ASB/LD
ARRET N°
N° RG 20/01664
N° Portalis DBV5-V-B7E-GBUM
[U]
C/
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA VENDEE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
Chambre Sociale
ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 juillet 2020 rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de LA ROCHE-SUR-YON
APPELANTE :
Madame [F] [U]
née le 04 juin 1961 à [Localité 4] (85)
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Ayant pour avocat postulant Me Jérôme CLERC, substitué par Me Amélie GUILLOT, tous deux de la SELARL LEXAVOUE POITIERS-ORLEANS, avocats au barreau de POITIERS
Représenté par Me Gilles DEVERS, avocat plaidant au barreau de LYON, substitué par Me Anne ROBERT avocat au barreau de LYON
INTIMÉE :
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA VENDEE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Mme [X] [S], munie d’un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile, les parties ou leurs conseils ne s’y étant pas opposés, l’affaire a été débattue le 10 mai 2022, en audience publique, devant :
Madame Anne-Sophie DE BRIER, Conseiller qui a présenté son rapport
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente
Madame Anne-Sophie DE BRIER, Conseiller
Monsieur Jean-Michel AUGUSTIN, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lionel DUCASSE
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, que l’arrêt serait rendu le 21 juillet 2022. A cette date le délibéré a été prorogé à la date de ce jour.
– Signé par Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente, et par Monsieur Lionel DUCASSE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé du litige
FAITS ET PROCÉDURE :
Fin 2015 et jusqu’en 2016, Mme [F] [U], infirmière libérale conventionnée exerçant son activité à [Localité 3], a fait l’objet d’un contrôle de son activité par la caisse primaire d’assurance maladie de la Vendée, visant les actes et soins remboursés par la caisse entre le 1er décembre 2012 et le 31 mars 2016.
Par lettre du 2 août 2016, la caisse a informé Mme [U] des anomalies de facturation qu’elle avait relevées.
Mme [U] a été reçue en entretien par la caisse le 5 octobre 2016.
Par lettre du 14 octobre 2016, la caisse lui a notifié les griefs retenus :
– actes facturés mais non réalisés (faits qualifiés de fraude) : 32.487,49 euros ;
– non respect de la NGAP en matière de facturation (faits qualifiés de faute) : 21.486,96 euros ;
et l’a informée de son droit de formuler des observations et de demander à être de nouveau entendue, dans le délai d’un mois.
Le même jour, Mme [U] a adressé à la caisse des informations complémentaires.
Par lettre du 4 novembre 2016, reçue le 12 novembre 2016, la caisse a notifié à Mme [U] un indu de 53.974,45 euros, l’a informée du délai de deux mois dont elle disposait pour procéder au paiement de cette somme, présenter des observations ou contester la notification, et l’a informée de la mise en oeuvre d’une procédure aux fins de pénalité financière pour faute et pour fraude.
Par lettre du 8 décembre 2016, la directrice de la caisse lui a notifié :
– une pénalité financière pour faute, d’un montant de 10.565,92 euros,
– une pénalité financière pour fraude, d’un montant de 20.000 euros.
Mme [U] a contesté l’indu en saisissant la commission de recours amiable, qui dans sa séance du 21 décembre 2017 a rejeté son recours. Cette décision lui a été notifiée par lettre du 4 janvier 2018.
Le 26 février 2018, Mme [U] a alors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de La Roche-sur-Yon, devenu pôle social du tribunal de grande instance puis du tribunal judiciaire.
Le 20 décembre 2018, Mme [U] a saisi ce même tribunal d’une contestation des pénalités financières.
Par jugement du 10 juillet 2020, le tribunal judiciaire de La Roche-sur-Yon, pôle social, a :
– débouté Mme [U] de ses demandes,
– condamné Mme [U] à payer à la caisse les sommes suivantes, portant intérêt au taux légal à compter de la notification du jugement :
* 53.578,27 euros au titre de l’indu notifié le 4 novembre 2016,
* 30.565,92 euros au titre des pénalités financières,
– condamné Mme [U] à verser à la caisse la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné Mme [U] aux dépens,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision.
Par déclaration du 6 août 2020, Mme [U] a relevé appel de cette décision en visant chaque disposition.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Soutenant oralement à l’audience ses conclusions, Mme [U] demande à la cour de :
– annuler la décision de la commission de recours amiable datée du 21 décembre 2017,
– « débouter la CPAM de toute demande financière à l’encontre de Mme [F] [U] tendant à l’annulation d’un indu de 53.974,45 euros notifié le 4 novembre 2016 »,
– dire qu’en l’absence d’indu, aucune pénalité financière n’est due,
– condamner la caisse à lui verser la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Mme [U] admet cinq anomalies de prescription relatives à des majorations de nuit qui n’étaient pas prescrites, pour la somme globale de 396,18 euros.
Elle se prévaut du fait que la caisse a procédé à un contrôle administratif, et non médical, pour reprocher à la caisse et aux premiers juges de s’être livrés à des analyses médicales.
Elle expose que la « Démarche de Soins Infirmiers » est une prescription infirmière, dont ni le service administratif de la caisse ni des juridictions judiciaires ne peuvent remettre en cause le contenu ; qu’une DSI ne s’analyse pas acte par acte, mais globalement.
Elle considère que les déclarations faites par les patients ne sont qu’un indice très mince de la réalité des soins pratiqués.
S’agissant des pénalités, elle soutient que dans la mesure où la créance principale n’est pas arrêtée, la directrice de la caisse est dans l’impossibilité de fixer une pénalité. Elle fait valoir que sa contestation est globale.
S’agissant en particulier de la pénalité pour « activités fautives », Mme [U] se prévaut de l’article 9 du code de procédure civile et de l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme pour soutenir que, dans la mesure où la CPAM prend l’initiative de remettre en cause ses droits patrimoniaux, c’est à cette dernière qu’il appartient de prouver le bien fondé de la décision rendue. Elle estime que les griefs doivent être suffisamment précis pour lui permettre de se défendre utilement. Elle reproche à la caisse de ne pas identifier le fondement juridique et les griefs, et indique qu’elle-même est dans l’incapacité de le faire au regard de la longue liste des qualifications juridiques visées à l’article R. 147-8 du code de la sécurité sociale. Elle estime que la mention « activité fautive » n’a aucun sens car elle concerne la clinique. Elle en déduit qu’elle est dans l’incapacité de se défendre sur le fond de ses droits, et que le juge est dans l’incapacité d’exercer le contrôle de proportionnalité qui relève de sa mission.
Elle se prévaut de moyens de défense sensiblement similaires concernant la pénalité prononcée en application des articles R. 147-11 et R. 147-11-1 du code de la sécurité sociale, qui selon la caisse sanctionne des « activités frauduleuses ». Elle ajoute que les seuls documents produits, à savoir des tableaux établis par la caisse, ne sont pas des preuves.
Soutenant oralement à l’audience ses conclusions, la caisse demande à la cour de confirmer le jugement, de déclarer irrecevable la contestation de la pénalité financière et de condamner Mme [U] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La caisse fait valoir qu’elle se doit de fournir l’ensemble des éléments en cause afin de justifier sa décision, et qu’il est juridiquement et moralement inconcevable qu’un professionnel de santé puisse s’abriter derrière le secret médical pour couvrir une éventuelle fraude à l’assurance maladie.
Elle soutient n’avoir procédé qu’à un contrôle administratif, et non médical, de l’activité de Mme [U], et fait remarquer que le contrôle de facturation n’est pas soumis à un formalisme strict. Elle indique n’avoir pas remis en cause les Démarches de Soins Infirmiers établies par Mme [U], mais avoir seulement remis en cause leur facturation au regard des actes réellement réalisés.
Elle soutient que les procès-verbaux dressés par les agents chargés du contrôle font foi jusqu’à preuve du contraire.
S’agissant de la pénalité financière, la caisse soutient que le recours de Mme [U] était tardif.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées et oralement reprises à l’audience.
Motivation
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement rendu le 10 juillet 2020 par le tribunal judiciaire, pôle social, de La Roche-sur-Yon, sauf en ce qu’il a condamné Mme [F] [U] à payer à la caisse la somme de 53.578,27 euros au titre de l’indu notifié le 4 novembre 2016,
Statuant à nouveau de ce chef,
Condamne Mme [F] [U] à payer à la caisse primaire d’assurance maladie de la Vendée la somme de 53.974,45 euros au titre de l’indu,
Et y ajoutant,
Condamne Mme [U] à payer à la caisse la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en plus de la somme allouée au titre de la procédure de première instance,
Condamne Mme [U] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,