Résiliation de bail d’habitation et insalubrité

Notez ce point juridique

1. Il est essentiel de respecter les procédures légales en matière de résiliation de bail, notamment en ce qui concerne la notification de l’assignation aux autorités compétentes. Tout manquement à ces obligations peut entraîner l’irrecevabilité de la demande de résiliation du bail.

2. Les bailleurs ont l’obligation de fournir un logement décent aux locataires, conforme aux normes en vigueur. Tout manquement à cette obligation peut entraîner des conséquences juridiques, telles que l’obligation de relogement ou la réduction du montant du loyer.

3. En cas de litige entre bailleur et locataire concernant l’état du logement loué, il est important de recueillir des preuves tangibles de l’état du logement, telles que des expertises ou des photographies. Ces éléments peuvent être déterminants pour établir la responsabilité de chaque partie et résoudre le litige de manière équitable.


Madame [B] [O] [S] a donné à bail à Madame [T] [A] un appartement en juillet 1989. En mars 2019, la locataire a demandé une expertise car le logement était devenu insalubre. Le juge des référés a ordonné le relogement de la locataire et la suspension du paiement du loyer. Après réintégration en août 2019, un expert a jugé que les travaux rendaient le logement décent. En juin 2020, la bailleresse a demandé la résiliation du bail pour défaut de paiement du loyer, mais le tribunal a rejeté sa demande. En appel, la bailleresse demande la résiliation du bail, l’expulsion de la locataire et le paiement des loyers impayés, tandis que la locataire demande la confirmation du jugement initial et la justification de travaux de réparation.

Sur la recevabilité de l’appel :

La recevabilité de l’appel n’est pas discutée par les parties, les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d’office.

Sur la recevabilité de la demande de résiliation du bail :

Le premier juge a déclaré irrecevable la demande de résiliation du bail et d’expulsion de la locataire au motif qu’il n’était pas justifié que les dispositions de l’article 24 III de la loi du 6 juillet 1989 prévoyant que l’assignation aux fins de constat de la résiliation du bail doit être notifiée par huissier au représentant de l’État dans le département, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, au moins deux mois avant l’audience, afin qu’il saisisse l’organisme compétent désigné sur le plan local d’action pour le relogement et l’hébergement des personnes défavorisées, suivant la répartition de l’offre globale de services d’accompagnement vers et dans le logement prévu à l’article 4 de la loi n°90-449 du 31 mai 1990 précité, l’organisme saisi devant alors réaliser un diagnostic social et financier au cours duquel le locataire et le bailleur sont mis en demeure de présenter leurs observations, le tout étant ensuite transmis au jugement avant l’audience.

L’appelante qui sollicite l’infirmation de la décision déférée sur ce point, verse aux débats un accusé réception électronique que lui a délivré la préfecture de la Haute-Corse, attestant qu’elle a bien été destinataire par voie électronique le 30 juin 2020 de l’assignation en résiliation du bail entraînant la saisine de la commission compétente.

En l’état de cette tardive production, il y a lieu d’infirmer le jugement sur ce point et de déclarer la demande de résiliation et d’expulsion recevable.

Sur l’exécution du contrat de location par les parties et ses conséquences :

Concernant la bailleresse, celle-ci en vertu de l’article 1719 du Code civil et de l’article 2 du décret n°2002-120 du 30 janvier 2002, a l’obligation de mettre à disposition de sa cocontractante un logement décent qui doit donc répondre à un certain nombre de critères dont notamment l’absence de risque pour la sécurité et la santé du locataire, une performance énergétique minimale et la mise à disposition de certains équipements.

Sur la base d’un descriptif établi le 14 décembre 2018 par Monsieur [P], expert dommage-construction, le juge d’instance statuant en référé le 18 avril 2019 a fondé sa décision d’ordonner le relogement de Madame [T] [A] dans un logement similaire, a relevé que celui, objet du présent litige, n’était pas décent et même présentait un danger en ce que les locaux n’étaient pas protégés contre les eaux de ruissellement et les remontées d’eau, que les matériaux de construction, les canalisations et revêtements du logement présentaient des risques manifestes pour la santé et la sécurité physique de l’occupant, que les réseaux et branchements d’électricité n’étaient pas en bon état d’usage et de fonctionnement et qu’enfin l’aération n’était pas suffisante et les dispositifs de ventilation ne permettaient pas un renouvellement de l’air et une évacuation de l’humidité adaptée aux besoins d’une occupation normale.

Monsieur [X] dans son pré-rapport du 29 juillet 2019, après avoir rappelé que l’origine principale de l’insalubrité du logement était un dégât des eaux ancien en provenance du logement voisin situé au-dessus, a précisé que lors de sa visite des lieux que la locataire avait réintégrés et à sa plus grande surprise, un certain nombre de travaux importants avaient été effectués en l’absence d’un maître d »uvre pour les piloter, sans attendre sa venue et ses éventuelles prescriptions. Il a ainsi, le 11 juin 2019, constaté :

– l’installation d’une VMC destinée à améliorer la ventilation du logement en s’étonnant tout de même du nombre de grilles d’aération et de leur localisation anarchique,
– la réfection totale du réseau de canalisations de l’appartement voisin, la réfection de la salle de bains

– Madame [B] [O] [W] épouse [S] condamnée à payer à Madame [A] la somme de 1 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens
– Madame [T] [A] dispensée de payer le loyer pour les mois de mai à octobre de toutes les années jusqu’à ce que sa bailleresse respecte les prescriptions judiciairement imposées relatives au chauffage et à la conformité de la nouvelle installation électrique
– Madame [T] [A] condamnée à payer à Madame [B] [O] [W] épouse [S] la totalité du montant du loyer indexé pour les mois d’août, septembre et octobre 2019, puis à compter de 2020 et jusqu’en 2024, pour les mois de mai à octobre de chacune de ces années
– Madame [B] [O] [W] épouse [S] déboutée de sa demande de remboursement de la taxe d’enlèvement d’ordures ménagères
– Madame [B] [O] [W] épouse [S] condamnée aux dépens d’appel


Réglementation applicable

– Code civil
– Décret n°2002-120 du 30 janvier 2002
– Loi du 6 juillet 1989
– Loi n°90-449 du 31 mai 1990
– Code de procédure civile

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Pierre Louis MAUREL
– Me Marie-Christine MARIETTI

Mots clefs associés

– Recevabilité de l’appel
– Demande de résiliation du bail
– Assignation aux fins de constat de la résiliation du bail
– Commission compétente
– Exécution du contrat de location
– Logement décent
– Insalubrité du logement
– Travaux de réfection
– Dispositif de chauffage
– Installation électrique
– Non-paiement du loyer
– Allocation logement
– Taxe d’enlèvement d’ordures ménagères
– Astreinte
– Frais irrépétibles
– Dépens d’appel

– Recevabilité de l’appel : Critères juridiques qui déterminent si un appel interjeté contre une décision de justice est admissible à être entendu par une cour supérieure.

– Demande de résiliation du bail : Procédure légale par laquelle une partie (locataire ou bailleur) demande la fin anticipée du contrat de bail en raison de manquements contractuels ou de dispositions légales.

– Assignation aux fins de constat de la résiliation du bail : Acte juridique par lequel un bailleur demande à un tribunal de constater officiellement la résiliation d’un bail suite à des manquements du locataire.

– Commission compétente : Organe ou autorité désigné par la loi pour traiter et décider de certaines questions spécifiques dans un domaine donné.

– Exécution du contrat de location : Ensemble des obligations et des droits qui doivent être respectés par les parties (locataire et bailleur) dans le cadre d’un contrat de location.

– Logement décent : Logement qui répond aux critères minimum de confort et de sécurité définis par la loi pour être habitable.

– Insalubrité du logement : État d’un logement qui présente des risques pour la santé ou la sécurité des occupants en raison de ses conditions de salubrité défaillantes.

– Travaux de réfection : Ensemble des réparations ou améliorations effectuées sur un bien immobilier pour en restaurer l’état ou pour améliorer ses performances.

– Dispositif de chauffage : Installation ou équipement destiné à assurer le chauffage d’un espace de vie.

– Installation électrique : Ensemble des équipements et des circuits électriques fournissant et distribuant l’électricité dans un bâtiment.

– Non-paiement du loyer : Défaut de paiement du loyer par le locataire à la date convenue dans le contrat de location.

– Allocation logement : Aide financière destinée à réduire le montant du loyer ou des charges locatives pour les ménages à revenus modestes.

– Taxe d’enlèvement d’ordures ménagères : Taxe locale destinée à financer le service de collecte et de traitement des déchets ménagers.

– Astreinte : Somme d’argent qu’une partie doit payer à l’autre en cas de non-exécution d’une obligation dans les délais fixés par le juge.

– Frais irrépétibles : Frais de justice qui ne sont pas inclus dans les dépens et que la partie gagnante peut demander à la partie perdante de rembourser.

– Dépens d’appel : Ensemble des frais engagés pour un procès en appel, incluant les frais de justice et autres dépenses liées à la procédure.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Chambre civile

Section 1

ARRET N°

du 24 JANVIER 2024

N° RG 22/00394 – N° Portalis DBVE-V-B7G-CEEQ TJ-R

Décision déférée à la Cour :

Jugement Au fond, origine Juge des contentieux de la protection de bastia, décision attaquée en date du 16 Mai 2022, enregistrée sous le n°

[S]

C/

[A]

Copies exécutoires délivrées aux avocats le

COUR D’APPEL DE BASTIA

CHAMBRE CIVILE

ARRET DU

VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT QUATRE

APPELANTE :

Mme [B] [O] [S]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Pierre Louis MAUREL, avocat au barreau de BASTIA

INTIMEE :

Mme [T] [A]

née le 11 Octobre 1938 à [Localité 3]

Lieudit [Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Marie-Christine MARIETTI, avocat au barreau de BASTIA

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022-0974 du 07/11/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BASTIA)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 23 octobre 2023, devant Thierry JOUVE, Président de chambre, chargé du rapport, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Thierry JOUVE, Président de chambre

Marie-Ange BETTELANI, Conseillère

Emmanuelle ZAMO, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Elorri FORT.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 janvier 2024

ARRET :

Contradictoire,

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Thierry JOUVE, Président de chambre, et par Murielle DELEGUE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

Par contrat en date du 15 juillet 1989, Madame [B] [O] [S] a donné à bail à Madame [T] [A] un appartement situé au rez-de-chaussée du lotissement [Adresse 4] à [Localité 1] moyennant un loyer mensuel de 436 €.

Par assignation en référé en date du 8 mars 2019, la locataire a sollicité la désignation d’un expert estimant que son logement était devenu insalubre.

Par ordonnance en date du 18 avril 2019, le juge des référés du tribunal d’instance de Bastia a ordonné, aux frais de la bailleresse, le relogement de Madame [A] dans un logement similaire jusqu’à réalisation des travaux de reprise des désordres ainsi que la suspension du paiement du loyer tant que le relogement ne sera pas effectué.

La locataire a réintégré l’appartement litigieux en août 2019.

L’expert désigné, Monsieur [X], a déposé son rapport le 31 octobre 2019 (indiquant que les travaux réalisés par la bailleresse étaient de nature à rendre le logement décent).

Par exploit en date du 24 juin 2020, Madame [S] a attrait Madame [T] [A] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bastia aux fins de voir principalement prononcer la résiliation du bail d’habitation en date du 15 juillet 1989 pour défaut de règlement du loyer depuis le mois d’avril 2019, ordonner l’expulsion, condamner la locataire au paiement de l’arriéré s’élevant à la somme de 10 464 € ainsi que de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.

Par jugement contradictoire en date du 16 mai 2022, le Tribunal a :

‘ déclaré irrecevable la demande de résiliation et d’expulsion de la locataire,

‘ débouté Madame [B] [O] [W] épouse [S] de sa demande en paiement des loyers pour la période comprise entre la date de réintégration dans le bien soit entre août 2019 et la présente décision,

‘ condamné Madame [B] [O] [W] épouse [S] à justifier de l’installation effective d’un chauffage ainsi que de la délivrance d’une attestation de conformité de l’installation électrique, ci-après Consuel, et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard passé un délai d’un mois à compter de la signification du présent jugement,

‘ débouté les parties de leurs autres demandes,

‘ condamné Madame [B] [O] [W] épouse [S] à payer à Madame [A] la somme de 1 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

APPEL :

Par déclaration enregistrée le 10 juin 2022, Madame [W] a interjeté appel de la décision en toutes ses dispositions.

Elle a notifié ses dernières conclusions par voie électronique le 25 mai 2023.

Madame [A] a notifié ses dernières conclusions par voie électronique le 28 août 2023.

Par ordonnance rendue le 7 septembre 2023, la clôture a été fixée au 6 septembre 2023 et l’affaire a été renvoyée à l’audience du 23 octobre 2023 où elle a été retenue. Le délibéré a été fixé au 24 janvier 2024.

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Dans ses conclusions, Madame [S] sollicite :

– l’infirmation du jugement entrepris sauf en ce qu’il a débouté Madame [A] de ses demandes.

– la résiliation judiciaire du bail,

– l’expulsion de Madame [A] du logement situé au rez-de-chaussée du lotissement [Adresse 4], situé lieudit [Adresse 4] à [Localité 1],

– la condamnation de Madame [A] à lui payer la somme de 436 € par mois impayé sur la période courant du mois d’avriI 2019 au mois de juin 2023, soit au total de 20 495 €,

– la condamnation de Madame [A] à rembourser à Madame [S], la taxe d’enlèvement des ordures ménagères payée depuis avril 2019,

– le rejet de l’ensemble de ses demandes présentées par Madame [A],

– la condamnation de Madame [A] à lui payer la somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles,

– sa condamnation en outre aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Pierre-Louis MAUREL, avocat aux offres de droit, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions Madame [A] sollicite :

– la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a déclaré irrecevable la demande de résiliation du bail présentée par Madame [S],

– la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a aussi débouté Madame [S] de sa demande en paiement des loyers à compter de la date de réintégration dans les lieux soit août 2019,

– le rejet de la demande de Madame [L] [S] en résiliation du bail y ajoutant que cette règle est d’ordre public,

– d’être reçue en son appel incident,

et constatant la persistance de l’état d’insalubrité de l’appartement,

– la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a condamné Madame [S] à justifier de l’installation effective d’un chauffage ainsi que de la délivrance d’une attestation de conformité de l’installation électrique par le Consuel y ajoutant, sur appel incident, de justifier de la reprise de l’ensemble des désordres relevés dans le rapport d’expertise.

– que soit ordonné que Madame [S] ne pourra pas réclamer les loyers échus du mois d’août 2019 jusqu’à la réalisation effective et par elle justifiée des obligations mises à sa charge,

– la liquidation de l’astreinte prononcée par le jugement déféré à la somme de 18 250 €,

– la condamnation de Madame [L] [S] au paiement de cette somme,

– le prononcé d’une astreinte définitive de 250 € par jour de retard pour garantir l’accomplissement des obligations mises à la charge de Madame [S] et ce, à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,

– la condamnation de Madame [L] [S] au paiement de la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens sur le fondement de l’article 696 du même code.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux conclusions et aux pièces déposées conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la recevabilité de l’appel :

La recevabilité de l’appel n’est pas discutée par les parties, les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d’office.

Sur la recevabilité de la demande de résiliation du bail :

Le premier juge a déclaré irrecevable la demande de résiliation du bail et d’expulsion de la locataire au motif qu’il n’était pas justifié que les dispositions de l’article 24 III de la loi du 6 juillet 1989 prévoyant que l’assignation aux fins de constat de la résiliation du bail doit être notifiée par huissier au représentant de l’État dans le département, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, au moins deux mois avant l’audience, afin qu’il saisisse l’organisme compétent désigné sur le plan local d’action pour le relogement et l’hébergement des personnes défavorisées, suivant la répartition de l’offre globale de services d’accompagnement vers et dans le logement prévu à l’article 4 de la loi n°90-449 du 31 mai 1990 précité, l’organisme saisi devant alors

réaliser un diagnostic social et financier au cours duquel le locataire et le bailleur sont mis en demeure de présenter leurs observations, le tout étant ensuite transmis au jugement avant l’audience.

L’appelante qui sollicite l’infirmation de la décision déférée sur ce point, verse aux débats un accusé réception électronique que lui a délivré la préfecture de la Haute-Corse, attestant qu’elle a bien été destinataire par voie électronique le 30 juin 2020 de l’assignation en résiliation du bail entraînant la saisine de la commission compétente.

En l’état de cette tardive production, il y a lieu d’infirmer le jugement sur ce point et de déclarer la demande de résiliation et d’expulsion recevable.

Sur l’exécution du contrat de location par les parties et ses conséquences :

Concernant la bailleresse, celle-ci en vertu de l’article 1719 du Code civil et de l’article 2 du décret n°2002-120 du 30 janvier 2002, a l’obligation de mettre à disposition de sa cocontractante un logement décent qui doit donc répondre à un certain nombre de critères dont notamment l’absence de risque pour la sécurité et la santé du locataire, une performance énergétique minimale et la mise à disposition de certains équipements.

Sur la base d’un descriptif établi le 14 décembre 2018 par Monsieur [P], expert dommage-construction, le juge d’instance statuant en référé le 18 avril 2019 a fondé sa décision d’ordonner le relogement de Madame [T] [A] dans un logement similaire, a relevé que celui, objet du présent litige, n’était pas décent et même présentait un danger en ce que les locaux n’étaient pas protégés contre les eaux de ruissellement et les remontées d’eau, que les matériaux de construction, les canalisations et revêtements du logement présentaient des risques manifestes pour la santé et la sécurité physique de l’occupant, que les réseaux et branchements d’électricité n’étaient pas en bon état d’usage et de fonctionnement et qu’enfin l’aération n’était pas suffisante et les dispositifs de ventilation ne permettaient pas un renouvellement de l’air et une évacuation de l’humidité adaptée aux besoins d’une occupation normale.

Monsieur [X] dans son pré-rapport du 29 juillet 2019, après avoir rappelé que l’origine principale de l’insalubrité du logement était un dégât des eaux ancien en provenance du logement voisin situé au-dessus, a précisé que lors de sa visite des lieux que la locataire avait réintégrés et à sa plus grande surprise, un certain nombre de travaux importants avaient été effectués en l’absence d’un maître d »uvre pour les piloter, sans attendre sa venue et ses éventuelles prescriptions. Il a ainsi, le 11 juin 2019, constaté :

– l’installation d’une VMC destinée à améliorer la ventilation du logement en s’étonnant tout de même du nombre de grilles d’aération et de leur localisation anarchique,

– la réfection totale du réseau de canalisations de l’appartement voisin, la réfection de la salle de bains du logement litigieux (cumulus, lavabo, miroir, baignoire, peinture) avec néanmoins un trou dans la baignoire la rendant inutilisable, la commande

de la réglette au-dessus du lavabo inaccessible pour une personne handicapée ou de taille inférieure à 1,70 mètre, des plinthes inachevées,

– la réfection de l’installation électrique et des peintures dans toutes les pièces.

Il précisait ne pouvoir se prononcer sur les mérites de ces travaux, ceci n’entrant pas dans le champ de sa mission et considérait que l’appartement n’était plus à première vue inhabitable même si des travaux complémentaires relatifs à l’étanchéité du bâtiment, les chutes d’eau endommagées et les volets roulants semblaient nécessaires.

Dans son rapport final établi le 31 octobre 2019, il indiquait en complément que les travaux effectués [dont il ne pouvait toujours pas attester de leur qualité et donc de leur efficience] étaient de nature à rendre le logement décent sous réserve de l’installation d’un dispositif de chauffage (un convecteur électrique par pièce s’avérant suffisant), de la réparation de la baignoire et d’une modification rendant accessible le dispositif d’éclairage du miroir.

Dans ses écritures, Madame [T] [A] expose qu’elle a été contrainte, le loyer du gîte qu’elle occupait à titre de relogement n’étant plus réglé par sa propriétaire, de regagner l’appartement litigieux alors que l’ensemble des travaux nécessaires à en assurer le caractère décent n’avait pas été effectué, que malgré les injonctions du jugement querellé, le dispositif de chauffage n’a jamais été installé, que de nouvelles traces d’humidité ont ré-apparu et qu’alors que la conformité de la nouvelle installation électrique (Consuel) n’a toujours pas été vérifiée, le tableau électrique disjoncte régulièrement.

Du fait de l’existence et de la persistance des graves manquements de sa bailleresse à ses obligations contractuelles, elle estime être fondée à ne plus acquitter ses loyers et s’oppose aux demandes adverses de résiliation du bail et de paiement de l’arriéré.

À l’appui de ses prétentions, Madame [S] estime quant à elle, avoir, en engageant des frais conséquents, effectué les travaux nécessaires pour rendre l’appartement conforme aux normes en vigueur. Elle soutient que des photographies et les déclarations mêmes de son adversaire permettent de s’assurer de la présence du chauffage, qu’elle produit une facture en date du 14 octobre 2022 attestant de la pose dans la salle de bains d’un sèche-serviettes et d’un chauffage à inertie. Elle ajoute que si l’attestation de conformité de la nouvelle installation électrique par le Consuel n’a pu être obtenue, c’est du seul fait de la locataire qui n’a pas permis au technicien mandaté à cette fin d’accéder au logement et que les problèmes de disjoncteurs sont liés au caractère inadapté (puissance insuffisante) du contrat de fourniture d’électricité souscrit par l’occupante des lieux.

Sur quoi, la cour considère qu’au vu de l’état d’insalubrité du logement mis à disposition de Madame [T] [A], le juge des référés a pertinemment ordonné son relogement et l’a dispensée du paiement des loyers.

Depuis son retour en août 2019, et malgré les travaux effectués, le local loué n’est toujours pas aux normes puisque l’appelante ne justifie pas qu’elle ait installé de façon satisfaisante un système de chauffage dans toutes les pièces qui nécessitaient d’en disposer. Ce manquement n’est cependant dirimant que pendant les périodes froides ou fraîches, l’appartement s’avérant tout de même habitable, hors de ces périodes malgré la subsistance de certains défauts dont notamment la défectuosité de la baignoire et du dispositif d’éclairage du miroir.

L’éventuelle non-conformité de l’installation électrique n’est pas établie par la locataire, les dysfonctionnements évoqués pouvant plausiblement provenir d’une inadaptation de l’abonnement souscrit auprès du fournisseur d’énergie.

Il en résulte que le non-paiement du loyer est partiellement justifié et ne saurait constituer un manquement suffisamment grave pour entraîner une résiliation du bail. Pour autant, les améliorations apportées ne légitiment plus la dispense totale de règlement, étant en outre remarqué que Madame [T] [A] ne conteste pas le fait de continuer à percevoir l’allocation logement, la perception de cette aide étant par ailleurs évoquée par la fille de l’intimée Madame [F] [V] dans l’attestation qu’elle a établie le 11 décembre 2021.

Madame [S] sera donc déboutée de sa demande de résiliation du bail.

Madame [T] [A] sera condamnée à verser à sa bailleresse la totalité du montant du loyer indexé pour les mois d’août, septembre et octobre 2019, puis à compter de 2020 et jusqu’en 2024, pour les mois de mai à octobre de chacune de ces années.

L’intéressée sera déboutée de sa demande de remboursement de la taxe d’enlèvement d’ordures ménagères faute de produire le moindre document fiscal attestant de sa réclamation puis de son acquittement.

Il convient de confirmer la condamnation de Madame [S] à justifier de l’installation effective du chauffage et ce, sous astreinte de 50 € par jour de retard. Il y a également lieu, de prescrire, sous la même contrainte, la réparation de la baignoire et la mise en conformité de la réglette d’éclairage.

Concernant la nécessaire délivrance d’une attestation de conformité de l’installation électrique qui doit donc toujours être imposée à la propriétaire, la consultation des documents produits aux débats permet de s’interroger sur la responsabilité de chacune des parties dans l’échec de la mise en ‘uvre de ce processus qui suppose au niveau de la notification de la date de l’horaire de passage du technicien fixée arbitrairement par l’entreprise qui l’emploie, une consultation en ligne du site Internet de celle-ci. Or, il n’est pas certain qu’une telle démarche soit commodément à la portée d’une personne âgée de plus de 80 ans. Il conviendra donc que la bailleresse notifie utilement et suffisamment tôt à sa cocontractante, la date et l’horaire du prochain passage du Consuel.

Compte tenu du comportement globalement positif désormais adopté par la propriétaire, il ne paraît pas opportun actuellement de liquider l’astreinte prononcée.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Aucune considération d’équité n’impose qu’il soit fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Succombant partiellement, Madame [S] supportera les dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

– infirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a :

‘ condamné Madame [B] [O] [W] épouse [S] à justifier de l’installation effective d’un chauffage ainsi que de la délivrance d’une attestation de conformité de l’installation électrique ci-après Consuel, et ce sous astreinte de 50 € par jour de retard,

‘ condamné Madame [B] [O] [W] épouse [S] à payer à Madame [A] la somme de 1 500 € par application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

et statuant à nouveau des chefs infirmés,

– déclare recevable la demande de résiliation et d’expulsion de la locataire présentée par Madame [B] [O] [W] épouse [S] et la rejette,

– dit que Madame [T] [A] est dispensée de payer le loyer pour les mois de mai à octobre de toutes les années jusqu’à ce que sa bailleresse respecte les prescriptions judiciairement imposées relatives au chauffage et à la conformité de la nouvelle installation électrique,

– condamne Madame [T] [A] à payer à Madame [B] [O] [W] épouse [S] la totalité montant du loyer indexé pour les mois d’août, septembre et octobre 2019, puis à compter de 2020 et jusqu’en 2024, pour les mois de mai à octobre de chacune de ces années,

– déboute Madame [B] [O] [W] épouse [S] de sa demande de remboursement de la taxe d’enlèvement d’ordures ménagères,

– précise en ce qui concerne la condamnation de Madame [B] [O] [W] épouse [S] à la délivrance d’une attestation de conformité, qu’elle devra, en cas de difficulté,

justifier que sa locataire a bien été avisée en temps utile de la date et de l’heure de passage du CONSUEL et le cas échéant, des difficultés rencontrés par le technicien mandaté pour accéder eu logement,

– rejette la demande de liquidation de l’astreinte déjà prononcée et de fixation d’une nouvelle définitive,

– précise que le délai de l’astreinte provisoire de 50 € renouvelée commencera à courir passé les deux mois suivant la signification de la présente décision et pour une durée de trois mois,

– dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– rejette toutes les autres demandes plus amples ou contraires,

– condamne Madame [B] [O] [W] épouse [S] aux dépens d’appel.

LA GREFFIERE

LE PRESIDENT

 

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