Promesse de vente de fonds de commerce

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Confirmation du jugement du tribunal de commerce de Meaux

La cour confirme le jugement du tribunal de commerce de Meaux en date du 24 mars 2020, sauf en ce qu’il a condamné Mme. [R] à payer à M. [Y] la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

Augmentation des dommages et intérêts

Statuant de nouveau, la cour condamne Mme [R] à payer à M. [Y] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Autres frais à payer

Y ajoutant, la cour condamne Mme [R] à payer à M. [Y] la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Charge des dépens d’appel

La cour condamne Mme [R] à supporter la charge des dépens d’appel.

Signature

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 3

ARRÊT DU 10 MAI 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/09985 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCCPG

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Mars 2020 -Tribunal de Commerce de MEAUX – RG n° 2018002338

APPELANTE

Madame [K] [R]

née le 06 Octobre 1979 à Blanc Mesnil (93),

demeurant:

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me David COURTILLAT, avocat au barreau de PARIS, toque : G0644

INTIME

Monsieur [X] [Y]

né le 31 Juillet 1981 à Conflans Saint Honorine (78),

demeurant:

[Adresse 3]

[Localité 4]

représenté par Me Milijana JOKIC, avocat au barreau de MEAUX, toque : 97

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie RECOULES, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Nathalie RECOULES, Présidente de chambre

Madame Marie GIROUSSE, Conseillère

Monsieur Douglas BERTHE, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Nathalie RECOULES, Présidente de chambre et par Mme Laurène BLANCO, Greffier présent lors de la mise à disposition.

Exposé du litige :

La société FitsAndGo, spécialisée dans le secteur de l’événementiel et du marketing sportif, dispose d’un établissement secondaire exploité sous l’enseigne « Univers Proteine », qui a pour activité la vente de produits alimentaires et non alimentaires dédiés à la nutrition sportive.

Une promesse de vente de fonds de commerce sera régularisée le 1er mars 2017 entre la dirigeante de la société FitsAndGo, Mme [K] [R] et M. [X] [Y], moyennant une somme de 120.000 euros, sous réserve notamment de la condition suspensive d’obtention d’un prêt en vue du financement de l’acquisition d’un montant de 120.000 euros, d’une durée de 7 ans et au taux de 1,70 % l’an.

M. [Y] a versé la somme de 34.500 euros, à valoir sur le prix de vente, au titre d’une indemnité d’immobilisation. Les parties n’ont pas abouti à concrétiser la cession du fonds de commerce et M. [Y] n’a pas obtenu le remboursement des sommes versées.

Par acte d’huissier du 30 novembre 2017, M. [Y] a assigné la société FitsAndGo et Mme. [R] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Meaux aux fins notamment d’obtenir restitution de l’indemnité d’immobilisation versée. Par ordonnance en date du 9 mars 2018, le juge des référés, constatant l’existence d’une contestation sérieuse, a renvoyé la cause et les parties au fond.

Par jugement en date du 24 mars 2020, le tribunal de commerce de Meaux a reçu Mme [R] en son exception d’incompétence matérielle, l’a dite mal fondée et l’en a débouté, constaté l’absence de litispendance avec l’affaire pendante devant le tribunal de grande instance de Meaux et dit que la demande de la société FitsAndGo relative à la perte de chance relève de la compétence du tribunal de grande instance de Meaux, reçu M. [Y] en ses demandes au fond, les a dit en partie bien fondées, reçu Mme [R] et la société FitsAndGo en leurs demandes au fond, les a dit mal fondées et les en a débouté, condamné solidairement Mme [R] et la société FitsAndGo à restituer à M. [Y] la somme de 34.500 euros en principal, ce sous astreinte, condamné Mme [R] à payer à M. [Y] la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, celle de 2.000 euros au titre de l’article 700 du CPC, ordonné l’exécution provisoire de la présente décision et condamné Mme [R] en tous les dépens.

Par déclaration en date du 20 juillet 2020, Mme [R] a interjeté appel du jugement du 24 mars 2020 aux fin d’obtenir l’infirmation de toutes les condamnations mises à sa charge.

Moyens et prétentions des parties :

Dans ses conclusions déposées le 16 octobre 2020, Mme [R], appelante, demande à la cour de :

– infirmer la décision entreprise dans toutes ses dispositions et statuant à nouveau constater l’incompétence du tribunal de commerce quant aux demandes formulées à l’encontre de Mme [R] et constater l’irrecevabilité des demandes de M. [Y] ;

A titre subsidiaire :

– débouter M. [Y] de l’ensemble de ses demandes ;

– recevoir Mme [R] en ses demandes reconventionnelles et l’y dire bien fondée ;

– déclarer les 34.500 euros versés par M. [Y] acquis à Mme [R] au titre de l’indemnité d’immobilisation ;

– condamner M. [Y] au paiement de la somme de 60.000 euros en réparation du préjudice subi par Mme [R] au titre de la perte de chance ;

– condamner M. [Y] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du CPC ;

– condamner M. [Y] au paiement des entiers dépens en ce compris ceux de la première instance.

Au soutien de ses prétentions, Mme. [R] fait valoir que :

– sur l’incompétence du tribunal de commerce, en vertu de l’article L.110-1, 1° du code de commerce, la cession d’un fonds de commerce n’est pas un acte de commerce et qu’en application de l’article L.721-3 du code de commerce, Mme [R], n’ayant pas la qualité de commerçante, le tribunal de commerce n’avait pas compétence à entrer en voie de condamnation contre elle ;

– sur les sommes réclamées représentant une indemnité d’immobilisation et, au sens des articles 1103, 1104 du code civil et des articles 4 et 8 de la promesse du 1er mars 2017, aucune partie n’ayant dénoncé ladite promesse, M. [Y], promettant, n’a jamais justifié du dépôt d’une demande de crédit, qu’il a mis Mme [R] en confiance en lui versant une indemnité d’immobilisation et a demandé à prendre l’affaire en main le temps de l’obtention de son crédit, dont il a en quelques mois d’exploitation obéré la rentabilité pour ensuite proposer d’acquérir au « vil prix » de 2.600 euros la société, qu’ainsi l’indemnité d’immobilisation versée doit être acquise au promettant ;

– sur la perte de chance, au sens de l’article 1240 du code civil, elle implique seulement la privation d’une potentialité présentant un caractère de probabilité raisonnable et non un caractère certain, compte-tenu du fait que Mme [R] projetait de vendre un fonds de commerce à 130.000 euros, le comportement de M. [Y] a empêché la société FitsAndGo de donner suite aux propositions d’achat qu’elle avait reçues d’autres acquéreurs potentiels et, de ce fait, M. [Y] devra être condamné en réparation de la perte de chance de la société FitsAndGo ;

– au sens de la jurisprudence (Cass. civ. 3ème, 7 avril 2016, n°15-11342), du fait de l’incurie de M. [Y], la société FitsAndGo reste redevable d’un crédit à hauteur de 89.937,31 euros en septembre 2017, ainsi M. [Y] sera condamné à verser 60.000 euros au titre de la réparation de ce préjudice.

Dans ses conclusions déposées le 4 janvier 2021, M. [Y], intimé, demande à la cour de :

– déclarer recevable mais mal fondé l’appel principal interjeté par Mme [R] ;

– débouter Mme [R] de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

– confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Meaux le 24 mars 2020 en ce qu’il a reçu Mme [R] en son exception d’incompétence matérielle, l’a dite mal fondée et l’en a débouté, s’est déclaré compétent matériellement concernant les demandes formulées à l’encontre de Mme [R], constaté l’absence de litispendance avec l’affaire pendante devant le tribunal de grande instance de Meaux sous le numéro RG 18/01125 et dit que la demande de la société Fitsandgo relative à la perte de chance relève de la compétence du tribunal de grande instance de Meaux, reçu M. [Y] en ses demandes, au fond les a dites en partie bien fondées, reçu Mme [R] et la société Fitsandgo en leurs demandes, au fond les a dites mal fondées et les en a débouté, condamné solidairement Mme [R] et la société Fitsandgo à restituer à M. [Y] la somme de 34.500 euros en principal, versée entre leurs mains à titre d’indemnité d’immobilisation, ce sous astreinte, condamné Mme [R] à payer à M. [Y] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ordonné l’exécution provisoire de la présence décision, nonobstant appel et sans caution et condamné Mme [R] en tous les dépens ;

– infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Meaux le 24 mars 2020 en ce qu’il a condamné Mme [R] à payer à M. [Y] la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

Y faisant droit et statuant de nouveau,

– condamner Mme [R] à verser à M. [Y] la somme de 5.000 euros en réparation du préjudice subi ;

En tout état de cause,

– condamner Mme [R] à payer à M. [Y] la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance.

Au soutien de ses prétentions, M. [Y] fait valoir que :

– sur la compétence du tribunal de commerce, au sens des articles L.110-1, 3° et L.121-1 du code de commerce, qui prévoient les actes de commerce qualifiant les commerçants et compte-tenu du litige de l’espèce qui concerne bien l’achat et la vente d’un fonds de commerce, Mme [R] est commerçante, ainsi la cour confirmera le jugement du 24 mars 2020 en ce qu’il s’est déclaré matériellement compétent pour connaître du présent litige ;

– sur la restitution de l’indemnité d’immobilisation, Mme [R] n’ayant pas respecté ses engagements aux termes du compromis de vente et au cours de la seconde phase de négociation en ce qu’elle n’a pas communiqué ou tardivement les pièces comptables, M. [Y] s’est vu refuser la demande de prêt ce dont il l’a informée le 28 avril 2017, sans que ne puisse lui être reproché un défaut de diligences dans ses démarches relatives l’obtention du prêt bancaire ; compte-tenu de l’état d’endettement de la société FitsAndGo, qui s’élevait à la somme de 144.000 euros, sa dirigeante Mme. [R] a fait preuve d’une mauvaise foi en dissimulant la réalité de la situation comptable ; conformément aux dispositions des articles 1137 et 1139 du code civil, Mme. [R] a sciemment omis de porter à la connaissance de l’acquéreur ces informations qu’elle savait pertinemment décisives et essentielles et la vente du fonds de commerce n’a donc pas abouti ; qu’en tout état de cause, l’annulation de la vente est directement imputable à l’appelante, comme justifié M. [Y] a été contraint de régler inutilement des intérêts et des frais d’assurance dans le cadre du prêt bancaire souscrit en vue du financement de l’indemnité d’immobilisation versée à Mme [R] ; en conséquence, la cour condamnera Mme. [R] à restituer à M. [Y] la somme de 34.500 euros en principal, versée entre ses mains à titre d’indemnité d’immobilisation, ce sous astreinte et à lui verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

– sur la demande de réparation de la perte de chance, le tribunal de commerce de Meaux a débouté Mme. [R] de sa demande de réparation de perte de chance puisque l’appelante avait engagé une action de réparation du préjudice lié à une perte de chance devant le tribunal judiciaire de Meaux.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions déposées.

Décision

Sur l’exception d’incompétence :

Aux termes des dispositions des articles L.110-1, 3° et L.121-1 du code de commerce, la loi répute acte de commerce l’opération de vente ou d’achat d’un fonds de commerce, sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle.

En outre, l’article L721-3 du code de commerce prévoit que le tribunal de commerce connaît des contestations relatives aux actes de commerce entre toutes personnes.

En l’espèce, Mme. [R], en sa qualité de gérante de la société FitsAndGo, dont dépendait l’établissement secondaire Univers protéine, objet du contrat de cession, est intervenue dans les pourparlers relatifs à l’élaboration de la promesse de vente et a été la bénéficiaire directe de l’indemnité d’immobilisation versée par M. [Y].

Au regard de sa qualité de dirigeante de droit d’une société commerciale et, dans la mesure où les faits qui lui sont reprochés sont en lien direct avec la gestion de cette société, le demandeur non-commerçant disposait du choix de saisir le tribunal civil ou le tribunal de commerce.

Ainsi, contrairement à ce que soutient Mme. [R], c’est à bon droit que le tribunal de commerce de Meaux l’a considérée comme commerçante et s’est déclaré compétent sur les demandes formées à son encontre.

Le jugement sera confirmé de ce chef par motifs substitués.

Sur la restitution de l’indemnité d’immobilisation :

Aux termes des articles 4 et 8 de la promesse de vente signée entre les parties le 1er mars 2017, il était convenu, d’une part, que le transfert de propriété du fonds de commerce interviendrait au jour de la signature de l’acte définitif et du paiement effectif des sommes exigibles, dont la date du transfert de propriété était envisagée le 1er mai 2017 et, d’autre part, que la vente serait conclue sous condition suspensive d’obtention d’un prêt à certaines conditions.

Il ressort des échanges non contestés entre les parties, d’une part, que M. [Y] avait fait des démarches auprès des banques dès le mois de février et qu’il informait Mme. [R] de la nécessité d’obtenir les bilans 2015 et 2016 pour voir prospérer le dossier et, d’autre part, comme l’a relevé le tribunal de commerce, que Mme. [R] n’a jamais fourni à M. [Y] les pièces comptables nécessaires au soutien de sa demande de prêt par volonté délibérée de dissimuler la réalité de la situation financière de la société.

Par son attitude, Mme. [R] a contribué à l’échec de la transaction et c’est à bon droit que le tribunal de commerce l’a condamnée solidairement avec la société FitsAndGo à la restitution de la somme versée au titre de l’indemnité d’immobilisation.

Le jugement sera confirmé de ce chef sans qu’il n’y ait lieu d’examiner la demande au titre d’une prétendue perte de chance.

Sur la demande de dommages et intérêts :

M. [Y] a subi un préjudice résultant des man’uvres de Mme. [R], en ce qu’il a été contraint de souscrire un prêt personnel pour verser une indemnité d’immobilisation directement entre les mains de Mme. [R], non prévue dans la promesse de vente régularisée entre les parties le 1er mars 2017, et qu’il justifie avoir subi un préjudice au titre du règlement des intérêts et des frais d’assurance à hauteur de 4.538,26 euros qu’il convient d’indemniser.

La cour infirmera le jugement entrepris concernant le quantum des indemnités accordées et, statuant de nouveau, condamnera Mme. [R] à verser à M. [Y] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires :

La cour confirmera le jugement en ce qu’il a condamné Mme. [R] à supporter la charge des dépens et à payer à M. [Y] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Succombant à la présente instance, Mme. [R] sera condamnée à supporter la charge des dépens et à payer à M. [Y] la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs :

La cour,

CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de Meaux en date du 24 mars 2020 sauf en ce qu’il a condamné Mme. [R] à payer à M. [Y] la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

Statuant de nouveau,

Condamne Mme [R] à payer à M. [Y] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [R] à payer à M. [Y] la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [R] à supporter la charge des dépens d’appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

 

 

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