Selon l’article L. 311-18 devenu L. 312-28 du code de la consommation, le contrat de crédit est établi par écrit ou sur un autre support durable. Il constitue un document distinct de tout support ou document publicitaire. Un encadré, inséré au début du contrat, informe l’emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit. Un décret en Conseil d’Etat fixe la liste des informations figurant dans le contrat et dans l’encadré mentionné au premier alinéa du présent article.
En cas de manquement à cette obligation, l’établissement de crédit est sanctionné de la déchéance du droit aux intérêts en application de l’article L 311-48 alinéa 1 devenu L 341-4 du code de la consommation.
En l’espèce, l’encadré au début du contrat n’indique pas le montant de la mensualité avec assurance, omission d’autant plus grave que l’assurance a été souscrite.
Il en résulte que la disposition précitée n’est pas respectée.
La SA CREATIS a consenti à Madame [G] [Y] un prêt personnel pour un regroupement de crédits, mais plusieurs échéances n’ont pas été honorées. La SA CREATIS a mis en demeure Madame [G] [Y] de rembourser les échéances impayées, puis a invoqué la déchéance du terme. Elle a ensuite assigné Madame [G] [Y] devant le juge des contentieux de la protection pour obtenir le remboursement du prêt, des intérêts et des frais judiciaires. L’affaire a été mise en délibéré pour le 21 février 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION SUR L’ABSENCE DU DÉFENDERESSE
En l’espèce, il convient de faire application de l’article 472 du code de procédure civile selon lequel si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
SUR LA RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE
La forclusion de l’action en paiement d’un crédit à la consommation est une fin de non-recevoir qui doit être relevée d’office par le juge comme étant d’ordre public, en vertu de l’article 125 du code de procédure civile. Selon l’article L. 311-52 devenu l’article R. 312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Au regard des pièces produites aux débats, il apparaît que la présente action a été engagée avant l’expiration d’un délai de deux années à compter du premier incident de paiement non régularisé, ce qui rend la demande recevable.
SUR LA DÉCHÉANCE DU DROIT AUX INTÉRÊTS
Aux termes de l’article L. 141-4 du code de la consommation, le juge peut relever d’office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application. En l’espèce, des manquements ont été constatés concernant le formalisme du contrat, le bordereau de rétractation, la fiche d’informations pré-contractuelles et la notice d’assurance, ce qui entraîne la déchéance du droit aux intérêts pour la SA CREATIS.
SUR LES SOMMES RESTANT DUES
Selon l’article L. 311-48 alinéa 3e du code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital restant dû après déduction des intérêts réglés à tort. La créance de la SA CREATIS s’établit donc à la somme de 29 507,28 € au titre du solde du contrat de prêt.
SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
En application de l’article 696 du code de procédure civile, la partie succombante doit supporter les dépens. Madame [G] [Y] est donc condamnée à payer les dépens. De plus, elle est condamnée à payer à la SA CREATIS la somme de 200,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– La somme de 29 507,28 € est allouée à la SA CREATIS pour solde du contrat de crédit n°28942000704034
– La somme de 200,00 € est allouée à la SA CREATIS sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
Réglementation applicable
– Code de procédure civile
– Code de la consommation
– Code civil
Article 472 du code de procédure civile:
Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Article 125 du code de procédure civile:
La forclusion de l’action en paiement d’un crédit à la consommation est une fin de non-recevoir qui doit être relevée d’office par le juge comme étant d’ordre public.
Article L. 311-52 du code de la consommation:
Les actions en paiement engagées devant la juge des contentieux de la protection à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
Article L. 141-4 du code de la consommation:
Le juge peut relever d’office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application.
Article L. 311-18 du code de la consommation:
Le contrat de crédit est établi par écrit ou sur un autre support durable. En cas de manquement à cette obligation, l’établissement de crédit est sanctionné de la déchéance du droit aux intérêts.
Article L. 311-15 du code de la consommation:
L’emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l’acceptation de l’offre de contrat de crédit.
Article L. 311-6 du code de la consommation:
Le prêteur ou l’intermédiaire de crédit donne à l’emprunteur, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres permettant à l’emprunteur d’appréhender clairement l’étendue de son engagement.
Article L. 311-19 du code de la consommation:
Lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, une notice doit être remise à l’emprunteur, qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant.
Article L. 311-48 du code de la consommation:
En cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital restant dû après déduction des intérêts réglés à tort, déduction faite des paiements effectués à quelque titre que ce soit.
Article 12316 du code civil:
Le prêteur est fondé à réclamer à l’emprunteur le paiement des intérêts au taux légal sur le capital restant dû à compter de la mise en demeure.
Article 696 du code de procédure civile:
La partie succombante doit supporter les dépens.
Article 700 du code de procédure civile:
Le juge peut condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
Article 514 du code de procédure civile:
La décision est de droit exécutoire à titre provisoire.
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :
– SELARL HAUSSMANN – KAINIC – HASCOET- HELAIN
– Me Marcel ADIDA
Mots clefs associés
– Motifs de la décision
– Absence du défendeur
– Recevabilité de la demande
– Forclusion de l’action en paiement
– Déchéance du droit aux intérêts
– Défaut de formalisme du contrat
– Défaut de bordereau de rétractation conforme
– Défaut de production de la fiche d’informations pré-contractuelles européenne normalisée
– Défaut de notice d’assurance
– Sommes restant dues
– Demande de paiement
– Dépens
– Article 700 du code de procédure civile
– Exécutoire à titre provisoire
– Motifs de la décision: Raisons qui ont conduit à la prise d’une décision judiciaire.
– Absence du défendeur: Situation où le défendeur dans une affaire judiciaire n’est pas présent lors de l’audience.
– Recevabilité de la demande: Aptitude d’une demande à être examinée par le tribunal.
– Forclusion de l’action en paiement: Perte du droit d’agir en justice pour réclamer un paiement, généralement due à un dépassement du délai légal.
– Déchéance du droit aux intérêts: Perte du droit de percevoir des intérêts sur une somme due, souvent en raison d’un non-respect des conditions contractuelles.
– Défaut de formalisme du contrat: Non-respect des règles de forme prévues par la loi pour la validité d’un contrat.
– Défaut de bordereau de rétractation conforme: Absence ou non-conformité du document permettant à un consommateur de se rétracter d’un contrat à distance.
– Défaut de production de la fiche d’informations pré-contractuelles européenne normalisée: Non-remise du document d’information obligatoire avant la conclusion d’un contrat.
– Défaut de notice d’assurance: Absence de document informant sur les conditions d’une assurance.
– Sommes restant dues: Montant d’argent qui reste à payer.
– Demande de paiement: Requête adressée à une personne pour qu’elle effectue un paiement.
– Dépens: Frais engagés lors d’une procédure judiciaire, généralement à la charge de la partie perdante.
– Article 700 du code de procédure civile: Disposition légale permettant au juge d’allouer une somme à une partie pour compenser ses frais de justice.
– Exécutoire à titre provisoire: Décision judiciaire qui peut être mise en œuvre avant même qu’elle ne soit définitive.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL DE PROXIMITÉ DE PANTIN
[Adresse 4]
[Localité 8]
Tél:[XXXXXXXX02]
Fax : [XXXXXXXX01]
@ : [Courriel 9]
REFERENCES : N° RG 23/01894 –
N° Portalis DB3S-W-B7H-YJ4U
Minute :
JUGEMENT
Du : 21 Février 2024
Société CREATIS, SA
C/
Madame [G] [Y]
JUGEMENT
Après débats à l’audience publique du 11 Décembre 2023, le jugement suivant a été rendu par mise à disposition au greffe le 21 Février 2024 ;
Sous la Présidence de Madame Armelle GIRARD, juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de BOBIGNY siégeant au tribunal de proximité de PANTIN, assistée de Madame Martine GARDE, greffier ;
ENTRE :
DEMANDEUR :
Société CREATIS, SA
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 5]
Représentée par la SELARL HAUSSMANN – KAINIC – HASCOET- HELAIN, avocats au barreau de l’ESSONNE
Substitué par Me Marcel ADIDA, avocat au barreau de l’ESSONNE
DÉFENDEUR :
Madame [G] [Y]
[Adresse 6]
[Localité 7]
Non comparante
Copie exécutoire délivrée le :
à : SELARL HAUSSMANN – KAINIC – HASCOET- HELAIN
Mme [G] [Y]
Expédition délivrée à :
EXPOSÉ DU LITIGE
Selon offre préalable acceptée le 8 décembre 2018, la SA CREATIS a consenti à Madame [G] [Y], née le [Date naissance 3] 1978, un prêt personnel n°28942000704034 au titre d’un regroupement de crédits, d’un montant de 38 800,00 € remboursable en 144 mensualités de 345,58 € hors assurance incluant notamment les intérêts au taux débiteur annuel fixe de 4,31 %.
Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, par lettre recommandée en date du 16 juin 2023, la SA CREATIS a mis en demeure Madame [G] [Y] de rembourser les échéances impayées.
En l’absence de régularisation, la SA CREATIS a entendu se prévaloir de la déchéance du terme par courrier recommandé en date du 21 juillet 2023.
Par acte de commissaire de justice signifié le 20 octobre 2023 à étude, la SA CREATIS a attrait Madame [G] [Y] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Pantin, aux fins de voir :
➢
constater l’acquisition de la déchéance du terme suivant mise en demeure et à défaut, prononcer la résolution judiciaire du contrat ;
➢
condamner Madame [G] [Y] à lui payer la somme de 38 494, 06 €, outre intérêts au taux contractuel annuel de 4, 31 % à compter de la mise en demeure et à titre subsidiaire à compter de l’assignation ;
➢
ordonner la capitalisation des intérêts ;➢
condamner Madame [G] [Y] au paiement de la somme de 800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance.À l’audience du 11 décembre 2023, en application de l’article R. 632-1 du code de la consommation, la présidente a soulevé d’office un ou plusieurs moyens tirés de la violation des dispositions du code de la consommation susceptibles d’entraîner la nullité et / ou la déchéance du droit aux intérêts tels que visés à la note d’audience.
À cette même audience, la SA CREATIS représentée par son conseil qui a été autorisé à déposer son dossier, a demandé le bénéfice de son acte introductif d’instance et indique s’en rapporter au droit. La demanderesse soutient que son action n’est pas forclose, qu’elle a respecté le formalisme mis à sa charge et qu’elle produit les documents exigés par la loi.
Madame [G] [Y] n’a pas comparu et ne s’est pas fait représenter, malgré sa convocation régulière.
L’affaire a été mise en délibéré au 21 février 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
SUR L’ABSENCE DU DÉFENDERESSE
En l’espèce, il convient de faire application de l’article 472 du code de procédure civile selon lequel si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
SUR LA RECEVABILITÉ DE LA DEMANDE
La forclusion de l’action en paiement d’un crédit à la consommation est une fin de non-recevoir qui doit être relevée d’office par le juge comme étant d’ordre public, en vertu de l’article 125 du code de procédure civile.
Selon l’article L. 311-52 devenu l’article R. 312-35 du code de la consommation à la suite de l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 14 mars 2016 portant recodification de la partie législative du code de la consommation, les actions en paiement engagées devant la juge des contentieux de la protection à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
Cet événement est caractérisé par le non-paiement des sommes dues à la suite de la résiliation du contrat ou de son terme, le premier incident de paiement non régularisé, le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable ou le dépassement, du découvert tacitement accepté ou de l’autorisation de découvert convenue au sens du 13° de l’article L. 311-1 du code de la consommation, non régularisé à l’issue du délai de 3 mois prévu à l’article L. 311-47 devenu L. 312-93 du même code sans proposition par le prêteur d’un autre type d’opération de crédit au sens du 4° de l’article L. 311-1 précité.
Au regard des pièces produites aux débats, en particulier le contrat et l’historique de compte, il apparaît que la présente action a été engagée avant l’expiration d’un délai de deux années à compter du premier incident de paiement non régularisé (30 novembre 2020), étant précisé que la procédure de surendettement, clôturée par une décision d’irrecevabilité en date du 16 février 2023, a interrompu le délai de forclusion.
La demande de la SA CREATIS est par conséquent recevable.
SUR LA DÉCHÉANCE DU DROIT AUX INTÉRÊTS
Aux termes de l’article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation, le juge peut relever d’office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application.
Sur le défaut de formalisme du contrat
Selon l’article L. 311-18 devenu L. 312-28 du code de la consommation, le contrat de crédit est établi par écrit ou sur un autre support durable. Il constitue un document distinct de tout support ou document publicitaire. Un encadré, inséré au début du contrat, informe l’emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit. Un décret en Conseil d’Etat fixe la liste des informations figurant dans le contrat et dans l’encadré mentionné au premier alinéa du présent article.
En cas de manquement à cette obligation, l’établissement de crédit est sanctionné de la déchéance du droit aux intérêts en application de l’article L 311-48 alinéa 1 devenu L 341-4 du code de la consommation.
En l’espèce, l’encadré au début du contrat n’indique pas le montant de la mensualité avec assurance, omission d’autant plus grave que l’assurance a été souscrite.
Il en résulte que la disposition précitée n’est pas respectée.
Sur le défaut de bordereau de rétractation conforme
Selon l’article L. 311-15 devenu L. 311-12 puis L. 312-19 du code de la consommation, l’emprunteur peut se rétracter sans motifs dans un délai de quatorze jours calendaires révolus à compter du jour de l’acceptation de l’offre de contrat de crédit.
En vertu de l’article L. 311-15 devenu L. 311-12 puis L. 312-21 du code de la consommation, afin de permettre l’exercice du droit de rétractation mentionné à l’article L. 311-15 devenu L. 311-12 puis L. 312-19 précité, un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit.
Par arrêt du 26 mars 2020 (CJUE, 26 mars 2020, aff. C-66/19), la Cour de justice de l’Union européenne a d’ailleurs dit pour droit que les modalités d’exercice des droits du consommateur, et en particulier les informations relatives à la computation du délai de rétractation qui revêtent une importance fondamentale, doivent figurer de manière claire et concise dans le contrat de crédit afin d’en permettre la connaissance et la bonne compréhension par le consommateur, conformément à l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48/CE (points 37, 39 et 45).
Selon l’article R. 311-4 devenu R. 312-9 du code de la consommation, le formulaire détachable de rétractation est établi conformément au modèle type joint en annexe au présent code. Il ne peut comporter au verso aucune mention autre que le nom et l’adresse du prêteur.
En cas de manquement à cette obligation, l’établissement de crédit est sanctionné de la déchéance du droit aux intérêts en application de l’article L. 311-48 alinéa 1er devenu L. 341-4 du code de la consommation.
En l’espèce, le prêteur ne justifie pas la remise du bordereau de rétractation.
Il en résulte que la disposition précitée n’est pas respectée.
Sur le défaut de production de la fiche d’informations pré-contractuelles européenne normalisée (ou FIPEN)
Aux termes de l’article L. 311-6 devenu L. 312-12 du code de la consommation, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit donne à l’emprunteur, préalablement à la conclusion du contrat de crédit, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres permettant à l’emprunteur d’appréhender clairement l’étendue de son engagement.
Le support utilisé par le prêteur à cette fin doit mentionner l’ensemble des informations énumérées par l’ancien article R. 311-3 I. devenu R. 312-2 du même code, présentées conformément à la fiche d’information annexée à cet article (ancien article R. 311-3 IV. devenu R. 312-5 dudit code).
Conformément à l’article L. 311-48 alinéa 1er devenu L. 341-1 du code de la consommation, le prêteur qui accorde un crédit sans communiquer à l’emprunteur les informations pré-contractuelles dans les conditions fixées par l’article L. 311-6 devenu L. 312-12 du même code est déchu du droit aux intérêts. Pour échapper à une telle sanction, le prêteur doit ainsi prouver la remise d’une fiche dont la teneur répond aux exigences des articles précités.
Par arrêt du 18 décembre 2014 (CA CONSUMER FINANCE, C-449/13), la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit que les dispositions de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil, doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’opposent à ce qu’en raison d’une clause type, le juge doive considérer que le consommateur a reconnu la pleine et correcte exécution des obligations pré-contractuelles incombant au prêteur, cette clause entraînant ainsi un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 (point 32).
La Cour de justice précise qu’une clause type figurant dans un contrat de crédit ne compromet pas l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 si, en vertu du droit national, elle implique seulement que le consommateur atteste de la remise qui lui a été faite de la fiche d’information européenne normalisée (point 29). Elle ajoute qu’une telle clause constitue un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents et que le consommateur doit toujours être en mesure de faire valoir qu’il n’a pas été destinataire de cette fiche ou que celle-ci ne permettait pas au prêteur de satisfaire aux obligations d’informations pré-contractuelles lui incombant (point 30). Si une telle clause type emportait, en vertu du droit national, la reconnaissance par le consommateur de la pleine et correcte exécution des obligations précontractuelles incombant au prêteur, elle entraînerait un renversement de la charge de la preuve de l’exécution desdites obligations de nature à compromettre l’effectivité des droits reconnus par la directive 2008/48 (point 31).
Il est ainsi constant qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à son obligation d’information et qu’il ne peut se prévaloir d’une clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d’information pré-contractuelle européenne normalisée sans verser ce document aux débats. La signature de la mention d’une telle clause ne peut en effet être considérée que comme un simple indice non susceptible, en l’absence d’élément complémentaire, de prouver l’exécution par le prêteur de son obligation d’information.
En l’espèce, le prêteur ne justifie pas avoir remis à Madame [G] [Y] la fiche d’informations pré-contractuelles telle que prévue aux articles précités. En effet, l’exemplaire versé n’est pas paraphé ni signé, et ne fait pas partie d’un ensemble de pages numéroté et signé, ce dont il résulte que la preuve de sa remise n’est pas démontrée.
Par l’absence de production de cette fiche, la SA CREATIS ne permet ainsi pas au juge de vérifier que ce document contient les informations requises en totalité et qu’elle a ainsi satisfait à son obligation fixée par l’article L. 311-6 devenu L. 312-12 précité.
Sur le défaut de notice d’assurance
Selon l’article L. 311-19 devenu L. 312-29 du code de la consommation, lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, une notice doit être remise à l’emprunteur, qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus.
En cas de manquement à cette obligation, l’établissement de crédit est sanctionné de la déchéance du droit aux intérêts en application de l’article L 311-48 alinéa 1 devenu L 341-4 du code de la consommation.
En l’espèce, il n’est pas justifié de la remise à l’emprunteur de cette notice et encore moins de la régularité de celle-ci. En effet, l’exemplaire versé n’est pas paraphé ni signé, et ne fait pas partie d’un ensemble de pages numéroté et signé, ce dont il résulte que la preuve de sa remise n’est pas démontrée.
La simple clause selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu ce document et en avoir pris connaissance ne peut en faire présumer la régularité. Elle ne peut constituer qu’un indice qu’il appartient au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents.
Il en résulte que la disposition précitée n’est pas respectée.
*
Pour toutes ces raisons, la SA CREATIS doit donc être déchue de son droit aux intérêts sur le prêt litigieux.
SUR LES SOMMES RESTANT DUES
Selon l’article L. 311-48 alinéa 3e devenu L. 341-8 du code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital restant dû après déduction des intérêts réglés à tort, déduction faite des paiements effectués à quelque titre que ce soit.
Cette limitation légale de la créance du prêteur exclut qu’il puisse prétendre au paiement de toute autre somme, notamment de la clause pénale prévue par l’article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation, qu’il convient d’écarter.
La déchéance s’étend également aux primes ou cotisations d’assurances, dont la privation n’apparaît pas excessive au regard des manquements du prêteur à ses obligations qui entachent d’irrégularité le contrat principal dès sa formation. La société de crédit n’établit d’ailleurs pas avoir avancé lesdites primes ou cotisations d’assurance pour le compte de la débitrice défaillante et ne peut ainsi prétendre à leur remboursement par cette dernière.
Les sommes dues par la débitrice se limiteront dès lors à la différence entre le montant effectivement débloqué à son profit et les règlements effectués par celle-ci, tels qu’ils résultent du décompte.
La créance de la SA CREATIS s’établit donc comme suit ➢ capital emprunté depuis l’origine : 38 800,00 €
➢ moins les versements réalisés :
antérieurement à la déchéance du terme : 9 292,72 €postérieurement à la déchéance du terme : 0,00 €soit un TOTAL restant dû de 29 507,28 € au titre du solde du contrat de prêt, sous réserve des versements postérieurs et/ou non pris en compte dans le décompte en date du 9 août 2023.
En conséquence, il convient de condamner Madame [G] [Y] à payer à la SA CREATIS la somme de 29 507,28 € au titre du solde du contrat de prêt conclu le 8 décembre 2018.
Par ailleurs, bien que déchu de son droit aux intérêts, le prêteur est fondé, en vertu de l’article 12316 du code civil, à réclamer à l’emprunteur le paiement des intérêts au taux légal sur le capital restant dû à compter de la mise en demeure, le taux d’intérêt étant en principe majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice.
Cependant, par arrêt du 27 mars 2014, la Cour de Justice de l’Union Européenne (affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA/Fesih Kalhan) a dit pour droit que l’article 23 de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil s’oppose à l’application d’intérêts au taux légal lesquels sont en outre majorés de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire d’une décision de justice prononçant la déchéance du droit aux intérêts si « les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur à la suite de l’application de la sanction de la déchéance des intérêts ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté » ses obligations découlant de ladite directive.
La Cour de Justice a ainsi indiqué que « si la sanction de la déchéance des intérêts se trouvait affaiblie, voire purement et simplement annihilée, en raison du fait que l’application des intérêts au taux légal majoré est susceptible de compenser les effets d’une telle sanction, il en découlerait nécessairement que celle-ci ne présente pas un caractère véritablement dissuasif » (point 52).
Il s’ensuit qu’en vue d’apprécier le caractère réellement dissuasif de la sanction, il appartient à la juridiction « de comparer, dans les circonstances de l’affaire dont elle est saisie, les montants que le prêteur aurait perçus en rémunération du prêt dans l’hypothèse où il aurait respecté son obligation » découlant de la directive, « avec ceux qu’il percevrait en application de la sanction de la violation de cette même obligation » (point 50).
La Cour de Justice a également indiqué que « dans l’occurrence où la juridiction de renvoi constaterait que la sanction de la déchéance des intérêts conventionnels ne présente pas un caractère véritablement dissuasif au sens de l’article 23 de la directive 2008/48, il y a lieu de rappeler à cet égard qu’une juridiction nationale, saisie d’un litige opposant exclusivement des particuliers, est tenue, lorsqu’elle applique les dispositions du droit interne, de prendre en considération l’ensemble des règles du droit national et de les interpréter, dans toute la mesure du possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de la directive applicable en la matière pour aboutir à une solution conforme à l’objectif poursuivi par celle-ci » (point 54).
En l’espèce, il résulte des pièces versées aux débats que les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal, même non majoré de cinq points, nonobstant la déchéance des intérêts, ne sont pas suffisamment inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations découlant de la directive 2008/48, le taux légal actuel (pour un professionnel, 2ème semestre 2023 : 4,22 %) étant très voisin de celui du contrat (4,31 %), de sorte que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts ne revêt pas de caractère effectif et dissuasif.
Afin d’assurer l’effet de la directive 2008/48, notamment de son article 23, et par conséquent de garantir le caractère effectif et dissuasif de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts, il convient donc de dire que la somme restant due en capital ne portera pas intérêts.
Enfin, il y a lieu de rejeter la demande formée de capitalisation des intérêts au regard de la déchéance totale du droit aux intérêts, même au taux légal, étant rappelé au surplus qu’en vertu de l’article L. 311-23 devenu article L. 312-38 du code de la consommation, la capitalisation des intérêts ne peut être prononcée en matière de crédit à la consommation.
SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES
En application de l’article 696 du code de procédure civile, la partie succombante doit supporter les dépens. Il y aura donc lieu de condamner Madame [G] [Y] de ce chef.
Conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée et il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.
L’équité commande par ailleurs de condamner Madame [G] [Y] à payer à la SA CREATIS la somme de 200,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire, conformément aux dispositions de l’article 514 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La juge des contentieux de la protection, statuant après débats tenus en audience publique, par jugement réputé contradictoire et public rendu en premier ressort par mise à disposition au greffe,
DIT la SA CREATIS recevable en ses demandes ;
PRONONCE la déchéance du droit aux intérêts de la SA CREATIS au titre du contrat de crédit n°28942000704034 conclu le 8 décembre 2018 avec Madame [G] [Y], née le [Date naissance 3] 1978, à compter de la date de conclusion du prêt ;
CONDAMNE Madame [G] [Y] à payer à la SA CREATIS la somme de 29 507,28 € pour solde du contrat de crédit n°28942000704034 en date du 8 décembre 2018, cette somme ne portant pas intérêts ;
RAPPELLE qu’en cas de mise en place d’une procédure de surendettement, la créance sera remboursée selon les termes et conditions fixées dans la dite procédure ;
REJETTE la demande de capitalisation annuelle des intérêts de la SA CREATIS ;
CONDAMNE Madame [G] [Y] à payer à la SA CREATIS la somme de 200,00 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Madame [G] [Y] aux dépens de l’instance ;
RAPPELLE que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire.
La greffière La juge des contentieux de la protection