Sur le manquement à l’obligation d’information et de conseil
M. [N] et Mme [G] affirment que les sociétés intimées ont manqué à leurs obligations d’information et de conseil en ne leur proposant pas des garanties adaptées à leurs besoins. Malgré des avenants signés, ils estiment que leur préjudice matériel est fondé et réclament une indemnisation complète de leur préjudice mobilier.
La cour constate cependant que les appelants ont été informés de la couverture souscrite et ont modifié les garanties à deux reprises. Ils ne démontrent pas de manquement de la part des sociétés intimées à leur devoir de conseil et d’information.
Sur l’exécution de ses obligations par la société Generali
M. [N] et Mme [G] contestent le montant de l’indemnisation reçue de la part de la société Generali, réclamant un montant supérieur. Ils mettent en avant des frais de mise en sécurité et des travaux immobiliers non pris en compte dans l’indemnisation.
La cour constate que les demandes complémentaires des appelants ne sont pas justifiées et rejette leurs demandes d’indemnisation supplémentaire. La décision attaquée est confirmée de ce chef.
Sur les dommages et intérêts au titre de leur préjudice moral et de la résistance abusive
M. [N] et Mme [G] réclament des dommages et intérêts pour préjudice moral et dénoncent une résistance abusive de la part de la compagnie d’assurance. Ils estiment que leur préjudice moral est fondé et que la compagnie a agi de mauvaise foi.
La cour conclut qu’il n’est pas établi de faute de la part des sociétés intimées et rejette les demandes des appelants. La décision attaquée est confirmée de ce chef.
Sur les demandes annexes
En application de l’article 700 du code de procédure civile, M. [N] et Mme [G] sont condamnés à payer aux sociétés Generali Iard et Burdigala Assurances Patrimoine un montant de 3.000 € au titre des frais de procédure en appel. Ils supporteront également la charge des dépens.
La décision de première instance est confirmée dans son ensemble.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
1ère CHAMBRE CIVILE
————————–
ARRÊT DU : 6 NOVEMBRE 2023
N° RG 21/01295 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-L7DL
[E] [N]
[D] [G]
c/
S.A. GENERALI IARD
S.A.R.L. BURDIGALA ASSURANCES PATRIMOINE
[M] [B]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 10 février 2021 par le Tribunal Judiciaire de BORDEAUX (chambre : 6, RG : 17/07172) suivant déclaration d’appel du 03 mars 2021
APPELANTS :
[E] [N]
né le 22 Février 1979 à [Localité 6] (33)
de nationalité Française
demeurant [Adresse 3]
[D] [G]
née le 19 décembre 1975 à [Localité 5] (33)
de nationalité Française
demeurant [Adresse 3]
représentés par Maître Fabrice DELAVOYE de la SELARL DGD AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉES :
S.A. GENERALI IARD, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 2]
représentée par Maître Jean-Jacques BERTIN, avocat au barreau de BORDEAUX
S.A.R.L. BURDIGALA ASSURANCES PATRIMOINE, prise en la personne de son liquidateur amiable, M. [M] [B], domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 4]
INTERVENANT FORCE :
[M] [B], es qualités de liquidateur de la société BURDIGALA ASSURANCES PATRIMOINE, domicilié en cette qualité [Adresse 1]
représentés par Maître Nathalie PLANET de la SELARL NATHALIE PLANET AVOCATS, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistés de Maître Jennifer KNAFOU de la SELARL KL2A – KNAFOU & LOUPPE AVOCATS ASSOCIÉS, avocat plaidant au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 septembre 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Emmanuel BREARD, Conseiller, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Mme Paule POIREL
Conseiller : Mme Bérengère VALLEE
Conseiller : M. Emmanuel BREARD
Greffier : Mme Véronique SAIGE
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCEDURE
M.[E] [N] et Mme [D] [G] sont propriétaires de leur résidence principale située à [Localité 5]. Le 23 avril 2012, ils ont souscrit un contrat d’assurance ‘multirisque domicile D2″ auprès de la SA Generali Iard par l’intermédiaire de la SARL Burdigala Assurances Patrimoine. Le dit contrat prévoit que l’habitation est équipée de moyens de protection et de prévention. Il prévoit également une base, concernant le mobilier, de 60 000 euros avec un maximum 20 % pour les objets de valeur, soit 12 000 euros pour la garantie ‘vol-vandalisme’. Le montant de la cotisation annuelle était de 812,76 euros hors frais et taxes.
Par un premier avenant prenant effet le 27 juillet 2012, une clause complémentaire ‘tous risques bijoux, fourrures et objets divers’ a été souscrite. Elle précise également une garantie en tous lieux pour deux vélos électriques. Le montant annuel de la cotisation s’élevait à 1 695,96 euros hors frais et taxes. Le plafond de garantie pour le mobilier reste inchangé.
Par un second avenant prenant effet le 29 août 2013, un contrat d’assurance ‘multirisque domicile D3″ a été conclu. Il prévoit une base pour le mobilier de 60 985 euros avec un maximum 20 % pour les objets de valeur, soit 12 197 euros pour la garantie ‘vol-vandalisme’. Le montant de la cotisation annuelle était de 874,26 euros hors frais et taxes.
Le 20 décembre 2016, M. [N] a porté plainte pour des faits de vol par effraction commis dans sa résidence durant le week-end du 17 et 18 décembre 2016. De nombreux biens de valeurs lui ont été dérobés.
Par courrier du 26 décembre 2016, M. [N] a évalué la valeur de l’ensemble des biens dérobés à 250 000 euros. La société Burdigala Assurances Patrimoine lui a indiqué que sa garantie est plafonnée à hauteur de 60 000 euros avec une limitation à hauteur de 12 000 euros pour les objets de valeur.
Le 3 mai 2017, une provision de 6 000 euros a été versée par la société Generali Iard.
Dans son rapport du 19 juillet 2017, le cabinet Polyexpert, désigné par la société Generali Iard, a évalué le montant des dommages à hauteur de 128 196 euros et le montant de l’indemnité à la somme arrondie de 43 627 euros dont 5 221 euros au titre de l’indemnité différée, après application des limitations contractuelles.
Par acte d’huissier des 17 et 21 juillet 2017, M. [N] et Mme [G] ont fait assigner la société Burdigala Assurances Patrimoine et la société Generali Iard devant le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins de les voir condamner in solidum à leur verser des dommages et intérêts en réparation de leur préjudice matériel.
Par jugement du 10 février 2021, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :
– débouté la société Generali Iard de ses demandes au titre de la déchéance du droit à garantie de M. [N] et Mme [G] ;
– débouté M. [N] et Mme [G] de leurs demandes au titre du manquement au devoir d’information et de conseil formé à l’encontre de la société Burdigala Assurances Patrimoine et de la société Generali Iard ;
– condamné la société Generali Iard à payer à M. [N] et Mme [G] les sommes de 38 405 euros en règlement immédiat et de 5 221 euros en règlement différé sur présentation de facture, dont il conviendra de déduire la provision de 6 000 euros déjà versée ;
– dit que les sommes dues porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision avec capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l’article 1343-2 du code civil ;
– débouté M. [N] et Mme [G] de leur demande au titre du préjudice moral ;
– condamné la société Generali à payer à M. [N] et Mme [G] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouté la société Burdigala Assurances Patrimoine de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la société Generali Iard aux entiers dépens.
M. [N] et Mme [G] ont relevé appel de ce jugement par déclaration du 3 mars 2021 et par conclusions déposées le 29 août 2023, ils demandent à la cour de :
– confirmer le jugement rendu le 10 février 2021 par le tribunal judiciaire de Bordeaux en ce qu’il a débouté la société Generali Iard de ses demandes au titre de la déchéance du droit à garantie de M. [N] et Mme [G] ;
– infirmer le jugement rendu le 10 février 2021 par le tribunal judiciaire de Bordeaux en ce qu’il a débouté M. [N] et Mme [G] de leurs demandes au titre du manquement au devoir d’information et de conseil à l’encontre de la société Burdigala Assurances Patrimoine et la société Generali Iard et de leurs demandes indemnitaires afférentes,
EN CONSÉQUENCE ET STATUANT À NOUVEAU,
A titre principal,
– juger que les sociétés Generali Iard et Burdigala Assurances Patrimoine ainsi que M. [B] es qualités de liquidateur amiable de la société Burdigala ont manqué à leurs obligations d’information et de conseil au préjudice de M. [N] et Mme [G] ;
– juger que la responsabilité civile contractuelle de la société Generali Iard est engagée à l’égard M. [N] et Mme [G] ;
– juger que la responsabilité civile délictuelle de la société Burdigala Assurances Patrimoine ainsi que M. [B] es qualité de liquidateur amiable de la société Burdigala est engagée à l’égard M. [N] et Mme [G] ;
– condamner in solidum les sociétés Generali Iard et Burdigala Assurances Patrimoine ainsi que M. [B] es qualité de liquidateur amiable de la société Burdigala à verser à M. [N] et Mme [G] la somme de 295 519,53 euros TTC à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices qu’ils ont subis ;
– débouter la société Generali Iard de toutes ses demandes, fins et prétentions :
– débouter la société Burdigala Assurances Patrimoine ainsi que M. [B] es qualité de liquidateur amiable de la société Burdigala de toutes ses demandes, fins et prétentions ;
A titre subsidiaire,
– juger que les fautes des défenderesses ont fait perdre à M. [N] et Mme [G] une chance soit de solliciter l’extension des garanties de leur contrat, soit de souscrire une assurance couvrant le risque de vol/vandalisme à concurrence de la valeur effective de leur patrimoine mobilier ;
– condamner in solidum les sociétés Generali Iard et Burdigala Assurances Patrimoine ainsi que M. [B] es qualité de liquidateur amiable de la société Burdigala à régler à M. [N] et Mme [G] la somme de 280 743,55 euros TTC à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice matériel (soit 95 % de la somme de 295 519,53 euros) ;
A titre infiniment subsidiaire :
– juger que la société Generali n’a pas exécuté son obligation d’indemnisation du sinistre subi par M. [N] et Mme [G] ;
– condamner la société Generali à régler M. [N] et Mme [G] une somme de 60 000 euros au titre de la garantie « vol » outre 34 232,16 euros au titre de la garantie « vandalisme/détériorations immobilières » ;
En tout état de cause,
– condamner in solidum les sociétés Generali Iard et Burdigala Assurances Patrimoine ainsi que M. [B] es qualités de liquidateur amiable de la société Burdigala à régler M. [N] et Mme [G] la somme de 5 000 euros pour résistance abusive et au titre de leur préjudice moral ;
– condamner in solidum les sociétés Generali Iard et Burdigala Assurances Patrimoine ainsi que M. [B] es qualités de liquidateur amiable de la société Burdigala à régler à M. [N] et Mme [G] la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Fabrice De La Voie, par application de l’article 699 du code de procédure civile.
– juger que les condamnations prononcées produiront intérêts au taux légal à compter de la date mise en demeure du 15 mars 2017 ;
– juger que ces intérêts porteront eux-mêmes intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;
– condamner les sociétés Generali Iard et Burdigala Assurances Patrimoine ainsi que M. [B] es qualités de liquidateur amiable de la société Burdigala, à rembourser aux requérants, sur justificatif, les frais de recouvrement de l’huissier qui pourrait être appelé à exécuter toute décision concourant à son indemnisation, dans la limite des sommes versées à cet huissier au titre du droit de recouvrement ;
Par assignation en intervention forcée du 5 avril 2022, M. [N] et Mme [G] ont attrait M. [M] [B], es qualité de liquidateur de la société Burdigala Assurances Patrimoine.
Par conclusions déposées le 29 août 2023, la société Burdigala Assurances Patrimoine et M. [B] es qualité de liquidateur de la présente société demande à la Cour de :
– confirmer le jugement rendu le 10 février 2021 par le tribunal judiciaire de Bordeaux en ce qu’il a débouté M. [N] et Mme [G] et toutes parties de toutes demandes, fins et conclusions tournées à l’encontre de la société Burdigala Assurances Patrimoine ;
En conséquence :
– juger que si la société Generali Iard est bien fondée à opposer une déchéance de garantie à M. [N] et Mme [G] alors les reproches formulés à l’encontre de la société Burdigala Assurances Patrimoine quant aux montants garantis sont sans objet
– juger que la société Burdigala Assurances Patrimoine n’a pas manqué à son devoir d’information et de conseil ;
– juger que M. [N] et Mme [G] ne justifient pas d’un préjudice indemnisable ;
– juger que le préjudice résultant d’un manquement au devoir d’information et de conseil ne peut consister qu’en une perte d’une chance et ne peut correspondre qu’à une fraction du préjudice subi ;
En conséquence,
– débouter M. [N] et Mme [G] de toutes demandes, fins et conclusions contre la société Burdigala Assurances Patrimoine et M. [B] es qualité de liquidateur amiable de la société Burdigala ;
– condamner M. [N] et Mme [G] ou tout succombant à payer à la société Burdigala Assurances Patrimoine et M. [B] es qualité de liquidateur amiable de la société Burdigala une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner les mêmes aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Nathalie Planet.
Par conclusions déposées le 19 août 2021, la société Generali Iard demande à la Cour de :
– confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 10 février 2021 par le tribunal judiciaire de Bordeaux ;
Au besoin et statuant à nouveau
– juger que le préjudice résultant d’un manquement au devoir de conseil et d’information ne peut constituer qu’en une perte de chance, inexistante ;
– débouter M. [N] et Mme [G] du surplus de leurs demandes, fins et conclusions, excédant les sommes allouées par le jugement du 10 février 2021 ;
En toute hypothèse
– condamner M. [N] et Mme [G] à verser à la société Generali Iard la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance d’appel, dont distraction au profit de Me Jean Jacques Bertin sur le fondement de l’article 699 du code de procédure civile.
L’affaire a été fixée à l’audience rapporteur du 18 septembre 2023.
L’instruction a été clôturée par ordonnance du 4 septembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION.
I Sur le manquement à l’obligation d’information et de conseil.
M. [N] et Mme [G] affirment que les sociétés intimées ont toutes les deux manqué à leurs obligations précontractuelles et contractuelles d’information et de conseil, sur le fondement des articles 1382, devenu 1240, et 1147 devenu 1231-1 du code civil.
Ils estiment que l’assureur et son représentant devaient leur faire souscrire un contrat adapté à leurs situations et besoins, après s’être renseigné sur leurs besoins, et les aviser des risques auxquels ils s’exposent. Ils précisent qu’il appartient aux mêmes de vérifier si les garanties souscrites sont suffisantes et éventuellement d’inviter le client à en souscrire d’autres en complément.
Ils estiment qu’à défaut les professionnels commettent une faute qui les oblige à réparer le préjudice en lien avec celle-ci.
C’est ainsi que suite au sinistre survenu le week-end des 17 et 18 décembre 2016, ils considèrent que la société Burdigala Assurances Patrimoine n’a pas proposé de garanties adaptées à leurs besoins, alors qu’ils ont sollicité à plusieurs reprises une meilleure couverture, ce que démontre la signature de deux avenants.
Ils avancent que la police d’assurance conclue contre le vol ne tient pas compte de leur état de fortune, ni de leur volonté d’être couverts contre ce risque à hauteur de la valeur déclarée.
Ils reprochent aux premiers juges ont commis une erreur d’appréciation en ne procédant pas à une analyse complète des pièces et en ne tenant pas compte des nouvelles garanties et options souscrites lors des avenants précités.
Ainsi, ils mettent en avant leur mail en date du 20 avril 2012 listant et estimant leurs divers biens meubles à la somme de 351.265 € en vu, disent-ils, de leur assurance et en réponse à leur intermédiaire d’assurance. Ils observent que ce cadre, le contrat conclu le 28 juin suivant prévoyait une garantie mobilier pour un montant de 60.000 € et une extension de valeur à neuf à 3 ans / 25% et que 20% d’objets de valeur, soit 12.000 €, était compris dans la garantie ‘vol-vandalisme’.
Ils expliquent que cette garantie ne leur convenant pas, il a été signé deux avenants les 27 juillet 2012 pour une extension ‘tout risques bijoux, fourrures et objets divers’ augmentant les cotisations annuelles de 812,76 € à 1.595,96 €, et 29 août 2013 pour une extension valeur à neuf intégrale.
Ils disent qu’ils pouvaient croire à une garantie sur l’intégralité de leur patrimoine en cas de sinistre, étant assurés d’une indemnisation pour une valeur à neuf d’un bien sinistré, quelle que soit son ancienneté.
Ils précisent que M. [O], gérant de la société intermédiaire, était leur ami et les avaient rassurés quant à ces avenants et qu’ils lui avaient fait d’autant plus confiance. Ils soulignent que l’intéressé avait également connaissance de l’importance de leur patrimoine mobilier et qu’il n’a pas été répondu à leurs besoins.
Ils arguent ne pas être des professionnels de l’assurance, faute que la qualité de dirigeant de société de M. [N] ne lui assure une compétence en cette matière, et avoir déclaré la consistance de leur patrimoine, évalué à un montant de 351.265 €.
Ils affirment que malgré leur inventaire du 21 avril 2012, ils n’ont pas été garantis. De même, malgré leur demande en ce sens du 20 avril 2012, dénonçant soit la négligence de leurs adversaires, soit le fait qu’elles leur ont fait souscrire des contrats avec limitations importantes, pour éviter d’avoir à payer des indemnités conséquentes en cas de sinistre, mais en percevant des primes élevées, les protections prises n’étaient pas suffisantes et ils n’en n’ont pas été avisés.
Ils versent en outre aux débats un procès-verbal de constat d’huissier du 28 mars 2017 établissant que la valeur de leur mobilier restait supérieure à celle évoquée dans les plafonds de l’assurance objet du présent litige.
Ils en déduisent que leur préjudice matériel est fondé et qu’il ne saurait leur être opposé de clause limitative de responsabilité, ce d’autant qu’ils ont justifié de l’ensemble des objets qui leur ont été dérobés et des dégradations subies.
A titre subsidiaire, ils se prévalent d’une perte de chance soit d’exiger les plafonds de garantie contractuels faire l’objet d’une majoration, soit de souscrire un autre contrat leur permettant d’être intégralement couverts.
Cela résulte notamment de leur mail précité du 20 avril 2012, des avenants successifs, ce qui leur permet d’évaluer leur perte à 95% de bénéficier d’une couverture complète, donc d’être totalement indemnisés de leur préjudice mobilier suite au sinistre des 17 et 18 décembre 2016.
***
La cour constate, comme l’a exactement fait la décision attaquée, que M. [N] et Mme [G] ont été informés de la portée de la couverture souscrite, celle-ci ayant fait l’objet de deux avenants signé par leurs soins.
Ainsi, ils ne peuvent pas soutenir qu’ils ne connaissaient pas le contenu des garanties, ayant négociées spécifiquement celles-ci à deux reprises et en modifiant à ces occasions les clauses relatives aux objets de valeur. En particulier, lors du premier avenant, ils ont été en capacité d’assurer deux vélos électriques en plus et une cave à vin lors de la dernière modification du 29 août 2013.
Sans avoir besoin d’un éclairage particulier, les intéressés pouvaient se référer aux montants prévus au contrat s’agissant des montants garantis, dont ils ne contestent pas avoir pris connaissance. Ainsi, il n’apparaît pas qu’ils aient eu l’intention d’augmenter la valeur de leur mobilier à la somme de 350.000 €, souhaitant en revanche y inclure des objets précisés comme mentionné auparavant.
Ainsi, la ‘base mobilier’ dans le contrat ne pouvait couvrir qu’une partie des meubles contenus dans l’habitation des appelants, lesquels ne pouvaient qu’avoir conscience de cette couverture à la lecture de la police d’assurance.
De surcroît, quand bien même M. [N] a fait référence dans son mail du 20 avril 2012 à patrimoine mobilier d’une valeur d’environ 350.000 € à assurer, il n’est pas établi par cette
seule pièce l’intention de souscrire au titre de la garantie vol- dégradation un risque pour ce montant (pièce 2 des appelants).
Aucun élément contractuel ne va en ce sens et l’information contenue dans le contrat est suffisamment explicite pour être comprise par tout profane et il n’est pas établi que l’assureur ou l’intermédiaire d’assurance ait donné le moindre conseil contraire à ce titre.
Il importe peu que M. [O] ait eu connaissance du contenu mobilier de la maison de M. [N] et Mme [G], faute qu’il soit rapporté la preuve de leur volonté de souscrire une assurance pour un montant supérieur à ce titre.
M. [N] et Mme [G] ne démontrent pas de manquement de la part des sociétés intimées à leur devoir de conseil et d’information et seront donc déboutés de leurs demandes à ce titre.
La décision attaquée sera par conséquent confirmée de ce chef.
II Sur l’exécution de ses obligations par la société Generali.
M. [N] et Mme [G] mettent en avant que la société Generali n’a pas respecté son obligation de paiement. Ils contestent que celle-ci les ait indemnisés de leurs dommages, notamment en réduisant l’indemnité de détériorations mobilières à la somme de 673 €, une indemnisation entière étant due à ce titre.
Or, ils rappellent avoir justifié auprès de l’intermédiaire d’assurance de frais de mise en sécurité de leur habitation pour un montant de 8.207,16 €, mais n’avoir perçu un acompte que d’une somme de 6.000 €, sans que son affectation ne soit précisée.
Ils insistent sur le fait que le jugement attaqué a condamné leur assureur à leur régler la somme de 38.405 € en règlement immédiat et d’un montant de 5.221 € au titre d’un règlement différé.
Ils réclament néanmoins un montant de 60.000 € correspondant à la limite d’indemnisation de la police d’assurance, d’autant qu’ils soutiennent que leur préjudice réel est supérieur.
S’agissant des préjudices immobiliers, outre les frais de sécurité précités, ils mettent en avant des travaux pour leur entrée et leur cave s’élevant à des montants respectifs de 13.970 € et 12.054 €, donc que les détériorations immobilières se chiffrent à une somme de 34.231 €.
Ils disent encore que les constats d’huissiers effectués à leurs demandes recensent des biens volés dans leur maison pour une valeur supérieure à 12.000 €, plafond de la garantie retenue.
Ils précisent que la valeur à neuf des objets dérobés est encore supérieure.
Ils remettent en cause la liste à laquelle fait référence la société Generali, celle-ci n’étant pas celle établie avec le concours du cabinet d’expert amiable, mais une autre remise en avril 2012 comprenant des objets disponibles à la vente.
***
L’article 1134 du code civil applicable énonce que ‘Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.
Elles doivent être exécutées de bonne foi’.
Il apparaît néanmoins que le devis de réparation de sols et du mur mitoyen fourni par les appelants émanant de la Sasu Firinci en date du 9 janvier 2017 pose difficulté en ce qu’il fait référence à des réparations de carrelage dont il n’est pas établi qu’il soit en lien direct avec le sinistre. De même, s’agissant d’une évaluation forfaitaire, celle-ci n’expose pas en quoi consiste les travaux, ni le détail des détériorations concernées.
Aussi, cette pièce ne saurait fonder les demandes faites au titre des dégradations subies.
En ce qui concerne les détériorations mobilières, il est remarqué qu’aucune pièce complémentaire n’est versée en dehors des indemnisations déjà retenues. Aussi, aucun montant supplémentaire ne saurait être accordé à ce titre.
Sur le vol de mobilier, ainsi que l’ont exactement retenu les premiers juges, dont la motivation sera adoptée par la cour, il sera observé que les objets de valeur et les vins et alcool ont en tout état de cause été indemnisés selon les plafonds de garantie. S’agissant des biens mobiliers retenus à hauteur de 15.000 €, quand bien même une partie serait différée dans l’attente de facture, en l’absence de justificatifs supplémentaires de préjudice relevant de cette catégorie, les demandes supérieures à ce montant faites par les appelants seront rejetées.
Dès lors, les demandes complémentaires faites à ce titre seront rejetées et la décision attaquée confirmée de ce chef.
III Sur les dommages et intérêts au titre de leur préjudice moral et de la résistance abusive sollicités par M. [N] et Mme [G].
M. [N] et Mme [G] considèrent ce préjudice fondé en ce qu’ils disent que M. [P], qui était gérant de la société Burdigala, était leur ami et que les biens dérobés, en particulier certaines montres gravées, avaient une valeur sentimentale importante.
Ils arguent également d’une résistance abusive de la part de la compagnie d’assurance en ce que l’argumentaire adverse est dénué de fondement et établit la mauvaise foi de cette partie.
Ils insistent en particulier sur les éléments recueillis par l’expert amiable qui n’ont pas été pris en compte par la société Generali, montrant un différentiel important entre la garantie effectivement souscrite et la perte évaluée, établissant le préjudice moral sollicité.
De plus, ils estiment la perte de chance établie, l’absence de positionnement le montant de la cotisation et à son importance comme la preuve du manquement au devoir de conseil et d’information adverse.
***
Selon l’article 1240 du code civil, ‘tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer’.
Il est de principe qu’en application de ce texte, la résistance à une action en justice peut constituer un abus de droit dans le cas d’intention de nuire, mauvaise foi ou d’erreur grossière équipollente à un dol.
Néanmoins, il ressort des éléments précédemment retenus par la cour qu’il n’est rapporté la preuve d’aucune faute de la part des sociétés intimées.
Il s’ensuit que non seulement il n’est établi aucun préjudice moral en lien avec les faits dénoncés, mais en outre qu’il n’existe pas de résistance abusive.
Par conséquent, les demandes faites par M. [N] et Mme [G] de ce chef seront également rejetées et la décision attaquée confirmée.
IV Sur les demandes annexes.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
En l’espèce, l’équité commande que M. [N] et Mme [G] soient condamnés in solidum à régler aux sociétés Generali Iard et Burdigala Assurances Patrimoine, ensemble, un montant de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la présente procédure en appel.
Aux termes de l’article 696 alinéa premier du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. Sur ce fondement, M. [N] et Mme [G], qui succombent au principal, supporteront in solidum la charge des dépens, dont distraction au profit de Me Planet et de Me Bertin, avocats, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS.
La cour,
CONFIRME la décision rendue par le tribunal judiciaire de Bordeaux le 10 février 2021 ;
Y ajoutant,
CONDAMNE in solidum M. [N] et Mme [G] à régler aux sociétés Generali Iard et Burdigala Assurances Patrimoine, ensemble, la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’instance d’appel ;
CONDAMNE in solidum M. [N] et Mme [G] aux entiers dépens de la présente instance, dont distraction au profit de Me Planet et de Me Bertin.
Le présent arrêt a été signé par Madame Paule POIREL, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,