M. [R] [S] a été employé par la société GAEC [Localité 4] en tant que salarié agricole polyvalent. Après avoir saisi le conseil de prud’hommes d’Arras pour obtenir le paiement de différentes sommes au titre de l’exécution de son contrat de travail, le conseil de prud’hommes a débouté M. [R] [S] de ses demandes et l’a condamné à payer 150 euros au GAEC [Localité 4]. M. [R] [S] a fait appel de cette décision et a réclamé un rappel de salaire ainsi que des congés payés. La Cour d’Appel de Douai a infirmé le jugement initial et a condamné le GAEC [Localité 4] à payer à M. [R] [S] le rappel de salaire et les congés payés demandés, ainsi qu’une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Résumé de l’affaire
M. [R] [S] a été engagé en tant que salarié agricole polyvalent par la société CARON devenue GAEC [Localité 4]. Suite à un litige concernant le paiement de différentes sommes au titre de son contrat de travail, M. [R] [S] a saisi le conseil de prud’hommes d’Arras. Le jugement rendu le 24 juin 2022 a débouté M. [R] [S] de ses demandes et l’a condamné à payer des frais au GAEC [Localité 4]. M. [R] [S] a fait appel de cette décision.Exposé du litige
M. [R] [S] réclame un rappel de salaire ainsi que des congés payés non versés par le GAEC [Localité 4]. Le litige porte également sur la validité du reçu pour solde de tout compte signé par M. [R] [S] et sur la durée de travail hebdomadaire mentionnée dans son contrat.Décision de la cour
La cour a considéré que le reçu pour solde de tout compte signé par M. [R] [S] était libératoire pour les sommes mentionnées et a rejeté sa demande de rappel de congés. En revanche, la cour a accueilli la demande de rappel de salaire de M. [R] [S] en raison d’une durée de travail hebdomadaire non respectée par le GAEC [Localité 4]. Le GAEC [Localité 4] a été condamné à payer les sommes réclamées par M. [R] [S] ainsi que des frais de procédure.Conclusion
La cour a infirmé le jugement initial et a statué en faveur de M. [R] [S], condamnant le GAEC [Localité 4] à payer les rappels de salaire et de congés ainsi que des frais de procédure.ARRÊT DU 23 Février 2024 N° 213/24 N° RG 22/01076 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UMYY PN/AL Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ARRAS en date du 24 Juin 2022 (RG F 20/00155 -section ) GROSSE : aux avocats le 23 Février 2024 République Française Au nom du Peuple Français COUR D’APPEL DE DOUAI Chambre Sociale – Prud’Hommes- APPELANT : M. [R] [S] [Adresse 2] [Localité 3] représenté par Me Géry HUMEZ, avocat au barreau d’ARRAS INTIMÉE : G.A.E.C. GAEC [Localité 4] [Adresse 1] [Localité 3] représentée par Me Hugues MAQUINGHEN, avocat au barreau de LILLE DÉBATS : à l’audience publique du 07 Décembre 2023 Tenue par Pierre NOUBEL magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré, les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe. GREFFIER : Valérie DOIZE COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ Pierre NOUBEL : PRÉSIDENT DE CHAMBRE Virginie CLAVERT : CONSEILLER Laure BERNARD : CONSEILLER ARRÊT : Contradictoire prononcé par sa mise à disposition au greffe le 23 Février 2024, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Pierre NOUBEL, Président et par Valérie DOIZE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 16 Novembre 2023 EXPOSÉ DU LITIGE ET PRÉTENTIONS RESPECTIVES DES PARTIES M. [R] [S] a été engagé par la société CARON, devenue GAEC [Localité 4] suivant contrat à durée indéterminée de 1989 en qualité de salarié agricole polyvalent. La convention collective applicable est celle des exploitations de polyculture et d’élevage, coopératives d’utilisation de matériel agricole du département du Pas-de-Calais. Le 24 août 2020, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes d’Arras afin d’obtenir la condamnation de son employeur au paiement de différentes sommes au titre de l’exécution du contrat de travail. Vu le jugement du conseil de prud’hommes du 24 juin 2022, lequel a : – déclaré irrecevable la demande de M. [R] [S] au titre de la contestation du reçu pour solde de tout compte, – débouté M. [R] [S] de l’intégralité de ses demandes, – condamné ce dernier à payer au GAEC [Localité 4] 150 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux éventuels dépens de l’instance. Vu l’appel formé par M. [R] [S] le 18 juillet 2022, Vu l’article 455 du code de procédure civile, Vu les conclusions de M. [R] [S] transmises au greffe par voie électronique le 23 juin 2023 et celles du GAEC [Localité 4] transmises au greffe par voie électronique le 5 janvier 2023, Vu l’ordonnance de clôture du 16 novembre 2023, M. [R] [S] demande : – d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, – de condamner le GAEC [Localité 4] à lui payer : – 6364,80 euros bruts au titre de rappels de salaire, outre 636,48 euros bruts de congés payés y afférents, – 12230,40 euros bruts de rappels de congés payés, – 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, – de condamner le GAEC [Localité 4] à lui adresser les bulletins de salaires, le certificat de travail et l’attestation POLE EMPLOI conformes à la décision à intervenir, dans un délai de 8 jours de la notification de celle-ci et, passé ce délai, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, – de débouter le GAEC [Localité 4] de ses demandes, fins et conclusions, – de condamner le GAEC [Localité 4] aux entiers dépens. Le GAEC [Localité 4] demande : – à titre principal : – de confirmer le jugement entrepris en son intégralité, – de condamner M. [R] [S] aux dépens de l’instance d’appel, – de condamner M. [R] [S] à lui payer 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel, – à titre subsidiaire, de débouter M. [R] [S] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions infondées. SUR CE, LA COUR Sur le caractère libératoire du reçu pour solde de tout compte Attendu qu’en application de l’article L 1234- 20 du code du travail, le solde de tout compte, établi par l’employeur et le salarié lui donne reçu de l’ inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail. Le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature au-delà duquel il devient libératoire pour l’employeur pour les sommes qui sont mentionnées ; Attendu qu’en l’espèce, M. [R] [S] a signé son reçu pour solde de tout compte le 31 décembre 2019, correspondant lors de son dernier jour de travail ; Que dans ces conditions, on ne saurait considérer que les quelques heures pendant lesquelles le lien de subordination entre les parties subsistait, étaient susceptibles d’avoir une quelconque influence sur la signature du salarié, alors même qu’il était employé de le GAEC [Localité 4] depuis 1989, qu’il n’est fait état d’aucune pression de la part de l’intimée ; Que dans ces conditions, c’est par une exacte appréciation que les premiers juges ont considéré que le document litigieux entrait dans le cadre de l’article L 1234- 20 du code du travail ; Attendu qu’en l’espèce, le reçu pour solde de tout compte n’a pas été dénoncé, alors que le salarié a saisi le conseil de prud’hommes bien après le délai de six mois prévu dans le cadre de ces dispositions légales ; Qu’il s’en suit que celui-ci a un effet libératoire pour les sommes qui y sont mentionnées ; Attendu que le reçu pour solde de tout compte mentionne des montants relatifs : – au salaire de base, déduction faite des congés payés pris, – à l’indemnité de congés payés (9jours), 677,70 € – à l’indemnité de départ à la retraite, 2405,28 € – au complément différentiel, 29,15 € – à l’indemnité compensatrice de congés payés, 1126,87 € ; Que les sommes afférentes aux congés payés sont très clairement mentionnées ; Que dans ces conditions, M. [R] [S] n’est pas recevable à réclamer un rappel de congés payés ; Attendu qu’en revanche, les pièces produites au dossier font apparaître que M. [R] [S] réclame l’équivalent de quatre heures par semaine au titre des années non prescrites ; Que ces sommes correspondent au coût des heures revendiquer au-delà de l’horaire légal des 35 heures hebdomadaires ; Que le reçu pour solde de tout comporte mention d’une somme due au titre du salaire de base ; Que cette mention exclut nécessairement des sommes éventuellement dues au-delà de ce contingent, d’autant que les bulletins de paie du salarié portent mention d’un salaire de base fixé à hauteur de 151,67 heures ; Que dans ces conditions, le reçu pour solde de tout compte ne saurait avoir de caractère libératoire au regard des sommes réclamées à hauteur de 6364,80 € en principal ; Qu’il s’ensuit que cette demande est recevable ; Sur la demande de rappel de salaire formé par M. [R] [S] Attendu que M. [R] [S] réclame le paiement de 6364,80 €, outre les congés payés y afférents ; Que son contrat de travail en date du 24 juillet 2000 prévoit, « par anticipation à la nouvelle durée légale du travail dès le 1er août 2000 un horaire annuel de 1600 heures de travail effectif, sur une base de 39 heures hebdomadaires, avec l’octroi de deux jours de congés supplémentaires par mois ; Que dans ces conditions, le salarié s’estime en droit de réclamer un rappel de salaire correspondant aux heures qui ne l’ont pas été payées au-delà des 35 heures hebdomadaires mentionnées sur ses bulletins de paie ; Attendu que pour s’opposer à la demande, le GAEC [Localité 4] fait valoir en substance que dès le 1er septembre 2000, et surtout pendant plus de 19 ans, il a été décidé par les parties de porter la durée de travail hebdomadaire à 35 heures, avec maintien de la rémunération perçue pour 39 heures , que ce n’est qu’après 19 ans de relations contractuelles que le salarié a formé une revendication à cet égard, alors qu’il a marqué son accord en signant son bulletin de paie de septembre 2000, sur lequel apparaît une durée du temps de travail de 35 heures hebdomadaires, un maintien de la rémunération perçue pour 39 heures hebdomadaires dénommée « complément différentiel » ; Attendu cependant que le fait que M. [R] [S] ait apposé sa signature sur certains de ces bulletins de salaire ne suffit pas à considérer qu’il a donné un consentement éclairé sur la modification d’un élément essentiel de son contrat de travail ; Que la durée de relation contractuelle ne suffit pas à établir que M. [R] [S] a pleinement acquiescé à cette modification ; Que le complément différentiel porté sur les fiches de paie du salarié ne saurait équivaloir au paiement des heures au-delà de 35 heures, alors même que le quantum de ce poste est resté constant malgré l’augmentation du salaire de base et que celui-ci est très inférieur à 17,33 heures ; Que dans ces conditions, la demande formée par M. [R] [S] doit être accueillie ; Sur les demandes formées en application de l’article 700 du code de procédure civile Attendu qu’à cet égard, il sera alloué à M. [R] [S] 1.500 euros ; Qu’à ce titre, le GAEC [Localité 4] doit être déboutée de sa demande ; PAR CES MOTIFS Statuant par arrêt contradictoire, INFIRME le jugement entrepris, STATUANT à nouveau, DECLARE forclose la demande formée par M. [R] [S] au titre du rappel de congés, CONDAMNE le GAEC [Localité 4] à payer à M. [R] [S] : – 6364,80 € à titre de rappel de salaire, – 636,48 € au titre des congés payés y afférents, CONDAMNE le GAEC [Localité 4] aux dépens, CONDAMNE le GAEC [Localité 4] à payer à M. [R] [S] : – 1500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile. LE GREFFIER Valérie DOIZE LE PRESIDENT Pierre NOUBEL