 161,56 euros, indemnité de requalification en CDI : 1.615,66 euros, ordonné la rectification des documents légaux sous astreinte de 10 euros par jours de retard, à compter de quinze [mot manquant] à compter du présent jugement pour une durée de trois mois, condamné l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du CPC, débouté l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] de l’ensemble de ses demandes, condamné l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] aux dépens.
Aux termes des dernières écritures de son conseil transmises au greffe en date du 13 septembre 2021 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, l’Office de tourisme intercommunal de [Localité 1]-[Localité 2] a sollicité :
-d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et notamment en ce qu’il a : dit que le second contrat de professionnalisation ne vise pas une qualification différente ou supérieure et qu’il est donc entaché d’illégalité, constaté la violation du délai de carence entre le second contrat de professionnalisation et le CDD subséquent, ordonné la requalification du second contrat de professionnalisation en CDI à effet au 2 mars 2015, en conséquence, condamné l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] à payer à Madame [V] [P] les sommes suivantes : dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement : 1.615,66 euros, indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 9.693,66 euros, indemnités de préavis : 1.615,66 euros, indemnité compensatrice de congés payés sur préavis : 161,56 euros, indemnité de requalification en CDI : 1.615,66 euros, ordonné la rectification des documents légaux sous astreinte de 10 euros par jours de retard, à compter de quinze [mot manquant] à compter du présent jugement pour une durée de trois mois, condamné l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] au paiement de la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du CPC, débouté l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] de l’ensemble de ses demandes, condamné l’Office tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] aux dépens
-statuant à nouveau :
* au principal, de juger que la succession de deux contrats de professionnalisation est licite, de juger l’inapplicabilité du délai de carence entre le contrat de professionnalisation et le contrat de travail saisonnier, en conséquence de débouter purement et simplement Madame [P] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
*au subsidiaire, de juger que la somme de 19.987,89 euros réclamée au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut être allouée, en toute hypothèse, la débouter de cette demande ladite salariée ne pouvant prétendre à une telle indemnité, son ancienneté étant inférieure à 2 ans et celle-ci ne rapportant pas la preuve du préjudice subi, de confirmer le jugement entrepris en ce que l’indemnité de requalification ne saurait excéder un mois de salaire, soit la somme de 1.655,65 euros,
-en tout état de cause, de condamner Madame [P] à la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’instance.
Aux termes des dernières écritures de son conseil transmises au greffe en date du 29 septembre 2021 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, Madame [P] a demandé :
-de confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 27 juillet 2021,
-y ajoutant, de condamner l’Office de tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 4 janvier 2022, et l’affaire fixée à l’audience de plaidoirie du 8 mars 2022, où la décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 1er juin 2022.
En vertu de l’article L6325-7 du code du travail, le contrat de professionnalisation à durée déterminée peut être renouvelé une fois si :
1° Le bénéficiaire, ayant obtenu la qualification visée, prépare une qualification supérieure ou complémentaire
2° Le bénéficiaire n’a pu obtenir la qualification visée pour cause d’échec aux épreuves d’évaluation de la formation suivie, de maternité, de maladie, d’accident du travail, de maladie professionnelle ou de défaillance de l’organisme de formation.
Il est admis que seul un renouvellement de contrat de professionnalisation à durée déterminée est possible, et qu’il n’est pas possible de conclure deux contrats de professionnalisation à durée déterminée successifs auprès du même employeur.
En l’espèce, les parties ont été liées, notamment au travers de deux contrats de professionnalisation à durée déterminée, à effet du 17 mars au 31 décembre 2014, puis du 2 mars au 31 décembre 2015.
Il ne ressort d’aucune mention expresse du second contrat de professionnalisation, ni ne se déduit d’aucune mention dudit contrat ou des éléments soumis l’appréciation de la cour, qu’il constituait un renouvellement du premier contrat destiné à préparer la bénéficiaire à une qualification complémentaire au premier contrat, contrairement à ce qu’expose l’appelant, qui n’argue parallèlement pas, ni a fortiori ne démontre que ce second contrat constituait un renouvellement destiné à préparer une qualification supérieure, ou un renouvellement suite à l’absence d’obtention de la qualification pour cause d’échec tel que défini par les dispositions légales précitées. Cette analyse relative à une absence de renouvellement du contrat de professionnalisation à durée déterminée destiné à préparer la bénéficiaire à une qualification complémentaire au premier contrat est confirmée par le fait qu’à rebours de ce qu’affirme l’appelant, que dans les dispositions relatives au ‘type de contrat’ du second contrat de professionnalisation à durée déterminée figure le code 11 qui correspond à un contrat initial (et non le code 24, afférent à un renouvellement pour obtention d’une qualification supérieure ou complémentaire). Il ne peut, en outre, qu’être observé que la validation par l’AGEFOS, invoquée par l’appelant, n’a pas d’incidence déterminante dans le présent débat judiciaire relatif à la requalification en contrat à durée indéterminée. Dès lors, faute de mise en évidence que ce second contrat de professionnalisation répondait aux exigences de l’article L6325-7 susvisé, la cour ne peut que constater la succession de deux contrats de professionnalisation à durée déterminée, prohibée, et non licite contrairement à ce dont se prévaut l’appelant. Dans ces conditions, il ne peut être reproché aux premiers juges d’avoir dit que le second contrat de professionnalisation ne vise pas une qualification différente ou supérieure et qu’il est donc entaché d’illégalité et ordonné la requalification du second contrat de professionnalisation en CDI à effet au 2 mars 2015, tout en déboutant l’Office de tourisme intercommunal de [Localité 1]-[Localité 2] de ses demandes inverses à ces égards. Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ces points et les demandes en sens contraire de l’appelant rejetées.
En revanche, en l’état de cette requalification, et au vu des règles applicables en cette matière (disposant que si un contrat à durée déterminée succède à un contrat de professionnalisation, le délai de carence n’est pas applicable pour les cas particuliers visés à l’article L1244-4 du code travail dans sa version applicable aux données de l’espèce, soit notamment pour un contrat à durée déterminée saisonnier), le jugement entrepris, utilement critiqué à cet égard par l’appelant, ne pourra qu’être infirmé en ses dispositions afférentes au constat de la violation du délai de carence entre le second contrat de professionnalisation et le CDD [saisonnier] subséquent et Madame [P] déboutée sur ce point.
Les demandes en sens contraire seront rejetées.
En application de l’article L1245-2 du Code du travail, lorsque le juge fait droit à une demande de requalification de contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, il doit condamner l’employeur à verser au salarié une indemnité ne pouvant être inférieure à un mois de salaire, à moins que la requalification découle du seul fait de la poursuite de la relation contractuelle de travail après l’échéance de son terme.
Au titre de ses demandes principales, l’appelant sollicite l’infirmation du jugement et le débouté de la demande adverse et au titre de ses demandes subsidiaires, en cas de requalification, sollicite la confirmation du jugement en ses dispositions afférentes à l’indemnité de requalification, tandis que l’intimée sollicite également la confirmation du jugement sur ce point. Par suite, en l’absence de moyen relevé d’office, le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions à cet égard.
Il est constant que, pour la rupture du contrat de travail ayant lié les parties à effet du 2 mars 2015, requalifié en contrat à durée indéterminée, l’employeur n’a pas respecté de procédure de licenciement, ni n’a énoncé dans écrit susceptible de valoir lettre de licenciement une cause réelle et sérieuse de licenciement. La rupture intervenue le 31 décembre 2015 (et non le 31 octobre 2016 qui correspond à une autre rupture, consécutive à l’arrivée à terme d’un contrat de travail distinct, à durée déterminée, conclu postérieurement à la rupture du 31 décembre 2015) donc s’analyser comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, contrairement à ce qu’expose l’appelant.
Au moment de la rupture du contrat de travail, le 31 décembre 2015, Madame [P], avait moins de deux ans d’ancienneté dans la structure (et non plus de deux ans comme soutenu par l’intimée). Le plancher de six mois de salaires alors prévu pour un salarié ayant plus de deux ans d’ancienneté dans une entreprise de onze salariés et plus n’est donc pas applicable. Au regard de son ancienneté, de son âge, des justificatifs sur sa situation postérieure au licenciement (contrat à durée déterminée à effet du 15 mars au 31 octobre 2016 ; documents émanant de Pôle emploi : courrier de relevé de situation daté du 13 mars 2018, attestation de paiement Pôle emploi et avis de situation du 14 juin 2019, courrier de relevé de situation du 12 novembre 2020; contrat à durée indéterminée à effet du 1er janvier 2021), Madame [P] se verra allouer des dommages et intérêts à hauteur de 2.500 euros et sera déboutée du surplus de sa demande, faute de rapporter la preuve d’un plus ample préjudice, lié causalement à la rupture sans cause réelle et sérieuse du 31 décembre 2015. Le jugement entrepris sera infirmé à cet égard, s’agissant du quantum retenu et l’Office de tourisme intercommunal de [Localité 1]-[Localité 2] sera condamné à verser à Madame [P] une somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L’appelant ne critique pas de manière fondée le jugement en ce qu’il l’a condamné à des dommages et intérêts au titre du préjudice subi pour non-respect de la procédure de licenciement, dont l’octroi est possible en cas de requalification en contrat à durée indéterminée et le cumul n’est pas interdit avec les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au regard des dispositions légales applicables aux données de l’espèce. Ce préjudice, au vu des éléments soumis à l’appréciation de la cour, a exactement évalué par les premiers juges à un quantum de 1.615,66 euros. Par suite, le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions querellées à ces égards (en ce comprises celles afférentes au débouté des demandes de l’Office de tourisme intercommunal de [Localité 1]-[Localité 2] sur ce point) et les demandes en sens contraire rejetées.
Parallèlement, l’appelant ne développe pas de critique utile du jugement en ses chefs afférents à l’indemnité compensatrice de préavis (un mois en vertu des dispositions conventionnelles) et aux congés payés afférents, étant constaté que l’inexécution du préavis est imputable à l’employeur. En l’absence de moyen relevé d’office, le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions querellées à ces égards (en ce comprises celles afférentes au débouté des demandes de l’Office de tourisme intercommunal de [Localité 1]-[Localité 2] sur ce point), tel que sollicité par Madame [P], sauf à préciser que les sommes objets de condamnation au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents sont fixées nécessairement en brut. Les demandes en sens contraire seront rejetées.
Au regard des développements précédents, il sera ordonné, après infirmation du jugement sur ce point, à l’Office de tourisme intercommunal de [Localité 1]-[Localité 2] de remettre à Madame [P] les documents légaux de rupture, rectifiés, conformément au présent arrêt, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision, ce sans astreinte inutile en l’espèce. Madame [P] sera déboutée du surplus de ses demandes à cet égard, non justifié. Les demandes en sens contraire seront rejetées.
L’Office de tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2], succombant principalement sera condamné aux dépens de première instance (le jugement entrepris étant confirmé à cet égard), et de l’instance d’appel qui seront recouvrés comme en matière d’aide juridictionnelle.
Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions querellées afférentes aux frais irrépétibles de première instance.
L’Office de tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] étant seul condamné aux dépens ou perdant le procès au sens de l’article 700 du code de procédure civile, sera rejetée sa demande de condamnation de Madame [P] au titre des frais irrépétibles d’appel.
L’équité commande en outre de prévoir la condamnation de l’Office de tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] à verser à Madame [P] une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.
Le jugement, non utilement critiqué sur ce point, ne pourra qu’être confirmé en ce qu’il a ordonné son exécution provisoire.
Les parties seront déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires à ces égards.
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe le 1er juin 2022,
CONFIRME le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Bastia le 27 juillet 2021, tel que déféré, sauf :
-en ses dispositions relatives au constat d’une violation du délai de carence entre le second contrat de professionnalisation et le CDD subséquent,
-s’agissant du quantum des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-à préciser que les sommes objets de condamnation au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents sont fixées nécessairement en brut,
-en ses dispositions relatives à la rectification des documents légaux sous astreinte de 10 euros par jours de retard, à compter de quinze [mot manquant] à compter du présent jugement pour une durée de trois mois,
Et statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
DEBOUTE Madame [V] [P] de demande au titre du constat d’une violation du délai de carence entre le second contrat de professionnalisation et le CDD subséquent,
CONDAMNE l’Office de tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2], pris en la personne de son représentant légal, à verser à Madame [V] [P] la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
ORDONNE à l’Office de tourisme intercommunal de [Localité 1]-[Localité 2], pris en la personne de son représentant légal, de remettre à Madame [P] les documents légaux de rupture, rectifiés, conformément au présent arrêt, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision,
DÉBOUTE l’Office de tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d’appel,
CONDAMNE l’Office de tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2], pris en la personne de son représentant légal, à verser à Madame [V] [P] une somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,
CONDAMNE l’Office de tourisme intercommunal [Localité 1]-[Localité 2], pris en la personne de son représentant légal, aux dépens de l’instance d’appel, qui seront recouvrés comme en matière d’aide juridictionnelle,
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT