COUR D’APPEL
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
ARRET N°
DU : 26 Avril 2023
N° RG 22/01931 – N° Portalis DBVU-V-B7G-F4ON
FK
Arrêt rendu le vingt six Avril deux mille vingt trois
Sur APPEL d’une ORDONNANCE DE REFERE rendue le 20 septembre 2022 par le Président du tribunal de commerce de CLERMONT-FERRAND (RG n° 2022/002087)
COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré :
Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre
Madame Virginie DUFAYET, Conseiller
M. François KHEITMI, Magistrat Honoraire
En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé
ENTRE :
La société D.A.G. IMPORT
SAS à associé unique immatriculée au RCS de Lyon sous le n° 399 005 446
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentants : Me Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
(postulant) et la SCP POTEJOIE & ASSOCIES, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND (plaidant)
APPELANTE
ET :
La société MON BENTO
SAS à associé unique immatriculée au RCS de Clermont-Ferrand sous le n° 511 239 444 00066
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentants : Me Sébastien RAHON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND (postulant) et la SELAS CABINET ESTRAMON, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND (plaidant)
INTIMÉE
DEBATS : A l’audience publique du 15 Février 2023 Monsieur [U] a fait le rapport oral de l’affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l’article 785 du CPC. La Cour a mis l’affaire en délibéré au 26 Avril 2023.
ARRET :
Prononcé publiquement le 26 Avril 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé du litige
Exposé du litige :
La SAS Mon Bento, ayant son siège à [Localité 2], vend divers objets relatifs à la cuisine et à la restauration, parmi lesquels des boîtes à repas dénommées MB Original.
Elle confie la distribution de ces articles à différentes entreprises, entre autres depuis l’année 2016 à la SASU DAG Import, dont le siège est situé à [Localité 5] (Rhône).
En juin 2016, la SASU DAG Import a fait enregistrer la marque « Good Jour », pour désigner des boîtes à repas qu’elle commercialise pour son propre compte.
La SAS Mon Bento, estimant que ces boîtes à repas vendues par la SASU DAG Import sous sa propre marque constituaient une copie servile de celles qu’elle vend sous sa marque MB Original, a fait dresser des constats d’huissier, puis a fait assigner le 8 décembre 2021 la SASU DAG Import devant le président du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand, en demandant à titre principal qu’il soit mis fin à ce qu’elle considérait comme un trouble manifestement illicite.
Le président du tribunal de commerce, par une ordonnance du 22 décembre 2021, a partiellement fait droit aux demandes de la SAS Mon Bento, en faisant interdiction à la SASU DAG Import de poursuivre la commercialisation, la vente et la publicité de sa boîte à repas « Good Jour », à peine d’une astreinte de 2 000 euros par jour de retard et par infraction constatée, dans la limite de trente jours à compter du surlendemain de la signification de l’ordonnance. Le juge des référés s’est en outre réservé la liquidation de l’astreinte. Sur l’appel formé par la SASU DAG Import, la cour d’appel de Riom a confirmé cette ordonnance, suivant arrêt du 23 mars 2022.
Le 6 mai 2022, la SAS Mon Bento a fait de nouveau assigner la SASU DAG Import devant le juge des référés, pour demander en principal que l’astreinte soit liquidée à la somme de 1 048 000 euros, et qu’elle soit reconduite au montant de 2 000 euros par jour de retard et par infraction constatée, pour une période de soixante jours.
La SAS Mon Bento a fait valoir, au soutien de ces demandes, que malgré l’ordonnance du 22 décembre 2021, la SASU DAG Import a continué de diffuser des publicités pour sa boîte à repas « Good Jour », ainsi qu’il résultait notamment de nouveaux constats d’huissier qu’elle avait fait établir, et qui révélaient que le 28 mars 2022, onze sites internet étaient encore actifs.
La SASU DAG Import a contesté ces demandes, en exposant que les constats produits par la SAS Mon Bento ne démontrent pas qu’elle ait commis d’infraction chacun des jours de la période indiquée par la société adverse ; qu’elle a mis fin à la commercialisation de la boîte à repas litigieuse dès le jour du prononcé de l’ordonnance du 22 décembre 2021, comme elle l’a fait constater par un huissier qui a examiné son catalogue 2022, et qu’elle n’administre pas elle-même les sites en ligne, de sorte qu’elle n’était pas en mesure d’agir sur le contenu de ces sites pour les faire modifier. Cette société affirmait avoir réalisé toutes les diligences possibles pour se conformer à l’interdiction qui lui était faite, et reprochait à la société adverse de tenter d’obtenir un enrichissement indu.
Le juge des référés, suivant une ordonnance du 20 septembre 2022, a liquidé l’astreinte à la somme de 238 000 euros, condamné la SASU DAG Import à payer cette somme à la SAS Mon Bento, condamné la SASU DAG Import aux dépens et au paiement d’une somme de 6 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, et rejeté le surplus des demandes.
Le juge a rappelé, dans les motifs de l’ordonnance, les dispositions de l’article L. 131-4 du code des procédures civiles d’exécution, selon lequel le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée, et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter. Il a énoncé que l’astreinte avait commencé de courir le 25 décembre 2021 surlendemain de la signification de la première ordonnance, et ce jusqu’au terme de la période de trente jours, le 23 janvier 2022 ; que la SASU DAG Import justifiait certes avoir mis fin à la commercialisation de la boîte à repas litigieuse dès le 25 décembre 2021, et qu’elle avait demandé à ses correspondants de cesser de vendre les boîtes à repas qu’ils détenaient, mais que la SAS Mon Bento rapportait la preuve que ces boîtes ont continué d’être vendues par d’autres sociétés au-delà de cette date, en magasin ou sur site internet, et que la SASU DAG Import ne pouvait soutenir qu’elle était totalement étrangère à ces sociétés. Le juge a encore énoncé que l’astreinte devait être fixée sur la base des seules infractions dûment constatées, et non pas pour l’ensemble des jours écoulés entre deux constats d’infraction ; que, sur la base des infractions constatées, l’astreinte devait être fixée à la somme de 238 000 euros.
La SASU DAG Import, suivant déclaration reçue au greffe de la cour le 3 octobre 2022, a interjeté appel de cette ordonnance.
La société appelante demande à la cour de réformer l’ordonnance et de débouter la SAS Mon Bento de ses demandes, notamment de liquidation de l’astreinte. Elle critique l’ordonnance déférée, au motif que le premier juge a mal interprété l’arrêt du 22 mars 2022, qui a rejeté une demande de la SAS Mon Bento de lui faire retirer de la vente les boîtes figurant sur les sites internet, ou se trouvant en magasin, et qui d’autre part lui a fait interdiction de commercialiser non pas tous les produits de la marque Good Jour, mais seulement les boîtes à repas désignées par cette marque. La SASU DAG Import affirme qu’elle a pris toutes les mesures possibles et nécessaires pour se conformer à la décision initiale, ainsi qu’elle l’a fait constater par un huissier, et qu’elle n’a pas le pouvoir de « déréférencer » les produits de la marque Good Jour sur certains sites en ligne ; elle ajoute qu’elle n’avait pas l’interdiction de faire de la publicité sur les réseaux sociaux, et elle critique en outre le montant auquel l’astreinte a été liquidée, montant qui ne se fonde sur aucun calcul explicite. Elle reproche de nouveau à la société intimée de rechercher, sous couvert de l’astreinte, un enrichissement indu. Elle demande la condamnation de cette société à lui verser 20 000 euros de dommages et intérêts.
La SAS Mon Bento forme appel incident, et demande à la cour de porter l’astreinte liquidée à la somme de 1 100 000 euros, ainsi que d’ordonner la reconduction de l’astreinte courante pour une nouvelle période de soixante jours.
Elle relève que la SASU DAG Import n’a pas exécuté l’ordonnance déférée, et a organisé son insolvabilité. Elle soutient que cette société s’est volontairement soustraite à ses obligations, comme l’a relevé le premier juge, qui n’a pas dénaturé les termes de l’ordonnance initiale et de l’arrêt confirmatif, interdisant sans équivoque à la SASU DAG Import de poursuivre la commercialisation et la publicité pour les articles en cause sur ses catalogues, sur des supports papier ou des sites en ligne. Elle souligne enfin que seule la preuve d’une cause étrangère pourrait justifier la suppression de l’astreinte.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 14 février 2023.
Il est renvoyé, pour l’exposé complet des demandes et observations des parties, à leurs dernières conclusions déposées au greffe le 8 et le 13 février 2023.
Motivation
Dispositif
PAR CES MOTIFS :
Statuant après en avoir délibéré, publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, mis à disposition des parties au greffe de la cour ;
Infirme l’ordonnance déférée, en ce qu’elle a liquidé l’astreinte à la somme de 238 000 euros, et condamné la SASU DAG Import à payer cette somme à la SAS Mon Bento ;
Statuant à nouveau de ces chefs,
Liquide l’astreinte à la somme de 102 000 euros, et condamne la SASU DAG Import à payer cette somme à la SAS Mon Bento ;
Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses autres dispositions ;
Rejette les autres demandes ;
Laisse à chacune des parties la charge des frais et dépens qu’elle a exposés en cause d’appel.
Le greffier, La présidente,