Acquisition de la clause résolutoire et délais de paiement

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Acquisition de la clause résolutoire et résiliation du bail

Selon l’article 834 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé des mesures en cas d’urgence. Dans cette affaire, la juridiction des référés n’a pas eu besoin de caractériser l’urgence pour constater l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de droit d’un bail, conformément à l’article L.145-41 du code de commerce.

Demandes de provision et de délais de paiement

En vertu de l’article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Dans ce cas, la créance de 33 403,78 euros au titre de l’arriéré locatif a été jugée non contestable, et la société preneuse a été condamnée par provision.

L’article 1343-5 du code civil

L’article 1343-5 du code civil permet au juge de reporter ou échelonner le paiement des sommes dues en fonction de la situation du débiteur et des besoins du créancier. Dans cette affaire, des délais de paiement ont été accordés à la défenderesse en raison de ses difficultés temporaires et de sa situation financière justifiée.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 23/57393 N° Portalis 352J-W-B7H-C22F4
N° : 12-AF
Assignation du :
03 octobre 2023
[1]
[1] 2 copies exécutoires
délivrées le :
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ rendue le 15 décembre 2023
par Cristina APETROAIE, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assistée de Clémence BREUIL, Greffier. DEMANDERESSE
La S.C.I. [Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Maître Dominique DEMEYERE, avocat au barreau de PARIS – #E1291
DEFENDERESSE
La S.A.S.U. JESSICA MONGE
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Maître Dov GHNASSIA de la SELEURL DOV GHNASSIA AVOCATS, avocats au barreau de PARIS – #G0431
CRÉANCIER INSCRIT
La CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DE [Localité 5] ET D’ILE DE FRANCE
[Adresse 2]
[Localité 4]
DÉBATS
A l’audience du 27 octobre 2023, tenue publiquement, présidée par Cristina APETROAIE, Juge, assistée de Arnaud FUZAT, Greffier, Nous, Président, après avoir entendu les parties représentées par leur conseil, avons rendu la décision suivante :

EXPOSE DU LITIGE

Aux termes d’un acte sous signature privée du 15 février 2006, la SCI [Adresse 1] a donné à bail à la SARL POKES COIFFURE, aux droits de laquelle vient la SAS JESSICA MONGE, des locaux à usage commercial dépendant d’un immeuble situé [Adresse 1]), moyennant le paiement d’un loyer annuel en principal de 24 000 euros hors charges hors taxes.

Faisant valoir le défaut de paiement de loyers, le bailleur a délivré à la SAS JESSICA MONGE par acte extrajudiciaire du 21 février 2023, un commandement de payer visant la clause résolutoire portant sur la somme de 15 469,73 euros au titre des loyers échus au 4e trimestre 2023, outre 1 546,97 euros au titre de la clause pénale et 196,59 euros au titre du coût du commandement.

Se prévalant de la clause résolutoire stipulée au contrat de bail et de la non régularisation des causes du commandement de payer, SCI [Adresse 1] a, par exploit délivré le 2 octobre 2023, fait citer la SAS JESSICA MONGE devant le président du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé, aux fins de :
« – recevoir la SCI [Adresse 1] en son action et l’y déclarer bien fondée,
– constater que les démarches amiables envers la SASU JESSICA MONGE ont été vaines et notamment les relances et nombreuses mises en demeure ainsi que le commandement de payer visant la clause résolutoire,
– constater l’acquisition de la cause résolutoire stipulée au bail du 15 février 2006 à la date du 22 mars 2023,
– juger le bail commercial du 15 février 2006 comme étant résilié à cette date,
-en conséquence,
– juger la SASU JESSICA MONGE comme étant sans droit ni titre à occuper le local situé au [Adresse 1],
– condamner par provision la SASU JESSICA MONGE au paiement de la somme de 25 253,39 euros représentant le montant des arriérés de loyer impayés à la date du 5 juillet 2023, avec intérêts au taux légal,
– condamner par provision la SASU JESSICA MONGE au paiement d’une indemnité journalière d’occupation de 109,61 euros à compter de la date du 22 mars 2023 et ce, jusqu’à la libération effective des lieux, nonobstant le règlement de la provision de charges trimestrielles de 285 euros,
– condamner par provision la SASU JESSICA MONGE au paiement de l’indemnité prévue par le contrat de bail de 1 546,97 euros correspondant à l’indemnité de 10 % selon la clause pénale du contrat de bail,
– juger que la somme de 18 101,21 euros versée au titre du dépôt de garantie sera acquise au bailleur conformément aux dispositions du contrat de bail,
– ordonner l’expulsion de la SASU JESSICA MONGE, ainsi que celle de tous occupants de son chef du local sis au [Adresse 1], sans délai et ce, avec l’assistance d’un serrurier et de la force publique s’il y a lieu,
– ordonner le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux dans un garde-meuble ou dans tout autre lieu au choix de la demanderesse, mais aux frais et risques et périls de la SASU JESSICA MONGE et ce, en garantie de toute somme qui pourrait être due, selon les dispositions des articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,
– ordonner la capitalisation des intérêts,
En tout état de cause,
– condamner la SASU JESSICA MONGE à verser à la SCI [Adresse 1] le montant de 4 000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, lesquels comprendront le coût du commandement de payer du 21 février 2023 pour un montant de 196,59 euros,
– ordonner que l’exécution provisoire de la décision, conformément au contrat de bail commercial du 15 février 2006, aura lieu au seul vu de la minute ».

Aux termes des conclusions développées oralement à l’audience du 27 octobre 2023, la demanderesse réitère les demandes formulées au terme de son acte introductif d’instance, actualisant sa demande de provision à la somme de 33 403,78 euros arrêtée au 17 octobre 2023. Elle confirme avoir reçu à la barre un chèque d’un montant de 4 000 euros et indique s’opposer à l’octroi de délais de paiement formulées en défense.

Par conclusions déposées et développées oralement, la SAS JESSICA MONGE ne conteste pas le principe et le montant de la provision réclamée par le bailleur au titre de l’arriéré locatif. Elle sollicite la suspension de la clause résolutoire, l’octroi de 24 mois de délais et dépose à la barre un chèque d’un montant de 4 000 euros.

Conformément aux dispositions de l’article 446-1 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens, il est renvoyé à l’acte introductif d’instance ainsi qu’aux notes d’audience, aux conclusions et à la note en délibéré susvisées.

Sur l’acquisition de la clause résolutoire

Aux termes de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

La juridiction des référés n’est toutefois pas tenue de caractériser l’urgence, au sens de l’article 834 du code de procédure civile, pour constater l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de droit d’un bail.

L’article L.145-41 du code de commerce dispose que « toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai ».

En l’espèce, le contrat de bail stipule une clause résolutoire pour défaut de paiement des sommes résultant de l’exécution du contrat de bail, un mois après la délivrance d’un commandement resté infructueux.
Le défendeur constitué n’oppose aucune contestation à la validité du commandement et il résulte du décompte actualisé, qui n’est pas davantage contesté, que les causes du commandement de payer n’ont pas été régularisées dans le délai d’un mois, de sorte que le contrat de bail s’est trouvé résilié de plein droit par l’effet de l’acquisition de la clause résolutoire.

Sur les demandes de provision et de délais de paiement

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

Il résulte du décompte actualisé, arrêté au 17 octobre 2023, que la créance n’apparaît pas sérieusement contestable à hauteur de la somme de 33 403,78 euros au principal au titre de l’arriéré locatif échu à cette date, troisième trimestre 2023 inclus, non contestée par la SAS JESSICA MONGE, au paiement de laquelle la société preneuse sera condamnée par provision.

L’article 1343-5 du code civil dispose que « Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues ».

Compte tenu des éléments versés aux débats, des difficultés temporaires rencontrées dans la gestion et l’exploitation du fonds de commerce, des efforts constants de paiement et de la situation financière de l’entreprise, dont il est justifié, il y a lieu d’accorder à la défenderesse les délais de paiement sollicités, selon les modalités ci-après exposés dans le dispositif.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des référés, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

Renvoyons les parties à se pourvoir au fond ainsi qu’elles en aviseront, mais dès à présent par provision, tous les moyens des parties étant réservés ;

Constatons que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire sont réunies ;

Condamnons la SAS JESSICA MONGE à verser à la SCI [Adresse 1] la somme de 33 403,78 euros à titre de provision à valoir sur la dette locative échue au 17 octobre 2023, troisième trimestre 2023 inclus ;

L’autorisons à se libérer de cette somme en 23 mensualités égales et consécutives d’un montant de 1 225,16 euros chacune et une dernière d’un montant égal à celui du solde restant dû, le premier versement devant être effectué au plus tard le 15ème jour du mois suivant la signification de la présente ordonnance à défaut d’exécution volontaire de cette ordonnance, sauf meilleur accord des parties ;

Suspendons pendant cette période, les effets de la clause résolutoire qui sera réputée n’avoir jamais été acquise en cas de respect des modalités de paiement ;

Disons qu’à défaut de paiement d’une seule mensualité (loyer ou arriéré) à son échéance et dans son intégralité, le solde restant dû deviendra immédiatement exigible et ce, 30 jours après l’envoi à la société locataire d’une mise en demeure de payer restée sans effet, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ;

Constatons en ce cas la résiliation de plein droit du bail consenti sur des locaux situés [Adresse 1]) ;

Autorisons en ce cas l’expulsion de la SAS JESSICA MONGE et celle de tous occupants de son chef des lieux précités, et disons qu’à défaut de départ volontaire, la partie défenderesse pourra être contrainte à l’expulsion avec, si besoin est, l’assistance de la force publique ;

Rappelons en ce cas que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d’exécution ;

Condamnons en ce cas SAS JESSICA MONGE à payer à la SCI [Adresse 1] une indemnité d’occupation mensuelle, à titre provisionnel, égale au montant du loyer contractuel augmenté des charges et taxes, jusqu’à la libération effective des lieux et la remise des clés ;

Disons n’y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons la SAS JESSICA MONGE au paiement des dépens ;

Rappelons que la présente ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.

Fait à Paris le 15 décembre 2023.

Le Greffier,Le Président,

Clémence BREUILCristina APETROAIE

 

 

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