MOTIFS DE LA DÉCISION:
A titre liminaire, la Cour constate que la disposition du jugement déféré ayant déclaré recevable l’action de la société EPIBATZ recevable ne fait l’objet d’aucune critique et doit dès lors être confirmée.
Il est acquis aux débats que la condition suspensive liée à l’obtention du prêt a été levée le 19 novembre 2019 lorsque le CIC OUEST a fait savoir aux acquéreurs que leur demande de prêt, conforme aux prescriptions de la promesse synallagmatique de vente, était acceptée.
Nullité de la vente pour dol du vendeur et manquement de l’agence immobilière à son devoir d’information:
Pour s’opposer aux demandes du vendeur et de l’agence immobilière, les acquéreurs opposent la nullité de la vente pour dol du vendeur et un manquement de l’agence immobilière à son devoir d’information.
Le vendeur, la société EPIBATZ, avait confié à la société CONSULT TRANSACTION un mandat d’entremise.
Manquement à l’obligation d’information:
En l’espèce, la société CONSULT TRANSACTION a fourni à M. [G] et à Mme [I] un document de présentation du bien à vendre rédigé comme suit : ‘à vendre, fonds de commerce d’un magasin d’alimentation en emplacement exceptionnel en hyper centre d’une commune touristique de la presqu’île Guérandaise.
Il est constant qu’existait à la date de signature de la promesse une concurrence sous la forme d’une petite épicerie d’alimentation située à 100 mètres, mais les acquéreurs en avaient connaissance et l’ont indiqué au cabinet de comptabilité chargé de réaliser leur prévisionnel.
Condamnation et restitution:
En conséquence de ce qui précède, la promesse synallagmatique de vente est nulle.
La société LES FLOTS DE L’OUEST est déboutée de sa demande visant à voir M. [G] et Mme. [I] lui payer la somme de 11.000 euros. Ayant toutefois perçu cette somme en raison de la levée du séquestre ordonnée par le premier juge sous exécution provisoire, elle est condamnée à la restituer aux appelants.
Condamnation des sociétés EPIBATZ et CONSULT TRANSACTION:
Les sociétés EPIBATZ et CONSULT TRANSACTION, qui succombent, sont condamnées in solidum aux dépens de première instance et d’appel et paieront in solidum à M. [G] et à Mme [I] la somme de 8.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
27 février 2024
Cour d’appel de Rennes
RG n° 22/04344
3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N°106
N° RG 22/04344 – N° Portalis DBVL-V-B7G-S5UH
M. [R] [G]
Mme [V] [I]
C/
S.A.S. LES FLOTS DE L’OUEST
S.A.R.L. CONSULT TRANSACTION
Copie exécutoire délivrée
le :
à : Me RAYNAUD
Me GABORIT
Me COUETMEUR
Copie certifiée conforme délivrée
le :
à : TC de SAINT NAZAIRE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 27 FÉVRIER 2024
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Fabienne CLÉMENT, Présidente,
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Frédérique HABARE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 11 Janvier 2024
devant Madame Olivia JEORGER-LE GAC, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 27 Février 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTS :
Monsieur [R] [G]
né le 08 Juin 1974 à [Localité 8]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représenté par Me François RAYNAUD de la SARL FRANÇOIS RAYNAUD AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LORIENT
Madame [V] [I]
née le 15 Mars 1984 à [Localité 9]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me François RAYNAUD de la SARL FRANÇOIS RAYNAUD AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LORIENT
INTIMÉES :
S.A.S. LES FLOTS DE L’OUEST (anciennement dénommée EPIBATZ), immatriculée au RCS de Saint-Nazaire sous le n°513 011 957, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentée par Me Emmanuelle CELIS substituant Me Benoit GABORIT de la SELARL MGA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE
S.A.R.L. CONSULT TRANSACTION (anciennement dénommée CONSULTIM SERVICE),
immatriculée au RCS ST NAZAIRE sous le numéro 510 730 542, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Caroline MATHON substituant Me Jacques-Yves COUETMEUR de la SCP CADORET-TOUSSAINT, DENIS & ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-NAZAIRE
Par l’entremise de la société CONSULTIM SERVICES, désormais dénommée CONSULT TRANSACTION, M. [R] [G] et Mme [V] [I], acquéreurs, ont conclu avec la société EPIBATZ, désormais dénommée LES FLOTS DE L’OUEST, le 27 septembre 2019, une promesse synallagmatique d’achat du fonds de commerce d’une supérette située à [Localité 7], moyennant un prix de 220.000 euros.
La promesse était soumise à la condition suspensive d’obtention d’un prêt bancaire d’un montant de 230.000 euros, d’une durée de sept années, aux taux maximum de 1,2% hors assurance :
– les démarches devant être faites au plus tard dans les quarante cinq jours de la signature de la promesse,
– le prêt devant être obtenu autant que possible pour le 31 janvier 2020,
– l’accord de la banque devant être obtenu le 31 janvier 2020 sous peine de caducité de la promesse
– l’ensemble des démarches et diligences devant être justifié.
Le 14 décembre 2019, le CRÉDIT MUTUEL DE BRETAGNE a donné son accord pour un financement de 206.100 euros.
Une demande a été réalisée auprès de CRÉDIT AGRICOLE, lequel a appris aux acquéreurs que le quartier allait connaître une profonde modification des commerces et que leur dossier ne serait pas finançable.
Le 19 novembre 2019, le CIC OUEST avait donné son accord pour un prêt conforme à la promesse ; informé des modifications du secteur et de l’élaboration d’un nouveau prévisionnel, il a ensuite refusé d’accorder ce prêt.
Le vendeur et l’intermédiaire ont été informés de la situation au mois de février 2020.
Lors de la signature de la promesse, les acquéreurs avaient versé une somme de 11.000 euros séquestrée entre les mains du rédacteur.
Le vendeur, la société LES FLOTS DE L’OUEST, s’est opposée à sa restitution, tandis que les acquéreurs lui ont opposé son dol.
Par acte du 16 novembre 2020, la société LES FLOTS DE L’OUEST a assigné M. [G] et Mme [I] aux fins de les voir condamner à lui payer la somme de 11.000 euros de dommages et intérêts.
La société CONSULT TRANSACTION a elle-même assigné M. [G] et Mme [I] aux fins de les voir condamnés à lui payer la somme de 16.800 euros à titre de dommages et intérêts.
Par jugement du 15 juin 2022, le tribunal de commerce de SAINT-NAZAIRE a :
– dit que l’action engagée par la société EPIBATZ à l’encontre de Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] est recevable et non sujette à forclusion ;
– dit que l’intégralité des conditions suspensives du compromis du 14 novembre 2019 ont bien été levées ;
– condamné Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] à confirmer à Maître [R] [P] leur accord pour débloquer au profit de la société EPIBATZ le dépôt de garantie d’un montant de 11.000 euros, sous astreinte financière d’un montant de 500 euros par jour de retard, qui commencera 15 jours après la signification du présent jugement ;
– débouté la société LES FLOTS DE L’OUEST de sa demande de dommages et intérêts,
-condamné solidairement Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] à payer à la société EPIBATZ la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamner solidairement Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] à payer à la société CONSULT TRANSACTION la somme de 16.800 euros outre intérêt légaux à compter du 4 mai 2020 ;
– Ordonne la capitalisation des intérêts ;
– Condamner solidairement Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] à payer à la société CONSULT TRANSACTION la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Dit qu’il n’y a pas lieu à écarter ou aménager l’exécution de droit du présent jugement ;
– Condamne solidairement Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] aux entiers dépens.
Appelants de ce jugement, M. [G] et Mme [I], par conclusions du 19 décembre 2023, ont demandé à la Cour de :
A TITRE PRINCIPAL :
INFIRMER en tous points le Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de SAINT-NAZAIRE le 8 juillet 2022 ;
DÉBOUTER la société LES FLOTS DE L’OUEST de l’ensemble de ses demandes,
JUGER que la société LES FLOTS DE L’OUEST a intentionnellement dissimulé des informations dont elle savait le caractère déterminant pour Monsieur [G] et Madame [I],
PRONONCER la nullité du protocole de cession de fonds de commerce conclu le 14 novembre 2019 entre la société LES FLOTS DE L’OUEST, Monsieur [G] et Madame [I],
CONDAMNER la société LES FLOTS DE L’OUEST à restituer à Monsieur [G] et Madame [I] la somme de 11.000,00 euros,
SUBSIDIAIREMENT :
INFIRMER en tous points le Jugement rendu par le Tribunal de Commerce de
SAINT-NAZAIRE le 8 juillet 2022 ;
DÉBOUTER la société LES FLOTS DE L’OUEST de l’ensemble de ses demandes,
JUGER que la société LES FLOTS DE L’OUEST a manque a son devoir d’information,
PRONONCER la nullité du protocole de cession de fonds de commerce conclu le 14 novembre 2019 entre la société LES FLOTS DE L’OUEST, Monsieur [G] et Madame [I],
CONDAMNER la société LES FLOTS DE L’OUEST à restituer à Monsieur
[G] et Madame [I] la somme de 11.000,00 euros,
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
JUGER que la société CONSULT TRANSACTION a manqué a son devoir de conseil et d’information en omettant d’informer Monsieur [G] et Madame [I] de la modification imminente des facteurs locaux de commercialités,
DÉBOUTER La société CONSULT TRANSACTION de l’ensemble de ses demandes,
CONDAMNER solidairement La société LES FLOTS DE L’OUEST et La société CONSULT TRANSACTION à payer à Monsieur [G] et Madame [I] une somme de 7.427,85 euros a titre de dommages-intérêts,
CONDAMNER solidairement la société LES FLOTS DE L’OUEST et la société CONSULT TRANSACTION a payer a Monsieur [G] et Madame [I] une somme de 8.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens,
ORDONNER qu’a défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans |’arrêt a intervenir, I’exécution forcée devant être réalisée par l’intermédiaire d’un huissier, le montant des sommes retenues par l’huissier en application du Décret n°2016-230 du 26 février 2016 relatif aux tarifs de certains professionnels du droit et au fonds interprofessionnel de l’accès au droit et a la justice et de l’arrêté du 27 février 2018 fixant Ies tarifs réglementés des huissiers de justice devra être supporté par Ies débiteurs en sus de l’application de I’article 700 du CPC.
Par conclusions du 20 décembre 2023, la société LES FLOTS de l’OUEST anciennement dénommée EPIBATZ a demandé à la Cour de :
CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a :
– DIT que l’action engagée par la société LES FLOTS DE L’OUEST (EPIBATZ) à l’encontre de Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] est recevable et non sujette à forclusion ;
– DIT que l’intégralité des conditions suspensives du compromis de cession du 14 novembre 2019 ont bien été levées ;
– CONDAMNE Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] à confirmer à Maître [R] [P] leur accord pour débloquer au profit de la société LES FLOTS DE L’OUEST (EPIBATZ) le dépôt de garantie d’un montant de 11.000 euros, sous astreinte financière d’un montant de 500 euros par jour de retard, commençant 15 jours après la signification du jugement ;
– DIT n’y avoir pas lieu à écarter l’exécution de droit du jugement ;
Au surplus, statuant à nouveau :
JUGER que les conditions d’application de la clause pénale stipulée compromis de cession du 14 novembre 2019 sont réunies ;
CONDAMNER Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] à verser à la société LES FLOTS DE L’OUEST (EPIBATZ), outre la somme en principal de 11.000 euros (ONZE MILLE EUROS) les intérêts au taux légal sur ladite somme courant à compter de la mise en demeure du 26 février 2020 ;
DÉBOUTER Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
CONDAMNER Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] à payer à la société LES FLOTS DE L’OUEST (EPIBATZ) la somme de 6.000,00 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile;
CONDAMNER Monsieur [R] [G] et Madame [V] [I] à supporter les entiers dépens.
Par conclusions du 09 décembre 2022, la société CONSULT TRANSACTION anciennement dénommée CONSULTIM SERVICE a demandé à la Cour de :
– Confirmer le jugement en date du 15 juin 2022 du tribunal de commerce de SAINT-NAZAIRE en toutes ses dispositions,
En conséquence,
– Condamner solidairement Monsieur [G] [R] et de Madame [I] [V] à verser à la Société CONSULT TRANSACTION la somme de 16 800 euros à titre de dommages et intérêts conformément aux dispositions des articles 1240 et suivants du code civil, outre intérêts au taux légal à compter du 4 mai 2020,
– Ordonner la capitalisation des intérêts échus par année entière en application des dispositions de l’article 1154 du code civil,
– Condamner solidairement Monsieur [G] [R] et de Madame [I] [V] à verser à la Société CONSULT TRANSACTION la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de première instance,
– Condamner solidairement Monsieur [G] [R] et de Madame [I] [V] aux entiers dépens de première instance conformément aux dispositions des articles 696 et suivants du code de procédure civile,
– Débouter Monsieur [G] [R] et de Madame [I] [V] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
– Ordonner qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans le jugement à intervenir, l’exécution forcée devant être réalisée par l’intermédiaire d’un huissier, le montant des sommes retenues par l’huissier en application du Décret n°2016-230 du 26 février 2016 relatif aux tarifs de certains professionnels du droit et au fonds interprofessionnel de l’accès au droit et à la justice et de l’arrêté du 27 février 2018 fixant les tarifs réglementés des huissiers de justice devra être supporté par le débiteur en sus de l’application de l’article 700 du CPC,
– Condamner solidairement Monsieur [G] [R] et de Madame [I] [V] à verser à la Société CONSULT TRANSACTION la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d’appel,
– Condamner solidairement Monsieur [G] [R] et de Madame [I] [V] aux entiers dépens d’appel, conformément aux dispositions des articles 696 et suivants du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION:
A titre liminaire, la Cour constate que la disposition du jugement déféré ayant déclaré recevable l’action de la société EPIBATZ recevable ne fait l’objet d’aucune critique et doit dès lors être confirmée.
Il est acquis aux débats que la condition suspensive liée à l’obtention du prêt a été levée le 19 novembre 2019 lorsque le CIC OUEST a fait savoir aux
acquéreurs que leur demande de prêt, conforme aux prescriptions de la promesse synallagmatique de vente, était acceptée.
Pour s’opposer aux demandes du vendeur et de l’agence immobilière, les acquéreurs opposent la nullité de la vente pour dol du vendeur et un manquement de l’agence immobilière à son devoir d’information.
Le vendeur, la société EPIBATZ, avait confié à la société CONSULT TRANSACTION un mandat d’entremise.
Dès lors, et par application des dispositions des articles 1984 et 1998 du code civil, la société EPIBATZ est tenue par les actes fait par la société CONSULT TRANSACTION en son nom, et plus précisément, s’agissant d’un mandat d’entremise, est tenu par les informations que celle-ci a délivrée en son nom.
En l’espèce, la société CONSULT TRANSACTION a fourni à M. [G] et à Mme [I] un document de présentation du bien à vendre rédigé comme suit :
‘ à vendre, fonds de commerce d’un magasin d’alimentation en emplacement exceptionnel en hyper centre d’une commune touristique de la presqu’île Guérandaise.
Cette supérette, sans concurrence, est au coeur de tous les autres commerces avec stationnement aisé’.
Il est constant qu’existait à la date de signature de la promesse une concurrence sous la forme d’une petite épicerie d’alimentation située à 100 mètres, mais les acquéreurs en avaient connaissance et l’ont indiqué au cabinet de comptabilité chargé de réaliser leur prévisionnel.
Sur ce point, l’examen du premier dossier prévisionnel rédigé par le cabinet SOREGOR démontre que celui-ci prend pour hypothèses de calcul les états comptables précédents de la société EPIBATZ et pour le solde les renseignements que lui fournissent les futurs acquéreurs sur l’état du marché local et la façon dont ils envisagent de travailler.
D’autre part, il est sans incidence que des professionnels du conseil (avocat et expert comptable) soient intervenus aux côtés des acquéreurs pour rédiger la promesse synallagmatique et le dossier prévisionnel, cette circonstance ne pouvant en aucun cas exonérer le débiteur d’un devoir de conseil et d’information de l’exécution de ses propres obligations.
M. [G] et Mme [I], qui étaient domiciliés au moment de la vente sur le Morbihan, font valoir que quelques mois avant la vente, la mairie de [Localité 7], dans le journal d’information municipal du printemps 2019, avait rédigé plusieurs pages sur la revitalisation du commerce du centre bourg, en indiquant notamment:
– avoir réuni les commerçants de BATZ sur MER,
– que se définissait un nouvel axe de chalandise et une nouvelle centralité commerciale ‘trois scénarii de développement ont été proposés par l’étude, dont un a retenu l’attention après échange avec les commerçants. Il vise à mieux identifier le commerce de centre bourg tout en le reliant au nouvel axe de chalandise des rues Pasteur et du Croisic pour définir un nouvelle centralité commerciale’
– qu’allait être réaménagé le quartier de la gare et de ses parkings avec la remise en état d’un bâtiment qui allait être redéployé en cellules commerciales,
Le numéro de l’été 2019 du journal d’informations commerciales faisait état :
– du déplacement de la maison de la presse, d’un emplacement proche de la supérette EPIBATZ, vers le nouvel axe de chalandise,
– de la fermeture de la poste,
– du réaménagement des voies de communication du centre ville ‘conformément aux échanges issus du groupe de travail des commerçants volontaires’.
La commune de BATZ sur MER, dont ne sont pas issus les appelants domiciliés dans le Morbihan, est une petite commune de 4.000 habitants en hiver, qui voit sa population se multiplier en été.
La supérette litigieuse était ouverte toute l’année et traditionnellement, pour ce type de commerce, se pose la question de la rentabilité hivernale, qui doit absolument être compensée par une très forte rentabilité estivale.
Elle était située dans le centre historique de la commune de [Localité 7] et contrairement à ce qu’indiquent les appelants, il n’apparaît pas établie, au regard des plans versés aux débats, que le réaménagement des voies de circulation ou même le départ de la maison de la presse ait pu lui être défavorable, restant située dans un environnement très commerçant, près de l’office du tourisme, près d’une église emblématique de la commune et au sein d’une rue pour laquelle était annoncée par la mairie ‘une mise en valeur’.
En revanche, s’agissant d’une supérette bénéficiant d’un quasi monopole sur la commune de [Localité 7], elle pouvait voir son chiffre d’affaires nettement menacé par l’ouverture d’un commerce de même nature dans une zone du centre ville comportant des parkings permettant de charger immédiatement ses achats en sortant du magasin, les plans versés aux débats démontrant qu’en ce qui la concerne, les parkings sont situés à quelques rues de son emplacement.
Il importe peu que ce risque se soit ou non réalisé de manière effective.
Ce qui est constant en revanche, c’est qu’à la date à laquelle la promesse synallagmatique de vente a été signée, le projet d’ouverture de nouvelles cellules commerciales sur une place munie de parkings était connue des commerçants de [Localité 7] et que le risque en découlant d’installation d’un concurrent avec l’avantage comparatif du parking l’était tout autant.
Cette circonstance devait être portée à la connaissance des futurs acquéreurs en premier lieu par la société CONSULT TRANSACTION.
L’intermédiaire immobilier est tenu d’un devoir d’information contractuel avec celui qui lui confie le mandat d’entremise et délictuel avec celui avec lequel il s’est entremis.
Il a l’obligation de procéder de sa propre initiative à la recherche de tous les éléments susceptibles d’influer sur la qualité et les caractéristiques essentielles du bien pour lesquelles il s’entremet et sa mission consiste à délivrer l’information obtenue à son mandant ainsi qu’ à l’autre partie.
Il ne peut se borner, alors même qu’il demande des honoraires s’élevant à 8% du prix de vente, à prendre quelques photos et à effectuer quelques visites.
En l’espèce, les projets de la municipalité, concomitants avec la promesse de vente, influaient sur les caractéristiques essentielles de la supérette proposée à la vente en ce que celle-ci risquait à court terme de voir s’établir un concurrent avec un avantage comparatif.
Si ce risque est bien entendu toujours présent pour un commerce, les projets décrits plus haut le faisait passer de risque théorique à risque probable, et cette information était de nature à modifier le consentement des acquéreurs potentiels.
Cette information était enfin aisément accessible à un professionnel de l’immobilier aguerri aux recherches sur l’environnement commercial des biens pour lesquels il s’entremet.
La société EPIBATZ ne conteste pas avoir été informée des projets de réorganisation des axes commerciaux et de l’ouverture à court terme de nouvelles cellules commerciales.
Elle était tenue, aux termes de la promesse synallagmatique qu’elle avait signée, du devoir d’information prévu par les dispositions de l’article 1112-1 du code civil, rappelé dans l’acte, aux termes duquel ‘celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son co-contractant’.
M. [G] et Mme [I] ne sont pas habitants de BATZ sur Mer et n’ont pas reçu les bulletins d’information du printemps et de l’été 2019.
Ils n’avaient pas à rechercher dans quelle mesure la commune étant en passe de connaître une réorganisation structurelle de ses axes de commercialité.
Ils pouvaient faire confiance à la société EPIBATZ qui présentait son commerce, par l’entremise de son mandant comme une supérette ‘sans concurrence’, au coeur de ‘tous les autres commerces’.
La réticence dolosive de la société EPIBATZ est établie, l’information retenue étant de nature à influer sur la décision d’achat des appelants et/ou sur le prix qu’ils pouvaient offrir, s’agissant de la rétention d’une information relative à un risque potentiel de voir à court terme se modifier les conditions de rentabilité du fonds de commerce vendu.
En conséquence de ce qui précède, la promesse synallagmatique de vente est nulle.
La société LES FLOTS DE L’OUEST est déboutée de sa demande visant à voir M. [G] et Mme. [I] lui payer la somme de 11.000 euros.
Ayant toutefois perçu cette somme en raison de la levée du séquestre ordonnée par le premier juge sous exécution provisoire, elle est condamnée à la restituer aux appelants.
La société CONSULT TRANSACTION est déboutée de sa demande de dommages et intérêts, la nullité de la promesse synallagmatique de vente conduisant à ne retenir aucune faute à l’encontre des appelants.
Au surplus, les manquements relevés par la Cour à l’exécution de son devoir de conseil conduisent à la condamner à payer aux appelants la somme de 2.500 euros de dommages intérêts réparant les frais exposés inutilement exposés pour créer une société d’exploitation, faire rédiger le protocole de cession et faire rédiger un prévisionnel.
Le solde des demandes n’est pas justifié compte tenu de la date à laquelle les appelants ont été informés du dol, leur permettant de ne pas s’engager dans un bail d’habitation.
Les sociétés EPIBATZ et CONSULT TRANSACTION, qui succombent, sont condamnées in solidum aux dépens de première instance et d’appel et paieront in solidum à M. [G] et à Mme [I] la somme de 8.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Aucun motif ne justifie qu’il soit contrevenu aux dispositions réglementaires du tarif des huissiers de justice et la demande émise à ce titre est rejetée.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Infirme le jugement déféré.
Statuant à nouveau :
Prononce la nullité de la promesse synallagmatique de vente du 14 novembre 2019.
Déboute la société LES FLOTS DE L’OUEST de sa demande visant à voir condamner M. [G] et Mme [I] au paiement de la clause pénale de 11.000 euros insérée à l’acte susvisé et consignée entre les mains de Me [P].
Condamne la société LES FLOTS de l’OUEST à restituer à M. [G] et à Mme [I] la somme de 11.000 euros déconsignée en exécution du jugement déféré.
Déboute la société CONSULT TRANSACTION de sa demande de dommages et intérêts.
Condamne la société CONSULT TRANSACTION à payer à M. [G] et à Mme [I], ensemble, la somme de 2.500 euros de dommages et intérêts.
Rejette le surplus des demandes.
Condamne in solidum la société LES FLOTS de l’OUEST et la société CONSULT TRANSACTION au paiement des dépens de première instance et d’appel.
Condamne in solidum la société LES FLOTS de L’OUEST et la société CONSULT TRANSACTION à payer à M. [G] et Mme [I], ensemble, la somme de 8.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,