Contrat de location de site internet : décision du 29 février 2024 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/08710

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N° RG 21/08710 – N° Portalis DBVX-V-B7F-N7K6

Décision du Tribunal de Commerce de Saint etienne

du 05 novembre 2021

RG : 2020J615

S.A.R.L. LE GOUTILLON

C/

S.A.S. LOCAM

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

6ème Chambre

ARRET DU 29 Février 2024

APPELANTE :

LA SOCIETE LE GOUTILLON

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me John CURIOZ, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

assisté de Me Julien AMOYAL, avocat au barreau de SENLIS

INTIMEE :

LA SOCIETE LOCAM – LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 04 Avril 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 23 Janvier 2024

Date de mise à disposition : 29 Février 2024

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

– Joëlle DOAT, présidente

– Evelyne ALLAIS, conseillère

– Stéphanie ROBIN, conseillère

assistées pendant les débats de Cécile NONIN, greffière

A l’audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Joëlle DOAT, présidente, et par Cécile NONIN, greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Faits, procédure et demandes des parties

La société Le Goutillon, dont le gérant est M. [S] [V], exerçant une activité de restauration à [Localité 4], a signé le 3 septembre 2019 un contrat de licence d’exploitation de site internet avec la société Incomm, prévoyant le versement de 48 loyers mensuels de 186 euros hors taxes, soit 223,20 euros toutes taxes comprises, outre des frais d’adhésion et de mise en ligne d’un montant de 1 291,20 euros toutes taxes comprises.

Les frais d’adhésion ont été réglés le 13 septembre 2019.

Le 29 octobre 2019, la société Le Goutillon a signé un procès verbal de livraison et de conformité du site internet.

La société Incomm a cédé le contrat à la société Location automobiles matériels (ci-après nommée Locam), en application de l’article 12.02 des conditions générales du contrat.

La société Locam a réglé la facture de vente à la société Incomm.

Le 4 novembre 2019, la société Locam a adressé à la société Le Goutillon une facture unique de loyers.

Plusieurs loyers sont demeurés impayés.

Par lettre recommandée du 7 mai 2020 avec accusé de réception, la société Locam a mis en demeure la société Le Goutillon de régler l’arriéré, dans un délai de huit jours et l’a informée qu’à défaut la déchéance du terme serait prononcée.

Par acte d’huissier de justice du 10 septembre 2020, la société Locam a fait assigner la société Le Goutillon devant le tribunal de commerce de Saint Etienne aux fins de la voir condamner au paiement :

– de la somme de 11 293,92 euros outre les intérêts légaux à compter de la mise en demeure,

– de la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– des dépens

La société Le Goutillon a demandé au tribunal de commerce :

– à titre principal

– de constater que la société Locam est venue aux droits de la société Incomm,

– de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de fourniture du site internet aux torts de la société Locam,

– débouter la société Locam de toutes ses demandes,

– à titre subsidiaire

– de minorer la clause pénale à 0 euro,

– d’accorder des délais de paiement d’une durée de 24 mois à la société Le Goutillon,

– à titre reconventionnel

– de condamner la société Locam à lui payer la somme de 1 291,20 euros au titre des sommes payées sans contrepartie,

– de condamner la société Locam à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,

– de condamner la société Locam à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner la société Locam aux entiers dépens.

Par jugement du 5 novembre 2021, le tribunal de commerce de Saint Etienne a

– condamné la société le Goutillon à verser à la société Locam la somme de 11 293,92 euros incluant la clause pénale, avec intérêts au taux légal et autres accessoires de droit à compter de la mise en demeure du 7 mai 2020,

– débouté la société Le Goutillon de toutes ses demandes,

– condamné la société Le Goutillon à verser à la société Locam la somme de 250 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit que les dépens dont frais de greffe taxés et liquidés à 74,32 euros seront payés par la société Le Goutillon à la société Locam,

Exposé du litige

– débouté la société Locam du surplus de ses demandes,

– dit que la présente décision est exécutoire de droit par provision.

Par déclaration du 8 décembre 2021, la société le Goutillon a interjeté appel de ce jugement.

Par dernières conclusions notifiées par voie dématérialisée le 16 novembre 2022, elle demande à la cour :

– d’infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Saint Etienne le 5 novembre 2021 sauf en ce qu’il a rejeté le surplus des demandes de la société Locam

et statuant a nouveau :

à titre principal :

– de débouter la société Locam de toutes ses demandes,

– de dire et juger que la société locam est partie au contrat de location de site internet en date du 17 septembre 2019 en qualité de cessionnaire du contrat,

– de prononcer la résolution judiciaire du contrat de fourniture de site internet aux torts de la société Locam en raison de l’absence de livraison du site internet de la société le Goutillon,

en conséquence de la résolution du contrat,

– de condamner la société Locam à lui payer la somme de 1 291,20 euros au titre de la mise en ligne du site internet outre 446,40 euros au titre du loyer de novembre et décembre 2019 soit un total de 1 737,60 euros,

– de condamner la société Locam à lui payer la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts au titre de la perte de chance de générer du chiffre d’affaires faute de livraison du site internet,

à titre subsidiaire,

– de minorer la clause pénale prévue au contrat de fourniture de site internet à 0 euro,

– de débouter la société Locam de sa demande de paiement des loyers échus et à échoir,

en tout état de cause

– de condamner la société Locam à payer à la société Le Goutillon, la somme de 10 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– de condamner la société Locam aux entiers dépens.

A l’appui de ses prétentions, elle fait valoir que :

– la société Locam n’intervient pas seulement au titre du financement du site internet, mais en qualité de cessionnaire du contrat de licence d’exploitation du site internet, site internet qui n’a jamais été mis en oeuvre,

– la qualité de cessionnaire lui confère celle de partie au contrat, de sorte que les fautes du cédant lui sont opposables,

– l’absence de mise en cause de la société Incomm dans le cadre de la présente procédure est sans incidence, la société Locam ayant la qualité de cessionnaire et aucune demande n’étant formulée à l’égard de la société Incomm, qui du fait de la cession n’est plus partie au contrat,

– le site internet n’a jamais été livré, M. [I] signataire du procès verbal de livraison en attestant, indiquant qu’il est réclamé à M. [V] une somme astronomique alors que le site n’a jamais été mis en ligne sur la toile, la société Locam n’apportant aucun élément démontrant le contraire,

– aucune proposition de site n’a été effectuée et l’absence de livraison du site constitue un manquement contractuel suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat,

– le procès verbal de livraison a été obtenu dans le cadre d’une technique du commercial visant à faire signer le commerçant, sans lui laisser le temps de lire les documents, M. [V] ne se souvenant pas même avoir signé un tel document.

Ce dernier ne fait en outre pas référence à une description du site. Aucun résultat n’est obtenu sur internet avec la référence ‘le goutillon.net’, aucun cahier des charges n’existe et le nom du domaine visé dans le procès verbal de réception n’est pas celui du contrat de licence du site internet.

Ces éléments ôtent toute force probante à ce procès verbal de livraison.

– le contrat de licence de site internet doit donc être résolu et les parties remises en l’état où elles se trouvaient avant celui-ci,

– subisidiairement, si la résolution judiciaire n’était pas prononcée, les sommes réclamées ne sont pas dues, la société Locam n’ayant pas vérifié l’exécution du contrat de licence d’exploitation,

– la demande de dommages et intérêts est fondée sur la perte de chance d’augmenter son chiffre d’affaires grâce au site internet et sur l’action abusive de la société Locam.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 2 mai 2022, la société Locam demande à la cour de :

– débouter la société Le Goutillon de toutes ses demandes,

– confirmer le jugement entrepris,

– condamner la société Le Goutillon à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

– la condamner aux dépens d’appel.

Elle soutient que :

– les dispositions invoquées pour faire échec à l’absence de la société Incomm dans la cause ne sont pas applicables, ayant trait à la vente et non au louage,

– la preuve d’un manquement à ses obligations contractuelles n’est pas rapportée,

– aucune réclamation concernant le site n’a été formée auprès du fournisseur ou de la société Locam,

– l’absence d’établissement d’un cahier des charges n’incombe pas à la société Locam, le contrat de licence ne lui ayant été cédé qu’après la réception du site,

– le contrat de licence d’exploitation prévoit expressément que la cession ne décharge pas la société Incomm de ses obligations de maintenance et d’assistance technique.

Il s’en déduit que la société Locam n’intervient que dans le cadre d’un financement et qu’elle n’a pas à répondre d’un manquement contractuel du fournisseur dans l’exécution de ses propres obligations,

– elle n’a pas à restituer de sommes qu’elle n’a pas reçues,

– la modération de la clause pénale n’est pas justifiée, la preuve du caractère excessif de son montant n’étant pas rapportée et cette indemnité correspondant à la réparation du préjudice qu’elle subit.

Il convient de se référer aux conclusions précitées pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 4 avril 2023.

Motivation

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant dans les limites de l’appel,

Confirme le jugement déféré sauf, en ce qu’il a débouté la société le Goutillon de sa demande de résolution judiciaire du contrat de fourniture de site internet aux torts de la société Locam, et a condamné la société Le Goutillon à payer à la société Locam la somme de 11 293,92 euros incluant la clause pénale, avec intérêts au taux légal et autres accessoires de droit à compter de la mise en demeure du 7 mai 2020,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Déclare irrecevable la demande de résolution judiciaire du contrat de fourniture de site internet aux torts de la société Locam,

Condamne la société Le Goutillon à payer à la société Locam la somme de 10 367,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 mai 2020, date de la mise en demeure,

Y ajoutant

Condamne la société Le Goutillon aux dépens d’appel,

Déboute la société Le Goutillon et la société Locam de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

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