Motifs de la décision :
Si le premier juge a retenu que le désistement par la S.A.R.L. MAISON 86 de l’incident a fait suite au changement par les époux [U], suivant conclusions d’incident en réponse notifiées le 9 mai 2022, de leur prétention indemnitaire fondée désormais sur la diminution du prix de la vente de l’immeuble et non plus sur le droit à réparation des désordres dénoncés, les époux [U], dans leur assignation ont fait valoir un préjudice de jouissance à hauteur de 15 000 € et outre préjudice résultant des désordres affectant l’immeuble à hauteur de 8.629,39 €.
Leur intérêt à agir était en cela certain dès lors qu’ils sollicitaient l’indemnisation d’un préjudice personnel de jouissance, par nature non transmissible à l’acquéreur du bien.
L’incident tendant à les voir déclarer irrecevables en leur action était ainsi voué à l’échec.
Contrairement à ce qu’a retenu le premier juge, les époux [U], dont l’action a d’emblée et toujours été recevable au titre de cette demande d’indemnisation du préjudice de jouissance, n’ont pas à supporter les dépens de l’incident dont la SARL MAISON 86 s’est désistée, peu important qu’ils aient modifié en cours d’instance le fondement de leur autre chef de demande afférent au coût de réfection des désordres.
La SARL MAISON 86 devait donc supporter la charge des dépens de l’incident dont elle s’est désistée.
L’équité justifiait en première instance de ne pas allouer d’indemnité de procédure.
Devant la cour :
Devant la cour, la SARL MAISON 86 succombe et supportera les dépens d’appel.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRET N°443
N° RG 23/00655 – N° Portalis DBV5-V-B7H-GYHG
[U]
[U]
C/
S.A.R.L. SARL MAISON 86
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
1ère Chambre Civile
ARRÊT DU 24 OCTOBRE 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/00655 – N° Portalis DBV5-V-B7H-GYHG
Décision déférée à la Cour : ordonnance du 26 janvier 2023 rendue par le Juge de la mise en état de POITIERS.
APPELANTS :
Monsieur [X] [U]
né le 17 Juin 1980 à [Localité 3]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Madame [H] [U]
née le 06 Janvier 1982 à [Localité 5]
[Adresse 4]
[Localité 2]
ayant tous les deux pour avocat Me Urbain ONDONGO, avocat au barreau de POITIERS
INTIMEE :
S.A.R.L. MAISON 86 représentée par la SELARL EKIP en la personne de Me [E] [C], mandataire à sa liquidation judiciaire
[Adresse 6]
[Localité 1]
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 805 et 907 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 18 Septembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Thierry MONGE, Président de Chambre
Monsieur Dominique ORSINI, Conseiller
Monsieur Philippe MAURY, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Mme Elodie TISSERAUD,
ARRÊT :
– Réputé contradictoire
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– Signé par M. Thierry MONGE, Président de Chambre, et par Mme Elodie TISSERAUD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par acte d’huissier en date du 25 octobre 2021, M. et Mme [X] et [H] [U] ont fait assigner la SASU MKT PROMOTION et la S.A.R.L. MAISON 86 devant le tribunal judiciaire de POITIERS aux fins que le tribunal les condamne solidairement à leur payer les sommes suivantes :
– 8.629,39 euros au titre du coût des travaux de réfection de différents désordres dont ils s’étaient plaints à l’issue de la construction de leur maison d’habitation, à titre de dommages et intérêts sur la base d’un rapport d’expertise judiciaire,
– 15.000 euros en réparation des préjudices subis au titre du trouble de jouissance,
– 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dont les frais de l’expertise judiciaire.
Par ses dernières conclusions d’incident, la S.A.R.L. MAISON 86 s’est désistée de sa demande d’incident présentée par laquelle elle opposait le défaut d’intérêt à agir des époux [U] et leur réclamait une indemnité de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle a précisé que son désistement faisait suite au changement de fondement juridique des prétentions des époux [U] qui avaient reconnu ne plus être propriétaires de la maison d’habitation litigieuse et fondaient désormais leurs prétentions indemnitaires sur la diminution du prix de vente de l’immeuble.
La S.A.R.L. MAISON 86 a maintenu sa demande de condamnation des époux [U] au paiement d’une indemnité de 2.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
La SASU MKT Promotion s’est désistée de l’instance en incident qu’elle avait engagé suivant conclusions notifiées le 22 avril 2022.
Par leurs conclusions notifiées par RPVA le 23 juin 2022, les époux [U] ont indiqué accepter le désistement par la SASU MKT de l’instance d’incident
Par ordonnance contradictoire en date du 26/01/2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de POITIERS a statué comme suit :
‘DONNONS ACTE à la S.A.R.L. MAISON 86 et à la SASU MKT PROMOTION de leur désistement de leurs instances d’incident,
CONDAMNONS M. et Mme [X] et [H] [U] à payer à la S.A.R.L. MAISON 86 la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
DISONS que M. et Mme [X] et [H] [U] seront tenus aux dépens de l’instance d’incident, dont distraction au profit de Maître CHAPERON-LECLER par application de l’article 699 du code de procédure civile.
RENVOYONS l’affaire à l’audience virtuelle de mise en état du 23 mars 2023 à 9h30 pour les conclusions au fond de la S.A.R.L. MAISON 86 et de la SASU MKT PROMOTION, qui devront être signifiées au plus tard le 21 mars 2023″.
Le premier juge a notamment retenu que :
– la S.A.R.L. MAISON 86 a contesté, suivant conclusions d’incident notifiées le 4 avril 2022, l’intérêt à agir des époux [U] en réparation des désordres dénoncés compte tenu qu’ils avaient vendu l’immeuble concerné. Le désistement par la S.A.R.L. MAISON 86 de l’incident a fait suite au changement par les époux [U], suivant conclusions d’incident en réponse notifiées le 9 mai 2022, de leur prétention indemnitaire fondée désormais sur la diminution du prix de la vente de l’immeuble et non plus sur le droit à réparation des désordres dénoncés. Dans ces conditions, et la S.A.R.L. MAISON 86 n’ayant provoqué l’incident qu’en raison du fondement juridique évoqué initialement par les époux [U], il n’est pas inéquitable de les condamner à lui payer la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens de l’incident.
LA COUR
Vu l’appel en date du 15/03/2023 interjeté par M. [X] [U] et Mme [H] [U]
Vu l’article 954 du code de procédure civile
Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 24/03/2023, M. [X] [U] et Mme [H] [U] ont présenté les demandes suivantes :
‘DIRE M. et Mme [U] recevables en leur action ;
– INFIRMER l’ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Poitiers du 26 janvier 2023 en ce qu’elle condamné les époux [U] au paiement de la somme de 1500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’incident ;
– LAISSER à la charge de SELARL EKIP prise en la personne de Maître [C] [E] es qualité de mandataire liquidateur de la Société MAISON 86 les dépens de première instance ;
– INSCRIRE au passif de la liquidation judiciaire de la S.A.R.L. MAISON 86 les dépens de première instance et d’appel.
A l’appui de leurs prétentions, M. [X] [U] et Mme [H] [U] soutiennent notamment que :
– suivant contrat de construction avec fourniture du plan signé par les époux [U] avec la S.A.R.L. MAISON 86 le 15 mars 2013, cette société s’est engagée pour la construction de leur maison à usage d’habitation et notamment dans les prestations suivantes : construction hors d’eau, hors d’air, livraison en kit avec notice de montage et fourniture de second ‘uvre.
La S.A.R.L. MAISON 86 a sous-traité la construction de la maison à la SASU MKT PROMOTION.
Il avait été convenu que le maître d’ouvrage effectuerait lui-même les travaux de second ‘uvre et de finition, les travaux de second ‘uvre étant livrés en kit par le constructeur, le tout pour le prix de 108.112 €.
La construction a été réalisée et le prix intégralement payé.
– toutefois, il s’est révélé postérieurement plusieurs désordres et non façons et une mesure d’expertise judiciaire a été ordonnée en référé le 27/09/2017, le rapport étant déposé le 8 mars 2019.
– divers désordres ont été relevés par l’expert
– par exploit introductif d’instance en date du 25 octobre 2021, les époux [U] ont assigné la société MKT PROMOTION et la S.A.R.L. MAISON 86 aux fins de les voir condamnées à leur payer ces sommes.
– par conclusions d’incident du 4 avril 2022, la S.A.R.L. MAISON 86 a soutenu que les époux [U] n’avaient plus d’intérêt à agir en ce qu’ils ont vendu leur maison et que l’action sur le fondement de la responsabilité décennale ou de la responsabilité contractuelle appartient dorénavant aux acquéreurs de la maison.
– les époux [U] ont conclu au rejet de ces demandes et à la condamnation des demandeurs à l’incident à leur payer la somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en ce qu’il est fait échec au principe de la transition de l’action du vendeur à l’acheteur si le vendeur justifie d’un préjudice personnel transmissible.
– les époux [U], dont il n’est pas contesté qu’ils étaient propriétaires de l’immeuble jusqu’à sa vente, dans leur assignation ont fait valoir un préjudice de jouissance à hauteur de 15 000 € et un préjudice résultant des désordres affectant l’immeuble à hauteur de 8.629,39 €.
– il appartient au juge saisi au fond d’apprécier le bien fondé ou non des demandes présentées comme relevant des préjudices personnels des demandeurs.
L’intérêt à agir n’est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l’action.
De même, l’existence du préjudice invoqué par les demandeurs n’est pas une condition de recevabilité de leur action mais de son succès.
– en indiquant que ce serait à la faveur du changement d’un fondement juridique par les époux [U] dans leurs conclusions d’incident en réponse du 9 mai 2022 que la S.A.R.L. MAISON 86 se serait désistée alors même que les concluants ont présenté leurs demandes de réparation des préjudices subis, comprenant un préjudice de jouissance, ce dont il se déduit qu’ils ont un intérêt à agir, le premier juge a privé sa décision de base légale.
– il n’y a pas lieu à condamner M. et Mme [U] au paiement d’une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et la S.A.R.L. EKIP prise en la personne de Maître [C] [E] es qualité de mandataire liquidateur de la Société MAISON 86 devra supporter les dépens de première instance.
La SELARL EKIP prise en la personne de Maître [C] [E] es qualité de mandataire à la liquidation judiciaire de la Société MAISON 86, régulièrement intimée à personne habilitée, n’a pas constitué avocat en cause d’appel.
Il convient de se référer aux écritures de M. et Mme [U] pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.
Vu l’ordonnance de clôture en date du 03/07/2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Si le premier juge a retenu que le désistement par la S.A.R.L. MAISON 86 de l’incident a fait suite au changement par les époux [U], suivant conclusions d’incident en réponse notifiées le 9 mai 2022, de leur prétention indemnitaire fondée désormais sur la diminution du prix de la vente de l’immeuble et non plus sur le droit à réparation des désordres dénoncés, les époux [U], dans leur assignation ont fait valoir un préjudice de jouissance à hauteur de 15 000 € et outre préjudice résultant des désordres affectant l’immeuble à hauteur de 8.629,39 €.
Leur intérêt à agir était en cela certain dès lors qu’ils sollicitaient l’indemnisation d’un préjudice personnel de jouissance, par nature non transmissible à l’acquéreur du bien.
L’incident tendant à les voir déclarer irrecevables en leur action était ainsi voué à l’échec.
Contrairement à ce qu’a retenu le premier juge, les époux [U], dont l’action a d’emblée et toujours été recevable au titre de cette demande d’indemnisation du préjudice de jouissance, n’ont pas à supporter les dépens de l’incident dont la SARL MAISON 86 s’est désistée, peu important qu’ils aient modifié en cours d’instance le fondement de leur autre chef de demande afférent au coût de réfection des désordres.
La SARL MAISON 86 devait donc supporter la charge des dépens de l’incident dont elle s’est désistée.
L’équité justifiait en première instance de ne pas allouer d’indemnité de procédure.
Devant la cour, la SARL MAISON 86 succombe et supportera les dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, et en dernier ressort,
INFIRME l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a :
– condamné M. et Mme [X] et [H] [U] à payer à la S.A.R.L. MAISON 86 la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– dis que M. et Mme [X] et [H] [U] seront tenus aux dépens de l’instance d’incident, dont distraction au profit de Maître CHAPERON-LECLER par application de l’article 699 du code de procédure civile.
Statuant à nouveau de ces chefs,
DIT que la société MAISON 86, représentée par la SELARL EKIP prise en la personne de Maître [C] [E] es qualité de mandataire à sa liquidation judiciaire conservera la charge de ses frais irrépétibles relatifs à la procédure d’incident dont elle s’est désistée.
LAISSE les dépens de première instance à la charge de la société MAISON 86, représentée parla SELARL EKIP prise en la personne de Maître [C] [E] es qualité de mandataire liquidateur de la Société MAISON 86
Y ajoutant,
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires.
CONDAMNE la société MAISON 86, représentée parla SELARL EKIP prise en la personne de Maître [C] [E] es qualité de mandataire à sa liquidation judiciaire aux dépens d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,