Rémunérations abusives des dirigeants : la demande d’expertise

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Conseils juridiques :

1. Attention à la nécessité de préciser clairement le périmètre légal dans lequel l’expertise d’évaluation des rémunérations des dirigeants est attendue. Il est recommandé de définir avec précision si l’expertise doit appréhender la situation sur le plan commercial, social ou fiscal, afin d’éviter toute ambiguïté et de garantir une analyse pertinente.

2. Il est recommandé de veiller à ce que les demandes d’avis impliquant une appréciation juridique soient évitées dans la mission confiée à l’expert. Conformément à l’article 238 du code de procédure civile, l’expert ne doit pas se prononcer sur des questions relevant du pouvoir exclusif du juge, afin de respecter les limites de ses compétences.

3. Il est recommandé de s’assurer que les demandes additionnelles d’extension de la mission soient clairement formulées et régulièrement saisies par les parties. En cas de demandes non explicitement énoncées, la cour ne sera pas en mesure de statuer sur ces points, soulignant l’importance de la clarté et de la précision dans les demandes présentées devant la juridiction.


La société SAAT, M. [X] et M. [P] ont fait appel d’une ordonnance et demandent à la cour de réformer cette ordonnance en définissant le périmètre légal de l’expertise d’évaluation des rémunérations des dirigeants. La société Casinos de [Localité 6] demande quant à elle la confirmation de l’ordonnance et la désignation d’un mandataire ad hoc pour représenter la SAAT. L’affaire a été fixée à une audience en octobre 2023.

Introduction de l’affaire

La cour est saisie de l’appel principal de la société SAAT de M. [X] et de M. [P], qui souhaitent modifier ou préciser les contours de l’expertise sollicitée. La cour doit d’abord examiner la demande avant dire droit présentée par la société Casinos et la fin de non-recevoir soulevée par cette dernière, avant de se pencher sur les prétentions des parties concernant la mission de l’expert.

Sur la désignation d’un mandataire ad hoc et la fin de non-recevoir

La société Casinos de [Localité 6] estime qu’il existe une opposition d’intérêts entre la SAAT et ses dirigeants, nécessitant la désignation d’un administrateur ad hoc. Cependant, la cour observe que la société Casinos n’avait formé aucune prétention de ce chef en première instance, rendant sa demande irrecevable selon l’article 564 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie.

Sur l’étendue de la mission

La cour a numéroté les chefs de mission définis par le juge des référés, allant de la précision des rémunérations des dirigeants à l’évaluation des responsabilités et préjudices. Les parties sont en désaccord sur la nature des rémunérations et la licéité de l’avis requis du technicien sur la conformité des rémunérations à l’intérêt social de la SAAT.

Sur la nature des rémunérations, objet de l’expertise

Les appelants souhaitent une réformation de la mission, arguant que l’expertise doit se limiter aux rémunérations des fonctions techniques salariales. La société Casinos de [Localité 6] insiste sur une approche globale des rémunérations, incluant tous les avantages en nature, pour éviter un risque fiscal. La cour retient que l’expertise doit inclure toutes les rémunérations et avantages en nature, mais sans empiéter sur les pouvoirs du juge.

Sur la licéité de l’avis requis du technicien

Les appelants demandent à la cour de déclarer illégal le chef de mission concernant la conformité des rémunérations à l’intérêt social de la SAAT. La cour conclut que cette mission excède les pouvoirs des experts et doit être supprimée, car elle implique une appréciation juridique relevant du juge du fond.

Sur la perception par M. [P] de la prime de bilan

Le juge des référés a demandé à l’expert de vérifier les conditions de perception de la prime de bilan par M. [P]. La société SAAT conteste cette mission, mais la cour considère que la société Casinos de [Localité 6] a un intérêt légitime à vérifier que la prime n’a pas été versée, confirmant ainsi ce chef de mission.

Sur la demande additionnelle d’extension de la mission

La société Casinos de [Localité 6] souhaite étendre la mission de l’expert à 22 autres points précis. Cependant, ces demandes ne sont pas explicitement énoncées dans les conclusions de la société, et la cour décide de ne pas statuer sur des demandes non régulièrement saisies.

Sur les autres demandes

La société SAAT, M. [X] et M. [P] demandent des dommages et intérêts pour des propos diffamatoires tenus par la société Casinos de [Localité 6]. La cour rejette cette demande, invoquant l’immunité des écrits produits en justice, car les accusations sont en rapport direct avec la demande d’expertise.

Sur l’application de l’article 700 du Code de procédure civile

La cour estime qu’il serait inéquitable de débouter la société Casinos de [Localité 6] de sa demande formulée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, accordant ainsi une compensation pour les frais de justice.

Sur les dépens

La cour décide que la société Casinos de [Localité 6] supportera les dépens de l’instance d’appel, étant donné que la société SAAT, M. [X] et M. [P] ont partiellement gain de cause.

– La demande de désignation d’un administrateur ad hoc pour représenter la société SAAT : irrecevable
– Les chefs de mission de Mme [C] :
– Préciser les rémunérations salariées et de gérance de MM. [X], [P] et [Z] : infirmés
– Les chefs de mission de l’expert judiciaire :
– Indiquer les contrats de travail et les rémunérations de MM. [X], [P] et [Z] : mission donnée
– Demande en dommages-intérêts de la société SAAT, M. [X] et M. [P] : déboutée
– Demande de la société Casinos de [Localité 6] au titre de l’article 700 du code de procédure civile : déboutée
– Condamnation de la société Casinos de [Localité 6] aux dépens d’appel


Réglementation applicable

Voici la liste des articles des Codes cités dans les motifs de la décision, ainsi que le texte de chaque article cité :

Articles cités :

1. Article 145 du Code de procédure civile
2. Article 564 du Code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie
3. Article 238 du Code de procédure civile
4. Article 41 alinéa 3 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881
5. Article 700 du Code de procédure civile

Texte de chaque article cité :

1. Article 145 du Code de procédure civile :
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S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.
« `

2. Article 564 du Code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie :
« `markdown
Les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions, si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
« `

3. Article 238 du Code de procédure civile :
« `markdown
L’expert doit donner son avis sur les points pour l’examen desquels il a été commis. Il ne peut répondre à d’autres questions que celles qui lui sont posées par la décision qui l’a commis.
« `

4. Article 41 alinéa 3 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881 :
« `markdown
Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux, ni les rapports ou autres pièces de procédure adressés aux juges ou aux parties. Toutefois, le tribunal pourra, même d’office, ordonner la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires.
« `

5. Article 700 du Code de procédure civile :
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Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.
« `

Ces articles fournissent le cadre juridique pour les décisions prises dans le jugement, en particulier concernant les mesures d’instruction, les nouvelles prétentions en appel, les limites des missions d’expertise, l’immunité des écrits produits en justice, et les frais de justice.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– SELARL TEHIO
– SELARL CHEVALIER AVOCATS

Mots clefs associés

– Appel principal
– Expertise sollicitée
– Contours de l’expertise
– Demande avant dire droit
– Fin de non-recevoir
– Mandataire ad hoc
– Intérêt à agir
– Opposition d’intérêts
– Mesure d’instruction in futurum
– Agissements de la gérance
– Intérêt social
– Administrateur ad hoc
– Article 145 du Code de procédure civile
– Article 564 du Code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie
– Mission de l’expert
– Rémunérations salariées et de gérance
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– Juste rémunération
– Prime de bilan
– Conformité à l’intérêt social
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– Risque financier
– Propos diffamatoires et outrageants
– Dommages et intérêts
– Immunité judiciaire
– Article 41 alinéa 3 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881
– Article 700 du Code de procédure civile
– Dépens de l’instance d’appel

– Appel principal: Recours formé par une partie devant une juridiction supérieure pour contester une décision rendue par une juridiction inférieure.
– Expertise sollicitée: Demande faite à un expert pour fournir des connaissances spécialisées dans un domaine particulier.
– Contours de l’expertise: Limites et étendue du domaine dans lequel l’expertise est requise.
– Demande avant dire droit: Requête adressée à un juge pour qu’il statue sur une question de procédure avant d’entrer dans le fond du litige.
– Fin de non-recevoir: Moyen de défense procédural visant à faire rejeter une demande en raison d’un vice de forme ou d’une absence de qualité pour agir.
– Mandataire ad hoc: Personne désignée par un tribunal pour représenter les intérêts d’une personne incapable de le faire elle-même.
– Intérêt à agir: Condition requise pour qu’une partie puisse engager une action en justice, impliquant un lien direct et personnel avec le litige.
– Opposition d’intérêts: Situation où les intérêts d’une personne entrent en conflit avec ceux d’une autre, pouvant compromettre l’impartialité.
– Mesure d’instruction in futurum: Mesure ordonnée par un tribunal pour obtenir des preuves ou des informations dans le futur.
– Agissements de la gérance: Actions entreprises par les dirigeants d’une société dans le cadre de leur gestion.
– Intérêt social: Objectif de l’entreprise visant à maximiser la valeur pour ses actionnaires tout en prenant en compte les intérêts des parties prenantes.
– Administrateur ad hoc: Personne nommée pour assister ou représenter une entreprise dans des circonstances particulières.
– Article 145 du Code de procédure civile: Disposition légale permettant à une partie d’obtenir des mesures d’instruction avant tout procès.
– Article 564 du Code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie: Disposition spécifique du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie régissant certaines procédures judiciaires.
– Mission de l’expert: Tâche confiée à un expert pour réaliser une analyse ou une évaluation dans un domaine spécifique.
– Rémunérations salariées et de gérance: Paiements effectués aux employés et aux dirigeants d’une entreprise pour leur travail.
– Avantages en nature: Avantages non monétaires fournis aux employés en plus de leur salaire.
– Juste rémunération: Montant considéré comme équitable pour le travail ou les services fournis.
– Prime de bilan: Prime versée aux actionnaires en fonction des résultats financiers de l’entreprise.
– Conformité à l’intérêt social: Respect des intérêts de l’entreprise et de ses parties prenantes dans les décisions prises.
– Appréciation juridique: Évaluation des faits et des preuves à la lumière du droit applicable.
– Redressement fiscal: Processus visant à corriger des erreurs ou des omissions dans la déclaration fiscale d’une entreprise ou d’un individu.
– Risque financier: Possibilité de subir des pertes financières en raison de divers facteurs.
– Propos diffamatoires et outrageants: Déclarations qui portent atteinte à la réputation ou à l’honneur d’une personne et qui dépassent les limites de la liberté d’expression.
– Dommages et intérêts: Réparation financière accordée à une partie lésée pour compenser un préjudice subi.
– Immunité judiciaire: Protection légale accordée à certaines personnes contre les poursuites judiciaires dans certaines circonstances.
– Article 41 alinéa 3 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881: Disposition légale régissant la responsabilité pénale des propos diffamatoires dans les médias.
– Article 700 du Code de procédure civile: Article permettant à un juge de condamner une partie à verser une somme d’argent à l’autre pour ses frais de justice.
– Dépens de l’instance d’appel: Frais engagés lors d’une procédure d’appel, y compris les honoraires d’avocat et les frais de justice.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

N° de minute : 2024/7

COUR D’APPEL DE NOUMÉA

Arrêt du 12 février 2024

Chambre commerciale

N° RG 22/00091 – N° Portalis DBWF-V-B7G-TNG

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 6 octobre 2022 par le président du tribunal mixte de commerce de NOUMEA (RG n° 22/12)

Saisine de la cour : 27 octobre 2022

APPELANTS

SARL SAAT CASINO TELE – BINGO, prise en la personne de ses représentants légaux

Siège social : [Adresse 5] – [Localité 7]

M. [O] [X]

né le [Date naissance 2] 1940 à [Localité 8]

demeurant [Adresse 4] – [Localité 7]

M. [V] [P]

né le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 7]

demeurant [Adresse 3] – [Localité 7]

Tous représentés par la SELARL TEHIO, avocat au barreau de NOUMEA

INTIMÉE

SNC CASINOS DE NOUMEA, représentée par ses gérants en exercice

Siège social : [Adresse 9] – [Localité 6]

Représentée par la SELARL CHEVALIER AVOCATS, avocat au barreau de NOUMEA

12/02/2024 : Copie revêtue de la forme exécutoire : – Me TEHIO ;

Expéditions : – Me CHEVALIER ;

– Copie CA ; Copie TMC

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 23 octobre 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

M. Philippe ALLARD, Président de chambre, président,

Mme Marie-Claude XIVECAS, Conseillère,

Mme Béatrice VERNHET-HEINRICH, Conseillère,

qui en ont délibéré, sur le rapport de Mme Béatrice VERNHET-HEINRICH.

Greffier lors des débats : Mme Mikaela NIUMELE

Greffier lors de la mise à disposition : M. Petelo GOGO

ARRÊT :

– contradictoire,

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, le délibéré fixé au 28/12/2023 a été prorogé au 25/01/2024 puis au 12/02/2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

– signé par M. Philippe ALLARD, président, et par M. Petelo GOGO, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.

*

La société SAAT constituée le 4 juillet 1984 a pour objet l’exploitation d’un établissement de jeux sous l’enseigne «Télé Bingo ».

Depuis l’année 1997, son capital social est détenu par la société Casinos de [Localité 6] à hauteur de 50 % des parts sociales, soit 300 parts sur 600, le solde étant réparti ainsi qu’il suit :

– M. [O] [X] : 99 parts sociales

– M. [V] [P] : 1 part sociale

– M. [M] [Y] : 1part sociale

– M. [B] [Y] : 1 part sociale

– la société S.E.H.T. : 198 parts sociales, étant observé que cette société détient également 90 % du capital social de la société Casino de [Localité 6].

Dans le contexte d’un changement de gouvernance au sein de son propre actionnaire majoritaire, la société Casinos de [Localité 6] s’est intéressée au fonctionnernent de la société SAAT, après avoir découvert, à l’occasion de l’assemblée générale des comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2019, à la lecture du rapport spécial du commissaire aux comptes, le montant des rémunérations servies par la SAAT à ses dirigeants, tant en leur qualité de salarié que de gérant.

Les parties n’ont pu se mettre d’accord sur la désignation d’un cabinet d’audit désigné en commun et le conflit s`est durci entre les deux sociétés.

Dans ce contexte, par actes d’huissier de justice du 1er avril 2022, la société en nom collectif Casinos de [Localité 6] a assigné M. [O] [X] et M. [V] [P], et la SAAT devant le juge des référés du tribunal mixte de commerce de ce siège, à l’effet de voir ordonner une mesure d’expertise judiciaire pour déterminer les conditions de rémunérations de MM. [X], [P] et [Z] sur le fondement de L’article 145 du code de procédure civile.

Par ordonnance datée du 6 octobre 2022, le président du tribunal mixte de commerce de Nouméa, faisant droit à cette demande, a :

– écarté l’exception d’incompétence formée par M. [X], M. [P] et par la société SAAT,

– débouté M. [X], M. [P] de leur demande respective de mise hors de cause,

au principal, renvoyé les parties a se pourvoir ainsi qu’elles aviseront et dès à présent, par provision,

– dit n’y avoir lieu de donner acte à la société en nom collectif Casinos de [Localité 6] de sa renonciation à sa demande d’expertise au titre des rémunérations de gérance,

– dit n’y avoir lieu de fixer les seules missions de l’expert-comptable tel que sollicité par la société SAAT à titre subsidiaire dans son dispositif,

– ordonné une mesure d’expertise et commis Mme [C] pour y procéder, avec mission de :

– préciser le niveau actuel précis des rémunérations salariées et de gérance de MM. [X], [P] et [Z] au sein de la société SAAT et préciser la nature et le montant des avantages en nature dont ils bénéficient ou ont bénéficié au cours de la période courant à compter de l’exercice ouvert le 1er janvier 2019,

– décrire les fonctions techniques dont ces rémunérations sont / ont été la contrepartie et indiquer si les justificatifs produits sont de nature à justifier le montant de ces rémunérations par rapport à des postes comparables occupés dans des sociétés de taille similaire à la société SAAT, ainsi qu’au regard du service rendu, et le cas échéant, donner son avis sur le montant de la juste rémunération de telles fonctions,

– préciser les conditions dans lesquelles M. [P] a pu bénéficier de la prime de bilan décidée en sa faveur depuis 2016 et dans l’affirmative, indiquer les montants perçus à ce titre par l’intéressé,

– donner son avis sur la conformité à l’intérêt social de la société SAAT, des rémunérations perçues par MM. [X] et [P] ainsi que les avantages en nature qui leurs ont été octroyés,

-dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,

– laissé les dépens à la charge de la société Casinos de [Localité 6].

PROCEDURE D’APPEL

La société SAAT, M. [X] et M. [P] ont relevé appel de cette ordonnance par requête enregistrée au greffe de la cour le 27 octobre 2022.

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 5 juin 2023, ils demandent à la cour de :

– dire leur appel recevable,

– réformer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

– définir l’objet et le périmètre légal dans lequel l’expertise d’évaluation des rémunérations des dirigeants doit intervenir à savoir à titre commercial ou social ou fiscal (article 21 CINC),

– juger que l’appréciation des niveaux de rémunérations en contrepartie des services rendus au titre des fonctions techniques n’intéressent que les rémunérations du travail pour l’appréciation de la déductibilité fiscale de la charge sur le fondement de l’article 21 du Code des impôts de la Nouvelle-Calédonie,

– juger que l’appréciation des niveaux de rémunérations s’apprécie tant au regard de la situation économique, financière et fiscale interne qu’à l’aune d’éléments comparatifs externes,

– juger que les éléments comparatifs doivent s’inscrire dans le cadre de postes équivalents à périmètre de fonctions et d’activités identiques, exerçant dans des sociétés dont l’activité est similaire,

en conséquence,

– modifier le chef de mission d »appréciation de la « juste rémunération » en ces termes :

« Décrire les fonctions techniques dont les rémunérations salariales sont/ont été la contrepartie et indiquer si les fonctions effectivement exercées sont de nature à justifier le montant des rémunérations versées en considération de la situation économique, financière et fiscale de la société SAAT à compter de l’exercice ouvert le 1er janvier 2019, et également par rapport à des postes à périmètre de fonctions et à l’intervention identiques occupés dans des sociétés d’activité similaire à la société SAAT ainsi qu’au regard du service rendu, et le cas échéant, donner son avis sur le montant de la juste rémunération de telles fonctions, »

– juger que le chef de mission « portant sur l’appréciation de la conformité à l’intérét social des rémunérations perçues par M. [X] et M. [P] » est illégale pour constituer une question de pur droit,

Dans ses dernières écritures, notifiées par voie électronique le 6 juillet 2023, la société Casinos de [Localité 6] demande à la cour de :

– confirmer l’ordonnance objet du présent appel.

– procéder avant dire droit à la désignation d’un mandataire ad hoc chargé de représenter la société SAAT au cours de cette instance, afin de mettre un terme au conflit d’intérêts caractérisé vis-à-vis de ses gérants,

à défaut, déclarer irrecevables pour défaut d’intérêt propre les prétentions de la société SAAT visant à contester les termes d’une mission d’expertise qui ne vise que ses seuls dirigeants,

– débouter les appelants de l’ensemble de leurs demandes.

– subsidiairement, modifier le seul chef de mission se rapportant à l’appréciation de la conformité à l’intérêt social de la société SAAT des rémunérations perçues par M. [X] et M. [P], ainsi que les avantages en nature qui leurs sont octroyés, et le remplacer par celui-ci :

« donner son avis sur le montant de la juste rémunération de telles fonctions au regard du service rendu ;

– proposer une appréciation du risque financier auquel est exposée la SAAT en cas de redressement fiscal portant sur le caractère excessif des rémunérations versées aux dirigeants ainsi qu’à M. [Z] »,

– dans l’hypothèse où la cour devrait modifier les chefs de mission de l’expert judiciaire, et que les modifications apportées conduiraient à alourdir la mission de ce dernier, dire que les consignations complémentaires ordonnées seraient à la charge exclusive et solidaire de M. [X] et M. [P],

en tout état de cause,

– étendre la mission de l’expert judiciaire à l’ensemble des questions contenues dans le dire adressé le 19 mai 2023 par la société Casinos de [Localité 6] en réaction au premier pré-rapport de l’expert judiciaire,

– déclarer irrecevables les demandes de suppression et de dommages et intérêts formées par M. [X] et M. [P] sur le fondement de l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881, et subsidiairement les en débouter comme infondées,

– condamner solidairement les appelants à payer à la société Casinos de [Localité 6] la somme de 800.000 francs pacifique au titre de l’article 700 du code de procédure civile de Nouvelle Calédonie,

– condamner solidairement les appelants aux entiers dépens, avec distraction au profit de la selarl Lionel Chevalier, avocat sur offre de droit.

L’affaire a été fixée à l’audience du 13 juillet 2023 par ordonnance du magistrat chargé de la mise en état du 6 juin 2023 puis renvoyée à l’audience du 23 octobre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

La cour est saisie de l’appel principal de la société SAAT de M. [X] et de M. [P] lesquels, sans s’opposer au principe de l’expertise sollicitée souhaitent en voir modifier ou préciser les contours.

Il y a lieu au préalable d’examiner la demande avant dire droit présentée par la société Casinos et la fin de non-recevoir soulevée à titre subsidiaire par cette dernière (I). La cour examinera ensuite les prétentions émises par chacune des parties quant à la définition et au contenu de la mission devant être confiée à l’expert (Il).

I. Sur la désignation d’un mandataire ad hoc et la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt à agir

La société Casinos de [Localité 6] estime qu’il existe une opposition manifeste d’intérêts entre la SAAT et ses dirigeants dans le cadre de la présente instance en référé, qui a pour objet la mise en oeuvre d’une mesure d’instruction in futurum visant à établir l’existence d’agissements de la gérance, contraires à l’intérêt social. Elle se prévaut d’un arrêt rendu le 9 novembre 2022 par la Cour de cassation, qui rappelle que l’action sociale exercée à l’encontre des gérants en fonction nécessitait impérativement la désignation d’un administrateur ad hoc pour prévenir un tel conflit d’intérêts.

La société SAAT, M. [X] et M. [P] n’ayant pas répliqué aux dernières conclusions de la société Casinos de [Localité 6] datées du 6 juillet 2023, n’ont opposé aucun moyen de défense à cette demande de désignation d’un mandataire ad hoc.

La cour observe cependant, que la société Casinos de [Localité 6], bien que demanderesse à l’action principale fondée sur l’article 145 du Code de procédure civile, n’avait formé aucune prétention de ce chef en première instance. Sa demande est en conséquence irrecevable en application de l’article 564 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie, qui interdit aux parties de soumettre à la cour de nouvelles prétentions, si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

II. Sur l’étendue de la mission

Pour une meilleure compréhension, la cour a numéroté de (1) à (5) les chefs de mission définis par le juge des référés ainsi qu’il suit :

– (1) préciser le niveau actuel précis des rémunérations salariées et de gérance de MM. [X], [P] et [Z] au sein de la société SAAT et préciser la nature et le montant des avantages en nature dont ils bénéficient ou ont bénéficié au cours de la période courant à compter de l’exercice ouvert le 1er janvier 2019,

– (2) décrire les fonctions techniques dont ces rémunérations sont/ont été la contrepartie et indiquer si les justificatifs produits sont de nature à justifier le montant de ces rémunérations par rapport à des postes comparables occupés dans des sociétés de taille similaire à la société SAAT, ainsi qu’au regard du service rendu, et le cas échéant, donner son avis sur le montant de lajuste rémunération de telles fonctions,

– (3) préciser les conditions dans lesquelles M. [P] a pu bénéficier de la prime de bilan décidée en sa faveur depuis 2016 et dans l’affirmative, indiquer les montants perçus à ce titre par l’intéressé,

– (4) donner son avis sur la conformité à l’intérêt social de la société SAAT, des rémunérations perçues par MM. [X] et [P] ainsi que les avantages en nature qui leurs ont été octroyés,

– (5) et plus généralement fournir tout élément technique et de fait permettant à la juridiction éventuellement saisie au fond de déterminer les responsabilités susceptibles d’être encourues et d’évaluer les préjudices subis.

Les parties sont en désaccord sur deux points de la mission confiée par le juge des référés à Mme [C] d’une part quant à la nature des rémunérations, objet de l’expertise (a), et d’autre part quant à la licéité de l’avis requis du technicien portant sur la conformité des rémunérations versées aux dirigeants à l’intérêt social de la SAAT (b).

a. Sur la nature des rémunérations, objet de l°expertise

Le juge des référés demande à l’expert, aux points n° 3 et n° 4 de la mission de préciser le niveau actuel des rémunérations salariées et de gérance de MM. [X], [P] et [Z], de préciser également la nature et le montant des avantages en nature dont ils ont bénéficié ou bénéficient à compter l’exercice ouvert le 1er janvier 2019, de décrire les fonctions techniques dont ces rémunérations sont ou ont été la contrepartie et de donner son avis sur le montant de la juste rémunération de telles fonctions.

Les appelants entendent obtenir la réformation de la mission. Ils font valoir que le périmètre légal dans lequel l’expertise d’évaluation des rémunérations des dirigeants est attendue doit être précisé, selon qu’il s’agit d’appréhender la situation sur le plan commercial social ou même fiscal.

Ils soutiennent, qu’au regard de la réglementation fiscale, l’appréciation des niveaux de rémunération en contrepartie des services rendus au titre des fonctions techniques n’intéressent que les rémunérations du travail, et sollicitent en conséquence de la cour, qu’elle revoit la mission en apportant cette précision et en limitant l’investigation de l’expert aux seules rémunérations des fonctions techniques salariales. Ils entendent également ajouter à la mission une précision en demandant à l’expert de se prononcer sur les rémunérations des fonctions techniques, exclusivement salariales, selon elle, en considération de la situation économique, financière, et fiscal, et par rapport à des postes à périmètre de fonctions et d’intervention identiques, dans des sociétés d’activité similaire.

La société Casino de [Localité 6] rappelle qu’elle a bien un intérêt légitime à l’organisation de la mesure d’expertise sollicitée en vue de déterminer le niveau de rémunération des dirigeants de la SAAT, dans la mesure où des rémunérations excessives exposeraient la société SAAT à une intégration de la partie de rémunération excédant l’importance du service rendu au bénéfice imposable de la société. Elle fait valoir qu’il importe dans ces conditions, d’examiner dans le cadre de l’expertise l’ensemble des rémunérations et avantages en nature versés aux dirigeants de la SAAT, quelle qu’en soit la nature salariale et statutaire et non de limiter l’analyse aux seules rémunérations versées en contrepartie de fonctions techniques salariales, dès lors que, c’est bien cette approche globale que retient l’administration fiscale lorsqu’elle retient l’existence d’une rémunération excessive.

Enfin elle précise que le fait que la société Casinos de [Localité 6] ait pu, en son temps, alors qu’elle était représentée par une autre équipe dirigeante, voter en faveur des rémunérations de gérance qu’elle estime aujourd’hui comme excessives, ne la prive en rien de la possibilité de les contester aujourd’hui, si elle estime qu’elles exposent la société à un risque fiscal, notamment.

La cour retient comme le premier juge que la société Casinos de [Localité 6] a bien un intérêt légitime à voir ordonner la mesure diexpertise sollicitée, quant au montant des avantages en nature et des rémunérations , toute nature confondue, versées aux dirigeants de sa filiale, la SAAT, à compter du 1er janvier 2020, date à compter de laquelle la société Casinos de [Localité 6], représentée par une nouvelle équipe dirigeante, a refusé de renouveler les conventions antérieures relatives aux rémunérations servies aux gérants de la société SAAT.

Pour autant, l’article 238 du code de procédure civile impose à la cour de revoir la formulation de la mission confiée à Mme [C] en ce qu’il interdit à l’expert commis de porter la moindre appréciation d’ordre juridique, sauf à empiéter sur les pouvoirs du juge.

Sous le bénéfice de ces observations, il convient en conséquence de supprimer dans l’énoncé de la mission, toute demande d’avis impliquant de la part de l’expert une appréciation juridique, relevant du pouvoir exclusif du juge du fond, selon les modalités fixées au dispositif du présent arrêt.

b. Sur la licéité de l’avis requis du technicien portant sur la conformité des rémunérations versées aux dirigeants à l’intérêt social de la SAAT

Les appelants demandent à la cour de dire illégal ce chef de mission.

La société Casinos de [Localité 6] ne s’oppose pas à la modification de son énoncé en proposant les formulations suivantes :

– donner son avis sur le montant de la juste rémunération de telles fonctions au regard du service rendu,

– proposer une appréciation du risque financier auquel est exposé la société SAAT en cas de redressement fiscal portant sur le caractère excessif des rémunérations versées aux dirigeants ainsi qu’à M. [Z].

La cour retient, au regard des limites ci-dessus rappelées, posées par l’article 238 du code de procédure civile que le chef de mission n° 4 au terme duquel il est demandé à Mme [C] de se prononcer sur la conformité des rémunérations servies aux dirigeants de la SAAT à l’intérêt social de cette dernière, excéde manifestement les pouvoirs dévolus par la loi aux techniciens experts, ce dont toutes les parties conviennent au demeurant.

Il y a lieu en conséquence de le supprimer purement et simplement, sans rien y substituer, dès lors que la proposition de modification de la société Casinos de [Localité 6], qui appelle un avis sur la « juste rémunération » et sur le risque financier encouru en cas de redressement fiscal, implique nécessairement une appréciation juridique du fond du droit, qui relève du seul pouvoir souverain du juge du fond.

c. Sur le chef de mission relatif à la perception par M. [P] de la prime dite de bilan

Le juge des référés a confié à l’experte judiciaire mission de vérifier les conditions dans lesquelles M. [P] a pu bénéficier de la prime de bilan décidée en sa faveur depuis 2016, et dans l’affirmative d’indiquer les montants perçus à ce titre par l’intéressé.

La société SAAT, M. [X] et M. [P] concluent à la suppression de cette mission, mais ne développent aucun argument dans leurs dernières écritures. Dans leur mémoire ampliatif d’appel déposé le 30 novembre 2022, ils faisaient valoir que ce chef de mission était dépourvu de tout objet, dès lors qu’il ressortait d’une attestation du commissaire aux comptes datée du 9 juin 2022, que M. [P], devenu directeur adjoint en 2017 n’avait jamais perçu cette prime, dont le versement est subordonné à l’atteinte de seuil de déclenchement qui n’a pas été atteint.

La société Casinos de [Localité 6] soutient son maintien. Elle fait valoir qu’il s’agit de vérifier si, comme cela est soutenu par les parties adverses, l’intéressé n’a effectivement rien perçu à ce titre car les conditions financières exigées pour déclencher le droit à cette prime ne sont pas réunies.

La cour considère que la société Casinos de [Localité 6] a bien un intérêt légitime à faire contrôler que ladite prime n’a effectivement pas été versée à l’intéressé depuis que son principe a été décidé au motif que les seuils financiers définis pour déclencher son versement n’ont pas été atteint.

Le chef de mission sera en conséquence purement et simplement confirmé.

III. Sur la demande additionnelle d’extension de la mission

La société Casinos de [Localité 6] expose que l’expert judiciaire a déposé deux pré-rapports, à la suite desquels les parties adverses, considérant que l’expert avait outrepassé ses pouvoirs, ont, saisi la présidente du tribunal mixte de commerce d’un incident d’expertise pour l’audience du 19 juin 2023. Elle fait valoir qu’elle a déposé dans le cadre de cette instance devant le président du tribunal de commerce, des conclusions tendant à étendre la mission de l’expert, à 22 autres points précis, correspondant aux dires qu’elle avait adressés au technicien et qu’elle réitère les mêmes demandes devant la cour qui pourra statuer si elle s’estime compétente pour en connaître.

La société SAAT, M. [X] et M. [P] n’ont développé aucune argumentation pour répondre à ces prétentions additionnelles, dans le cadre de la présente instance.

Cependant force est de constater que ces demandes additionnelles, dont le président du tribunal mixte de commerce est saisi dans le cadre de l’instance d’incident sur expertise, ne sont pas explicitement énoncées par la demanderesse, ni au dispositif, ni dans le corpus de ses conclusions du 6 juillet 2023, lesquelles procèdent par simple renvoi aux questions contenues dans le dire qu’elle avait adressé le 19 mai 2023 à l’expert en réaction à son premier pré-rapport , qui n’est pas versé aux débats.

Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de statuer sur des demandes dont la cour n’a pas été régulièrement saisie.

IV. Sur les autres demandes

La société SAAT, M. [X] et M. [P] soutiennent que la société Casinos de [Localité 6] a, dans ses dernières conclusions, tenu des propos diffamatoires et outrageants à leur égard. Ils demandent en conséquence à la cour de la condamner à leur verser une somme de 500 000 francs à chacun à titre de dommages et intérêts.

La société Casinos de [Localité 6] s’oppose à cette demande. Elle fait valoir que la cour, statuant en référé, n’est pas compétente pour statuer au fond sur le caractère diffamatoire des faits qui lui sont reprochés, et doit en conséquence déclarer les parties adverses irrecevables en leurs demandes. Subsidiairement, au fond, elle soutient que ses propos ne portent aucune imputation d’un fait précis de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération de la SAAT, de M. [X] et de M. [P].

Les propos remis en cause devant la cour sont les suivants :

Extrait des conclusions de la société Casinos de [Localité 6] :

« Les gérants savent pertinemment que la mesure d’expertise ordonnée va mettre en évidence les nombreux abus dont ils se sont rendus coupables »

« Ils savent qu’ils ont perçus depuis de nombreuses années des rémunérations excédant très largement les services rendus à la société »

«  Leur intérêt personnel est donc parfaitement distinct de celui de la SAAT lésée par de tels abus. »

« Et pourtant preuve supplémentaire de l’abus de leurs fonctions, ceux-ci prétendent… »

« Il s’agit là d’un exemple parmi tant d’autres des abus de la gérance de la SAAT, le plus préoccupant étant qu’elle semble n’en avoir nullement véritablement conscience. »

« que la Cour ne soit pas dupe de leurs gesticulations : après s’être farouchement opposés à la réalisation de cette mission d’expertise, les appelants tentent désormais d’en compliquer l’exécution autant qu’ils le peuvent. »

L’article 41 alinéa 3 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881, invoqué par les appelants, institue le principe d’une immunité destinée à garantir le libre exercice du droit d’agir ou de se défendre en justice qui est applicable aux écrits produits ou propos tenus devant toute juridiction. Cette immunité ne doit recevoir exception que dans les cas où les faits diffamatoires sont étrangers à la cause ce qui n’est pas le cas en espèce dès lors que les accusations et griefs portés à l’encontre des dirigeants de la SAAT sont en rapport direct avec la demande d’expertise, qui est au c’ur des débats.

Dans ces conditions, il convient de débouter M. [X], M. [P] et la SAAT de leur demande tendant à la condamnation de la société Casinos de [Localité 6] de ce chef.  

V. Sur l’application de l’article 700 du Code de procédure civile

Il serait inéquitable de débouter la société Casinos de [Localité 6] de sa demande formulée à ce titre.

VI. Sur les dépens

La société SAAT, M. [X] et M. [P] ayant partiellement gain de cause, la société Casinos de [Localité 6] supportera les dépens de l’instance d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevable la demande formée pour la première fois devant la cour, tendant à la désignation d’un administrateur ad hoc pour représenter la société SAAT, sur la désignation d’un mandataire ad hoc ;

Infirme l’ordonnance entreprise en ce que Mme [C] a reçu les chefs de mission suivants :

– préciser le niveau actuel précis des rémunérations salariées et de gérance de MM. [X], [P] et [Z] au sein de la société SAAT et préciser la nature et le montant des avantages en nature dont ils bénéficient ou ont bénéficié au cours de la période courant à compter de l’exercice ouvert le 1er janvier 2019,

– décrire les fonctions techniques dont ces rémunérations sont/ont été la contrepartie et indiquer si les justificatifs produits sont de nature à justifier le montant de ces rémunérations par rapport à des postes comparables occupés dans des sociétés de taille similaire à la société SAAT, ainsi qu’au regard du service rendu, et le cas échéant, donner son avis sur le montant de la juste rémunération de telles fonctions,

– préciser les conditions dans lesquelles M. [P] a pu bénéficier de la prime de bilan décidée en sa faveur depuis 2016 et dans l’affirmative, indiquer les montants perçus à ce titre par l’intéressé,

– donner son avis sur la conformité à l’intérêt social de la société SAAT, des rémunérations perçues par MM. [X] et [P] ainsi que les avantages en nature qui leurs ont été octroyés,

– et plus généralement fournir tout élément technique et de fait permettant à la juridiction éventuellement saisie au fond de déterminer les responsabilités susceptibles d’être encourues et d’évaluer les préjudices subis ;

Statuant à nouveau, sur les chefs de mission, donne mission à l’expert judiciaire de :

– indiquer si M. [X], M. [P] et M. [Z] sont titulaires ou ont été titulaires d’un contrat de travail au sein de la société SAAT, et dans l’affirmative, indiquer la date de leur signature et prise d’effet, ainsi que le montant annuel des salaires et des avantages en nature qui leur sont ou ont été versés à compter du 1er janvier 2019, ainsi que le montant des cotisations sociales versées par la société SAAT pour le compte de ces trois salariés,

– indiquer si des rémunération sont versées aux gérants depuis le 1er janvier 2019, indiquer leur montant, rechercher si celles-ci ont été fixées ou entérinées par les assemblées générales, et chiffrer le montant des cotisations sociales versées pour le compte des gérants,

– décrire les fonctions techniques dont ces rémunérations du travail et de gérance, sont/ont été la contrepartie et indiquer si les justificatifs produits sont de nature à justifier le montant de ces rémunérations, et indiquer le montant des rémunérations du travail et de gérance, accordé pour des postes à périmètre de fonctions et d’interventions identiques occupés dans des sociétés d’activité similaire,

– préciser les conditions dans lesquelles M. [P] a pu bénéficier de la prime de bilan décidée en sa faveur depuis 2016 et dans l’affirmative, indiquer les montants perçus a ce titre par l’intéressé,

– fournir tout élément technique et de fait permettant à la juridiction éventuellement saisie au fond de déterminer les responsabilités susceptibles d’être encourues et d’évaluer les préjudices subis ;

Déboute la société SAAT, M. [X] et M. [P] de leur demande en dommages intérêts sur le fondement de l’article 41 alinéa 3 de la loi du 29 juillet 1881 ;

Déboute la société Casinos de [Localité 6] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Casinos de [Localité 6] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

 

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