Affaire du Bail Rural – Congé Annulé

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COUR D’APPEL DE VERSAILLES Code nac : 52C 1re chambre 2e section BAIL RURAL ARRET N° CONTRADICTOIRE DU 14 JUIN 2022 N° RG 21/00074 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UHW2 AFFAIRE : Société EARL DU BLANC SOLEIL C/ Mme [F] [K] … Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Décembre 2020 par le Tribunal Paritaire des baux ruraux de VERSAILLES N° RG : 51-18-0002 Expéditions exécutoires Expéditions Copies délivrées le : 14/06/22 à : Me Caroline VARLET-ANGOVE Me Christophe DE LANGLADE + Parties RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LE QUATORZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX, La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre : Société EARL DU BLANC SOLEIL Ayant son siège [Adresse 1] [Localité 81] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège Représentant : Maître Caroline VARLET-ANGOVE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0830 APPELANTE **************** Madame [F] [K] [Adresse 16] [Localité 81] Représentant : Maître Marie MASSON Substituant Maître Christophe DE LANGLADE de la SELARL LANGLADE ET ASSOCIES, avocat au barreau de COMPIEGNE Madame [B] [K] [Adresse 41] [Localité 81] Représentant : Maître Marie MASSON Substituant Maître Christophe DE LANGLADE de la SELARL LANGLADE ET ASSOCIES, avocat au barreau de COMPIEGNE Madame [Z] [W] [Adresse 105] [Localité 81] Représentant : Maître Marie MASSON Substituant Maître Christophe DE LANGLADE de la SELARL LANGLADE ET ASSOCIES, avocat au barreau de COMPIEGNE INTIMEES **************** Composition de la cour : En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 19 Avril 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Philippe JAVELAS, Président et Madame Gwenael COUGARD, conseillère, chargée du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur Philippe JAVELAS, Président, Madame Gwenael COUGARD, Conseillère, Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée, Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN EXPOSE DU LITIGE Par acte authentique du 6 novembre 1992, M. [E] [K] a consenti à l’exploitation agricole à responsabilité limitée Du Blanc Soleil un bail rural portant sur diverses parcelles de terre situées sur les communes de [Localité 103] et [Localité 81] (78) d’une surface totale de 61 ha 24 a 41 ca. Conclu pour une durée de 18 ans à compter du 1er novembre 1992, le bail s’est renouvelé tacitement à l’échéance à compter du 1er novembre 2010 pour une durée de 9 années. M. [K] est décédé le 22 août 2000. Par acte extrajudiciaire du 30 avril 2018, Mme [F] [K], Mme [B] [K] et Mme [Z] [W], ès qualités de propriétaires indivises des parcelles louées ont fait délivrer à l’exploitation Du Blanc Soleil un congé pour reprise à effet du 31 octobre 2019, afin de permettre l’exploitation des terres par M. [U] [W], fils de Mme [W]. Par requête reçue au greffe le 17 juillet 2018, l’exploitation Du Blanc Soleil a assigné Mmes [K] et [W] devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Versailles aux fins de : – annuler le congé qui lui a été signifié le 30 avril 2018, – les condamner solidairement à lui payer la somme de 188 420,43 euros augmentée des intérêts au taux légal majoré de trois points à compter du 6 novembre 1992, outre la capitalisation des intérêts, – les débouter de leurs entières demandes, Subsidiairement : – désigner tel expert qu’il plaira au tribunal afin de déterminer le montant des indemnités de sortie de ferme qui lui sont dues en application des articles L411-69 et suivants du code rural et de la pêche maritime, – dire et juger qu’il appartiendra aux bailleresses de procéder à leurs frais au bornage de leurs parcelles, – en tout état de cause : – les condamner solidairement à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, – les condamner solidairement aux entiers dépens. Par jugement contradictoire du 10 décembre 2020, le tribunal paritaire des baux ruraux de Versailles a : – déclaré valide le congé pour reprise au bénéfice de M. [W] délivré le 30 avril 2018 à l’exploitation Du Blanc Soleil à effet du 31 octobre 2019, – ordonné à défaut de départ volontaire, l’expulsion de l’exploitation Du Blanc Soleil ainsi que celle de tout occupant de son chef, si besoin est avec l’assistance de la force publique et sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à compter de la notification du jugement, des parcelles mentionnés au jugement, – condamné Mme [F] [K], Mme [B] [K] et Mme [W] in solidum à payer la somme de 71 097,04 euros à l’exploitation Du Blanc Soleil augmentée des intérêts au taux légal majoré de trois points à compter du 6 novembre 1992, – dit que les intérêts échus pour une année seront capitalisés, – débouté l’exploitation Du Blanc Soleil de sa demande d’indemnité au titre des améliorations, – débouté l’exploitation Du Blanc Soleil de sa demande de bornage, – condamné l’exploitation Du Blanc Soleil à payer à Mme [F] [K], Mme [B] [K] et Mme [W] une indemnité de 28 176 euros TTC au titre de la remise en état de la parcelle cadastrée section B n°[Cadastre 77], lieudit ‘[Adresse 98], – débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, – dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile, – dit que chaque partie supporterait la charge des dépens pour moitié et les y a condamnés en tant que de besoin, – ordonné l’exécution provisoire du jugement. Par déclaration reçue au greffe le 6 janvier 2021, l’exploitation Du Blanc Soleil a relevé appel de ce jugement. Aux termes de ses conclusions signifiées le 18 janvier 2022, elle demande à la cour de : – prononcer la jonction des deux affaires enrôlées sous les n° RG 21/00205 et RG 21/00074, – infirmer le jugement rendu par le tribunal paritaire des baux ruraux de Versailles du 20 décembre 2020 en ce qu’il : – a déclaré valide le congé pour reprise au bénéfice de M. [W] qui lui a été délivré le 30 avril 2018 à effet du 31 octobre 2019, – a ordonné à défaut de départ volontaire, son expulsion de l’exploitation Du Blanc Soleil ainsi que celle de tout occupant de son chef, si besoin est avec l’assistance de la force publique et sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai d’un mois à compter de la notification du jugement, des parcelles mentionnés au jugement, – a condamné Mme [F] [K], Mme [B] [K] et Mme [W] in solidum à lui payer la somme de 71 097,04 euros augmentée des intérêts au taux légal majoré de trois points à compter du 6 novembre 1992, – l’a déboutée de sa demande d’indemnité au titre des améliorations, – l’a déboutée de sa demande de bornage, – l’a condamnée à payer à Mme [F] [K], Mme [B] [K] et Mme [W] une indemnité de 28 176 euros TTC au titre de la remise en état de la parcelle cadastrée section B n°[Cadastre 77], lieudit ‘[Adresse 98], – a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, – a dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile, – a dit que chaque partie supporterait la charge des dépens pour moitié et les y a condamnés en tant que de besoin, – a ordonné l’exécution provisoire du jugement, Statuant à nouveau : – annuler le congé qui lui a été signifié le 30 avril 2018, – condamner solidairement Mmes [K] et [W] à lui payer la somme de 188 420, 43 euros, augmentée des intérêts au taux légal majoré de trois points à compter du 6 novembre 1992, outre la capitalisation des intérêts, – débouter Mmes [K] et [W] de leurs entières demandes, Subsidiairement : – désigner tel expert qu’il plaira au tribunal afin de déterminer le montant des indemnités de sortie de ferme qui lui sont dues en application des articles L411-69 et suivants du code rural et de la pêche maritime, – dire et juger qu’il appartiendra aux bailleresses de procéder à leurs frais au bornage de leurs parcelles, En tout état de cause : – condamner solidairement Mmes [K] et [W] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, – condamner solidairement Mmes [K] et [W] aux entiers dépens. Aux termes de leurs conclusions reçues au greffe le 2 août 2021, Mmes [K] et [W] demandent à la cour de : – prononcer la jonction des deux affaires enrôlées sous les n° RG 21/00205 et RG 21/00074, – confirmer le jugement du 20 décembre 2020 en ce qu’il a : – validé le congé délivré le 30 avril 2018 sur le bail conclu au profit de l’exploitation Du Blanc Soleil, – ordonné à l’exploitation Du Blanc Soleil de libérer les parcelles objets du congé délivré le 30 avril 2018 à compter du jour de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter d’un délai d’un mois suivant la notification du jugement, – ordonné à défaut de départ volontaire, l’expulsion de l’exploitation Du Blanc Soleil avec au besoin l’assistance de la force publique, – rejeté l’ensemble des prétentions de l’exploitation Du Blanc Soleil et plus particulièrement les demandes liées à la répartition de l’indu et à la nomination d’un expert, afin de fixer les éventuelles indemnités de sortie, – condamné l’exploitation Du Blanc Soleil à les indemniser des dégradations commises sur la parcelle cadastrée section B n°[Cadastre 77] et à leur verser une somme totale de 23 480 euros HT, Statuant à nouveau à titre subsidiaire : – condamner Mme [F] [K], Mme [B] [K] et Mme [W] à rembourser la somme de 71 097, 04 euros à l’EARL Legrand, il conviendrait d’appliquer le taux légal du 17 juillet 2013 au 14 octobre 2014, et seulement à compter du 15 octobre, l’application du taux légal majoré de trois points, En tout état de cause : – condamner l’exploitation Du Blanc Soleil à verser à Mmes [K] et [W] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, – condamner l’exploitation Du Blanc Soleil aux entiers dépens de l’instance. Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée. MOTIFS DE LA DÉCISION ‘ sur l’annulation du congé pour vice de forme : L’EARL du Blanc Soleil fait valoir que le congé qui lui a été délivré doit être annulé aux motifs que : – les consorts [K] [W] ne justifient pas de leur qualité à agir, – la mention de la profession de M. [U] [W] est imprécise et erronée, de sorte qu’elle ne répond pas à l’exigence imposée par l’article L411-47 du code rural, – il n’est pas démontré qu’elle avait connaissance de sa profession, et le tribunal ne pouvait pas estimer que cette imprécision n’avait pu lui causer aucun grief, le fait que le gérant de l’EARL, M. [H], soit conseiller municipal et fasse partie de la même société de chasse que M. [W] n’impliquant pas nécessairement qu’il connaisse sa profession ; le fait qu’elle ne puisse pas s’assurer du sérieux du projet de reprise de ce fait, cause nécessairement grief. En réponse, les consorts [K]-[W] exposent que : – les éléments versés démontrent suffisamment leur qualité de propriétaire des parcelles données à bail, ainsi qu’il résulte de l’attestation notariale et du relevé cadastral ; l’EARL du Blanc Soleil s’est toujours acquittée des loyers à leur attention, – la profession de M. [W] est indiquée au congé, elle n’est pas erronée puisqu’elle correspond bien à l’activité qu’il exerce, et aucun grief ne peut être établi du fait de l’imprécision que le tribunal a retenue, puisque M. [H] et M. [W] se connaissent très bien, – l’activité d’élevage de brebis est une pure activité de loisirs, ce que M. [H] ne peut ignorer, – le fait que sa demande d’installation porte sur une superficie supérieure à celle visée par le congé ne signifie pas qu’il est déjà installé comme agriculteur ; il s’agit de parcelles appartenant à sa famille et non visées par le bail rural. Sur ce, En premier lieu, l’EARL excipe de l’annulation du congé au motif que les consorts [K]-[W] ne justifient pas leur qualité de propriétaires. Il résulte pourtant suffisamment des pièces versées que le congé a été délivré à la requête de Mmes [F] et [B] [K] et Mme [Z] [K] épouse [W], qui justifient qu’elles sont propriétaires des parcelles données à bail à la date de la délivrance du congé. En effet, il résulte de l’extrait de la matrice cadastrale et de l’attestation notariée rédigée par Me [Y] le 27 août 2018 que Mmes [K] et [W] sont bien propriétaires, ce en vertu d’une attestation de propriété reçue par notaire le 27 juillet 2005, des parcelles suivantes : – Commune d'[Localité 93] : B[Cadastre 25], B[Cadastre 26], – Commune de [Localité 94] : C[Cadastre 9], – Commune de [Localité 103] : B[Cadastre 2], B[Cadastre 37], B[Cadastre 39], B[Cadastre 55], B[Cadastre 70], B[Cadastre 71], B[Cadastre 74], B[Cadastre 75], B[Cadastre 77] et B[Cadastre 32], – Commune de [Localité 104] : B[Cadastre 46] et [Cadastre 47], – Commune de [Localité 81] : A[Cadastre 42], A[Cadastre 43], A[Cadastre 48], A[Cadastre 49], A[Cadastre 53] à [Cadastre 54], A[Cadastre 57], A[Cadastre 58], A[Cadastre 62], A [Cadastre 63], A[Cadastre 64] à A[Cadastre 65], A[Cadastre 66], A[Cadastre 67], A[Cadastre 68], A[Cadastre 69], B[Cadastre 56], B[Cadastre 59], B[Cadastre 60], B[Cadastre 61], B[Cadastre 82], B[Cadastre 86] à [Cadastre 89], B[Cadastre 3], B[Cadastre 4], B[Cadastre 12], B[Cadastre 13], C[Cadastre 27], C[Cadastre 44], C[Cadastre 45], C[Cadastre 47] à C[Cadastre 50], C[Cadastre 51], C[Cadastre 79], C[Cadastre 80], C[Cadastre 5], C[Cadastre 6], C[Cadastre 7], C[Cadastre 8], C[Cadastre 28] à [Cadastre 29], C[Cadastre 33], ZA[Cadastre 37], ZA[Cadastre 38], ZA[Cadastre 40], ZA[Cadastre 71], ZA[Cadastre 73], ZA[Cadastre 77], ZA[Cadastre 83], ZA[Cadastre 14], ZA[Cadastre 15], ZA[Cadastre 17], ZA[Cadastre 18], ZA[Cadastre 20], ZA[Cadastre 23] à [Cadastre 24], ZA[Cadastre 34], ZB[Cadastre 19], ZB[Cadastre 52], ZB[Cadastre 72], ZB[Cadastre 75], ZB[Cadastre 77], ZB[Cadastre 78], ZB[Cadastre 83], ZB[Cadastre 90], ZB[Cadastre 91], ZB[Cadastre 21] à [Cadastre 22], ZB[Cadastre 30] à [Cadastre 31], ZB[Cadastre 35], ZB[Cadastre 36]. Il est au surplus fait observer par les mêmes consorts [K] – [W] que l’EARL du Blanc Soleil a régulièrement payé ses fermages à leur attention, démontrant ainsi elle-même les considérer comme légitimes propriétaires des parcelles louées. D’ailleurs l’EARL du Blanc Soleil ne verse aucune pièce de nature à contredire cette qualité de propriétaire des consorts [K]-[W]. Le moyen tiré de la nullité du congé pour défaut de qualité des requérants est écarté comme infondé. Ensuite, l’EARL du Blanc Soleil demande l’annulation du congé au motif de l’imprécision et de l’inexactitude de la profession de M. [W] telle qu’elle figure au congé. L’article L411-47 du code rural prévoit à peine de nullité notamment que le congé doit ‘indiquer, en cas de congé pour reprise, les nom, prénom, âge, domicile et profession du bénéficiaire ou des bénéficiaires devant exploiter conjointement le bien loué (…)’ Il est précisé que ‘la nullité ne sera toutefois pas prononcée si l’omission ou l’inexactitude constatée ne sont pas de nature à induire le preneur en erreur.’ Il est mentionné au congé signifié le 30 avril 2018 que M. [U] [W], qui est le fils de Mme [Z] [K] épouse [W], exerce ‘actuellement la profession de salarié dans une exploitation agricole et conservera cette activité en parallèle de l’exploitation des terres, objets du présent congé.’ Il est justifié par les intimées que M. [W] exerce l’activité de salarié agricole au sein du GAEC [Adresse 95], ce que confirme son employeur par attestation délivrée le 6 avril 2019. Il est indiscutable que cette mention est vague et ne permet pas, à la seule lecture, de déterminer en quoi consiste l’activité de M. [W] au sein du GAEC qui l’emploie. Pour autant, la mention de la profession exercée par le bénéficiaire de la reprise a pour finalité de permettre au titulaire du bail alors en titre de s’assurer du sérieux du projet et de sa compatibilité au regard du contrôle des structures. S’il est exact, comme le reproche l’EARL du Blanc Soleil, que cette mention manque de précision, il est certain qu’elle n’est pas inexacte, et surtout que le preneur à bail ne démontre pas que cette imprécision lui a causé grief. Elle affirme qu’elle n’a pas pu s’assurer du sérieux du projet de reprise, sans toutefois expliciter en quoi ce défaut de précision de l’activité effectivement exercée par M. [W] l’a empêchée de déterminer le sérieux du projet de reprise, ce alors que M. [P], gérant de l’EARL, et la famille [K] vivent dans un village de moins de 2 000 habitants, que M. [P] y est conseiller municipal, et qu’il est membre de la même société de chasse que M. [W], de sorte que M. [P] ne peut prétendre sérieusement ignorer l’activité de M. [W], ou à tout le moins sa situation au regard du contrôle des structures. De surcroît, le fait que M. [W] exerce par ailleurs une activité d’élevage de brebis à titre de pur loisir, et qu’à cette fin il produise du foin et de la paille est indifférent, compte tenu du caractère non professionnel de cette activité, de très faible envergure, s’agissant de quelques têtes. Enfin, et s’agissant du fait que M. [W] ait visé à son projet d’installation des terres non incluses dans le congé n’est pas non plus cause de nullité, alors que M. [W] expose avoir le projet d’exploiter en sus des terres actuellement données à bail à l’EARL quelques parcelles appartenant à sa famille et situées à proximité, portant ainsi le projet d’installation de 59 ha 24 a 41 ca à 64 ha 07 a 89 ca. En conséquence, aucun des griefs de forme formulés par l’EARL du Blanc Soleil ne peut être retenu et justifier l’annulation du congé. ‘ sur l’annulation du congé au fond : L’EARL du Blanc soleil soutient que le bénéficiaire de la reprise ne justifie pas des conditions requises. Elle prétend que M. [W] ne justifie pas d’un diplôme suffisant pour pouvoir prétendre bénéficier de la reprise, qu’il ne démontre pas posséder le matériel nécessaire à l’exploitation ni des moyens financiers pour l’acquérir. Elle estime que le contrat d’entraide avec l’exploitant voisin que prévoit de passer M. [W] ne peut être pris en compte et que les éléments versés par M. [W] pour prétendre démontrer qu’il remplit la condition de matériel ou des moyens financiers ne sont pas probants. Elle affirme ensuite que M. [W] n’a pas l’intention d’exploiter lui-même les terres, que si la possession de bâtiments nécessaires à l’exercice de l’activité agricole n’est pas imposée par l’article L411-59 du code rural, il n’en demeure pas moins qu’en pratique il ne peut prétendre disposer du matériel nécessaire s’il n’a pas un lieu où l’entreposer. Elle ajoute que les consorts [K]-[W] ont le projet de vendre une partie des parcelles objet du congé, qu’une délibération du conseil municipal de la commune de [Localité 81] le démontre sans ambiguïté, et que la vente, même partielle, des biens objet du congé, même la seule tentative de vente, suffit à caractériser la fraude dans l’exercice du droit de reprise et justifie l’annulation du congé. Elle souligne que les pièces versées par les consorts [K]-[W] ne peuvent contredire ce projet. En réponse, les consorts [K]-[W] affirment que M. [W] remplit les conditions pour bénéficier de la reprise. Ils expliquent que M. [W] a le projet de reprendre l’exploitation familiale, qu’il a toujours travaillé dans le monde agricole, qu’il exploitera bien personnellement et pour une durée minimum de 9 ans les terres querellées, qu’il réside à proximité des parcelles de sorte qu’il lui sera bien possible d’exploiter personnellement les biens repris. Ils ajoutent qu’il possède le matériel, puisqu’il élève des brebis à titre de loisirs et produit pour cette raison du foin et de la paille, il dispose de matériel suffisant pour démarrer l’exploitation et pourra effectuer d’autres investissements. Ils mentionnent qu’un contrat d’entraide est projeté avec M. [I], ce qui permettra de disposer du matériel complémentaire et qu’il dispose des moyens financiers pour effectuer des investissements complémentaires. Ils relèvent qu’exiger que M. [W] dispose de bâtiments est ajouté une condition à la loi. Ils font observer ensuite que M. [W] remplit non seulement la condition de capacité professionnelle mais aussi celle de l’expérience professionnelle, puisqu’il dispose d’un brevet technicien supérieur agricole. Ils prétendent qu’il n’a pas à justifier d’un plan professionnel de professionnalisation, cette exigence ne s’appliquant qu’aux jeunes agriculteurs sollicitant une aide à l’installation. Ils ajoutent qu’il justifie d’une expérience professionnelle supérieure à 5 ans. Ils mentionnent qu’il est hors champ du régime de l’autorisation d’exploiter et remplit la condition de l’article L411-59 du code rural, puisque la surface concernée par l’installation est inférieure au seuil de contrôle fixé en Ile de France à 131 hectares. Sur ce, Selon l’article L411-58 du code rural et de la pêche maritime, le bailleur a le droit de refuser le renouvellement du bail s’il veut reprendre le bien loué pour lui-même ou au profit de son conjoint, du partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité ou d’un descendant majeur ou mineur émancipé. L’article L411-59 du code rural énonce que ‘le bénéficiaire de la reprise doit, à partir de celle-ci, se consacrer à l’exploitation du bien repris pendant au moins neuf ans soit à titre individuel, soit au sein d’une société dotée de la personnalité morale, soit au sein d’une société en participation dont les statuts sont établis par un écrit ayant acquis date certaine. Il ne peut se limiter à la direction et à la surveillance de l’exploitation et doit participer sur les lieux aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l’importance de l’exploitation. Il doit posséder le cheptel et le matériel nécessaires ou, à défaut, les moyens de les acquérir. Le bénéficiaire de la reprise doit occuper lui-même les bâtiments d’habitation du bien repris ou une habitation située à proximité du fonds et en permettant l’exploitation directe. Le bénéficiaire de la reprise doit justifier par tous moyens qu’il satisfait aux obligations qui lui incombent en application des deux alinéas précédents et qu’il répond aux conditions de capacité ou d’expérience professionnelle mentionnées aux articles L. 331-2 à L. 331-5 ou qu’il a bénéficié d’une autorisation d’exploiter en application de ces dispositions.’ Il appartient aux consorts [K] [W] d’établir que M. [W] répond aux exigences imposées par l’article précité. Il leur appartient d’établir que M. [W] répond aux conditions de diplôme ou d’expérience professionnelle, qu’il possède le matériel nécessaire à l’exploitation ou les moyens de les acquérir, qu’il résidera sur place ou à proximité du fonds, enfin qu’il a bien le projet d’exploiter lui-même les terres reprises, ce pendant une durée de 9 années. Les intimées indiquent, sans être contestées sur ce point, que M. [W] réside à proximité immédiate des parcelles, puisqu’il demeure à [Localité 100], située à quelques kilomètres des communes où se trouvent la plupart des parcelles objet du litige. Les consorts [K]- [W] établissent également que M. [W] est titulaire d’un diplôme de brevet de technicien supérieur agricole. Il résulte en effet des pièces produites que M. [W], né le 26 juin 1979, est le fils de Mme [K] épouse [W] et est titulaire du brevet de technicien supérieur agricole, option ‘analyse et conduite de systèmes d’exploitation’ obtenu en juin 2000, diplôme qui lui confère la capacité agricole dans les conditions prévues par les articles R331-2 et D343-4 du code rural. S’il est exact que l’article D343-4 s’applique spécifiquement aux aides à l’installation, il n’en demeure pas moins que l’article R331-2 renvoie précisément à cette disposition pour définir les diplômes nécessaires pour satisfaire aux conditions de capacité. De plus, comme l’a justement relevé le tribunal, l’installation de M. [W] n’est pas soumise à autorisation préalable d’exploiter, au titre de la réglementation relative au contrôle des structures, et ce conformément à la notification qui lui a été faite par la direction départementale des territoires par courrier du 13 décembre 2018. M. [W] doit encore démontrer posséder le matériel nécessaire ainsi que des moyens pour acquérir le matériel complémentaire et enfin qu’il a pour but de se consacrer à l’exploitation du bien repris pendant au moins 9 ans. S’agissant de cette dernière exigence, l’EARL du Blanc Soleil conteste ce projet, affirmant que les consorts [K]-[W] ont l’intention de céder pour partie les parcelles actuellement données à bail. Elle verse notamment, au soutien de cette allégation, un procès-verbal de délibération du conseil municipal du 9 mars 2022 de la commune de [Localité 81] aux termes duquel ‘les propriétaires des terrains cadastrés AK [Cadastre 83], [Cadastre 84], [Cadastre 85] ‘[Localité 99]’ d’une contenance de 4 565 m², AK [Cadastre 92] ‘[Localité 96]’ d’une superficie de 11 986 m², AK [Cadastre 11] [Localité 102] de 611 m², soit un total de 17 162 m² sont d’accord pour les céder à la commune.’ Il est précisé au même procès-verbal que le but de cette acquisition répond au projet de construction d’un ensemble scolaire sur deux parcelles cadastrées AK [Cadastre 10] et AK [Cadastre 11] situées [Adresse 101]. L’EARL du Blanc Soleil verse le plan cadastral actualisé, selon lequel les parcelles AK [Cadastre 83], [Cadastre 84], [Cadastre 85], [Cadastre 92] et [Cadastre 11] correspondent aux parcelles anciennement désignées sous les numéros B[Cadastre 59], B[Cadastre 88], B[Cadastre 89], B[Cadastre 87], B [Cadastre 82], sans être démentie par les consorts [K]-[W] sur cette nouvelle numérotation des parcelles, lesquelles parcelles sont bien leur propriété et objet du bail, à l’exclusion de la parcelle B[Cadastre 89] (nouvellement AK [Cadastre 85]). Il est certain que ce procès-verbal du 9 mars 2022 mentionne le prix de vente des parcelles pour un montant de 1 220 000 HT, soit 71 euros le m², et autorise le maire à effectuer les démarches utiles en vue de l’acquisition desdites terres. Les consorts [K]-[W] versent devant la cour le procès-verbal du conseil municipal du 12 avril 2022, lequel mentionne que ‘le maire souhaite apporter quelques précisions au sujet du vote de la délibération n° 13-2022 relative à l’acquisition des parcelles AK [Cadastre 83], [Cadastre 84], [Cadastre 85], [Cadastre 92] et [Cadastre 11]. Ces terrains sont en cours d’acquisition, à l’initiative de la commune, afin d’y édifier une école. A l’heure actuelle les propriétaires n’ont pas encore donné leur accord malgré de nombreux contacts de la mairie. En cas de refus de l’un des propriétaires, une procédure de déclaration d’utilité publique sera lancée auprès de la préfecture des Yvelines, en raison de l’urgence du besoin d’une nouvelle école. Ces terrains seront mis à disposition de l’agriculteur qui les exploite le temps des études préalables aux travaux de construction de l’école.’ Comme le relève l’EARL du Blanc Soleil, cette question de la vente des parcelles à la commune n’était pas mentionnée à l’ordre du jour du conseil municipal, et n’a d’ailleurs pas donné lieu à un nouveau vote, de sorte que le projet de cession en cours en mars 2022 n’est pas remis en cause et n’est pas qu’à l’état de simple discussion. Il est certain que ce projet de vente d’une partie des parcelles actuellement données à bail interroge quant à la réalité du projet de reprise de M. [W], ce d’autant qu’il porte sur près d’un tiers de la surface totale des terres données à bail et qu’il s’agit d’une opération de forte rentabilité économique pour la famille [K]. Un tel projet, que les derniers éléments versés par les consorts [K]-[W] ne permettent nullement de démentir, suffit à contredire l’existence d’un projet sérieux de reprise par M. [W] dans le but de s’installer comme exploitant agricole. En conséquence, la condition posée par l’article L411-59 du code rural selon laquelle le bénéficiaire de la reprise doit justifier son intention de se consacrer à l’exploitation du bien repris n’est pas remplie, eu égard à ce projet de cession, et le congé n’a pas été donné régulièrement. En conséquence, il est annulé, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si M. [W] justifie disposer du matériel et des moyens financiers nécessaires, et le jugement entrepris infirmé. ‘ sur la demande reconventionnelle et subsidiaire de résiliation du bail Les consorts [K]-[W] affirment que la parcelle B n° [Cadastre 75] est comprise dans le bail et n’appartient pas en propre à M. [H], que l’EARL du Blanc Soleil n’a pas exploité la parcelle B n° [Cadastre 77], ce qui a rendu impossible la mise en culture de cette parcelle, compromettant ainsi la bonne exploitation du fonds. Ils ajoutent que trois parcelles sont louées par l’EARL du Blanc Soleil à Mme [M], et que cette sous-location prohibée, même partielle, justifie la résiliation de la totalité du bail. L’EARL du Blanc Soleil réplique que le grief formulé à son encontre quant au défaut d’exploitation de la parcelle B n° [Cadastre 77] n’est pas caractérisé, et qu’en outre la résiliation pour défaut d’entretien ne peut être prononcée que si un tel défaut compromet la bonne exploitation du fond. Elle ajoute que la sous-location qui lui est reprochée concernant la parcelle [Adresse 76] n’est pas démontrée, soulignant d’ailleurs que cette parcelle appartient en propre à M. [H]. et qu’elle n’est pas objet du bail litigieux. Sur ce, Compte tenu de l’annulation du congé pour vice de fond, les consorts [K]-[W] demandent la résiliation du bail. L’article L. 411-31 I et II dispose que ‘ (…), le bailleur ne peut demander la résiliation du bail que s’il justifie de l’un des motifs suivants: (…) 2° Des agissements du preneur de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds, notamment le fait qu’il ne dispose pas de la main-d »uvre nécessaire aux besoins de l’exploitation; (…) 1° Toute contravention aux dispositions de l’article L. 411-35; (…)’ Si le défaut d’entretien des parcelles louées peut-être une cause de résiliation du bail, par application de l’article L411-31 I 2° du code rural, il appartient cependant au bailleur d’établir la réalité du défaut d’entretien imputé à faute, et qu’un tel manquement par le preneur à ses obligations est susceptible de compromettre la bonne exploitation du fonds. Les bailleurs font grief à l’EARL du Blanc Soleil de ne pas avoir exploité la parcelle B [Cadastre 77] et de l’avoir laissée à l’abandon et versent pour étayer cette affirmation des photographies et un devis de remise en état de ladite parcelle. Les clichés versés aux débats fixent la situation d’une parcelle de terre en effet non exploitée, qui est un sous-bois peu entretenu. Les attestations versées corroborent le défaut d’entretien de cette parcelle, l’une d’entre elles étant rédigée par un ancien salarié de l’EARL du Blanc Soleil qui confirme avoir connu cette parcelle exploitée avant qu’elle soit placée en jachère puis laissée à l’abandon, la seconde étant établie par le gérant d’une société paysagiste qui expose avoir rédigé un devis pour les travaux nécessaires à la remise en état de ladite parcelle compte tenu de l’état d’abandon dans laquelle il l’a trouvée. Si comme le relève l’EARL du Blanc Soleil, les clichés produits ne permettent pas d’identifier avec certitude la parcelle dont l’image est ainsi reproduite, les attestations établies par un ancien salarié de l’EARL du Blanc Soleil et par une entreprise contactée par les bailleurs, ne font que confirmer l’état de la parcelle. Cependant, les bailleurs n’établissent pas en quoi le défaut d’entretien de la parcelle litigieuse, dont il convient d’observer qu’elle est d’une superficie de 28 ares, est susceptible de compromettre l’exploitation du fonds. En second lieu, les bailleurs reprochent également à l’EARL du Blanc Soleil d’avoir sous-loué la parcelle B [Cadastre 75] lieudit ‘[Localité 97]’. Mme [M], qui dit louer à M. [H] trois parcelles, parmi lesquelles une partie de la parcelle B [Cadastre 75], expose dans une attestation rédigée le 7 juin 2019, y faire pâturer ses chevaux. Elle prétend que M. [H], gérant de l’EARL du Blanc Soleil lui a expliqué que ces terres lui appartenaient. Sont annexées à l’attestation trois clichés représentant la pâture, sans toutefois qu’il soit possible de déterminer avec certitude les parcelles ainsi représentées, et en particulier qu’une partie de la parcelle B [Cadastre 75] est en effet occupée par Mme [M]. Cependant, les consorts [K]-[W], qui reprochent la sous-location d’une partie d’une parcelle, à supposer ce fait suffisamment établi par ces éléments, ne démontrent en rien en quoi une telle sous-location leur aurait porté préjudice et aurait été de nature à porter atteinte à la terre occupée par un tiers. En conséquence, la demande présentée à titre subsidiaire de résiliation du bail ne peut prospérer, les manquements imputés au preneur n’étant pas de nature à compromettre l’exploitation du fonds ou à porter atteinte aux droits du bailleur. En conséquence, le bail en cours se poursuit et la demande d’expulsion de l’EARL du Blanc Soleil est rejetée, le jugement étant infirmé de ce chef. ‘ sur la répétition de l’indu : L’EARL du Blanc Soleil affirme que la conclusion du bail a été concomitante à la signature d’un contrat de cession d’éléments mobiliers d’exploitation agricole, et la cession des autres éléments que le matériel est contraire à l’article L411-74 du code rural, justifiant la répétition des sommes qu’elle a versées alors, et dont elle justifie le paiement. Elle conteste la proratisation opérée et prétend que la totalité des sommes versées doit lui être restituée. En réponse, les consorts [K]-[W] affirment que le paiement que prétend avoir fait l’EARL du Blanc Soleil n’est pas établi, au surplus qu’elle n’établit pas que le prix versé a excédé de 10% le prix réel, enfin que la restitution doit être limitée aux seuls éléments visés par l’article L411-74, à l’exclusion du matériel et des façons culturales, enfin qu’il convient d’effectuer un prorata au regard de la superficie en cause et de distinguer selon les périodes pour les intérêts. Sur ce, L’article L411-74 du code rural énonce que ‘Sera puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 30 000 € ou de l’une de ces deux peines seulement, tout bailleur, tout preneur sortant ou tout intermédiaire qui aura, directement ou indirectement, à l’occasion d’un changement d’exploitant, soit obtenu ou tenté d’obtenir une remise d’argent ou de valeurs non justifiée, soit imposé ou tenté d’imposer la reprise de biens mobiliers à un prix ne correspondant pas à la valeur vénale de ceux-ci. Les sommes indûment perçues sont sujettes à répétition. Elles sont majorées d’un intérêt calculé à compter de leur versement (L. no 2014-1170 du 13 oct. 2014, art. 9-I) «et égal au taux de l’intérêt légal mentionné à l’article L. 313-2 du code monétaire et financier majoré de trois points». ‘ L’art. 9-I s’applique aux instances en cours à la date d’entrée en vigueur de la présente loi (L. no 2014-1170 du 13 oct. 2014, art. 9-II, JO 14 oct.). En cas de reprise de biens mobiliers à un prix ne correspondant pas à la valeur vénale de ceux-ci, l’action en répétition peut être exercée dès lors que la somme versée a excédé ladite valeur vénale de plus de 10 %. L’action en répétition exercée à l’encontre du bailleur demeure recevable pendant toute la durée du bail initial et des baux renouvelés qui lui font suite ainsi que, en cas d’exercice du droit de reprise, pendant un délai de dix-huit mois à compter de la date d’effet du congé.’ Il appartient à l’EARL du Blanc Soleil, qui est recevable à agir en répétition de l’indu au cours du bail, auquel il n’est pas mis un terme par l’effet de la présente décision, d’établir la réalité de l’indu qu’elle dit avoir payé à son entrée dans les lieux. Elle prétend que M. [E] [K] lui a cédé lors de la conclusion du bail, par effet d’un contrat dit de cession d’éléments mobiliers d’exploitation agricole, du cheptel mort (le matériel), des améliorations de fond, des impenses, des fumures annuelles, une indemnité de résiliation amiable anticipée des baux en cours, des façons culturales. Elle argue de ce que ces sommes qu’elle a dû verser, à part celles dues au titre du matériel, étaient dues au preneur sortant par le bailleur, et non pas par elle, justifiant son action en répétition. Comme l’a justement rappelé le tribunal, le fermier sortant peut librement céder au fermier entrant les éléments mobiliers de l’exploitation, notamment cheptel, matériel, récoltes, stocks, mais il lui est interdit de mettre à la charge du preneur entrant le prix des fumures et arrière-fumures, ni lui céder les améliorations faites sur le fonds, sauf certaines situation particulières non remplies en l’espèce. Le tribunal a relevé à raison que de telles améliorations ne peuvent être indemnisées au bénéfice du preneur sortant que par le bailleur. Il est exact que concomitamment au bail, a été signé entre M. [E] [K], exploitant et bailleur et l’EARL du Blanc Soleil, un contrat de cession d’éléments mobiliers d’exploitation agricole. Contrairement à ce que prétendent les consorts [K]-[W], la preuve du paiement est bien rapportée, comme l’a retenu le tribunal et résulte de l’acte de cession même, en ce qu’une somme de 200 000 francs a été versée le jour de la signature du compromis et séquestrée, et une somme de 593 591 francs a été versée au comptant ce jour à l’ordre du Trésor Public, en règlement d’une dette de M. [K], une somme de 1 356 366 francs le jour de l’acte au profit du cédant, enfin une somme de 176 000 francs au moyen d’une rente viagère, d’un montant annuel de 13 000 francs. Il est démontré que les trois premières sommes ont été versées, la première des sommes ayant été versée au jour du compromis et séquestrée, aucune information de ce que la somme séquestrée n’aurait pas été reversée au crédit de M. [K] n’étant invoquée. S’agissant de la somme due au Trésor public, et contrairement à ce qu’a retenu le 1er juge, il est bien justifié du versement au Trésor public de la somme de 593 591 francs pour le compte de M. [K] ainsi qu’il résulte de l’acte de cession, du relevé de compte de l’EARL du Blanc Soleil et de l’avis à tiers détenteur daté du 3 novembre 1992. Contrairement à ce qui est prétendu par l’EARL du Blanc Soleil, le versement de ces montants est suffisamment établi par les pièces sus-évoquées, l’EARL du Blanc Soleil ne versant aucun document de nature à contredire cette preuve. En revanche, aucune pièce ne permet de caractériser la réalité du versement de la rente viagère, de sorte qu’aucune répétition de l’indu n’est justifiée à ce titre. Aucune demande n’est présentée au titre de la cession du matériel (1 090 000 francs HT), dont il n’est pas allégué qu’elle aurait été faite à un prix supérieur de 10 % au prix du marché. La demande porte sur les améliorations du fond (481 500 francs), les impenses, résidus végétaux enfouis après broyage et incorporation au sol des dernières récoltes et de la valeur résiduelle des engrais et amendements non encore consommés (374 500 francs), les fumures annuelles en terres (139 100 francs), une indemnité de résiliation amiable anticipée des baux en cours (160 500 francs), des façons culturales effectuées jusqu’à la date de prise de possession (80 357 francs), soit une somme totale de 1 235 957 francs (188 420,43 euros) Compte tenu des pièces justifiant du versement des sommes telles que prévues à l’acte de cession, mis à part la rente viagère (176 000 euros), la somme de 1 235 957 – 176 000 = 1 059 957 francs, soit 161 589, 40 euros est due par les consorts [K]-[W] à l’EARL du Blanc Soleil. Il n’est pas justifié de réduire ce montant au prorata de la surface des parcelles objet du bail, le fait que le document de cession d’exploitation fasse référence à une superficie de 107 hectares, au lieu de la superficie sur laquelle porte le bail (61 ha 24 a 41 ca) étant indifférent, cette surface de 107 hectares servant de référence pour le calcul des impenses. Les consorts [K] [W] sont condamnés à payer à l’EARL du Blanc Soleil au titre de l’indu la somme de 161 589,40 euros, majorée d’un intérêt calculé à compter du 6 novembre 1992, et égal au taux de l’intérêt légal mentionné à l’article L. 313-2 du code monétaire et financier majoré de trois points, par effet de l’article L411-74 du code rural. ‘ sur les comptes de sortie de ferme L’EARL du Blanc Soleil sollicite une indemnité de sortie de ferme si le congé était validé. Les consorts [K] [W] demandent quant à eux une indemnité de remise en état de la parcelle qu’ils disent laissée à l’abandon (B [Cadastre 77]). Cependant, ces demandes sont sans objet, le bail se poursuivant. Elles sont rejetées, sans qu’il soit nécessaire d’ordonner une mesure d’expertise pour évaluer les indemnités dues. ‘ sur la demande de bornage L’EARL du Blanc Soleil sollicite que soit ordonné le bornage aux frais des bailleresses. Cependant, et comme l’a relevé le tribunal, aucun fondement textuel au soutien de cette prétention, qui sera rejetée, ce d’autant que le bail se poursuit, de sorte que l’argument mis en avant selon lequel les parcelles seraient imbriquées dans les terres de l’EARL du Blanc Soleil et que le bornage serait nécessaire pour permettre la reprise de jouissance des bailleresses n’est pas pertinent. ‘ sur les autres demandes Le jugement est infirmé en ce qu’il a dit que chaque partie supportera les dépens par moitié. Les consorts [K]-[W] sont condamnés aux dépens de première instance et d’appel. Il n’y a pas lieu d’accueillir les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. PAR CES MOTIFS, La cour, statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe, Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a rejeté la demande de bornage présentée par l’EARL du Blanc Soleil, Statuant à nouveau, Annule le congé délivré le 30 avril 2018 par Mmes [F] et [B] [K] et Mme [Z] [K] épouse [W] au profit de l’EARL du Blanc Soleil, Dit qu’en conséquence de cette annulation, le bail consenti à l’EARL du Blanc Soleil par les consorts [K]-[W] aux droits de M. [E] [K] se poursuit, Rejette l’ensemble des demandes présentées par les consorts [K]-[W], Condamne Mmes [F] et [B] [K] et Mme [Z] [K] épouse [W] à payer à l’EARL du Blanc Soleil la somme de 161 589,40 euros au titre de l’indu, augmentée d’un intérêt calculé à compter du 6 novembre 1992, et égal au taux de l’intérêt légal mentionné à l’article L. 313-2 du code monétaire et financier majoré de trois points, Rejette la demande d’indemnité de sortie de ferme présentée par l’EARL du Blanc Soleil et la demande présentée par Mmes [F] et [B] [K] et Mme [Z] [K] épouse [W] au titre des dégradations, Rejette le surplus des demandes, Rejette les demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, Condamne Mmes [F] et [B] [K] et Mme [Z] [K] épouse [W] aux dépens de première instance et d’appel. – prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. – signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,  

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