Occuper un local comme un logement constitue une occupation non autorisée par le bail et démontre de surcroît que la destination contractuelle et d’exploitation constante des lieux n’est également pas respectée.
S’agissant d’une violation grave aux obligations du preneur, et sans avoir besoin d’examiner les autres manquements allégués, la résiliation judiciaire du bail est prononcée, et par voie de conséquence, en tant que de besoin, l’expulsion du preneur est ordonnée.
– Il est recommandé de respecter strictement les délais et les règles de procédure en matière de dépôt de conclusions et de pièces, notamment après l’ordonnance de clôture, pour éviter toute irrecevabilité prononcée d’office.
– Il est conseillé de veiller au respect des obligations contractuelles, telles que l’obligation d’exploitation constante des lieux, d’entretien et de réparation, de paiement du loyer, de destination contractuelle et de justification d’assurance du local, pour éviter toute résiliation judiciaire du bail.
– Il est recommandé de fournir des justificatifs et des pièces justificatives pour appuyer ses demandes et arguments, afin de renforcer sa position lors d’un litige et d’obtenir une décision favorable du tribunal.
Madame [J] a donné à bail commercial à Monsieur [P] [H] un local à usage commercial pour une durée de 9 ans. Suite à des manquements du locataire à ses obligations contractuelles, le bailleur a sommé le preneur de cesser les infractions au bail. Le bailleur a ensuite assigné le preneur en justice pour résilier le bail commercial en raison d’un défaut d’exploitation des locaux, d’un défaut d’entretien général et de défauts de paiement des loyers. Le bailleur demande la résiliation du bail, l’expulsion du preneur, le paiement d’indemnités d’occupation et des arriérés de loyers. Le preneur conteste ces demandes et demande le rejet des demandes du bailleur, ainsi que des dommages et intérêts. Le tribunal devra statuer sur ces différentes prétentions lors de son jugement.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le rejet des conclusions du preneur et pièce signifiées postérieurement à l’Ordonnance de clôture
En droit, selon l’article 802, en vigueur depuis le 31 juillet 2023 :
« Après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office.
Sont cependant recevables les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu’à l’ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l’objet d’aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes de révocation de l’ordonnance de clôture.
Sont également recevables les conclusions qui tendent à la reprise de l’instance en l’état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption. »
Il résulte de ces dispositions que, postérieurement à la date de l’ordonnance de clôture, faute de se limiter à une demande incontestable de paiement de loyers et d’avoir par ailleurs sollicité la révocation de la dite ordonnance, les parties sont irrecevables à produire des conclusions et des pièces nouvelles.
Or, le preneur a signifié en date du 20/12/2023 de nouvelles conclusions (n°2) et une nouvelle pièce (n°3) alors que l’ordonnance de clôture était fixée au 6/12/2023, sans même en demander la révocation, de sorte que ces écritures et pièce ne pourront qu’être déclarées irrecevables.
Sur les manquements aux obligations du preneur
Les parties s’opposent sur la question du respect par le preneur de plusieurs de ses obligations vis à vis du bailleur en application du bail commercial :
– le respect de l’obligation d’exploitation
Selon le bailleur, le preneur manquerait depuis plusieurs années à son obligation d’exploitation, qu’il aurait fait constater ce fait récurrent par trois constats d’huissier et par une attestation d’un voisin commerçant qui se plaindrait de ce qui constituerait à ses yeux un trouble de voisinage ; alors que le preneur aurait fini par reconnaître cet état de fait dans ses dernières conclusions en arguant de ce qu’il n’ouvrirait le local que pour répondre à des rendez-vous sur place ; alors qu’au surplus le local servirait d’habitation à la soeur du preneur ; cela constituerait selon le bailleur une atteinte sérieuse à la commercialité du local et justifierait à lui seul la résiliation du contrat aux torts du preneur.
Le preneur prétend qu’il n’aurait jamais exploité quotidiennement cette galerie et qu’il aurait pris l’habitude de venir l’ouvrir chaque semaine quelques heures ou qu’il proposait des visites sur rendez-vous ; alors que le contrat de bail n’aurait pas dit qu’il devait ouvrir sa galerie en accord avec les horaires des commerces voisins ; alors qu’une galerie d’art ne serait pas un commerce comparable à un commerce de bouche ou de service et que le reste du temps, la galerie serait fermée à l’aide d’une grille, ce qui permettrait la visibilité de la vitrine et de l’intérieur.
– le respect de l’obligation d’entretien et de réparation
Le bailleur fait valoir que le preneur manquerait à son obligation d’entretien et de réparation, pour avoir constateé que la vitrine située à l’arrière de la boutique dans le hall de l’immeuble serait cassée et depuis deux ans, le local serait fermé par une simple plaque d’aggloméré, le bailleur redouterait une intrusion dans le local.
Selon le preneur, le local ne souffrirait d’aucun défaut d’entretien, les constats dressés ne corroboreraient aucunement les dires du commerçant voisin et plaignant, M [T] ; alors que s’agissant de la vitrine située à l’arrière de la boutique dans le hall de l’immeuble, sa vitre qui aurait été brisée à la suite d’une effraction puis remplacée par ses soins par une plaque d’agglomérée, il affirme que ce médium serait plus solide qu’une simple plaque de verre.
– le respect de l’obligation de paiement du loyer
Le bailleur soutient que le preneur manquerait de manière réitérée à son obligation de paiement du loyer, en octobre 2021 la dette locative s’élèverait à la somme de 979,76€, en février 2023 le preneur serait débiteur de la somme de 1.4971,16 €, ramenée à la veille de la clôture du dossier à la somme de 691,41 €.
Le preneur ne conteste pas la dette de loyer et fait valoir que, comme tous les commerçants, il aurait traversé une période difficile avec la crise sanitaire ; il serait aujourd’hui à jour du paiement de ses loyers.
– le respect de la clause de destination de « galerie de peinture », et l’existence d’une sous-location non autorisée par le bailleur
Le bailleur affirme que le preneur aurait violé la clause de destination de « galerie de peinture », pour avoir fait constaté le 10 novembre 2023 que Madame [V] [H], sœur du preneur et Monsieur [U] [S] logeraient dans le local commercial, constituant ainsi une occupation illégale reconnue par les personnes rencontrées sur place, ainsi que par le voisinage, tant dans l’immeuble que dans les commerces avoisinants ; constituant de même une sous-location non autorisée par le bailleur.
Le preneur reste taisant sur ce reproche.
– respect obligation de produire justificatifs d’assurance du local
Selon le bailleur, le preneur ne justifierait d’aucune assurance depuis plusieurs années en violation du contrat de bail.
Le preneur reste taisant sur ce point, il ne produit aucun justificatif en ce sens.
Réponse du Tribunal :
En droit, selon l’article 1741 du code civil, le contrat de louage se résout notamment par le défaut du preneur de remplir ses engagements.
Selon l’article 1224 du même code, la résolution peut résulter d’une décision de justice.
Le bail commercial souscrit le 21/01/2010 prévoit notamment pour le preneur les obligations d’exploitation constante des lieux, de leur entretien et réparation pour les conserver en bon état, de payer d’avance entre les mains du bailleur les loyers à leurs échéances, de respecter la destination contractuelle visée au bail, soit au cas particulier de galerie de peinture, de ne pas sous-louer le local et de justifier d’avoir acquitté ses primes d’assurance du local pour le risque d’incendie et risques divers.
En l’espèce, le Tribunal retient que si le non respect de l’obligation les loyers n’est pas rigoureusement respectée, elle ne constitue cependant pas une violation suffisamment grave dans la mesure où le preneur est à jour de sa dette de loyer et qu’il n’est pas démontré que ses retards étaient importants et systématiques. En revanche le bailleur démontre, en ayant fait constaté par constat d’huissier le 10 novembre 2023, ainsi que par le témoignage du voisinage, tant dans l’immeuble que dans les commerces avoisinants, que Mme [V] [H], qui serait la sœur du preneur et Monsieur [U] [S] logeraient ensemble dans le local commercial.
Or, cela constitue tant une occupation non autorisée par le bail, de même qu’une sous-location, également non autorisée par le bailleur et démontre de surcroît que la destination contractuelle et d’exploitation constante des lieux en “galerie de peinture” n’est également pas respectée.
De sorte, que s’agissant d’une violation grave aux obligations du preneur, et sans avoir besoin d’examiner les autres manquements allégués, la résiliation judiciaire du bail sera prononcée, et par voie de conséquence, en tant que de besoin, l’expulsion du preneur sera ordonnée.
Sur les demandes financières
Outre une condamnation à une indemnité d’occupation, et sans plus de précision que celle de rappeler qu’au 7/11/2023 le preneur resterait lui devoir la somme de 691,41€ (sa pièce 14), le bailleur forme à son dispositif une demande de condamnation du preneur à lui payer l’arriéré des les loyers et charges dus à la date d’effet de la résiliation, qui ne peut être ici que celle du jugement.
Le preneur dit être à jour des paiements en février 2022 (sa pièce 2).
Aussi, le Tribunal ne pourra condamner le preneur, à payer en deniers et quittances, que la seule somme de 691,41 € arrêtée au 7/11/2023.
Et dans l’attente du départ effectif du preneur, ce dernier sera condamné au paiement d’une indemnité d’occupation d’un montant identique à celui du loyer en cours.
Sur la demande du preneur d’un délai de grâce pour trouver un nouveau local
A titre subsidiaire, le preneur forme une demande de délai de huit mois avant son expulsion afin de lui permettre de trouver un nouvel espace d’exposition.
Le bailleur s’oppose au délai demandé par le preneur arguant de ce que le preneur aurait déjà disposé du temps nécessaire pour trouver un nouveau local ; alors que sa demande de délai ne serait assortie d’aucune pièce justifiant de difficultés dans la recherche d’une nouvelle location et alors que le preneur n’exploiterait plus les lieux et aurait cessé son activité professionnelle sur place, ce qui s’opposerait à un délai de grâce.
Réponse du Tribunal :
En droit, selon l’article L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution, le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales.
Le juge qui ordonne l’expulsion peut accorder les mêmes délais, dans les mêmes conditions.
Aussi, compte tenu de la profession d’artiste peintre et du statut d’adulte handicapé du preneur, ainsi que du marché locatif commercial, il convient d’accorder au preneur un délai de grâce à son expulsion pour une durée de trois mois, à compter de la signification du jugement.
Sur les autres demandes :
– sur les dépens,
Les dépens seront supportés par la partie qui succombe, en application de l’article 696 du code de procédure civile.
– sur la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la partie non condamnée aux dépens, tout ou partie des frais non compris dans les dépens qu’elle a engagé pour faire valoir ses droits et assurer correctement sa défense. Le preneur sera condamné à verser au bailleur la somme de 1.500 €.
– sur l’exécution provisoire,
L’exécution provisoire de la décision à venir est de droit et il n’y a pas lieu à l’écarter.
– Indemnités d’occupation: montant des loyers et charges à compter de la date du jugement jusqu’à libération effective des locaux loués, avec intérêts de plein droit au taux légal à compter du Jugement à intervenir
– Arriéré des charges et loyers: 691,41 € à la date d’arrêté du 7/11/2023
– Article 700 du code de procédure civile: 1.500 €
– Entiers dépens
Réglementation applicable
– Code de procédure civile, article 802 : Après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office. Sont cependant recevables les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu’à l’ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l’objet d’aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes de révocation de l’ordonnance de clôture. Sont également recevables les conclusions qui tendent à la reprise de l’instance en l’état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption.
– Code civil, article 1741 : Le contrat de louage se résout notamment par le défaut du preneur de remplir ses engagements.
– Code civil, article 1224 : La résolution peut résulter d’une décision de justice.
– Code des procédures civiles d’exécution, article L. 412-3 : Le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales.
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :
– Me Alice DESMETTRE
– Maître Laurent SUSSAT
Mots clefs associés
– Motifs de la décision
– Ordonnance de clôture
– Irrecevabilité
– Bail commercial
– Obligations du preneur
– Exploitation
– Entretien et réparation
– Paiement du loyer
– Clause de destination
– Assurance du local
– Motifs de la décision : Raisons ou justifications qui ont conduit à prendre une décision.
– Ordonnance de clôture : Décision judiciaire mettant fin à une procédure.
– Irrecevabilité : Caractère de ce qui ne peut être reçu, notamment en matière de demande ou de recours.
– Bail commercial : Contrat de location portant sur un local destiné à l’exercice d’une activité commerciale.
– Obligations du preneur : Devoirs et responsabilités du locataire envers le bailleur.
– Exploitation : Action de mettre en œuvre et de gérer une activité commerciale.
– Entretien et réparation : Actions visant à maintenir en bon état le local loué et à effectuer les réparations nécessaires.
– Paiement du loyer : Versement régulier d’une somme d’argent par le locataire au bailleur en contrepartie de l’occupation du local.
– Clause de destination : Clause du bail précisant l’usage prévu pour le local loué.
– Assurance du local : Contrat visant à couvrir les risques liés au local loué, tels que l’incendie ou les dégâts des eaux.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 22/00874 – N° Portalis DBX6-W-B7G-WI7Q
5ème CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND
30Z
N° RG 22/00874 – N° Portalis DBX6-W-B7G-WI7Q
Minute n° 2024/00
AFFAIRE :
[I] [J]
C/
[P] [H]
Grosses délivrées
le
à
Avocats : Me Alice DESMETTRE
Maître Laurent SUSSAT de la SCP HARFANG AVOCATS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
5ème CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 15 FEVRIER 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :
Marie WALAZYC, Vice-Présidente
Jean-Noël SCHMIDT, Vice-Président
Myriam SAUNIER, Vice-Présidente
Greffier, lors des débats et du prononcé
Pascale BUSATO, Greffier
DÉBATS :
A l’audience publique du 21 Décembre 2023
Délibéré au 15 février 2024
Sur rapport de Monsieur [R] [K] conformément aux dispositions de l’article 785 du code de procédure civile
JUGEMENT:
Contradictoire
Premier ressort
Prononcé publiquement par mise à disposition du jugement au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile
DEMANDERESSE :
Madame [I] [J]
de nationalité Française
119 cours Maréchal Galliéni
33000 BORDEAUX
représentée par Maître Laurent SUSSAT de la SCP HARFANG AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX, avocats plaidant
DÉFENDEUR :
Monsieur [P] [H]
né le 28 Août 1970 à TALENCE
de nationalité Française
56 rue Huguerie
33000 BORDEAUX
N° RG 22/00874 – N° Portalis DBX6-W-B7G-WI7Q
représenté par Me Alice DESMETTRE, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant
******
EXPOSE DU LITIGE
Faits constants :
Le 21 janvier 2010, mais à effet du 1er février 2010, Madame [J] a donné à bail commercial à Monsieur [P] [H], artiste peintre, un local à usage commercial sis 56 rue Huguerie à Bordeaux pour une durée de 9 ans à destination de « Galerie de peinture”, pour un loyer de 310 € par mois, payable d’avance.
La bailleresse a fait dresser un constat par un huissier de justice tendant à faire relever certains manquements du locataire à ses obligations contractuelles.
Par un commandement visant la clause résolutoire délivré le 19 octobre 2021, Madame [J] a sommé le preneur de cesser les infractions au bail relevées à son encontre.
Procédure :
Par acte d’huissier signifié en date du 1/02/2022, Madame [I] [J], (ci après “le bailleur”) a assigné M [P] [H] (ci après “le preneur”) à comparaître devant le Tribunal Judiciaire de BORDEAUX aux fins de résiliation du bail aux motifs d’un défaut d’exploitation des locaux, d’un défaut d’entretien général et de défauts de paiement et retards dans le paiement des loyers.
M [P] [H] a constitué avocat et a fait déposer des conclusions.
L’ordonnance de clôture est en date du 6/12/2023.
Le défendeur à fait signifier de nouvelles conclusions (n°2) et une pièce n°3, le 20/12/2023.
Les débats s’étant déroulés à l’audience du 21/12/2023, l’affaire a été mise en délibéré au 15/02/2024.
PRÉTENTIONS DU DEMANDEUR, le bailleur, Mme [J] :
Dans ses dernières conclusions signifiées en date du 4/12/2023 et reprises à l’audience, le demandeur sollicite du Tribunal de :
Prononcer la résiliation du bail commercial par lequel Madame [J] a donné en location commerciale à Monsieur [H] des locaux sis dans un immeuble situé 56 rue Huguerie à Bordeaux, aux torts griefs exclusifs du preneur.
En conséquence,
ordonner l’expulsion du preneur dès signification du jugement à intervenir, de toute occupation personnelle ou de tous occupants de son chef, ainsi que de ses biens de l’ensemble des locaux loués.
Autoriser Madame [J] à expulser le preneur de l’ensemble des lieux loués en faisant procéder, s’il y a lieu, à l’ouverture des portes avec le concours d’un serrurier et l’assistance de la force publique.
Condamner Monsieur [H] au paiement d’indemnités d’occupation égales au montant des loyers et charges à compter de la date d’effet de la résiliation du bail commercial jusqu’à vidange effective de l’ensemble des locaux loués, avec intérêts de plein droit au taux légal à compter du Jugement à intervenir,
Condamner Monsieur [H] au paiement de l’arriéré des charges et loyers à la date d’effet de la résiliation du bail commercial,
Débouter Monsieur [H] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Le condamner au paiement d’une indemnité de 3.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
Condamner Monsieur [H] aux entiers dépens sur le fondement de l’article 696 du Code de procédure civile.
Maintenir l’exécution provisoire de droit, nonobstant appel et sans caution
PRÉTENTIONS DU DÉFENDEUR, le preneur, M. [H] :
Le défendeur, dans ses dernières conclusions notifiées le 25 octobre 2023, demande au tribunal de :
A titre principal,
DEBOUTER Madame [J] de ses demandes de résiliation du contrat de bail commercial,
DEBOUTER Madame [J] de l’ensemble de ses demandes indemnitaires,
CONDAMNER Madame [J] au paiement de la somme de 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
A titre subsidiaire,
JUGER que Madame [J] ne pourra procéder à l’expulsion de Monsieur [H] qu’à l’expiration d’un délai de 8 mois à compter du jugement à intervenir,
DEBOUTER Madame [J] de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
L’exposé des moyens des parties sera évoqué par le Tribunal lors de sa motivation et pour le surplus, conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières écritures notifiées aux dates mentionnées ci-dessus.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le rejet des conclusions du preneur et pièce signifiées postérieurement à l’Ordonnance de clôture
En droit, selon l’article 802, en vigueur depuis le 31 juillet 2023 :
« Après l’ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office.
Sont cependant recevables les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu’à l’ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l’objet d’aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes de révocation de l’ordonnance de clôture.
Sont également recevables les conclusions qui tendent à la reprise de l’instance en l’état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption. »
Il résulte de ces dispositions que, postérieurement à la date de l’ordonnance de clôture, faute de se limiter à une demande incontestable de paiement de loyers et d’avoir par ailleurs sollicité la révocation de la dite ordonnance, les parties sont irrecevables à produire des conclusions et des pièces nouvelles.
Or, le preneur a signifié en date du 20/12/2023 de nouvelles conclusions (n°2) et une nouvelle pièce (n°3) alors que l’ordonnance de clôture était fixée au 6/12/2023, sans même en demander la révocation, de sorte que ces écritures et pièce ne pourront qu’être déclarées irrecevables.
Sur les manquements aux obligations du preneur
Les parties s’opposent sur la question du respect par le preneur de plusieurs de ses obligations vis à vis du bailleur en application du bail commercial :
– le respect de l’obligation d’exploitation
Selon le bailleur, le preneur manquerait depuis plusieurs années à son obligation d’exploitation, qu’il aurait fait constater ce fait récurrent par trois constats d’huissier et par une attestation d’un voisin commerçant qui se plaindrait de ce qui constituerait à ses yeux un trouble de voisinage ; alors que le preneur aurait fini par reconnaître cet état de fait dans ses dernières conclusions en arguant de ce qu’il n’ouvrirait le local que pour répondre à des rendez-vous sur place ; alors qu’au surplus le local servirait d’habitation à la soeur du preneur ; cela constituerait selon le bailleur une atteinte sérieuse à la commercialité du local et justifierait à lui seul la résiliation du contrat aux torts du preneur.
Le preneur prétend qu’il n’aurait jamais exploité quotidiennement cette galerie et qu’il aurait pris l’habitude de venir l’ouvrir chaque semaine quelques heures ou qu’il proposait des visites sur rendez-vous ; alors que le contrat de bail n’aurait pas dit qu’il devait ouvrir sa galerie en accord avec les horaires des commerces voisins ; alors qu’une galerie d’art ne serait pas un commerce comparable à un commerce de bouche ou de service et que le reste du temps, la galerie serait fermée à l’aide d’une grille, ce qui permettrait la visibilité de la vitrine et de l’intérieur.
– le respect de l’obligation d’entretien et de réparation
Le bailleur fait valoir que le preneur manquerait à son obligation d’entretien et de réparation, pour avoir constateé que la vitrine située à l’arrière de la boutique dans le hall de l’immeuble serait cassée et depuis deux ans, le local serait fermé par une simple plaque d’aggloméré, le bailleur redouterait une intrusion dans le local.
Selon le preneur, le local ne souffrirait d’aucun défaut d’entretien, les constats dressés ne corroboreraient aucunement les dires du commerçant voisin et plaignant, M [T] ; alors que s’agissant de la vitrine située à l’arrière de la boutique dans le hall de l’immeuble, sa vitre qui aurait été brisée à la suite d’une effraction puis remplacée par ses soins par une plaque d’agglomérée, il affirme que ce médium serait plus solide qu’une simple plaque de verre.
– le respect de l’obligation de paiement du loyer
Le bailleur soutient que le preneur manquerait de manière réitérée à son obligation de paiement du loyer, en octobre 2021 la dette locative s’élèverait à la somme de 979,76€, en février 2023 le preneur serait débiteur de la somme de 1.4971,16 €, ramenée à la veille de la clôture du dossier à la somme de 691,41 €.
Le preneur ne conteste pas la dette de loyer et fait valoir que, comme tous les commerçants, il aurait traversé une période difficile avec la crise sanitaire ; il serait aujourd’hui à jour du paiement de ses loyers.
– le respect de la clause de destination de « galerie de peinture », et l’existence d’une sous-location non autorisée par le bailleur
Le bailleur affirme que le preneur aurait violé la clause de destination de « galerie de peinture », pour avoir fait constaté le 10 novembre 2023 que Madame [V] [H], sœur du preneur et Monsieur [U] [S] logeraient dans le local commercial, constituant ainsi une occupation illégale reconnue par les personnes rencontrées sur place, ainsi que par le voisinage, tant dans l’immeuble que dans les commerces avoisinants ; constituant de même une sous-location non autorisée par le bailleur.
Le preneur reste taisant sur ce reproche.
– respect obligation de produire justificatifs d’assurance du local
Selon le bailleur, le preneur ne justifierait d’aucune assurance depuis plusieurs années en violation du contrat de bail.
Le preneur reste taisant sur ce point, il ne produit aucun justificatif en ce sens.
Réponse du Tribunal :
En droit, selon l’article 1741 du code civil, le contrat de louage se résout notamment par le défaut du preneur de remplir ses engagements.
Selon l’article 1224 du même code, la résolution peut résulter d’une décision de justice.
Le bail commercial souscrit le 21/01/2010 prévoit notamment pour le preneur les obligations d’exploitation constante des lieux, de leur entretien et réparation pour les conserver en bon état, de payer d’avance entre les mains du bailleur les loyers à leurs échéances, de respecter la destination contractuelle visée au bail, soit au cas particulier de galerie de peinture, de ne pas sous-louer le local et de justifier d’avoir acquitté ses primes d’assurance du local pour le risque d’incendie et risques divers.
En l’espèce, le Tribunal retient que si le non respect de l’obligation les loyers n’est pas rigoureusement respectée, elle ne constitue cependant pas une violation suffisamment grave dans la mesure où le preneur est à jour de sa dette de loyer et qu’il n’est pas démontré que ses retards étaient importants et systématiques. En revanche le bailleur démontre, en ayant fait constaté par constat d’huissier le 10 novembre 2023, ainsi que par le témoignage du voisinage, tant dans l’immeuble que dans les commerces avoisinants, que Mme [V] [H], qui serait la sœur du preneur et Monsieur [U] [S] logeraient ensemble dans le local commercial.
Or, cela constitue tant une occupation non autorisée par le bail, de même qu’une sous-location, également non autorisée par le bailleur et démontre de surcroît que la destination contractuelle et d’exploitation constante des lieux en “galerie de peinture” n’est également pas respectée.
De sorte, que s’agissant d’une violation grave aux obligations du preneur, et sans avoir besoin d’examiner les autres manquements allégués, la résiliation judiciaire du bail sera prononcée, et par voie de conséquence, en tant que de besoin, l’expulsion du preneur sera ordonnée.
Sur les demandes financières
Outre une condamnation à une indemnité d’occupation, et sans plus de précision que celle de rappeler qu’au 7/11/2023 le preneur resterait lui devoir la somme de 691,41€ (sa pièce 14), le bailleur forme à son dispositif une demande de condamnation du preneur à lui payer l’arriéré des les loyers et charges dus à la date d’effet de la résiliation, qui ne peut être ici que celle du jugement.
Le preneur dit être à jour des paiements en février 2022 (sa pièce 2).
Aussi, le Tribunal ne pourra condamner le preneur, à payer en deniers et quittances, que la seule somme de 691,41 € arrêtée au 7/11/2023.
Et dans l’attente du départ effectif du preneur, ce dernier sera condamné au paiement d’une indemnité d’occupation d’un montant identique à celui du loyer en cours.
Sur la demande du preneur d’un délai de grâce pour trouver un nouveau local
A titre subsidiaire, le preneur forme une demande de délai de huit mois avant son expulsion afin de lui permettre de trouver un nouvel espace d’exposition.
Le bailleur s’oppose au délai demandé par le preneur arguant de ce que le preneur aurait déjà disposé du temps nécessaire pour trouver un nouveau local ; alors que sa demande de délai ne serait assortie d’aucune pièce justifiant de difficultés dans la recherche d’une nouvelle location et alors que le preneur n’exploiterait plus les lieux et aurait cessé son activité professionnelle sur place, ce qui s’opposerait à un délai de grâce.
Réponse du Tribunal :
En droit, selon l’article L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution, le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales.
Le juge qui ordonne l’expulsion peut accorder les mêmes délais, dans les mêmes conditions.
Aussi, compte tenu de la profession d’artiste peintre et du statut d’adulte handicapé du preneur, ainsi que du marché locatif commercial, il convient d’accorder au preneur un délai de grâce à son expulsion pour une durée de trois mois, à compter de la signification du jugement.
Sur les autres demandes :
– sur les dépens,
Les dépens seront supportés par la partie qui succombe, en application de l’article 696 du code de procédure civile.
– sur la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la partie non condamnée aux dépens, tout ou partie des frais non compris dans les dépens qu’elle a engagé pour faire valoir ses droits et assurer correctement sa défense. Le preneur sera condamné à verser au bailleur la somme de 1.500 €.
– sur l’exécution provisoire,
L’exécution provisoire de la décision à venir est de droit et il n’y a pas lieu à l’écarter.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal,
– ECARTE des débats les conclusions de M. [P] [H] et pièces notifiées par voie électronique le 20/12/2023 ;
– PRONONCE la résiliation du bail commercial conclu entre Mme [I] [J] et M. [P] [H] pour les locaux au 56 rue Huguerie à Bordeaux, aux torts griefs exclusifs du preneur ;
– ORDONNE l’expulsion du preneur, de toute occupation personnelle ou de tous occupants de son chef, ainsi que de ses biens de l’ensemble des locaux loués ;
– ACCORDE toutefois au preneur un délai de grâce de trois mois à compter de la signification de ce jugement pour libérer et vider les lieux loués ;
– AUTORISE Mme [I] [J] à expulser, après l’écoulement du délai de grâce sus-visé, le preneur de l’ensemble des lieux loués en faisant procéder, s’il y a lieu, à l’ouverture des portes avec le concours d’un serrurier et l’assistance de la force publique ;
– CONDAMNE M [P] [H] au paiement d’indemnités d’occupation égales au montant des loyers et charges à compter de la date du jugement jusqu’à libération effective de l’ensemble des locaux loués, avec intérêts de plein droit au taux légal à compter du Jugement à intervenir ;
– CONDAMNE M. [P] [H] au paiement, en deniers et quittances, de la somme de 691,41 €, au titre de l’arriéré des charges et loyers à la date d’arrêté du 7/11/2023 ;
– CONDAMNE M. [P] [H] aux entiers dépens ;
N° RG 22/00874 – N° Portalis DBX6-W-B7G-WI7Q
– CONDAMNE M [P] [H] à payer à Mme [I] [J] la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– REJETTE les demandes plus amples ou contraires des parties ;
– RAPPELLE que le présent jugement est assorti de plein droit de l’exécution provisoire.
Le présent jugement a été signé par madame Marie WALAZYC, Vice-Présidente et par madame Pascale BUSATO, Greffier.
LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,