L’affaire concerne le partage de la succession de Mme [Y] [K], décédée en laissant pour lui succéder son époux [R] [U] et ses deux fils [N] et [C] [U]. Un litige a éclaté concernant le partage des biens, notamment en ce qui concerne l’évaluation des biens immobiliers du domaine agricole, les coupes de bois excessives effectuées par [R] [U], et la demande de créance de salaire différé de la part de [C] [U]. La cour a confirmé l’évaluation des biens immobiliers par l’expert, a rejeté la demande de créance de salaire différé de [C] [U], a condamné la succession de [R] [U] à une indemnité pour les coupes de bois excessives, et a rejeté les demandes d’attribution préférentielle des biens. Les dépens ont été attribués à [C] [U] et une somme de 2000 euros a été allouée à [N] [U] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Arrêt n° Grosse + copie délivrées le à COUR D’APPEL DE MONTPELLIER 2e chambre de la famille ARRET DU 1er FEVRIER 2024 Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/01895 – N° Portalis DBVK-V-B7D-OCGD Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 février 2019 Tribunal de grande instance de Carcassonne N° RG 12/01128 APPELANT : Monsieur [C] [U] né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 10] de nationalité Française [Adresse 13] [Localité 3] Représenté par Me Stéphane CABEE avocat au barreau de Carcassonne substitué à l’audience par Me Bideaus avocat au barreau de Carcassone INTIME : Monsieur [N] [U] né le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 10] de nationalité Française [Adresse 8] [Localité 4] Représenté par Me Franck ALBERTI avocat au barreau de Carcassonne substitué à l’audience par Me Christine AUCHE- HEDOU Ordonnance de clôture du 19 Octobre 2023 COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Novembre 2023,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Karine ANCELY, Conseillère faisant fonction de présidente de chambre et Mme Sandrine FEVRIER, Conseillère chargée du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Mme Karine ANCELY, Conseillère faisant fonction de présidente de chambre Mme Sylvie CRUZEL, Conseillère Mme Sandrine FEVRIER, Conseillère Greffier lors des débats : Mme Asnia BENKABA adjointe administrative faisant fonction de greffier ARRET : – Contradictoire ; – prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour fixée au 11 janvier 2023 prorogée au 1er février 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ; – signé par Mme Karine ANCELY, Conseillère Conseillère faisant fonction de présidente de chambre et par Asnia BENKABA adjointe administrative faisant fonction de greffier . * * * EXPOSÉ DU LITIGE M. [R] [U] et Mme [Y] [K] ont contracté mariage sous le régime de la séparation de biens le 18 mars 1954. De leur union sont issus deux enfants, [N] et [C] [U]. Mme [Y] [K] épouse [U] est décédée le [Date décès 7] 2009 en laissant pour lui succéder : – son époux séparé de biens, [R] [U], – ses deux fils issus de son mariage, [C] et [N]. Elle est décédée en l’état : ‘ d’une donation consentie à son époux selon acte du 29 septembre 1977 reçu par Me [J] [D], notaire à [Localité 12] d’Aude, aux termes duquel elle fait donation à celui-ci de l’universalité des biens meubles et immeubles qui composent sa succession, sans aucune exception ‘d’un testatment olographe en date du 5 octobre 2000 par lequel elle a confirmé la donation entre époux en ce qui concerne l’usufruit de tous ses biens, partagé son domaine agricole, dit [Adresse 11], situé sur la commune d'[Localité 9] (11) entre ses deux fils et légué la nue-propriété de la quotité disponible de sa succession à son fils, [C]. Par acte d’huissier en date du 24 juillet 2012, [C] [U] a fait citer [R] [U], son père et [N] [U], son frère, devant le tribunal de grande instance de Carcassonne en ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession et a sollicité, pour y parvenir, que soit ordonnée une expertise judiciaire Par jugement contradictoire en date du 18 décembre 2014, le tribunal judiciaire de Carcassonne a : – ordonné le partage judiciaire de la succession de [Y] [U] née [K], décédée à [Localité 9] le [Date décès 7] 2009 ; – désigné Maître [J], notaire à Montréal d’Aude, pour y procéder et le juge commissaire au partage désigné par l’ordonnance de la présidente du tribunal de grande instance de Carcassonne pour surveiller les opérations ; – rejeté la demande d’annulation du testament du 5 octobre 2000 ; – avant dire droit au fond, ordonné une expertise au frais avancés d'[C] [U] et désigné [A] [F] pour y procéder avec mission habituelle en la matière ; – réservé les frais irrépétibles et les dépens. L’expert a déposé son rapport le 23 mai 2016. [R] et [N] [U] ont relevé appel de ce jugement le 23 février 2015, et par arrêts du 16 mai 2019 et du 12 décembre 2019, la cour d’appel de Montpellier a : – confirmé le jugement entrepris en ce qu’il a ouvert les opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [Y] [U], désigné Maître [J], notaire, pour y procéder, commis le juge commissaire aux partages pour surveiller les opérations et faire rapport en cas de difficultés et avant, dire droit, ordonné une expertise confiée à [A] [F] ; – Infirmé le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande d’annulation du testament olographe du 5 octobre 2000 ; – Dit que la sincèrité du testament olographe du 5 octobre 2000 n’est pas établie et que l’état d’insanité d’esprit de [Y] [U] en octobre 2000 ne lui permettait plus de concevoir et rédiger par elle-même un tel acte ; – Annulé en conséquence le testament olographe du 5 octobre 2000. [R] [U] est décédé le [Date décès 6] 2016 laissant pour lui succéder ses deux fils. Par jugement contradictoire du 7 février 2019, le tribunal de grande instance de Carcassonne a : – homologué le rapport d’expertise de M. [F], et attribué comme suit en fonction des dispositions du testament du 5 octobre 2000 et sous réserve de la décision de la cour d’appel sur la validité de ce testament : * à M. [N] [U] le secteur A tel que déterminé par l’expert, y compris le logement Algeco, le tout pour une valeur de 232 711 euros, * à M. [C] [U] le secteur B et C avec les bâtiments du domaine, y compris hangar à bois excentré, le tout pour une valeur de 448 228 euros. – dit que la succession de MM. [U] [R], et [N] [U] lui-même sont solidairement redevables envers la succession de Mme [K] d’une indemnité de 36 066 euros, arrêtée au 12 juin 2015, pour coupes de bois excessives, – rejeté la demande en paiement de salaire différé formulée par M. [U] [C], – ordonné le partage de la succession de M. [U] [R] décédé le [Date décès 5] 2016 et a commis, pour y procéder, en qualité de notaire liquidateur, Me [X], – renvoyé les parties devant Me [J] pour les opérations de liquidation et partage, – rejeté toute demande autre ou plus ample formulée par les parties, – fait masse des dépens, y compris les frais de l’expertise judiciaire et dit qu’ils seront pris en frais privilégiés de partage, avec distraction au profit des avocats en la cause. Par déclaration au greffe du 19 mars 2019, M. [C] [U] a interjeté appel limité de la décision en ce qu’elle a : – évalué l’ancienne bergerie à 15.000 € à la place des 7.500 € proposés par l’expert judiciaire, – rejeté la demande de M. [C] [U] sur le rapport de la somme de 524.773 € par [N] [U] et la succession d'[R] [U], et de la demande d’application de la sanction du recel successoral à l’encontre de [N] [U] et [R] [U], pris solidairement, qui ont détourné cette somme de 524.773€ en procédant à des coupes de bois disproportionnées et en abusant de l’usufruit revendiqué par M. [R] [U], – rejeté la demande en paiement de salaire différé formulée par M. [C] [U], – rejeté les autres demandes présentées par M. [C] [U]. L’appelant, dans ses uniques conclusions du 11 juin 2019, demande à la cour de : – confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a ordonné l’ouverture des opérations de compte liquidation et partage de la succession de M. [R] [U], et désigner Me [Z] [J] (et non Me [X] désigné par erreur), en qualité de notaire liquidateur, aux fins de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage, – confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a retenu les évaluations immobilières proposées par l’expert judiciaire, – confirmer le jugement en ce qu’il a dit que les secteurs B et C du [Adresse 11] tels que définis par l’expert judiciaire Me [F] sont attribués à M. [C] [U], conformément aux volontés testamentaires de Mme [Y] [U], – infirmer le jugement de première instance sur les autres chefs de jugement, et notamment : – dire et juger que la valeur de l’ancienne bergerie est de 7.500 €, conformément à l’évaluation de l’expert judiciaire, – dire et juger que M. [R] [U], qui n’a pas fait d’inventaire préalable à l’exercice de son usufruit, n’a pas exercé son usufruit en « bon père de famille », et au contraire a commis un abus d’usufruit dans le but de nuire exclusivement à son fils [C] [U] en portant atteinte à la substance des immeubles soumis à son usufruit, et notamment ceux qui reviennent à M. [C] [U] par l’effet du legs testamentaire, – ordonner la déchéance de M. [R] [U] de son usufruit, – dire et juger que la succession de M. [R] [U] et [N] [U] ont commis un recel successoral en détournant la valeur de (497.707 + 27.066) 524.773 € d’actifs successoraux, par leurs coupes de bois abusives et excessives, – condamner solidairement la succession de M. [R] [U] et M. [N] [U] à rapporter à la succession de [Y] [U] cette somme de (497.707 + 27.066) 524.773 € augmentée des intérêts légaux à compter du 10 mai 2012, – dire et juger que la sanction du recel successoral sera appliquée à l’encontre de la succession de M. [R] [U] et de [N] [U], et notamment qu’ils n’auront pas droit au partage sur cette valeur de (497.707 + 27.066) 524.773 € recélée, – ordonner pour le cas où M. [N] [U] ne procéderait pas volontairement au paiement de cette somme de (497.707 + 27.066) 524.773 € entre les mains du notaire liquidateur, que le secteur A du [Adresse 11] (qui devrait normalement être attribué à M. [N] [U]) soit attribué à M. [C] [U] à titre de paiement de sa créance, – dire et juger que M. [C] [U] est titulaire d’une créance de salaire différé qui doit être prise en compte à hauteur de la somme de 134.090 € outre intérêts légaux courant à compter du 20 mai 2016, dans les opérations de compte liquidation partage de la succession de Mme [U] [Y], – condamner M. [U] [N] à verser à M. [U] [C] la somme de 10.000,00 € en application de l’article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d’appel, – dire et juger que les dépens de première instance et d’appel seront passés en frais privilégiés de partage, dont distraction au profit de la Scp Cabee-Biver-Spanghero, avec bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile. L’intimé, dans ses dernières conclusions du 16 octobre 2023, demande à la cour de : – rejeter toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées, – débouter M. [C] [U] de l’intégralité de ses demandes, – ordonner l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de Mme [Y] [U], – infirmer le jugement dont appel, – dire et juger que le [Adresse 11] doit globalement être évalue à la somme de 764.311 € (contre 675.939 € retenu par l’expert) détaillée par secteur comme suit : secteur A 150.000 €, secteur B 74.311 € et secteur C 540.000 €, – dire et juger que les secteurs A et B du [Adresse 11] tels que définis par l’expert judiciaire sont attribués à M. [N] [U] pour une valeur globale de 224.311 €, – dire et juger que le secteur C du [Adresse 11] tel que défini par l’expert judiciaire sera attribué à M. [C] [U] pour une valeur de 540.000 € à charge pour ce dernier de verser une soulte à [N] [U]. Subsidiairement, si les valeurs retenues par la cour devaient être celles proposées par l’expert nonobstant l’argumentation du concluant, à savoir une valeur de 330. 035 € pour les secteurs A et B et une valeur de 345.904 € pour le secteur C : – dire et juger que les secteurs A et B du [Adresse 11] tels que définis par l’expert judiciaire sont attribués à M. [N] [U] pour une valeur globale de 330.035 €, – dire et juger que le secteur C du [Adresse 11] tel que défini par l’expert judiciaire sera attribué à M. [C] [U] pour une valeur de 345.904 € à charge pour ce dernier de verser une soulte à [N] [U], – condamner M. [C] [U] à payer à [N] [U] une somme de 7 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens en ce compris les frais d’expertise. Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l’article 455 du code de procédure civile. L’ordonnance de clôture est intervenue le 19 octobre 2023. SUR CE LA COUR Sur l’actif de la succession et les évaluations retenues par l’expertise concernant le [Adresse 11] situé à [Localité 9] d’Aude L’expert et les parties s’accordent pour diviser le [Adresse 11] en trois secteurs, A, B et C. L’appelant demande l’homologation du rapport d’expertise concernant les valeurs retenues pour l’ensemble de ces secteurs et critique le jugement déféré en ce qu’il a retenu une valeur supérieure à celle proposée par l’expert concernant la Bergerie. L’intimé estime pour sa part que les secteurs A et B ont été surévalués contrairement au secteur C qui aurait été sous-évalué. Concernant le secteur A, l’argumentation de [N] [U] est devenue sans objet, dès lors que l’expert a retenu une valeur de 12 000 euros, tel que proposé par l’intéressé et non contestée par [C] [U]. L’évaluation des terres à vignes, proposée par M. [N] [U] à 2000 euros l’hectare contre 3500 euros proposés par l’expert, s’appuie sur un seul acte de vente, non soumis à l’expert, et dont les termes insuffisamment précis ne permettent pas de comparer les caractéristiques du bien, de sorte que c’est à juste titre que le premier juge a retenu la somme de 3500 euros l’hectare, en cohérence avec la nature des terres qui sont destinées à la culture de la vigne, et les autres valeurs retenues pour le foncier non bâti du domaine. Il en est de même pour les bois et taillis des secteurs A, B et C, évalués par l’expert à la somme de 3000 euros l’hectare en considération du prix d’achat sur pied du type de bois concerné et du prix avancé par M. [N] [U] qui a déclaré l’acheter 1500 euros à son père. Les pièces produites par l’intimé, qui ne suffisent pas à établir le caractère comparable des biens concernés, ne sont pas de nature à remettre en cause l’évaluation faite par l’expert que la cour adopte. L’algeco édifié sur un terrain non constructible pour une surface de 59 m2 sur un terrain non urbanisable, et qui présente un niveau de confort moyen a été justement évalué à 20 000 euros, soit environ 50 % des logements de qualité médiocres incluent dans le corps de ferme. Concernant les bâtiments à vocation agricole, les conclusions de l’expert, qui s’est fondé sur les valeurs observées lors de transactions de domaines agricoles, leur situation et leur faible usage en raison de l’absence d’activité agricole réelle qui induit une forte dépréciation, sont également validées, étant précisé que la valeur du bien doit s’apprécier à la valeur du marché et non, comme le soutient M. [N] [U], selon le coût actuel de construction. Ainsi, la valeur du hangar 4 arceaux est retenue pour la somme de 4800 euros. La valeur du hangar 2 arceaux, d’une surface de 95,76 m2, avec charpente refaite, mais un sol en terre battue, un plancher ordinaire et un mur face Nord affaibli ne peut dépasser les 7600 euros retenus par l’expert. La valeur du hangar du bois d’une surface de 500 m2, en terre battue, et dont la toiture présente une suspicion d’amiante, est suffisamment arrêtée à 50 euros du m2, soit 25000 euros au total. Concernant le corps de ferme, l’expert souligne l’ancienneté de la construction et un état médiocre. La qualité des logements A et B est qualifiée de très ordinaire et la valeur de 600 euros du m2, contestée par M. [N] [U] sur le fondement d’une estimation par calcul du taux de rentabilité qu’il n’argumente pas, doit être écartée. La valeur de 56400 euros est donc retenue conformément aux conclusions de l’expert. S’agissant du logement « [C] », c’est à juste titre que le premier juge a relevé que la valeur de ce bien, estimée à 62 250 euros ne fait l’objet d’aucune contestation puisque M. [C] [U] ne revendique pas d’abattement pour travaux. L’habitation principale, de type maison de maître, a été édifiée à la fin du 19ème siècle. Elle présente selon le rapport d’expertise, un niveau de confort de la première moitié du siècle dernier sans rénovation ni embellissement, et nécessite la reprise totale du second ‘uvre. L’expert a retenu une valeur de 750 euros au m2, par rapport à un prix moyen de transactions observées de 685 euros au m2, pour tenir compte de l’existence du garage qui est valorisé pour 13650 euros contrairement aux affirmations de M. [N] [U]. Le rapport d’expertise est donc validé sur ce point. Concernant la bergerie et l’écurie, c’est par des motifs pertinents que la cour adopte et complète, que le premier juge a estimé que leur valeur était comparable et a retenu, au vu des prix observés dans les transactions de domaines agricoles, une valeur de 200 euros au m2 pour la bergerie dont le sol béton est de qualité médiocre, et de 250 euros au m2 pour l’écurie, de meilleure facture, soit une valeur totale de 15000 euros pour la bergerie et de 21250 euros pour l’écurie dont la surface utile est de 85 m2, l’étage étant occupé par le logement d'[C] [U]. Il convient par conséquent de confirmer le jugement déféré en toutes ces dispositions relatives à l’évaluation de l’actif successoral. Sur la créance de salaire différé M. [C] [U] reproche au jugement dont appel de l’avoir débouté de sa demande de créance de salaire différé au motif qu’il ne rapportait pas la preuve d’un travail ne serait-ce qu’à temps partiel sur l’exploitation de sa mère, l’inscription auprès de la MSA n’établissant pas à elle seule la réalité d’un travail effectif si elle n’est pas corroborée par d’autres éléments. Il fait valoir que la qualité d’aide familial induit une absence de rémunération et que c’est à tort que le premier juge s’est fondé sur le doute exprimé par l’expert quant à la nécessité du travail de deux personnes sur l’exploitation alors que celle-ci comprend, outre les 7 hectares de vignes et champs, de nombreux batiments, engins et maisons d’habitation, ainsi que des bois. Il estime que la preuve de son activité résulte de sa dispense du service militaire, de la reconstitution de sa carrière par la MSA, et des attestations qu’il produit. Il conteste avoir perçu une quelconque rémunération, y compris pour les coupes de bois invoquées par l’intimé qui ne démontre pas selon lui qu’il ait perçu une quelconque rémunération ou le produit de l’exploitation des coupes de bois. En réponse, l’intimé soutient que M. [C] [U] n’a demandé le statut d’aide familial que pour avoir une couverture sociale et qu’il n’a fait que réaliser des coupes de bois pour son propre compte. Aux termes des dispositions de l’article L.321-13 du code rural, « Les descendants d’un exploitant agricole qui, âgés de plus de dix-huit ans, participent directement et effectivement à l’exploitation, sans être associés aux bénéfices ni aux pertes et qui ne reçoivent pas de salaire en argent en contrepartie de leur collaboration, sont réputés légalement bénéficiaires d’un contrat de travail à salaire différé sans que la prise en compte de ce salaire pour la détermination des parts successorales puisse donner lieu au paiement d’une soulte à la charge des cohéritiers ; le taux annuel du salaire sera égal, pour chacune des années de participation, à la valeur des deux tiers de la somme correspondant à 2 080 fois le taux du salaire minimum interprofessionnel de croissance en vigueur, soit au jour du partage consécutif au décès de l’exploitant, soit au plus tard à la date du règlement de la créance, si ce règlement intervient du vivant de l’exploitant ». Aux termes de l’article L.321-18 de ce même code, « La preuve de la participation agricole dans les conditions définies aux articles L.321-13 à L.321-18 pourra être apportée par tous moyens. En vue de faciliter l’administration de cette preuve, les parties pourront effectuer chaque année une déclaration à la mairie, laquelle devra être visée par le maire qui en donnera récépissé ». Il appartient donc à M. [C] [U] qui sollicite une créance de salaire différé d’apporter la preuve de sa participation directe et effective à l’exploitation agricole familiale, sans avoir été associé aux bénéfices ni aux pertes, et sans avoir reçu de salaire en argent en contrepartie de sa collaboration. A ce titre, l’appelant indique qu’il a travaillé comme aide familiale sur l’exploitation de sa mère de l’âge de 16 ans à l’âge de 40 ans, sans être rémunéré et qu’il était déclaré en qualité d’aide-familial auprès de la Mutualité Sociale Agricole (MSA). Selon le relevé de la MSA en date du 6 avril 2009, il a été affilié au régime non salarié agricole à compter du 1er janvier 1980, en qualité d’aide familial du 1er janvier 1983 au 31 mai 1988, puis du 1er janvier 1989 au 30 novembre 2001. L’intimé affirme toutefois que M. [C] [U] a été affilié à la MSA en qualité d’aide familial dans le seul but d’obtenir une couverture sociale alors qu’il n’avait pas d’activité sur l’exploitation, ce qui est contesté par l’appelant qui produit plusieurs attestations aux termes desquelles il aurait depuis les années 1980 toujours travaillé sur le [Adresse 11]. Ces attestations, qui sont contredites par les témoignages de ses deux ex-épouses affirmant qu’il ne travaillait pas pour ses parents mais effectuait des coupes de bois pour son compte, sont rédigées en termes généraux et n’apportent aucune précision sur la nature, la fréquence et l’ampleur des tâches qu’il aurait accomplies sur l’exploitation familiale pour participer de façon directe, effective, et désintéressée à sa mise en valeur. Sa dispense du service militaire et son affiliation à la MSA en tant qu’aide familial n’impliquent pas qu’il ait nécessairement exercé une activité agricole sans percevoir de rémunération pour cette activité. La réalité de cette activité ne peut donc se présumer ni se déduire de son affiliation à la MSA en qualité d’aide familial. Il s’ensuit que M. [C] [U] ne démontre pas la réalité de sa participation à l’exploitation agricole et ne rapporte pas la preuve qu’il remplit les conditions légales précitées pour bénéficier d’une créance de salaire différé. En conséquence, le jugement entrepris qui l’a débouté de sa demande de ce chef est confirmé. Sur les coupes de bois L’appelant soutient que [R] [U] et [N] [U] ont effectué des coupes de bois anormales et excessives sur les parcelles des secteurs B et C dont ce dernier est nu-propriétaire. Il fait valoir que M. [R] [U] n’a pas établi d’inventaire préalable à son entrée en jouissance, et qu’il a procédé à ces coupes de bois sans son accord, voire postérieurement à son opposition. Il estime qu'[R] [U] a porté atteinte à la substance des immeubles, commettant un abus d’usufruit dans le but de lui nuire. Invoquant un recel successoral pour une valeur de 524773€, il demande le rapport à la succession de cette somme ainsi que l’application de la sanction du recel successoral et, en cas de non-paiement, que le secteur A lui soit attribué à titre de paiement. L’intimé reconnait les coupes de bois réalisées pour [R] [U] afin d’assumer la charge financière du domaine et pour compléter sa faible pension retraite. Outre la qualification de recel successoral avancée par [C] [U], il conteste le caractère abusif de ces coupes, et invoque d’autres coupes réalisées par l’appelant. Il conteste enfin le montant de l’indemnisation proposée par l’expert. M. [C] [U] ne démontrant pas l’intention frauduleuse d'[R] [U], qui a procédé ouvertement aux coupes litigieuses, sans man’uvre ni dissimulation, c’est à juste titre que le premier juge, qui a écarté le recel successoral, a recherché au visa de l’article 578 du code civil, si les coupes réalisées par l’usufruitier avaient pu, par leur caractère excessif, porter atteinte à la substance du bien, démontrant ainsi un abus de son droit par M. [R] [U] engageant sa responsabilité. Aux termes de l’article 590 du code civil, si l’usufruit comprend des bois taillis, l’usufruitier est tenu d’observer l’ordre et la quotité des coupes, conformément à l’aménagement ou à l’usage constant des propriétaires. M. [C] [U] qui conteste les évaluations de l’expert, n’apporte aucun élément probant au soutien de ses prétentions, s’agissant de la surface d’exploitation litigieuse ou du rendement et de la valeur de la stère, permettant d’écarter les conclusions de l’expert qui, en l’absence de plan simple de gestion déposé, et tenant compte de la situation et de la nature des bois, a retenu un taux de coupe normal de 2,25% révélant un excès d’exploitation pour une surface de 8 ha 88 96 en secteur B et de 1ha 93 68 en secteur C engendrant une perte de valeur de 27 066 euros, outre un préjudice d’exploitation évalué à 9000 euros. Cette atteinte grave à la substance du fonds constitue un abus de jouissance engageant la responsabilité délictuelle d'[R] [U], lequel ne saurait être sanctionné d’une déchéance d’usufruit devenue sans objet du fait de son décès le [Date décès 6] 2016. L’abus de son usufruit par [R] [U] a causé à la succession de Mme [K] [Y] épouse [U] un préjudice que le premier juge a justement évalué à 36 066 euros. Le jugement déféré est par conséquent confirmé en ce qu’il a déclaré la succession de M. [R] [U] redevable envers la succession de Mme [K] [Y] épouse [U], d’une indemnité de 36 066 euros arrêtée au 12 juin 2015 pour coupe de bois excessives. Il sera toutefois infirmé en ce qu’il a déclaré [N] [U] solidairement redevable de cette somme envers la succession de Mme [K] [Y] épouse [U], l’appelant ne démontrant pas la participation fautive de l’intéressé aux coupes de bois, lequel reconnait uniquement avoir acheté le bois à son père à un tarif que l’expert n’a pas signalé comme insuffisant. Il n’y a pas lieu de prévoir de dispositions particulières en cas de non-paiement. Le jugement déféré est confirmé de ce chef. Sur les attributions M. [C] [U] demande la confirmation du jugement qui a procédé à l’attribution des immeubles du [Adresse 11] en fonction des dispositions du testament de Mme [Y] [K] du 5 octobre 2000. M. [N] [U] demande à titre principal, l’attribution à son profit des secteurs A et B du [Adresse 11] tels que définis par l’expert. L’article 832-3 du code civil dispose que l’attribution préférentielle peut être demandée conjointement par plusieurs successibles afin de conserver ensemble le bien indivis. A défaut d’accord amiable, la demande d’attribution préférentielle est portée devant le tribunal qui se prononce en fonction des intérêts en présence. En cas de demandes concurrentes, le tribunal tient compte de l’aptitude des différents postulants à gérer les biens en cause et à s’y maintenir. Tenant l’annulation du testament de Mme [Y] [K] par arrêt de la cour d’appel de Montpellier en date 12 décembre 2019, et faute pour [N] [U] de développer le moindre moyen au soutien de sa demande d’attribution préférentielle, il y a lieu d’infirmer le jugement de ce chef et de rejeter les demandes d’attribution formées par les parties. Sur les dépens et les frais irrépétibles L’action en partage étant exercée dans l’intérêt commun des parties, c’est à juste titre que le premier juge a déclaré les dépens frais privilégiés de partage. En cause d’appel, il convient de condamner M. [C] [U], partie perdante, aux entiers dépens. Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [N] [U] les frais qu’il a exposés pour la défense de ses intérêts en cause d’appel. M. [C] [U] sera condamné à lui verser la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. PAR CES MOTIFS La cour, INFIRME le jugement entrepris en ses dispositions sur la condamnation solidaire de [N] [U] et de la succession d'[R] [U] pour coupes de bois excessives, et sur les attributions entre héritiers, Statuant à nouveau : – Dit que la succession de M. [R] [U] est redevable envers la succession de Mme [K] [Y] épouse [U], d’une indemnité de 36 066 euros arrêtée au 12 juin 2015 pour coupe de bois excessives – Rejette les demandes d’attributions formées par les parties, CONFIRME la décision déférée pour le surplus des chefs critiqués, Y ajoutant, CONDAMNE M. [C] [U] aux dépens de l’instance d’appel, CONDAMNE M. [C] [U] à payer à M. [N] [U] la somme de 2000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. La greffière La président