1. Il est important de démontrer les conséquences économiques négatives de l’atteinte aux droits d’auteur, notamment en calculant le manque à gagner et la perte subie par la partie lésée. Il est également nécessaire de prendre en compte les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits.
2. Pour évaluer les dommages et intérêts consécutifs à une atteinte aux droits d’auteur, il est essentiel de déterminer la marge sur coût variable sur les ventes que la partie lésée aurait effectuées sans la contrefaçon. Cela implique de calculer le nombre d’articles contrefaisants écoulés, le nombre d’acquéreurs potentiels des produits originaux et la marge sur coût variable réalisée sur ces ventes.
3. En cas de concurrence déloyale par parasitisme, il est nécessaire de démontrer que l’opérateur économique a agi de manière fautive pour tirer profit des efforts, du savoir-faire ou de la notoriété d’un autre sans contrepartie. Il est important de prouver que cette pratique a causé un préjudice à la partie lésée.
Le délibéré de cette affaire a été reporté au 22 février 2024.
Sur la fin de non-recevoir opposée aux demandes de la société Stamp :
La société Stamp a introduit une action en contrefaçon contre les sociétés La Foir-fouille et FF Digital. Ces dernières ont opposé une fin de non-recevoir basée sur la prescription de l’action. La cour a jugé que l’action n’était pas prescrite, car la demande en justice a été introduite dans les délais légaux.
Sur les demandes tendant à l’infirmation du jugement de première instance :
Les sociétés La Foir-fouille et FF Digital ont demandé l’annulation de certaines pièces du dossier. La cour a jugé que ces demandes étaient dépourvues d’objet, car le tribunal n’avait pas statué sur ces points dans son dispositif.
Sur la demande d’annulation du procès-verbal de constat d’achat :
Les sociétés La Foir-fouille et FF Digital ont demandé l’annulation du procès-verbal de constat d’achat, arguant que l’huissier avait violé les règles en procédant à l’achat de l’article. La cour a confirmé l’annulation du procès-verbal, car l’huissier avait outrepassé ses compétences.
Sur la demande d’annulation du procès-verbal de saisie-contrefaçon :
Les sociétés La Foir-fouille et FF Digital ont demandé l’annulation du procès-verbal de saisie-contrefaçon, arguant que la saisie avait été pratiquée en dehors du ressort compétent. La cour a annulé la saisie, car elle avait été ordonnée par un juge incompétent.
Sur le droit d’auteur revendiqué par la société Stamp :
La société Stamp revendique un droit d’auteur sur un tabouret. La cour a reconnu l’originalité de l’oeuvre et a confirmé le droit d’auteur revendiqué par la société Stamp.
Sur la contrefaçon du droit d’auteur :
La société Stamp a prouvé que les sociétés La Foir-fouille et FF Digital avaient copié son tabouret. La cour a jugé qu’il s’agissait d’un acte de contrefaçon.
Sur l’action en concurrence déloyale :
La société Stamp a prouvé que les sociétés La Foir-fouille et FF Digital avaient pratiqué une concurrence déloyale en copiant son produit. La cour a retenu ces actes de parasitisme.
Sur la réparation des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale :
La société Stamp a demandé réparation pour les actes de contrefaçon et de concurrence déloyale. La cour a réservé sa décision, demandant à la société Stamp de fournir des éléments complémentaires pour évaluer le préjudice subi.
– 3180 euros pour la réduction du prix du voyage
– 63,27 euros pour les tests PCR caducs
– 150,20 euros pour les frais de taxis
– 1200 euros pour le préjudice moral
– 3500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et d’appel
Réglementation applicable
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :
– Me Marie CHAUVE-BATHIE, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE
– Me Lionel COUTACHOT, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE
– Me Olivier DESPLACES, avocat au barreau de LYON
– SCP LE STANC, CARBONNIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
– Me Pierre BUISSON, avocat au barreau de LYON
– SELARL LEXYMORE, avocat au barreau de BORDEAUX
– SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON
– SELAS FIDAL DIRECTION PARIS, avocat au barreau de LYON
– Me [V]
– Me [K]
– Me [Y]
Mots clefs associés
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
N° RG 20/06309 – N° Portalis DBVX-V-B7E-NHPY
Décision du Tribunal Judiciaire de LYON
Au fond du 20 octobre 2020
( chambre 10 cab 10 J)
RG : 15/12514
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE LYON
1ère chambre civile A
ARRET DU 22 Février 2024
APPELANTE :
S.A. STAMP
[Adresse 8]
[Adresse 8]
Représentée par Me Marie CHAUVE-BATHIE, avocat au barreau de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE, avocat postulant,
Et ayant pour avocat plaidant Me Lionel COUTACHOT, avocat au barreau de CHALON-SUR-SAONE
INTIMEES :
S.A. LA FOIR’FOUILLE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Olivier DESPLACES, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 285
Et ayant pour avocat plaidant la SCP LE STANC, CARBONNIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
S.A.R.L. FF DIGITAL
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Olivier DESPLACES, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 285
Et ayant pour avocat plaidant la SCP LE STANC, CARBONNIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTERVENANTES :
S.A.S. AQUINOV
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Pierre BUISSON, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 140
Et ayant pour avocat plaidant la SELARL LEXYMORE, avocat au barreau de BORDEAUX, toque : 814
S.A.S. DIRECTUSINE
[Adresse 1]
[Adresse 9]
[Adresse 9]
Représentée par la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque:475
Et ayant pour avocat plaidant la SELAS FIDAL DIRECTION PARIS, avocat au barreau de LYON, toque : 708
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Date de clôture de l’instruction : 08 Février 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 11 Mai 2023
Date de mise à disposition : 21 septembre 2023 prorogée au 9 novembre 2023, 11 janvier 2024, 1er février 2024 ,15 février 2024 et 22 février 2024 les avocats dûment avisés conformément à l’article 450 dernier alinéa du code de procédure civile
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
– Anne WYON, président
– Julien SEITZ, conseiller
– Thierry GAUTHIER, conseiller
assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier
A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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La société Stamp revendique un droit d’auteur sur le tabouret démontable en matière plastique connu sous le nom ‘Tam Tam’, dont le prototype et le modèle ont donné lieu à dépôts de modèles, respectivement enregistrés les 05 novembre 1968 et 08 septembre 1983.
Soupçonnant la société La Foir’fouille de contrefaire ce droit d’auteur, la société Stamp a fait réaliser le 13 mai 2015 un procès-verbal de constat d’achat dans le magasin La Foir’fouille de [Localité 7].
Sur autorisation du président du tribunal de grande instance de Lyon en date du 10 septembre 2015, la société Stamp a fait procéder le 28 septembre 2015 à une saisie-contrefaçon dans les locaux de la société La Foir’fouille à [Localité 4].
Par assignation signifiée le 06 novembre 2015, elle a fait assigner les sociétés La Foir’fouille et FF Digital devant le tribunal de grande instance de Lyon, en contrefaçon de droit d’auteur et en concurrence déloyale.
Par acte d’huissier du 18 novembre 2016, les sociétés La Foir’fouille et FF Digital ont appelé la société Directusine en intervention forcée, au titre de la garantie due par le vendeur.
Ces procédures ont été jointes par ordonnance du 08 décembre 2016.
Par acte d’huissier du 24 mars 2017, la société Directusine a assigné la société Aquinov, conseil en propriété intellectuelle, en garantie. Cette procédure a été jointe aux précédentes selon ordonnance du 16 mai 2017.
Par jugement du 20 octobre 2020, le tribunal de grande instance de Lyon a :
– prononcé la nullité du procès-verbal de constat d’achat du 13 mai 2015 ;
– prononcé la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 28 septembre 2015 ;
– dit que le tabouret ‘Tam Tam’ est protégeable au titre du droit d’auteur ;
– débouté la société Stamp de sa demande en contrefaçon des droits d’auteur relatifs au tabouret ‘Tam Tam’ ;
– débouté la société Stamp de sa demande en concurrence déloyale ;
– débouté la société Stamp de ses demandes de confiscation, d’interdiction et de publication;
– condamné la société Stamp aux entiers dépens de l’instance ;
– condamné la société Stamp à payer aux sociétés La Foir’fouille et FF Digital la somme de 1.500 euros, ainsi qu’une somme identique à la société Directusine, en indemnisation des frais non répétibles de l’instance ;
– condamné la société Directusine à payer à la société Aquinov la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires.
Le tribunal a retenu que les procès-verbaux d’achat et de saisie-contrefaçon étaient nuls, les huissiers instrumentaires ayant dépassé le cadre de leurs prérogatives ou de l’autorisation judiciaire. Il a ajouté que la combinaison de la forme particulière du tabouret ‘Tam Tam’ et de son caractère démontable était protégeable au titre du droit d’auteur, mais que les pièces produites par la société Stamp ne suffisaient pas à établir l’imitation ou la reproduction de ces caractères originaux dans les produits commercialisés par les sociétés La Foir’fouille et FF Digital.
Le tribunal a également jugé que la concurrence déloyale alléguée était établie, mais qu’aucune demande indemnitaire n’avait été formée à ce titre.
La société Stamp a relevé appel de ce jugement selon déclaration enregistrée le 13 novembre 2020, en intimant les sociétés La Foir’fouille et FF Digital.
Par assignation signifiée le 26 février 2021, les sociétés La Foir’fouille et FF Digital ont appelé la société Directusine en intervention forcée.
Par assignation signifiée le 21 mai 2021, la société Directusine a appelé la société Aquinov en intervention forcée et formé appel provoqué du jugement entrepris.
Suivant autorisation obtenue du président du tribunal judiciaire de Marseille, la société Stamp a fait précéder à une nouvelle saisie-contrefaçon le 12 janvier 2021.
Par ordonnance en date du 21 avril 2021, le magistrat délégué par le premier président de la cour d’appel de Lyon a autorisé la société Stamp à procéder à une troisième saisie-contrefaçon, réalisée selon procès-verbal du 21 juillet 2021.
*
Aux termes de ses conclusions récapitulatives déposées le 22 novembre 2021, la société Stamp demande à la cour de :
– infirmer partiellement le jugement du tribunal judiciaire de Lyon en date du 20 octobre 2020 (RG 15/12514) en ce qu’il a :
prononcé la nullité du procès-verbal de constat d’achat dressé le 13 mai 2015
prononcé la nullité du procès-verbal de saisie contrefaçon dressé le 28 septembre 2015
débouté la société Stamp de sa demande en contrefaçon des droits d’auteur relatifs au tabouret ‘Tam Tam’
débouté la société Stamp de sa demande en concurrence déloyale
débouté la société Stamp de ses demandes de confiscation, d’interdiction et de publication
condamné la société Stamp aux entiers dépens d’instance
condamné la société Stamp à payer aux sociétés La Foir’fouille et FF Digital la somme de 1.500 euros et à la société Directusine la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
débouté la société Stamp de ses plus amples demandes,
statuant à nouveau :
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que le tabouret ‘Tam Tam’ est protégé au titre des droits d’auteur au bénéfice de la société Stamp,
– faire interdiction aux sociétés La Foir’fouille, FF Digital et Directusine, sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée à compter de la signification de la décision à intervenir, de fabriquer, exposer, distribuer, commercialiser ou vendre directement ou indirectement des tabourets reproduisant les caractéristiques ou le dessin du tabouret ‘Tam Tam’ et à ce titre constitutif d’une contrefaçon des droits d’auteur détenus par la société Stamp,
– ordonner la confiscation en vue de leur destruction en présence d’un huissier de justice, aux frais exclusifs des sociétés La Foir’fouille, FF Digital et Directusine, de tout modèle de tabouret reproduisant les caractéristiques ou le dessin du tabouret ‘Tam Tam’ de la société Stamp,
avant dire droit et, si la juridiction de céans le juge nécessaire :
– désigner, aux frais et charges avancés des sociétés La Foir’fouille et FF Digital, tel expert qu’il plaira de nommer (qui serait avantageusement expert-comptable), avec faculté de s’adjoindre, pour la réalisation de sa mission, tout sapiteur ou technicien de son choix, afin d’évaluer l’entier préjudice subi du fait de la contrefaçon et de la concurrence déloyale, par la société Stamp, après communication par tout détenteur (toutes sociétés du groupe La Foir’fouille, société Directusine, conseiller, expert-comptable, commissaires aux comptes, prestataire logistique ‘) les livres de commerce, de comptabilité, carnets et bons de commandes, bordereaux de livraison, factures d’achat et de vente des tabourets contrefaisants, et plus généralement tous documents et pièces comptables, commerciales et matérielles concernant ce tabouret ;
en toute hypothèse, dès à présent :
– condamner, le cas échéant à titre provisionnel, solidairement les sociétés La Foir’fouille, FF Digital, Directusine à payer et porter à la société Stamp la somme de 601.420,80 euros à titre de dommages et intérêts représentatifs de la perte subie du chef de leurs actes distincts ou conjoints de contrefaçon et de concurrence déloyale ;
– faire injonction à la société La Foir’fouille de produire les contrats de publicité et de diffusion du spot télévisuel dans lequel apparaît le tabouret contrefaisant,
– condamner la société La Foir’fouille à payer une campagne de publicité équivalente (en temps, en coût et en nombre et plages horaires et de diffusion) rappelant l’existence du modèle original en le désignant et le représentant, énonçant la contrefaçon au titre de laquelle la société La Foir’fouille a été condamnée et les impacts sur l’économie nationale et l’emploi de l’achat de contrefaçon en France,
– ordonner la publication de la décision à intervenir dans quatre journaux au choix de la société Stamp, aux frais de la société La Foir’fouille, dans la limite de 5.000 euros par insertion, et dire encore que chaque publication pourra être accompagnée d’un dessin ou d’une photographie du tabouret contrefait,
– condamner la société FF Digital à insérer sur la page d’ouverture de son site internet pendant 120 jours, le texte in extenso du jugement (sic) à intervenir sous astreinte de 5.000 euros par jour de retard à l’expiration d’un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement,
– débouter les sociétés La Foir’fouille, FF Digital, Directusine et Aquinov de toutes demandes à l’encontre de la société Stamp,
– condamner solidairement les sociétés La Foir’fouille, FF Digital, Directusine et Aquinov à verser à la société Stamp la somme de 8.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner solidairement les sociétés La Foir’fouille, FF Digital, Directusine et Aquinov aux entiers dépens en ce compris les frais d’acte de saisie-contrefaçon et constat en ligne.
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Par conclusions récapitulatives déposées le 27 juillet 2021, les sociétés La Foir’fouille, devenue FFSA, et FF Digital demandent à la cour, au visa du décret du 29 février 1956, article 7, pour l’application de l’ordonnance de 1945, de l’article L. 211-6-1 du code de l’organisation judiciaire, des articles 56, 495 et 958 du code de procédure civile, des articles L. 111-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle, ainsi que de articles 1626 et 2224 du code civil, de :
– confirmer le jugement entrepris, en ce qu’il a prononcé l’annulation du procès-verbal de constat d’achat de Me [V] du 13 mai 2015, et en ce qu’il a prononcé l’annulation du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé par Me [K] le 28 septembre 2015,
– prononcer l’annulation du procès-verbal de saisie-contrefaçon intervenu en cause d’appel et dressé par Me [Y] le 12 janvier 2021,
– infirmer le jugement en ce qu’il donné valeur probante aux pièces adverses PA 7, 9 et 20,
– déclarer prescrites toutes les demandes de l’appelante qui ne pourraient se fonder que sur les éléments de preuve prétendus constitués seulement du constat de Me [Y] du 30 décembre 2020 et/ou de la saisie-contrefaçon du 21 juillet 2021, et ce en application de l’article 2224 du code civil,
subsidiairement sur le fond :
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que le tabouret dénommé ‘Tam Tam’ est protégeable au titre du droit d’auteur,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Stamp de sa demande en contrefaçon et en concurrence déloyale,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Stamp de ses autres demandes et a condamné cette dernière société aux dépens et à des sommes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner l’appelante à verser à chacune des concluantes la somme de 10.000 euros, ainsi qu’aux entiers dépens,
en toutes hypothèses :
– condamner la société Directusine à relever et garantir les concluantes de toutes les condamnations susceptibles d’être prononcées à leur encontre si leur responsabilité devait être retenue, par application de l’article 1626 du code civil.
*
Par conclusions récapitulatives déposées le 04 novembre 2021, la société Directusine demande à la cour de :
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé l’annulation du procès-verbal de constat d’achat de Me [V] du 13 mai 2015 et l’annulation du procè-verbal de saisie contrefaçon dressé par Me [K] le 28 septembre 2015,
– infirmer le jugement en ce qu’il a donné sa valeur probante aux pièces adverses PA 7, 9 et 20,
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que le tabouret dénommé ‘Tam Tam’ est protégeable au titre du droit d’auteur,
– dire et juger au contraire que ce tabouret n’est pas original et partant pas protégeable au titre du droit d’auteur,
– dire et juger que la société Stamp ne rapporte pas la preuve de l’étendue des préjudices qu’elle allègue,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Stamp de sa demande de contrefaçon,
– infirmer le jugement en ce qu’il a établi la concurrence déloyale sous l’angle de la concurrence parasitaire,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Stamp de ses autres demandes,
– infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société Directusine à payer à la société Aquinov la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
en toute hypothèse :
– condamner la société La Foir’fouille à lui verser la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens en application de l’article 699 du code de procédure civile, ceux d’appel étant distraits au profit de la société Fidal,
– condamner la société Aquinov à garantir et relever indemne la société Directusine de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.
Par conclusions déposées le 02 août 2021, la société Aquinov demande à la cour, au visa des articles 68, 909 et 910-1 du code de procédure civile, 1147 ancien du code civil, du Livre I du code de la propriété intellectuelle et de l’article 1240 du code civil, de :
– prononcer sa mise hors de cause en l’absence de demandes valablement formées contre elle,
– confirmer, en conséquence, le jugement déféré en ce qu’il a rejeté toutes demandes plus amples et contraire des parties et notamment l’appel en garantie de la société Directusine contre la société Aquinov,
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné la société Directusine à verser à la société Aquinov 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– y ajoutant, condamner la société Directusine à verser à la société Aquinov la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles devant la cour,
à titre subsidiaire :
– réformer le jugement déféré en ce qu’il a dit que le tabouret ‘Tam Tam’ est protégeable au titre du droit d’auteur,
– dire et juger que le modèle de tabouret ‘Tam Tam’ n’est pas protégeable au titre du droit d’auteur,
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a annulé le procès-verbal de constat d’achat dressé le 13 mai 2015,
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a annulé le procès-verbal de saisie contrefaçon dressé le 28 septembre 2015,
– y ajoutant, prononcer l’annulation du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 12 janvier 2021,
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société Stamp de sa demande en contrefaçon de droits d’auteur relatifs au tabouret dénommé ‘Tam Tam’ faute de preuve,
– débouter la Société Stamp de l’ensemble de ses demandes au titre de la contrefaçon,
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la Société Stamp de sa demande en concurrence déloyale,
– dire et juger que la société Aquinov n’a pas engagé sa responsabilité à l’égard de la société Directusine à raison de sa consultation du 27 novembre 2014,
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a rejeté toutes demandes plus amples et contraire des parties et notamment l’appel en garantie de la société directusine contre la société Aquinov, et plus généralement toute demande formée contre la société Aquinov,
en conséquence :
– débouter la société Directusine de sa demande en garantie à l’égard de la société Aquinov;
à titre encore plus subsidiaire :
– dire et juger que la société Stamp ne rapporte pas la preuve du préjudice qu’elle allègue au titre de la contrefaçon de droit d’auteur et au titre du parasitisme,
– dire et juger que la demande d’expertise sollicitée par la société Stamp est injustifiée, prématurée et en tout état de cause inutile,
en conséquence :
– débouter la société Stamp de sa demande d’expertise,
– débouter la société Stamp de ses demandes indemnitaires au titre de la contrefaçon de droits d’auteur et au titre du parasitisme,
– dire et juger que la détermination du préjudice subi par la société Directusine suppose la prise en compte des avantages qu’elle a pu retirer de la situation dommageable et la chance perdue d’éviter le dommage,
en conséquence :
– débouter la société Directusine de ses demandes de réparation de préjudices non établis et de sa demande de garantie à l’encontre de la Société Aquinov,
à titre très infiniment subsidiaire :
– limiter la garantie du Cabinet Aquinov aux seuls dommages et intérêts alloués au titre de la contrefaçon de droits d’auteur à l’exception de toute autre somme, après déduction des avantages que celle-ci a pu retirer de la situation dommageable et en prenant en compte la chance perdue par la société Directusine d’éviter de commettre des actes de contrefaçon de droit d’auteur si la société Aquinov avait émis une réserve sur une possible appréciation différente en dépit des seules décisions favorables connues à la date de l’avis,
en tout état de cause :
– condamner la société Directusine à payer à la société Aquinov la somme de 6.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la société Directusine aux entiers dépens.
Il est expressément renvoyé aux écritures susmentionnées pour plus ample exposé des moyens venant à l’appui des prétentions des parties.
Le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l’instruction par ordonnance du 08 février 2022 et l’affaire a été appelée à l’audience du 11 mai 2023, à laquelle elle a été mise en délibéré au 21 septembre 2023.
Le délibéré a été prorogé au 22 février 2024.
MOTIFS
Sur la fin de non-recevoir opposée aux demandes de la société Stamp :
Vu l’article 55 du décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 ;
Vu l’article 789 du code de procédure civile ;
Vu l’article 2224 du code civil ;
Vu l’article 2241 du même code ;
les sociétés FFSA (ci-après La Foir-fouille) et FF Digital font valoir que la société Stamp leur a reproché des actes de contrefaçon par courrier du 15 juillet 2015, mais n’a pu articuler la contrefaçon alléguée de manière factuelle avant ses conclusions déposées le 26 février 2021, faisant référence au constat d’huissier du 30 décembre 2020.
Elles observent qu’il s’est écoulé plus de 5 ans entre le courrier du 15 juillet 2015 et les conclusions du 26 février 2021, ce dont elles déduisent que l’action serait prescrite.
La société Stamp réplique que les sociétés La Foir-fouille et FF Digital sont irrecevables à lui opposer la fin de non-recevoir tirée de la prescription de ses demandes, en faisant valoir qu’il leur appartenait de la soulever avant toute défense au fond et le cas échéant dans le cadre de la mise en état.
Elle ajoute que le raisonnement des sociétés La Foir’fouille et FF Digital revient à substituer la date des mesures d’instruction à celle de la demande en justice comme élément interruptif de la prescription.
Sur ce :
Les dispositions de l’article 789 du code de procédure civile, conférant compétence exclusive au juge de la mise en état pour statuer sur les fins de non-recevoir, ne sont pas applicables aux instances introduites avant le 1er janvier 2020.
Or, la société Stamp a introduit l’instance en contrefaçon le 06 novembre 2015, ce dont il suit qu’elle ne peut valablement se prévaloir du dernier alinéa de cet article, en vertu duquel ‘ Les parties ne sont plus recevables à soulever ces fins de non-recevoir au cours de la même instance à moins qu’elles ne surviennent ou soient révélées postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état’.
La cour rappelle pour le surplus qu’en application de l’article 123 du code de procédure civile, les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause.
Il n’y a pas lieu en conséquence de déclarer les sociétés La Foir’fouille et FF Digital irrecevables à se prévaloir de la prescription de l’action de la société Stamp, aux motifs erronés qu’il leur aurait appartenu de le faire devant le juge de la mise en état, ou avant de conclure sur le fond.
La prescription de l’article 2224 du code civil court à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Elle est interrompue par la demande en justice.
En l’absence de meilleur élément, le jour auquel la société Stamp a connu les faits lui permettant d’exercer son action en contrefaçon doit être fixé au 13 mai 2015, date du constat d’achat effectué par Me [V], huissier à [Localité 6].
Le délai quinquennal de prescription a couru à compter de cette date et s’est trouvé interrompu par l’assignation en contrefaçon délivrée le 06 novembre 2015. L’action n’est donc pas prescrite et il convient de rejeter la fin de non-recevoir correspondante.
Sur les demandes tendant à l’infirmation du jugement de première instance en ce qu’il a donné valeur probante aux pièces 7, 9 et 20 de la société Stamp :
Vu les articles 542 et 562 du code de procédure civile ;
Vu l’article 954 du même code ;
Conformément à l’article 542 du code de procédure civile, l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel.
En application de l’article 562 du même code, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.
Il résulte de ces dispositions que l’appel ne peut tendre qu’à l’annulation du jugement ou à l’infirmation d’un ou plusieurs de ses chefs de dispositif. Il ne peut en revanche tendre à l’infirmation d’un élément de motivation.
Par conclusions récapitulatives déposées le 20 février 2018, les sociétés La Foir’fouille et FF Digital ont demandé au premier juge de ‘ juger dénuées d’efficacité probatoire les pièces 7 et 9 communiquées par la demanderesse ‘.
Le tribunal a répondu dans la motivation de son jugement que ‘ le caractère probant d’une pièce s’analyse comme une défense au fond, de sorte qu’il conviendra de l’examiner au besoin au moment de l’appréciation de l’atteinte ou de la faute alléguée ‘.
Il s’ensuit que le tribunal a considéré que la demande constituait en réalité un moyen et qu’il n’a pas statué à cet égard dans le dispositif de son jugement.
En l’absence de chef de dispositif statuant sur ce point, la cour ne peut donc ‘infirmer le jugement en ce qu’il a donné valeur probante aux pièces adverses PA 7,9 et 20’, ainsi que le demandent les sociétés La Foir’fouille, FF Digital et Directusine.
Il convient de juger que ces prétentions se trouvent dépourvues d’objet.
Les sociétés La Foir’fouille et FF Digital se sont abstenues pour le surplus de reprendre, dans le dispositif de leurs écritures, délimitant la saisine de la cour, la demande visant à ce que ces pièces soient écartées des débats, figurant dans la discussion de leurs conclusions. La cour n’a donc pas à statuer à cet égard.
Sur la demande d’annulation du procès-verbal de constat d’achat du 13 mai 2015 :
Vu l’article 1 de l’ordonnance n° 45-2592 du 02 novembre 1945 relative au statut des huissiers, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-727 du 02 juin 2016 ;
Les sociétés La Foir’fouille et FF Digital concluent à la nullité du procès-verbal de constat d’achat dressé le 13 mai 2015 par Me [V], en faisant valoir que l’huissier instrumentaire ne peut entrer dans un lieu privé sans décliner ses nom et qualités.
Elles ajoutent que les dispositions de l’ordonnance n° 45-2592 du 02 novembre 1945 font obstacle à ce qu’un huissier procède lui-même à l’achat de l’article dont il est appelé à constater l’acquisition.
Elles soutiennent que la nullité résultant de la violation de ces dispositions d’ordre public n’est pas subordonnée à la preuve d’un grief.
La société Directusine se prévaut également de ce moyen, dans des termes identiques.
La société Stamp soutient en retour que l’huissier, habilité en vertu de l’article 1 de l’ordonnance du 02 novembre 1945 à effectuer des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter, peut valablement procéder à l’achat d’un produit dans un lieu ouvert au public et en dresser constat, dès lors qu’il s’abstient de délivrer un avis sur les conséquences de fait ou de droit pouvant résulter de ce constat.
Elle ajoute qu’il n’y a pas de nullité sans texte ni grief et que la jurisprudence n’érige pas la méconnaissance des dispositions de l’article 1 de l’ordonnance du 02novembre 1945 en cause de nullité du constat, mais comme une cause affectant sa valeur probante.
Elle rappelle que la preuve de la contrefaçon peut être rapportée par tout moyen et affirme que le constat conserve en tout état de cause une force probante équivalente à celle de tout élément matériel de preuve.
Sur ce :
Conformément à l’article 1 de l’ordonnance du 02 novembre 1945, les huissiers de justice peuvent, commis par justice ou à la requête de particuliers, effectuer des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter.
C’est par de justes motifs, que la cour adopte, que le tribunal judiciaire de Lyon a prononcé la nullité du procès-verbal de constat d’achat du 13 mai 2015. L’achat par l’huissier de l’article argué contrefaisant dépasse en effet la simple constatation matérielle, quand même l’officier ministériel s’abstiendrait-il d’émettre un avis sur les conséquences de fait ou de droit de son constat, et caractérise partant la violation de l’article 1 de l’ordonnance du 02 novembre 1945 et l’excès de pouvoir, dont la sanction réside dans l’annulation de l’acte, sans qu’il soit besoin que l’irrégularité cause grief.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris sur ce point.
La cour rappelle par ailleurs que le constat d’huissier annulé se trouve dépourvu de force probante, sauf à consacrer l’excès de pouvoir.
Sur la demande d’annulation du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 28 septembre 2015:
Vu les articles 493 à 496 du code de procédure civile ;
Les sociétés La Foir’fouille et FF Digital font valoir que la société Stamp et l’huissier instrumentaire ont méconnu les termes de l’autorisation conférée par le président du tribunal de grande instance de Lyon en pratiquant la saisie-contrefaçon à leur siège de [Localité 4], alors que la saisie n’avait été autorisée que dans le ressort spécial du tribunal de grande instance de Lyon.
Elles ajoutent que la preuve n’est pas rapportée de ce que l’huissier instrumentaire leur aurait laissé copie de la requête en saisie-contrefaçon et de l’ordonnance présidentielle ayant autorisé la mesure, en contravention aux dispositions de l’article 495 du code de procédure civile.
Elles concluent en conséquence à la nullité de la saisie-contrefaçon.
Elles expliquent que le délai de recours de 15 jours mentionné par la société Stamp ne concerne que les demandes visant à ce que la saisie soit ordonnée lorsque le président du tribunal l’a refusée ou à ce que l’autorisation conférée soit rétractée, mais qu’il demeure sans effet sur la compétence de la juridiction du fond pour connaître de la régularité de la saisie pratiquée.
La société Directusine se prévaut également de la violation de l’autorisation de saisie-contrefaçon conférée par le président du tribunal de grande instance de Lyon, à raison du lieu auquel la mesure a été pratiquée.
La société Stamp réplique qu’aux termes de l’ordonnance ayant autorisé la saisie, le président du tribunal de grande instance de Lyon se trouvait seul compétent pour connaître de la régularité de la mesure, à l’exclusion du tribunal lui-même.
Elle ajoute que les recours susceptibles de viser une saisie-contrefaçon sont enfermés dans un délai de 15 jours et que les sociétés La Foir’fouille et FF Digital étaient donc forcloses, devant le premier juge à contester la régularité de la saisie.
Sur ce :
La cour retient en premier lieu que le chef de dispositif de l’ordonnance du 10 septembre 2015 autorisant la saisie-contrefaçon litigieuse, aux termes duquel le président du tribunal de grande instance de Lyon a dit qu’il lui en sera référé en cas de difficulté n’affecte point la compétence et le pouvoir reconnus aux juridictions du fond pour connaître de la régularité de la mesure, en cas de contestation élevée par voie d’exception à l’occasion de l’action en contrefaçon.
Elle rappelle en second lieu que le délai de 15 jours mentionné au premier alinéa de l’article 496 du code de procédure civile ne s’applique qu’à l’appel des décisions rejetant la requête en saisie-contrefaçon en tout ou partie, mais n’est point applicable à la contestation de la régularité de la mesure élevée par voie d’exception devant la juridiction du fond saisie de l’action en contrefaçon.
Il est constant en l’espèce que le président du tribunal de grande instance de Lyon a autorisé la société Stamp à ‘faire procéder par tout huissier de justice territorialement compétent du choix du requérant, dans les locaux des magasins exploités sous l’enseigne FOIR’FOUILLE du ressort de la juridiction, ainsi que dans tous les autres locaux industriels ou commerciaux, bureaux, usines, magasins, dépôts, sis dans le ressort de ce tribunal, à la constatation des actes constitutifs allégués de contrefaçon et à la saisie par voie de description du tabouret de type TAM TAM’.
C’est en conséquence par de justes motifs, qui répondent aux moyens des parties et que la cour adopte, que le premier juge a retenu qu’en pratiquant la saisie-contrefaçon à Castelnau-le-Lez, hors le ressort spécial du tribunal de grande instance de Lyon, l’huissier instrumentaire et sa mandante avaient violé les termes de l’autorisation judiciaire et qu’il a annulé la mesure pratiquée, eu égard à cet excès de pouvoir.
Sur la demande d’annulation du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 12 janvier 2021:
Vu l’article 958 du code de procédure civile ;
Les sociétés La Foire-fouille et FF Digital font valoir que le président du tribunal judiciaire de Marseille n’était pas compétent, au regard des dispositions de l’article 958 du code de procédure civile, pour autoriser la saisie-contrefaçon pratiquée le 12 janvier 2021 à leur siège de Castelnau-le-Lez.
Elles ajoutent que la société Stamp s’est abstenue de saisir la juridiction du fond d’une action en saisie-contrefaçon dans le délai de l’article 332-3 du code de la propriété intellectuelle.
Elles en déduisent que la saisie-contrefaçon pratiquée le 12 janvier 2021 encourt l’annulation.
La société Stamp s’en remet à la justice sur les mérites de ces contestations.
Sur ce :
En application de l’article 958 du code de procédure civile, le premier président peut, au cours de l’instance d’appel, ordonner sur requête toutes mesures urgentes relatives à la sauvegarde des droits d’une partie ou d’un tiers lorsque les circonstances exigent qu’elles ne soient pas prises contradictoirement.
En autorisant par voie d’ordonnance sur requête la saisie-contrefaçon pratiquée le 12 janvier 2021 alors que la présente cour se trouvait déja saisie de l’appel interjeté contre le jugement du 20 octobre 2020, le président du tribunal judiciaire de Marseille a méconnu la compétence exclusive conférée à Mme la première présidente par l’article 958 du code de procédure civile.
Il s’ensuit que la saisie-contrefaçon, ordonnée par un juge incompétent matériellement, doit être annulée.
Sur le droit d’auteur revendiqué par la société Stamp :
Vu l’article L. 111-2 du code de la propriété intellectuelle ;
La société Stamp fait valoir qu’elle est titulaire d’un droit d’auteur sur le tabouret ‘Tam-Tam’, ensuite de la cession consentie par son créateur [P] [T].
Elle soutient, par renvoi à la motivation de décisions judiciaires antérieures, que cette oeuvre ne peut être réduite ses proportions, sa forme évocatrice du diabolo ou du tambour et l’emploi de la matière plastique, son originalité tenant également :
– à l’existence de parties jumelles démontables et emboîtables se rencontrant en un point dont la finesse relative permet de supporter le poids d’un corps,
– aux possibilités que laissent entrevoir ces caractères démontable et emboîtable, qui ne répondent pas à un défi technique, mais permettent de jouer entre les multiples profils d’emboîtement.
Elle conteste l’antériorité que lui opposent les sociétés La Foir’fouille et FF Digital, constituée d’un tabouret en fibre de verre adoptant la forme d’un diabolo, créé en 1966. Elle soutient que les caractéristiques de cet article diffèrent de celles du tabouret créé par M. [T] quant à la matière employée, la dimension et l’absence de caractère démontable et emboîtable.
Les sociétés La Foir’fouille et FF Digital contestent en retour le droit d’auteur invoqué par l’appelante.
Elles soutiennent que les décisions ayant déja reconnu le caractère protégeable du tabouret ‘Tam Tam’ ne leur sont pas opposables, pour avoir été rendues envers d’autres parties.
Elles ajoutent que l’appelante ne décrit pas les caractéristiques conférant à l’oeuvre alléguée un caractère original et querellent le raisonnement du tribunal ayant retenu que l’originalité du tabouret ‘Tam Tam’ découlait de la combinaison de son caractère démontable et emboîtable et de l’existence de parties jumelles se rencontrant en un point dont la finesse permettait de supporter le poids d’un corps. Elles estiment en effet que le caractère démontable et emboîtable de l’oeuvre revendiquée représente une caractéristique purement fonctionnelle ne participant pas du domaine du droit d’auteur mais relevant de la protection par le brevet. Elles adoptent le même raisonnement relativement à la caractéristique tenant à la finesse du point de rencontre des parties emboîtées, permettant néanmoins de supporter le poids d’un corps. Elles estiment que la rencontre de ces deux caractéristiques fonctionnelles présente un caractère purement fortuit et n’est point révélatrice de la personnalité du créateur.
Elles se prévalent encore de ce que le droit d’auteur revendiqué porte sur un tabouret entier et non point sur des morceaux de tabouret, fussent-ils emboîtables.
Elles invoquent en dernier lieu une antériorité tenant à un modèle de tabouret en forme de diabolo déposé en 1966.
La société Directusine développe des moyens similaires à ceux des sociétés La Foir’fouille et FF Digital s’agissant de l’absence de démonstration de l’originalité de l’oeuvre revendiquée, de l’inopposabilité des décisions judiciaires antérieures relatives au même tabouret et des caractéristiques purement fonctionnelles retenues par le tribunal pour caractériser son originalité.
Elle se prévaut de deux antériorités constituées par des tabourets en forme de diabolo et d’un article du Guiness book des records dans lequel il est relaté que M. [T] s’est inspiré d’un tabouret démontable et emboîtable de conception australienne.
La société Aquinov développe des moyens identiques s’agissant de l’absence de description du caractère original de l’oeuvre et de l’aspect fonctionnel des éléments retenus par le tribunal pour caractériser cette originalité.
Elle ajoute que les différents profils d’emboîtement, évoqués par une juridiction ayant précédemment statué sur l’originalité du tabouret ‘Tam Tam’, sont inexistants.
Elle se réfère également à l’article du Guiness Book des records pour affirmer que M. [T] aurait repris un concept de tabouret emboîtable préexistant.
Elle soutient que la société Stamp ne saurait revendiquer de droit sur le style de mobilier ‘années 70’, caractérisé par des lignes courbes et l’emploi de la matière plastique, en faisant observer que M. [T] avait lui-même reconnu que la conception du tabouret ‘Tam Tam’ ne lui avait pas demandé beaucoup d’efforts.
Sur ce :
Conformément à l’article L. 111-2 du code de la propriété intellectuelle, l’oeuvre est réputée créée, indépendamment de toute divulgation publique, du seul fait de la réalisation, même inachevée, de la conception de l’auteur.
L’oeuvre n’est protégeable qu’à la condition de porter l’empreinte de la personnalité de son auteur et la preuve de son originalité incombe à celui qui se prévaut du droit correspondant.
Contrairement à ce que soutiennent les intimées, l’appelante procède à la description des éléments conférant un caractère original à l’oeuvre revendiquée, en reprenant à son compte de la motivation de jugements antérieurs.
Le fait que ces jugements ne soient pas opposables aux sociétés défenderesses ne fait aucunement obstacle à ce que la société Stamp en reprenne la lettre à l’appui de sa démonstration.
La société Stamp est donc habile à se prévaloir, par renvoi à ces décisions antérieures, d’une originalité tenant à la combinaison :
– d’une forme en diabolo alliée à l’emploi de la matière plastique (premier élément),
– de parties jumelles démontables et emboîtables se rencontrant en un point dont la finesse relative permet de supporter le poids d’un corps (deuxième élément),
– des possibilités offertes par ces caractères démontable et emboîtable, qui ne répondent pas à un défi technique, mais permettent de jouer entre les multiples profils d’emboîtement (troisième élément).
Le tabouret ‘Carrara et Matta’ créé en 1966, reprend certains des éléments de cette combinaison, savoir la forme en diabolo, l’emploi de matières plastiques et l’existence de deux parties en miroir se rencontrant en un point dont la finesse relative permet de supporter le poids d’un corps, mais ne présente point de caractère démontable et emboîtable, non plus qu’il n’offre la possibilité de jouer entre les différents profils d’emboîtement.
Le tabouret ‘Tulip’ créé en 1961, ne reprend que la forme évocatrice d’un diabolo, sans que les parties supérieure et inférieure ne se répondent par un jeu de miroir.
Le tabouret démontable et emboîtable, évoqué dans le Guiness Book des records, n’est pas produit et il n’est aucunement établi qu’il reprenne la combinaison particulière d’éléments invoqués par la société Stamp à l’appui de sa démonstration, particulièrement l’existence de parties jumelles et la possibilité de jouer entre les profils d’emboîtement.
La preuve n’est donc pas rapportée de l’existence d’antériorités reprenant la combinaison spécifique invoquée par la société Stamp.
Or, cette combinaison présente un caractère aléatoire, ludique et esthétique, au regard duquel elle ne se réduit point à une simple juxtaposition de caractéristiques fonctionnelles appelées à répondre à des considérations d’ordre purement technique.
La possibilité offerte à l’usager de remplir chacune des parties jumelles de matières ou d’objets différents, de les éclairer ou de pratiquer l’emboîtement de parties de couleurs distinctes, permet notamment de jouer sur les différents profils d’emboîtement, nonobstant les dénégations de la société Aquinov.
Il est parfaitement indifférent, enfin, qu’il ait fallu peu de temps à M. [T] pour imaginer le tabouret ‘Tam Tam’, la durée de l’investissement intellectuel et matériel consacré à la création d’une oeuvre ne participant pas des critères déterminant la protection par le droit d’auteur.
La cour retient en conséquence que la combinaison inédite des trois éléments d’originalité précédemment rappelés reflète la personnalité de M. [T] et confère au tabouret ‘Tam Tam’ la nature d’oeuvre de l’esprit protégée par le droit d’auteur.
Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef.
Sur la contrefaçon du droit d’auteur :
Vu l’article L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle ;
La société Stamp fait valoir que le tabouret commercialisé par la société La Foir’fouille sous le nom ‘[H]’ constitue la copie servile du tabouret ‘Tam-Tam’ dont il reprend la forme, les proportions et dimensions, les différents coloris, ainsi que le caractère démontable et emboîtable.
Elle indique que la preuve de la contrefaçon résulte des éléments produits aux débats, quand même les procès-verbaux des 13 mai et 28 septembre 2015 seraient-ils annulés, en se prévalant notamment du procès-verbal de constat en ligne établi le 30 décembre 2020.
Elle fait observer que la volonté de copier le tabouret ‘Tam-Tam’ est à ce point flagrante qu’elle a servi d’argument commercial aux sociétés La Foir’fouille et FF Digital, lesquelles ont mené une campagne de publicité audiovisuelle promouvant l’article contrefaisant, en employant le slogan ‘5 euros le tabouret, vous n’aurez qu’à dire que vous l’avez acheté dans une boutique design’, renvoyant à la réputation d’objet design de son propre tabouret.
Elle considère en conséquence que les sociétés La Foir’fouille et FF Digital se sont rendues coupables d’acte de contrefaçon par reproduction.
Les sociétés La Foir’fouille, FF Digital et Directusine contestent tout acte de contrefaçon et font valoir que le caractère démontable et emboîtable du tabouret dont la société Stamp leur impute la fabrication et/ou la commercialisation n’est pas démontré.
La société Aquinov se prévaut également de l’absence de reprise du caractère démontable et emboîtable.
Sur ce :
Conformément à l’article L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.
Le procès-verbal de constat en ligne dressé le 30 décembre 2020 par Me [Y], huissier de justice à la résidence de [Localité 5], témoigne de ce que les sociétés La Foir’fouille et FF Digital proposent à la vente un tabouret en plastique dont les proportions, les formes et la matière reprennent parfaitement celles du tabouret ‘Tam Tam’. Les captures d’écran jointes au constat font apparaître une ligne séparatrice en milieu de tabouret, révélant la superposition de deux parties jumelles distinctes séparables, ainsi qu’un mécanisme d’emboîtement parfaitement similaire à celui du modèle ‘Tam Tam’, caractérisant la reprise des caractères démontable et emboîtable.
Au surplus, le fait que les sociétés La Foir’fouille, FF Digital et Direct’usine se gardent de produire le tabouret argué de contrefaçon, alors qu’il leur serait aisé de ce faire, fait présumer la reprise de l’ensemble des caractères dont la combinaison fait naître l’originalité du tabouret ‘Tam Tam’,.
Il en résulte qu’en commercialisant, en magasin pour la première et en ligne pour la seconde, un tabouret reproduisant parfaitement la combinaison d’éléments conférant au tabouret ‘Tam Tam’ le caractère d’une oeuvre originale, les sociétés La Foir’fouille et FF Digital se sont rendues coupables d’actes de contrefaçon.
Il en ressort également qu’en fabricant le tabouret contrefaisant pour le vendre aux sociétés La Foir’fouille et FF Digital, la société Directusine s’est rendue coupable d’actes de contrefaçon.
Sur l’action en concurrence déloyale :
Vu l’article 1382 ancien, devenu 1240 du code civil ;
La société Stamp soutient que les sociétés La Foir’fouille et FF Digital se sont rendues coupables de concurrence déloyale par parasitisme en entretenant consciemment et volontairement dans l’esprit du public et du consommateur une confusion avec le tabouret ‘Tam Tam’ dans le seul dessein de capter sa clientèle. Elle se prévaut à cet égard de l’emploi d’un argument publicitaire insistant sur la caractère ‘design’ du produit vendu, par référence indirecte mais certaine à la réputation du tabouret ‘Tam Tam’.
Elle observe que le tribunal a reconnu la réalité des actes de concurrence déloyale ainsi caractérisés, mais l’a déboutée de sa demande indemnitaire en considérant que celle-ci était fondée sur la seule contrefaçon, alors que tel n’était pourtant le cas, les deux fondements ayant été expressément invoqués à l’appui d’une même demande.
Les sociétés La Foir’fouille et FF Digital estiment que la preuve du parasitisme n’est pas rapportée et que l’appelante n’articule pas de faits distincts de ceux allégués à l’appui de l’action en contrefaçon.
Sur ce :
En vertu de l’article 1382 ancien du code civil, devenu 1240 du même code, tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Si le principe de la liberté du commerce et de la concurrence permet à tout opérateur économique de s’établir et d’exercer son activité au détriment des autres opérateurs du même secteur, cette faculté ne saurait dégénérer en abus.
Il s’ensuit que tout opérateur économique faisant un usage fautif de la liberté d’entreprendre et causant un préjudice à ses concurrents ou aux autres acteurs du marché par l’emploi de procédés contraires aux règles et usages du commerce, se rend auteur de concurrence déloyale et engage sa responsabilité quasi-délictuelle envers les opérateurs lésés.
Constitue une pratique déloyale et contraire aux règles et usage du commerce, le fait pour tout opérateur économique, de se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer profit de ses efforts, de son savoir-faire, de sa notoriété ou de ses investissements, sans bourse délier.
Une partie agissant en contrefaçon ne peut cependant agir en concurrence déloyale sans démontrer de faits distincts de ceux invoqués à l’appui de l’action en contrefaçon.
La société Stamp fait état en l’espèce d’actes de concurrence déloyale et parasitaire distincts de ceux allégués au titre de la contrefaçon, en se prévalant du comportement promotionnel des sociétés La Foir’fouille et FG Digital.
Ayant considéré les éléments produits par la société Stamp, le tribunal a retenu par de justes motifs, que la cour adopte, que la communication publicitaire employée par les sociétés La Foir’fouille et FF Digital, revêtait un caractère parasitaire à l’égard de la société Stamp.
La cour observe au surplus que cette communication fait référence au ‘style Tam Tam’ pour désigner l’article contrefaisant, ce qui constitue une référence directe au produit de l’appelante, dans l’une des déclinaisons les plus pures qui soient du comportement parasitaire.
Il convient en conséquence de retenir que les sociétés La Foir’fouille et FF Digital se sont rendues auteurs d’actes de parasitisme.
L’absence de demande indemnitaire distincte formée de ce chef ne justifie pas le rejet de l’action en concurrence déloyale, dès lors que la nécessité de démontrer des faits distincts à l’appui d’une telle action ne s’accompagne point de l’obligation de demander une indemnisation différenciée, lorsque la victime estime que le dommage enduré au titre de la concurrence déloyale se confond avec celui né de la contrefaçon.
Sur la réparation des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale :
Vu l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Vu l’article 1382 ancien du code civil, devenu l’article 1240 du même code ;
La société Stamp fait valoir que les pertes subies à raison des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale imputables aux sociétés La Foir’fouille FF Digital et Direct’usine sont particulièrement importantes, du fait de la proximité du prix des articles contrefaisants avec celui du tabouret contrefait et de la facilité corrélative, pour le public concerné, à se détourner de l’original au profit de la copie.
Elle conteste que la perte endurée puisse s’entendre de la marge nette qu’elle aurait réalisée en l’absence de contrefaçon, en rappelant s’être trouvée contrainte de supporter des charges fixes tout en étant privée d’une partie des gains espérés.
Elle considère que ses gains manqués s’entendent en conséquence du chiffre d’affaires qu’elle aurait réalisé si elle avait vendu autant d’originaux que les intimées ont vendu de copies. Elle précise qu’à s’en tenir aux simples éléments comptables obtenus lors de la saisie-contrefaçon réalisée le 21 juillet 2021, sa perte de chiffres d’affaires s’établit à 601.420,80 euros, en supputant que les sociétés La Foire’fouille et FF Digital ont sans doute commandé des articles contrefaisants sous d’autres références que celles identifiées lors de cette mesure d’investigation.
Elle ajoute qu’elle a subi un préjudice d’image compte tenu de la banalisation de son produit, qu’il convient de réparer par l’obligation faite aux intimées de financer une campagne de publicité équivalente à celle lancée pour soutenir leurs produits contrefaisants, ainsi que par la publication de la décision à intervenir. Elle explique que cette dernière mesure est également de nature à limiter le nombre croissant d’actes de contrefaçon qu’elle endure de la part de nombreux acteurs économiques.
Elle sollicite qu’une expertise soit ordonnée en tant que de besoin afin d’évaluer son entier préjudice, si la cour devait considérer que les éléments au dossier ne permettent pas de statuer sur sa demande de provision.
Les sociétés La Foir’fouille et FF Digital font valoir que les clients de leurs produits discounts ne sont pas les mêmes que ceux des produits 4 à 6 fois plus chers de l’appelante, de sorte que celle-ci n’a subi aucune perte de clientèle.
Elles ajoutent que l’appelante ne justifie pas avoir enduré une perte de chiffre d’affaires et qu’elle ne saurait solliciter une expertise à dessein de pallier sa carence dans la preuve de l’existence et de l’ampleur de son préjudice.
Elle soutiennent pour finir qu’il incombe à l’appelante d’articuler des demandes distinctes des chefs de la contrefaçon et de la concurrence déloyale.
La société Direct’usine soutient que les chiffres avancés par l’appelante concernant le nombre d’articles contrefaisants vendus et le prix unitaire auquel elle aurait elle-même vendu ses propres produits, si ce n’avait été de la contrefaçon, ne reposent sur aucune pièce.
Elle ajoute que l’indemnisation doit s’opérer par référence à la marge nette que l’opérateur souffrant la contrefaçon aurait réalisé si ce n’avait été de celle-ci, et non par référence au chiffre d’affaires dont il a été privé.
Elle fait observer que le chiffre d’affaires de la société Stamp n’a cessé d’augmenter entre 2013 et 2019, ce dont elle déduit que celle-ci ne saurait alléguer d’une perte de chiffre.
Elle relève que les pièces produites par la société Stamp font présumer qu’elle ne commercialise pas directement le tabouret ‘Tam Tam’, mais a concédé une licence à une société tierce, de sorte que l’existence même de son préjudice économique est sujette à caution.
Elle affirme enfin que la preuve d’un préjudice d’image n’est pas rapportée.
La société Aquinov soutient que la société Stamp ne justifie pas du prix de vente d’un tabouret ‘Tam Tam’. Elle ajoute que l’appelante ne peut évaluer ses gains manqués sur la base d’une perte de chiffre d’affaires, alors que les gains manqués ne correspondent qu’à une perte de marge nette.
Elle estime que le préjudice moral n’est pas démontré, les investissements réalisés pour la conception et la production du tabouret ‘Tam Tam’ étant amortis de longue date.
Sur ce :
Conformément à l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-315 du 11 mars 2014, pour fixer les dommages et intérêts consécutifs à une atteinte aux droits d’auteur, la juridiction prend en considération distinctement :
1° Les conséquences économiques négatives de l’atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l’atteinte aux droits.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.
En application de ces règles d’indemnisation, les gains manqués et la perte subie par la partie lésée s’entendent de la marge sur coût variable sur les ventes qu’elle aurait effectuées si ce n’avait été de la contrefaçon.
Leur estimation implique en conséquence de déterminer :
– le nombre d’articles contrefaisants écoulés,
– le nombre d’acquéreurs de produits contrefaits qui auraient acquis l’original si ce n’avait été de la contrefaçon,
– la marge sur coût variable réalisée par la partie lésée sur les articles originaux qu’elle aurait ainsi écoulés.
Les éléments communiqués par l’appelante permettent de déterminer la masse contrefaisante, le nombre d’acquéreurs qui auraient acquis l’original et le prix d’un tabouret ‘Tam Tam’ original, mais ne mettent pas la cour en situation de connaître la marge sur coût variable applicable, non plus partant que de déterminer les gains manqués et la perte subie.
Il y a lieu, en pareilles circonstances, de réserver à statuer sur le surplus des demandes et d’enjoindre la société Stamp de fournir une attestation de son commissaire aux comptes indiquant la marge sur coût variable applicable à la fabrication d’un tabouret ‘Tam Tam’ de modèle Krystal en 2015, ainsi que ses bilans 2015 et 2016 accompagnés de leurs annexes, permettant de vérifier en tant que de besoin le calcul du commissaire aux comptes.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt mixte et contradictoire, prononcé en dernier ressort,
– Rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de la société Stamp et les déclare recevables ;
– Juge que les demandes visant l’infirmation du jugement en ce qu’il a donné valeur probante aux pièces 7,9 et 20 produites par la société Stamp se trouvent dépourvues d’objet ;
– Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a :
prononcé la nullité du procès-verbal de constat d’achat du 13 mai 2015,
prononcé la nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 28 septembre 2015,
dit que le tabouret ‘Tam Tam’ est protégé au titre du droit d’auteur ;
– L’infirme en ce qu’il a débouté la société Stamp de ses actions en contrefaçon et en concurrence déloyale ;
statuant à nouveau et y ajoutant :
– Prononce la nullité du procès-verbal de saisie contrefaçon du 12 janvier 2021 ;
– Juge que les sociétés La Foir’fouille, FF Digital et Direct’usine se sont rendues coupables de contrefaçon du droit d’auteur de la société Stamp sur le tabouret ‘Tam Tam’ ;
– Juge que les sociétés La Foir’fouille et FF Digital ont commis des actes de concurrence parasitaire au détriment de la société Stamp ;
– Réserve à statuer sur la demande indemnitaire, les autres mesures de réparation, les appels en garantie et les dépens de l’instance ;
– rabat l’ordonnance de clôture et ordonne la réouverture des débats sur ces points ;
– Enjoint à la société Stamp de produire une attestation de son commissaire aux comptes indiquant la marge sur coût variable applicable à la fabrication d’un tabouret ‘Tam Tam’ de modèle Krystal en 2015 et en 2016 ;
– Enjoint à la société Stamp de produire ses bilans 2015 et 2016, accompagnés de toutes leurs annexes ;
– Renvoie l’affaire à l’audience de mise en état du 7 mai 2024.
LE GREFFIER LE PRESIDENT