Rupture Anticipée et Non Justifiée d’un Contrat Saisonnier

Notez ce point juridique

1. Attention à la durée minimale des contrats saisonniers : En vertu de l’article L 1242-7 du code du travail, les contrats saisonniers doivent comporter une durée minimale. Il est recommandé de s’assurer que cette durée est clairement stipulée dans le contrat pour éviter toute contestation ultérieure. Dans le cas présent, l’absence de cette mention a conduit à une détermination judiciaire de la durée prévisible du contrat.

2. Attention à la rupture anticipée des contrats à durée déterminée : La rupture anticipée d’un contrat à durée déterminée (CDD) doit se conformer aux motifs énoncés à l’article L 1243-4 du code du travail. Il est recommandé de bien documenter et justifier les raisons de la rupture pour éviter des condamnations pour rupture injustifiée. Dans cette affaire, la rupture par SMS en invoquant un désaccord sur les conditions d’exécution du contrat a été jugée non conforme.

3. Attention au paiement des salaires et à l’exécution de bonne foi du contrat : L’employeur a l’obligation essentielle de payer les salaires convenus en temps voulu, conformément à l’article L. 1222-1 du code du travail. Il est recommandé de respecter scrupuleusement cette obligation pour éviter des réclamations de dommages et intérêts pour préjudice financier et moral. Dans ce cas, le retard de plus de 18 mois dans le paiement des salaires a conduit à une condamnation de l’employeur.

Résumé de l’affaire

Résumé des faits de l’affaire

Contexte et embauche :
– Mme [X] [U] a été embauchée par l’EARL Guillermond le 11 février 2019 sous un contrat de travail à durée déterminée (CDD) à terme imprécis, signé le 8 février 2019.
– L’employeur considère ce contrat comme un CDD saisonnier, tandis que Mme [X] [U] le qualifie de CDD à objet défini.
– Aucune durée minimale n’a été spécifiée dans le contrat.

Exécution du contrat :
– Le contrat était à temps plein, mais l’EARL Guillermond n’a pas fourni suffisamment de travail pour ce volume horaire.
– Le 8 avril 2019, l’EARL Guillermond a contacté Mme [X] [U] concernant l’exécution du travail. Sans réponse, l’employeur a mis fin au contrat par SMS le 9 avril 2019.
– Les documents de fin de contrat ont été envoyés à Mme [X] [U] le 11 avril 2019.

Contestations et procédures :
– Mme [X] [U] a contesté la rupture par courrier recommandé le 19 avril 2019.
– L’EARL Guillermond a répondu le 30 avril 2019, proposant une indemnité que Mme [X] [U] a refusée.
– Mme [X] [U] a saisi le conseil de prud’hommes de Grenoble le 12 novembre 2019, réclamant diverses sommes liées à l’exécution et à la rupture abusive du contrat.

Jugement du conseil de prud’hommes :
– Le 18 février 2021, le conseil de prud’hommes a jugé que le contrat était un contrat saisonnier.
– L’EARL Guillermond a été condamnée à payer :
– 1.600,00 € pour exécution déloyale du contrat.
– 1.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– Mme [X] [U] a été déboutée du surplus de ses demandes.
– L’EARL Guillermond a été condamnée aux dépens.

Appel :
– Mme [X] [U] a interjeté appel le 17 mars 2021.
– Elle demande à la cour de reconnaître le contrat comme un CDD à objet défini et de condamner l’EARL Guillermond pour rupture abusive.
– L’EARL Guillermond maintient que le contrat est un CDD saisonnier et demande la réformation du jugement.

Arguments des parties :
– Mme [X] [U] soutient que le contrat était un CDD à objet défini et réclame diverses indemnités.
– L’EARL Guillermond affirme que le contrat était un CDD saisonnier et que les salaires dus ont été intégralement payés.

Décision de la cour :
– La cour confirme que le contrat de Mme [X] [U] était un contrat saisonnier.
– La cour examine la durée prévisible du contrat et la rupture anticipée injustifiée par l’employeur.

Ce résumé présente les principaux faits et étapes de l’affaire, ainsi que les positions des parties et les décisions judiciaires jusqu’à l’appel.

Les points essentiels

Contrat saisonnier sans durée minimale

En l’espèce, le contrat litigieux que la cour qualifie de saisonnier ne comporte pas de durée minimale en méconnaissance de l’article L 1242-7 du code du travail, si bien qu’il y a lieu de déterminer la durée prévisible dudit contrat.

Offre d’emploi et tâches prévues

L’employeur se prévaut de l’offre Pôle Emploi diffusée, prévoyant un contrat à durée déterminée saisonnier d’un mois pour des travaux de remise en état des sols, paillage et désherbage des serres, ainsi que l’entretien et la plantation, excluant une embauche supérieure à 45 jours.

Durée effective du contrat

Mme [U] avance que le contrat a duré plus d’un mois et plus de 45 jours, et que l’employeur lui a demandé de se présenter pour la récolte d’asperges, ce qui montre que le contrat n’était pas terminé.

Motif de la rupture du contrat

L’EARL Guillermond n’a pas mis fin au contrat en raison de la fin des travaux d’entretien, mais en raison d’un désaccord allégué entre les parties sur les conditions d’exécution du contrat de travail.

Durée prévisible du contrat

Il s’en déduit que la durée prévisible du contrat saisonnier devait aller jusqu’à la fin de la récolte des asperges pour la saison 2019, soit jusqu’au 15 juin 2019.

Durée de la récolte des asperges

Un document de la chambre d’agriculture des Bouches du Rhône indique que la durée de la récolte des asperges est de 60 jours environ de la troisième à la sixième année, ce qui est applicable à la situation de Mme [U].

Rupture anticipée du contrat

La rupture du contrat de travail intervenue le 09 avril 2019 est jugée anticipée par rapport à la durée prévisible fixée au 15 juin 2019, et ne ressort pas d’un des motifs énoncés à l’article L 1243-4 du code du travail.

Condamnation de l’employeur

Il convient de condamner l’EARL Guillermond à payer à Mme [U] la somme de 3447 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture injustifiée du contrat de travail saisonnier à durée déterminée.

Exécution fautive du contrat de travail

L’employeur a admis avoir réglé avec retard l’intégralité du salaire, causant un préjudice financier et moral à Mme [U], justifiant l’allocation de 1600 euros à titre de dommages et intérêts.

Rappel de salaire et indemnité de fin de contrat

Mme [U] a été déboutée de sa demande de rappel de salaire et de congés payés afférents, car l’employeur avait régularisé la situation en cours de procédure.

Indemnité de fin de contrat

Mme [U] est déboutée de sa demande d’indemnité de fin de contrat, car le contrat est qualifié de contrat saisonnier, conformément aux articles L. 1243-10 et L. 1242-2 3ème du code du travail.

Demandes accessoires

L’EARL Guillermond est condamné à payer à Mme [U] une indemnité de procédure de 1000 euros, avec une indemnité complémentaire de 1000 euros, et aux dépens de première instance et d’appel.

Les montants alloués dans cette affaire:

Réglementation applicable

Articles des Codes cités et leur texte

Code du travail

– Article L. 1242-7 :
« Le contrat de travail à durée déterminée doit comporter un terme précis. Il peut ne pas comporter un terme précis lorsqu’il est conclu dans les cas prévus aux 1° et 2° de l’article L. 1242-2. Dans ce cas, il doit être conclu pour une durée minimale. »

– Article L. 1243-4 :
« Le contrat de travail à durée déterminée peut être rompu avant l’échéance du terme :
1° D’un commun accord entre l’employeur et le salarié ;
2° En cas de faute grave ;
3° En cas de force majeure ;
4° En cas d’inaptitude constatée par le médecin du travail. »

– Article L. 1222-1 :
« Le contrat de travail est exécuté de bonne foi. »

– Article L. 1243-10 :
« Lorsque, à l’issue du contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat de travail à durée indéterminée, le salarié a droit à une indemnité de fin de contrat, dite indemnité de précarité, égale à 10 % de la rémunération totale brute perçue pendant l’exécution de son contrat. Cette indemnité est versée au salarié par l’employeur, sauf dans les cas suivants :
1° Rupture anticipée du contrat à l’initiative du salarié ;
2° Rupture anticipée du contrat pour faute grave du salarié ;
3° Rupture anticipée du contrat pour force majeure ;
4° Rupture anticipée du contrat pour inaptitude constatée par le médecin du travail ;
5° Conclusion d’un contrat à durée indéterminée avec le même employeur à l’issue du contrat à durée déterminée. »

– Article L. 1242-2 3° :
« Le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Il ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants :
1° Remplacement d’un salarié absent ou dont le contrat de travail est suspendu ;
2° Remplacement d’un salarié passé provisoirement à temps partiel ;
3° Emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois. »

Code de procédure civile

– Article 700 :
« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. »

– Article 696 :
« La partie perdante est condamnée aux dépens, sauf si le juge met tout ou partie des dépens à la charge d’une autre partie, par une décision motivée. »

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Me Lionel THOMASSON
– Me Murielle VANDEVELDE-PETIT de la SELAS KPMG AVOCATS

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

2 février 2023
Cour d’appel de Grenoble
RG n°
21/01307
C 9

N° RG 21/01307

N° Portalis DBVM-V-B7F-KZHZ

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

Me Lionel THOMASSON

la SELAS KPMG AVOCATS

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 02 FEVRIER 2023

Appel d’une décision (N° RG F19/00963)

rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 18 février 2021

suivant déclaration d’appel du 17 mars 2021

APPELANTE :

Madame [X] [U]

née le 07 Septembre 1995 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Lionel THOMASSON, avocat au barreau de VIENNE

INTIMEE :

E.A.R.L. GUILLERMOND prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Murielle VANDEVELDE-PETIT de la SELAS KPMG AVOCATS, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président,

Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,

M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,

DÉBATS :

A l’audience publique du 23 novembre 2022,

M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président chargé du rapport, et Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère, ont entendu les parties en leurs observations, assistés de Mme Carole COLAS, Greffière, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 02 février 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 02 février 2023.

EXPOSE DU LITIGE’:

Mme [X] [U] a été embauchée le 11 février 2019 par l’exploitation agricole à responsabilité limitée (EARL) Guillermond suivant contrat de travail à durée déterminée (CDD) et à terme imprécis, conclu en la forme d’un titre emploi simplifié agricole (TESA) signé le 8 février 2019. Si l’employeur avance qu’il s’agit d’un CDD saisonnier, la salariée se prévaut d’un CDD à objet défini.

En tout état de cause, aucune durée minimale n’a été prévue au contrat.

Le contrat de travail a été conclu à temps plein, toutefois l’EARL Guillermond n’a pas fourni suffisamment de travail pour ce volume horaire.

Le 8 avril 2019, l’EARL Guillermond a contacté Mme [X] [U] au sujet de l’exécution de la relation de travail. Sans réponse de cette dernière, l’EARL Guillermond a mis fin au contrat de travail de Mme [X] [U] par un SMS en date du 9 avril 2019.

L’EARL Guillermond a adressé à Mme [X] [U] ses documents de fin de contrat datés du 11 avril 2019.

Par courrier recommandé en date du 19 avril 2019, Mme [X] [U] a contesté cette rupture auprès de l’employeur.

Par courrier recommandé en date du 30 avril 2019, l’EARL Guillermond a répondu à Mme [X] [U], lui proposant notamment une indemnité que la salariée a refusée.

Contestant la rupture de son contrat de travail, Mme [X] [U] a saisi le conseil de prud’hommes de Grenoble par requête en date du 12 novembre 2019 afin d’obtenir diverses sommes à caractère salarial et indemnitaire liées à l’exécution et à la rupture abusive d’un CDD à objet défini et subsidiairement d’un CDD saisonnier.

L’EARL Guillermond s’est opposée aux prétentions adverses et a sollicité de juger que le CDD saisonnier de Mme [X] [U] est régulier, que la saison d’entretien des plantations a pris fin le 15 avril 2019 et que le montant des rappels de salaires dus a été intégralement payé.

Par jugement en date du 18 février 2011, le conseil de prud’hommes de Grenoble a’:

-dit que le contrat de travail de Mme [X] [U] était un contrat saisonnier,

-bcondamné I’EARL Guillermond à payer Mme [X] [U] les sommes de :

– 1.600,00 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

– 1.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, lesdites sommes avec intérêts de droit à la date du présent jugement,

– débouté Mme [X] [U] du surplus de ses demandes,

– débouté l’EARL Guillermond sa demande reconventionnelle,

– condamné l’EARL Guillermond aux dépens.

La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusés de réception signé le 19 février 2021 pour l’EARL Guillermond. La lettre est revenue avec la mention pli non réclamé pour Mme [U].

Par déclaration en date du 17 mars 2021, Mme [X] [U] a interjeté appel à l’encontre dudit jugement.

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 17 juin 2021, Mme [X] [U] sollicite de la cour de’:

Vu les articles L. 1222-1, L. 1242-1 et suivants et L. 1243-4 du code du travail ;

Vu la jurisprudence et les pièces ;

Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 18 février 2021 en ce qu’il a débouté Mme [X] [U] de ses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail et à l’indemnité de fin de contrat et en ce qu’il a qualifié le contrat de travail en contrat de travail saisonnier, et, statuant à nouveau et en tant que de besoin :

Dire et juger que Mme [X] [U] a été embauchée dans le cadre d’un contrat de travail à durée déterminée à objet défini ;

Dire et juger que l’EARL Guillermond a rompu avant terme et sans justifier de l’une des circonstances légalement prévues le contrat de travail à durée déterminée de Mme [X] [U] ;

Condamner, en conséquence, l’EARL Guillermond à verser à Mme [X] [U] les sommes suivantes :

-outre intérêts légaux à compter de la demande :

Rappel de salaire sur temps de travail contractuel : 2.206,00 €

Congés payés afférents : 220,60 €

Indemnité de fin de contrat : 313,34 €

-outre intérêts légaux à compter de la notification de la décision à intervenir :

Dommages et intérêts rupture abusive d’un CDD à objet défini : 25.068,00 €

Subsidiairement, dommages et intérêts pour rupture abusive d’un CDD saisonnier conclu pour une durée prévisible de 8 mois : 12.534,00 €

Dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail : 2.000,00€

Condamner l’EARL Guillermond, outre aux entiers dépens, à verser à Mme [X] [U] la somme nette de 2.000,00 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 3 août 2021, l’EARL Guillermond sollicite de la cour de’:

Vu les dispositions applicables,

Vu les pièces versées aux débats,

Constater, dire et juger que le contrat à durée déterminée saisonnier de Mme [X] [U] en la forme du TESA est régulier

Constater, dire et juger que la saison d’entretien des plantations a pris fin au 15 avril 2019

Constater, dire et juger que le montant des rappels de salaires dus sur la période du 11 février au 15 avril 2019 s’élève à 2 203.09 euros bruts et a été intégralement payé

En conséquence :

Réformer les dispositions du jugement rendu le 18 février 2021 par le conseil de prud’hommes de Grenoble ayant condamné la société EARL Guillermond à verser à Mme [X] [U] les sommes de’:

– 1 600,00 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

– 1 000,00 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

Débouter Mme [X] [U] de l’ensemble de ses demandes

Condamner Mme [X] [U] au paiement d’une somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Condamner Mme [X] [U] aux entiers dépens.

Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l’article 455 du code de procédure civile de se reporter aux conclusions des parties susvisées.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 20 octobre 2022.

L’affaire, fixée pour être plaidée à l’audience du 23 novembre 2022.

EXPOSE DES MOTIFS’:

Sur la nature du contrat à durée déterminée conclu entre les parties’:

L’article L.1242-2 du code du travail dans sa version en vigueur depuis le 12 août 2018 énonce que’:

Sous réserve des dispositions de l’article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants :

1° Remplacement d’un salarié en cas :

a) D’absence ;

b) De passage provisoire à temps partiel, conclu par avenant à son contrat de travail ou par échange écrit entre ce salarié et son employeur ;

c) De suspension de son contrat de travail ;

d) De départ définitif précédant la suppression de son poste de travail après consultation du comité social et économique, s’il existe ;

e) D’attente de l’entrée en service effective du salarié recruté par contrat à durée indéterminée appelé à le remplacer ;

2° Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise ;

3° Emplois à caractère saisonnier, dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ou emplois pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois. Lorsque la durée du contrat de travail est inférieure à un mois, un seul bulletin de paie est émis par l’employeur;

4° Remplacement d’un chef d’entreprise artisanale, industrielle ou commerciale, d’une personne exerçant une profession libérale, de son conjoint participant effectivement à l’activité de l’entreprise à titre professionnel et habituel ou d’un associé non salarié d’une société civile professionnelle, d’une société civile de moyens d’une société d’exercice libéral ou de toute autre personne morale exerçant une profession libérale ;

5° Remplacement du chef d’une exploitation agricole ou d’une entreprise mentionnée aux 1° à 4° de l’article L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime, d’un aide familial, d’un associé d’exploitation, ou de leur conjoint mentionné à l’article L. 722-10 du même code dès lors qu’il participe effectivement à l’activité de l’exploitation agricole ou de l’entreprise ;

6° Recrutement d’ingénieurs et de cadres, au sens des conventions collectives, en vue de la réalisation d’un objet défini lorsqu’un accord de branche étendu ou, à défaut, un accord d’entreprise le prévoit et qu’il définit :

a) Les nécessités économiques auxquelles ces contrats sont susceptibles d’apporter une réponse adaptée;

b) Les conditions dans lesquelles les salariés sous contrat à durée déterminée à objet défini bénéficient de garanties relatives à l’aide au reclassement, à la validation des acquis de l’expérience, à la priorité de réembauche et à l’accès à la formation professionnelle continue et peuvent, au cours du délai de prévenance, mobiliser les moyens disponibles pour organiser la suite de leur parcours professionnel ;

c) Les conditions dans lesquelles les salariés sous contrat à durée déterminée à objet défini ont priorité d’accès aux emplois en contrat à durée indéterminée dans l’entreprise.

L’article L 1242-7 du même code expose que’:

Le contrat de travail à durée déterminée comporte un terme fixé avec précision dès sa conclusion.

Toutefois, le contrat peut ne pas comporter de terme précis lorsqu’il est conclu dans l’un des cas suivants:

1° Remplacement d’un salarié absent ;

2° Remplacement d’un salarié dont le contrat de travail est suspendu ;

3° Dans l’attente de l’entrée en service effective d’un salarié recruté par contrat à durée indéterminée ;

4° Emplois à caractère saisonnier définis au 3° de l’article L. 1242-2 ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ;

5° Remplacement de l’une des personnes mentionnées aux 4° et 5° de l’article L. 1242-2 ;

6° Recrutement d’ingénieurs et de cadres en vue de la réalisation d’un objet défini, prévu au 6° de l’article L. 1242-2.

Le contrat de travail à durée déterminée est alors conclu pour une durée minimale. Il a pour terme la fin de l’absence de la personne remplacée ou la réalisation de l’objet pour lequel il a été conclu.

L’article L.1242-8-2 du même code dispose que’:

Le contrat de travail à durée déterminée mentionné au 6° de l’article L. 1242-2 est conclu pour une durée minimale de dix-huit mois et une durée maximale de trente-six mois. Il ne peut pas être renouvelé.

L’article L 712-6 du code rural prévoit que’:

L’employeur qui utilise le titre emploi-service agricole est réputé satisfaire, par la remise au salarié et l’envoi à la caisse de mutualité sociale agricole des éléments du titre emploi qui leur sont respectivement destinés, aux formalités suivantes :

1° Les règles relatives à l’établissement d’un contrat de travail, dans les conditions prévues à l’article L. 1221-1 du code du travail ;

2° La déclaration préalable à l’embauche prévue à l’article L. 1221-10 du même code ;

3° La délivrance d’un certificat de travail prévue à l’article L. 1234-19 dudit code ;

4° L’établissement d’un contrat de travail écrit prévu dans les conditions et délais définis aux articles L. 1242-12, L. 1242-13 et L. 3123-6 du même code.

En l’espèce, dès lors que Mme [U] ne demande pas la requalification en contrat à durée indéterminée du contrat à durée déterminée sans terme précis, mais sans mention d’une durée minimale, conclu entre les parties, il convient de déterminer quelle a été la commune intention des parties lors de la régularisation du contrat du 08 février 2019 à effet du 11 février 2019 eu égard à ce que celui-ci comporte des mentions contradictoires puisqu’il est indiqué, s’agissant de sa nature, qu’il s’agit d’un contrat à durée déterminée à objet défini, mais que pour autant,Mme [U] est qualifiée de salariée ordinaire non cadre et qu’elle est embauchée en qualité de saisonnier.

Or, si ce n’est la mention formelle sur le contrat et les bulletins de paie d’un CDD-OD, il ne saurait être considéré que les parties ont entendu conclure un contrat à durée déterminée à objet défini comme le soutient Mme [U] dès lors qu’elle n’a été recrutée ni en qualité de cadre ou d’ingénieur et qu’il existe entre les parties une discussion sur l’objet du contrat dont Mme [U] ne prétend pas et encore moins ne démontre qu’il ait pu s’agir de missions incombant à un salarié statut cadre ou à un ingénieur puisque Mme [U] soutient que l’EARL Guillermond l’a embauchée non pas seulement pour des travaux préparatoires mais encore pour la récolte d’asperges et de fraises, soit des travaux d’exécution, qui ne renvoient manifestement pas à des missions de cadre ou d’ingénieur.

Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que le contrat de travail de Mme [X] [U] était un contrat saisonnier.

Sur la durée prévisible du contrat saisonnier sans terme précis et la rupture dudit contrat’:

En cas de rupture anticipée injustifiée d’un contrat à durée déterminée sans terme précis à l’initiative de l’employeur, il résulte de l’interprétation de l’article L. 1243-4 du code du travail que les juges doivent se référer à sa durée prévisible et non à sa durée éventuelle.

En l’espèce, le contrat litigieux que la cour qualifie de saisonnier ne comporte pas de durée minimale en méconnaissance de l’article L 1242-7 du code du travail si bien qu’il y a lieu de déterminer la durée prévisible dudit contrat.

L’employeur se prévaut certes de l’offre Pôle Emploi qu’il a diffusée prévoyant la conclusion d’un contrat à durée déterminée saisonnier pour une durée d’un mois aux fins de «’remettre en état les sols, paillage et désherbage des serres’» et précisant «’vous désherbez et coupez les fleurs des plants de fraises en plein champs, vous entretenez et taillez les fraises en hors sol’», le contrat visant quant à lui «l’entretien et la plantation’» et excluant l’embauche d’un saisonnier pour une durée supérieure à 45 jours de sorte que ces éléments sont effectivement compatibles avec une embauche limitée à des travaux préparatoires à la récolte d’asperges et de fraises pour lesquels il ressort de l’attestation de Mme [V], ingénieure agronome et conseillère à la chambre d’agriculture de l’Isère, qu’ils se sont terminés à la mi-avril 2019 sur le plateau du Chambaran, où se trouve l’exploitation agricole de l’EARL Guillermond, du fait des mauvaises conditions climatiques.

Toutefois, Mme [U] avance à juste titre qu’à la date où l’EARL Guillermond a mis fin au contrat le 09 avril 2019, il s’était écoulé plus d’un mois et même plus de 45 jours et que, surtout, par SMS en date du 2 avril 2019, l’employeur lui a demandé de se présenter le jeudi à 8 heures pour la récolte d’asperges en plein champ.

Au demeurant, l’EARL Guillermond n’a pas mis fin au contrat en prétendant que le cycle annuel de l’entretien des plantations de fraises et d’asperges était terminé mais à raison d’un désaccord allégué entre les parties sur les conditions d’exécution du contrat de travail.

Il s’en déduit que le délai prévisible de fin de contrat saisonnier n’était pas à la fin des travaux d’entretien des plantations d’asperges et de fraises mais à tout le moins la fin de la récolte des asperges pour la saison 2019.

Il ressort d’un document émanant de la chambre d’agriculture des Bouches du Rhône produit par Mme [U] que la durée de la récolte des asperges est de 30 jours la troisième année et de 60 jours environ de la troisième à la sixième année et qu’il n’y a en principe pas de récolte les deux premières années.

Si ce document émane, certes, d’une chambre de l’agriculture autre que celle dont dépend géographiquement l’EARL Guillermond, ainsi que celle-ci le soutient, il n’en demeure pas moins que cette dernière ne prétend pas que les durées de récolte des asperges en Chambaran seraient à tout le moins plus courtes et selon un rythme distinct en fonction des années qu’en Provence, ne fournissant aucune indication de ce chef.

Il s’ensuit que, compte tenu de la date d’achèvement, en 2019, de l’entretien des plantations d’asperges et de fraises à la mi-avril et de la durée de récolte des asperges évaluée au vu des éléments produits à 60 jours, la fin du contrat à durée déterminée saisonnier, au vu de la durée prévisible, est fixée au 15 juin 2019, Mme [U] ne justifiant aucunement que l’employeur se serait engagé sur un délai de 8 mois par la seule évocation qu’il a faite, dans son courrier du 30 avril 2019, d’une durée maximale de 8 mois pour les contrats saisonniers en matière agricole alors même qu’il se référait manifestement à une durée maximale théorique et non à la durée du contrat litigieux.

La rupture du contrat de travail à durée déterminée intervenue le 09 avril 2019 de manière anticipée par rapport à la durée prévisible fixée au 15 juin 2019 ne ressort pas d’un des motifs énoncés à l’article L 1243-4 du code du travail dès lors que l’EARL Guillermond l’a effectuée par SMS en se prévalant de désaccord des parties sur les conditions d’exécution du contrat.

Il convient en conséquence par infirmation du jugement entrepris de condamner l’EARL Guillermond à payer à M. [U] la somme de 3447 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture injustifiée du contrat de travail saisonnier à durée déterminée et de rejeter le surplus des prétentions de ce chef.

Sur l’exécution fautive du contrat de travail’:

Il résulte de l’article L. 1222-1 du code du travail que celui-ci doit être exécuté de bonne foi.

Par ailleurs, l’obligation pour l’employeur de payer le salaire convenu constitue une obligation essentielle découlant du contrat de travail.

En l’espèce, l’employeur admet lui-même dans ses conclusions d’appel qu’il a réglé avec retard l’intégralité du salaire le 16 octobre 2020 en cours de procédure, soit avec un retard conséquent de plus de 18 mois.

Les premiers juges ont fait une exacte appréciation du préjudice financier et moral subi par Mme [U] en lui allouant la somme de 1600 euros à titre de dommages et intérêts de sorte que le jugement entrepris est confirmé de ce chef et le surplus de la demande rejetée.

Sur le rappel de salaire et l’indemnité de fin de contrat’:

Mme [U] maintient une demande de rappel de salaire et de congés payés afférents dans le dispositif de ses conclusions d’appel tout en admettant que l’employeur a régularisé la situation, commettant au demeurant une erreur matérielle en indiquant que le rappel de salaire est de 2206 euros bruts alors qu’il s’agit de la somme globale comprenant également les congés payés afférents.

Elle indique que le conseil a fait droit à cette demande alors qu’elle en a été déboutée dès lors qu’à juste titre les premiers juges ont constaté que l’employeur avait acquiescé à cette demande en cours de procédure en procédant au paiement de sorte qu’il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [U] de sa demande de rappel de salaire et de celle de congés payés afférents puisque la requérante a été remplie de ses droits avant que le conseil de prud’hommes n’ait à statuer sur ce point.

Sur l’indemnité de fin de contrat’:

Au visa des articles L. 1243-10 et L. 1242-2 3ème du code du travail, dès lors que le contrat est qualifié de contrat saisonnier, Mme [U] est mal fondée en sa demande d’indemnité de fin de contrat de sorte qu’elle est déboutée par confirmation du jugement entrepris de sa demande de ce chef.

Sur les demandes accessoires’:

L’équité commande de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné l’EARL Guillermond à payer à Mme [U] une indemnité de procédure de 1000 euros et de lui accorder une indemnité complémentaire de procédure de 1000 euros.

Le surplus des prétentions des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile est rejeté.

Au visa de l’article 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris et y ajoutant, il convient de condamner l’EARL Guillermond, partie perdante, aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS’;

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi’;

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a débouté Mme [U] de sa demande indemnitaire pour rupture abusive du contrat à durée déterminée saisonnier

Statuant à nouveau du chef infirmé, et y ajoutant,

DIT que le terme prévisible du contrat à durée déterminée saisonnier est fixé au 15 juin 2019

DIT que l’EARL Guillermond a rompu de manière injustifiée le contrat à durée déterminée le 09 avril 2019

CONDAMNE l’EARL Guillermond à payer à Mme [U] la somme de trois mille trois cent quarante-sept euros (3347 euros) à titre de dommages et intérêts pour rupture injustifiée du contrat à durée déterminée saisonnier

DÉBOUTE Mme [U] du surplus de sa demande indemnitaire au titre de la rupture anticipée injustifiée

CONDAMNE l’EARL Guillermond à payer à Mme [U] une indemnité complémentaire de procédure de 1000 euros

REJETTE le surplus des prétentions au titre de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE l’EARL Guillermond aux dépens d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président de section, et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière Le Président

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