Visite médicale du personnel navigant

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Les dispositions spéciales du code de l’aviation civile

Les dispositions spéciales du code de l’aviation civile et du code des transports prévoyant la compétence du Conseil médical de l’aviation civile (CMAC) pour se prononcer sur le caractère définitif des inaptitudes des personnels navigants titulaires d’un titre aéronautique n’ont pas le même objet que les dispositions d’ordre public du code du travail, de sorte que le médecin du travail doit se prononcer sur l’inaptitude du salarié.

Incapacité de travail du personnel navigant

Un salarié personnel navigant a été placé en incapacité de travail du 12 mai 2012, date de son accident, jusqu’au 12 mai 2015 et ne conteste pas avoir bénéficié des dispositions tout à la fois de l’article L.6256-1 du code du travail et de l’article 2-1 de l’accord collectif concernant le maintien de salaire.

Selon l’article L1226-2 du code du travail dans sa version applicable au litige, lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise.

Accord collectif du Personnel Navigant Commercial

Selon l’accord collectif du Personnel Navigant Commercial 2013, l’inaptitude prononcée par le CMAC rend impossible la poursuite du contrat de travail de navigant à compter de la décision du CMAC indépendamment des dispositions du code du travail concernant l’inaptitude.

Le reclassement au sol est garanti dès lors que le salarié en informe l’entreprise et sous réserve de l’avis du médecin du travail qui se prononce sur son aptitude à occuper un emploi au sol.

Aux termes de son deuxième avis en date du 14 mars 2016, le médecin du travail a déclaré M. [T] [S] inapte au poste de navigant et précisé : ‘L’étude de poste effectué dans l’intervalle n’a pas montré d’évolution significative de la fonction de PNC long courrier depuis octobre 2015. Une possibilité de reclassement sur un poste sol est envisageable avec les caractéristiques suivantes :

1. un travail essentiellement sédentaire, 2. pas de tâche imposant port de charges, ni déplacements, ni postures agenouillées et accroupies, 3. temps de travail réduit dans un premier temps, type mi-temps pour raisons médicales’.

M. [T] [S] a été déclaré inapte aux fonctions de PNC.

Son reclassement sur un poste au sol étant envisageable sous certaines conditions, il incombait dès lors à la SA Air France d’effectuer une recherche immédiate propre à assurer à M. [T] [S] la possibilité de retrouver un emploi conforme aux préconisations du médecin du travail.

Il y a lieu, concernant les circonstances ayant précédé l’avis du médecin du travail du 13 mai 2016, de constater que :

– le 1er septembre 2015, la SA Air France a proposé deux postes temporaires à M. [T] [S] suite à la décision du service de santé le déclarant inapte au sol pour un mois,

– le 4 janvier 2016, soit près d’un mois après la décision du CMAC prononçant l’inaptitude définitive de M. [T] [S] à l’exercice de sa profession de navigant, elle a informé ce dernier de ‘la possibilité de bénéficier soit d’un reclassement au sol au sein de la compagnie, soit d’un reclassement externe’, en application de la réglementation en vigueur,

– le 25 janvier 2016, dans le délai de réponse imparti, l’intéressé lui faisait part de son intérêt pour un reclassement en interne mais ‘sur l’aéroport de [9]’ car habitant [Localité 5], ainsi que de sa situation de travailleur handicapé reconnu le 21 décembre 2015.

– lors d’un entretien en date du 14 mars 2016, M. [T] [S] a de nouveau exprimé son souhait, à savoir être affecté à un poste situé en région lyonnaise et conforme aux conclusions du médecin du travail (connues dès le premier examen du 24 février 2016 et reprises de manière identique dans le second avis).

– il a été offert à M. [T] [S] le 7 avril 2016 une affectation temporaire, au demeurant identique à la précédente, qu’il a refusée dès le 13 avril suivant, en réitérant sa demande d’une proposition définitive de reclassement près de [Localité 6],

– le 25 juillet 2016, l’employeur a proposé un reclassement au sol à [Localité 7], sur un poste d’agent circuit PN à la préparation commerciale Vols ou d’agent circuit PN à la banque PN.

Il en résulte que lorsque le médecin du travail a rendu son avis, l’employeur avait connaissance de l’ensemble des éléments lui permettant de faire aussitôt diligence pour effectuer les recherches permettant le reclassement au sol de M. [T] [S].

Ce n’est que tardivement, les 17 et 20 mai 2016 soit plus de deux mois après le dernier avis du médecin du travail, que la SA Air France justifie avoir entrepris une recherche aux fins de reclassement de M. [T] [S] auprès de la direction générale des ressources humaines et politique sociale, à destination des entités du groupe Transavia, Servait, Hop et Air France Cargo, ainsi que de la direction Entretien avion, maintenance en ligne, escales internationales, la seule à évoquer l’impossibilité d’un reclassement sur ‘le bassin lyonnais’, alors que, depuis le mois de janvier, elle disposait de toutes les informations utiles concernant les difficultés du salarié et ses souhaits quant à la localisation de son poste.

Tentative sérieuse et loyale de recherche de reclassement

Ce retard démontre à lui seul que l’employeur n’a pas procédé à une tentative sérieuse et loyale de recherche de reclassement, étant relevé que le salarié lui a, de plus, expressément rappelé dans sa lettre en date du 25 janvier 2016, ne plus percevoir depuis le 13 mai 2015 de salaire.

Selon les termes de l’article 2.4.2 de l’accord collectif PNC relatif au «Cas du PNC Inapte temporaire au vol» 5, ‘le PNC a la possibilité de refuser l’emploi au sol proposé : il est alors placé en position de congé sans solde’.

Il s’en déduit que la SA Air France était par conséquent tenue de régler son salaire à M. [T] [S] jusqu’au 1er septembre 2015, date à laquelle il a refusé les deux propositions de reclassement formulées à la suite de l’avis du service de santé au travail le déclarant notamment apte avec changement temporaire de poste au sol.

Ces manquements de la SA Air France à son obligation de loyauté dans la mise en oeuvre de recherches en vue du reclassement de M. [T] [S] dans un emploi au sol, ainsi que le prévoit l’accord collectif du PN, et de garantie de paiement du plein salaire de l’intéressé pendant plus de trois mois, présentent un degré de gravité tels qu’ils justifiaient le prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur.

Le jugement est confirmé en ce qu’il a fait remonter la date d’effet de cette résiliation au 21 septembre date du licenciement notifié postérieurement à la saisine du conseil de prud’hommes par le salarié.

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