COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 39H
12e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 19 MAI 2022
N° RG 20/01695 – N° Portalis DBV3-V-B7E-T2BK
AFFAIRE :
S.A.S. [L] BTP SERVICES
C/
S.A.S. AE&D – ARTS ENGINEERING AND DESIGNER
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 24 Décembre 2019 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° Chambre : 5
N° RG : 2018F01149
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Cécile ROBERT
Me Madeleine DE VAUGELAS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX NEUF MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A.S. [L] BTP SERVICES
venant aux droits de la société [L] AIRPORT
Inscrite au RCS d’Evry sous le n° 391 222 874
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Cécile ROBERT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 569
Représentant : Me Nicolas FONTAINE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1575
APPELANTE
****************
S.A.S. AE&D – ARTS ENGINEERING AND DESIGNER
Inscrite au RCS de Nanterre sous le n° 824 246 821
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Madeleine DE VAUGELAS, Postulant, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : PN 354 – N° du dossier 14594
Représentant : Me Astrid FERRE TREZON, Plaidant, avocat au barreau de Paris
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 08 Février 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur François THOMAS, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur François THOMAS, Président,
Madame Véronique MULLER, Conseiller,
Monsieur Patrice DUSAUSOY, Magistrat honoraire,
Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,
Exposé du litige
EXPOSE DU LITIGE
Le 2 août 2010, la société [L] Airport, spécialisée dans l’auscultation et le diagnostic des chaussées aéroportuaires, a conclu un contrat de travail à durée indéterminée avec M. [C] [W] en qualité d’ingénieur.
Il a été mis fin à ce contrat de travail à effet au 16 janvier 2018, la société [L] Airport lui reprochant d’avoir détourné une quote-part du prix d’un marché conclu avec l’aéroport de [Localité 20] au profit de la société AE&D – Arts Engineering and Designer, ci-après la société AE&D, laquelle aurait été constituée le 9 décembre 2016 par M. [W]
Le 7 novembre 2017, la société [L] Airport a été dissoute et son patrimoine a été transmis à la société [L] BTP Services, ci-après la société [L].
Plusieurs procédures judiciaires ont opposé les parties.
* Par ordonnance du 21 juin 2018, le juge des référés du conseil des prud’hommes d’Evry a condamné la société [L] à payer le solde de tout compte à M. [W], après que celui-ci l’a assignée en paiement de l’indemnité de rupture conventionnelle.
Ce conseil des prud’hommes a, dans l’instance au fond, par jugement du 1er décembre 2020, débouté M. [W] de la plupart de ses demandes, condamné la société [L] à lui régler la somme de 5.000 euros de dommages-intérêts pour dénigrement outre 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
* Le 2 octobre 2018, la plainte déposée le 15 mars 2018 par la société [L] à l’encontre de la société AE&D et M. [W] pour abus de confiance, recel d’abus de confiance, faux et usage de faux a été classée sans suite.
* Par jugement du 5 novembre 2019, le tribunal de grande instance de la Rochelle, saisi par M. [W], a retenu le caractère diffamatoire des propos tenus par M. [L] dans un courriel du 13 mars 2018 et l’a condamné à verser 5.000 euros à M. [W] à titre de dommages et intérêts, outre 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt du 19 octobre 2021, la cour d’appel de Poitiers a confirmé ce jugement.
* Par acte du 6 septembre 2018, la société [L] Associés a assigné M. [W] devant le tribunal de grande instance de Nanterre pour violation de ses obligations de loyauté, d’exclusivité et de non-concurrence.
Par jugement du 18 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Nanterre a partiellement fait droit aux demandes de la société [L] Associés, considérant que M. [W] avait violé la clause de non concurrence du pacte d’associé, lui a fait interdiction d’exercer une activité concurrente et l’a condamné au versement de la somme de 20.000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice moral. La société [L] Associés a été condamnée à rembourser les parts sociales de M. [W] à la suite de son exclusion de la société. M. [W] a fait appel de cette décision, cette procédure est actuellement en cours devant la cour d’appel.
* Le 12 septembre 2018, M. [W] a déposé plainte pour usurpation d’identité à l’encontre de son ancien employeur.
Par acte du 21 juin 2018, la société [L] a assigné la société AE&D devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de la voir condamner pour des actes de concurrence déloyale et parasitaire.
Par jugement du 24 décembre 2019, le tribunal de commerce de Nanterre a :
– Condamné la société AE&D à payer à la société [L] la somme de 60.418,58 euros à titre de dommages et intérêts pour pratiques concurrentielles déloyales, déboutant du surplus des demandes ;
– Interdit à la société [L] (sic) l’usage des logos et charte graphique de la société [L] sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée à compter de la signification du jugement ;
– Débouté la société [L] de sa demande de condamnation avec astreinte de la société AE&D pour la poursuite des relations commerciales avec les clients issus des relations de M. [W] ;
– Débouté la société [L] de sa demande de dommages et intérêts pour dénigrement ;
– Débouté la société [L] de sa demande de publication du jugement ;
– Débouté la société AE&D de sa demande reconventionnelle au titre du paiement de la somme de 46.239,35 euros hors taxes ;
– Condamné la société AE&D à payer à la société [L] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire ;
– Condamné la société AE&D aux dépens de l’instance.
Par déclaration du 13 mars 2020, la société [L] BTP Services a interjeté appel du jugement.
La clôture, prononcée le 9 décembre 2021, a été révoquée par ordonnance du 17 décembre 2021.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 18 janvier 2022, la société [L] BTP Services demande à la cour de :
– Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre en date du 24 décembre 2019 en ce qu’il a condamné la société AE&D pour pratiques concurrentielles déloyales ;
– Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre en date du 24 décembre 2019 en ce qu’il a interdit à la société AE&D toute reproduction et utilisation, sous quelque forme ou support que ce soit et à quelque titre que ce soit, et ce, sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée à compter de la signification de la décision, des documents reprenant les caractéristiques, chartes graphiques, logos de [L] Airport ou du groupe [L] ;
– Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre en date du 24 décembre 2019 en ce qu’il a débouté la société AE&D de sa demande reconventionnelle ;
– Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre en date du 24 décembre 2019 en ce qu’il a limité l’indemnisation de la société [L] à la somme de 60.418,58 euros et l’a déboutée des demandes de publication de la décision ;
– Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre en date du 24 décembre 2019 en ce qu’il a débouté la société [L] de sa demande de condamnation de la société AE&D à cesser les relations commerciales avec les clients dont elle a fait connaissance par l’intermédiaire des fonctions salariées de M. [W] ;
Et statuant à nouveau,
– Interdire à la société AE&D de conclure, exécuter ou poursuivre l’exécution de tout contrat, en France ou à l’étranger, avec un client de [L] Airport dont elle a fait connaissance par l’intermédiaire des fonctions salariées de M. [W] ce, sous astreinte de 30.000 euros par infraction constatée à compter de la signification de l’ordonnance (sic) à intervenir ;
– Condamner la société AE&D à payer à la société [L] la somme de 378.631,28 euros à titre de dommages et intérêts ;
– Ordonner la publication par dispositif de la décision à intervenir dans trois journaux ou périodiques au choix de la société [L] et aux frais de la société AE&D ;
En tout état de cause,
– Débouter la société AE&D de l’ensemble de ses demandes ;
– Condamner la société AE&D à payer à la société [L] la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées le 3 décembre 2021, la société AE&D – Arts Engineering and Designer demande à la cour de :
A titre principal,
– Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 24 décembre 2020 en ce qu’il a retenu que la société AE&D avait commis des actes de concurrence déloyale ;
Et statuant à nouveau,
– Débouter la société [L] de l’ensemble de ses demandes ;
A titre subsidiaire,
– Confirmer le jugement du tribunal de Commerce de Nanterre du 24 décembre 2020 en ce qu’il a :
/ Débouté la société [L] du surplus de ses demandes ;
/ Débouté la société [L] de sa demande de condamnation avec astreinte de la société AE&D à une interdiction de poursuite des relations commerciales avec les clients issus des relations de M. [C] [W] ;
/ Débouté la société [L] de sa demande de dommages et intérêts pour dénigrement;
/ Débouté la société [L] de sa demande de publication du jugement ;
– Infirmer le jugement du tribunal de Commerce de Nanterre du 24 décembre 2020 en ce qu’il a :
/ Condamné la société AE&D à payer à la société [L] la somme de 60.418,58 euros à titre de dommages et intérêts pour pratiques concurrentielles déloyales, la déboutant du surplus de ses demandes ;
/ Interdit à la société [L] [correction erreur : AE&D] (Sic) l’usage des logos et chartre graphique de la société [L] sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée à compter de la signification du jugement ;
Et statuant à nouveau,
– Débouter la société [L] de sa demande de condamnation de la société AE&D à lui payer la somme de 351.801,28 euros à titre de dommages et intérêts pour pratiques concurrentielles déloyales et limiter le montant de l’indemnisation de la société [L] au montant du préjudice réellement subi et justifié par elle, qui ne pourra excéder 19.163,05 euros ;
– Débouter la société [L] de sa demande de voir interdire à la société AE&D de « conclure, exécuter ou poursuivre l’exécution de tout contrat, en France ou à l’étranger, avec un client de la société [L] dont elle a fait connaissance par l’intermédiaire des fonctions salariée de M. [W] et ce, sous astreinte de 30.000 euros par infraction constatée à compter de l’ordonnance à intervenir » ;
– Débouter la société [L] de sa demande de voir ordonner la publication par disposition de la décision à intervenir dans trois journaux ou périodique aux choix de la société [L] et aux frais de la société AE&D ;
– Débouter la société [L] de sa demande de condamnation de la société AE&D au paiement à la société [L] de la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Débouter la société [L] du surplus de ses demandes ;
En tout état de cause, sur l’appel incident formé par la société AE&D,
– Infirmer le jugement du tribunal de Commerce de Nanterre du 24 décembre 2020 en ce qu’il a :
/ Débouté la société AE&D de sa demande reconventionnelle au titre du paiement de la somme de 61.239,35 euros ;
/ Condamné la société AE&D au paiement à la société [L] d’une somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Et statuant à nouveau,
A titre principal,
– Condamner la société [L] à rembourser à la société AE&D la somme de 46.239,35 euros indûment perçue par elle au titre d’une prestation réalisée par la société AE&D ;
– Condamner la société [L] à payer à la société AE&D la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
A titre subsidiaire,
– Condamner la société [L] à rembourser à la société AE&D la somme de 21.128, 34 euros hors taxes correspondant aux frais engagés par la société AE&D sur la mission encaissée par la société [L] ;
En tout état de cause,
– Interdire à la société [L], sous astreinte de 1.500 euros par infraction, d’utiliser le patronyme de M. [W] sur quelque support que ce soit, et notamment par utilisation de son ancienne adresse mail [Courriel 13] ou signature de mail ;
– Condamner la société [L] à payer à la société AE&D la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 20 janvier 2022.
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.
Motivation
Dispositif
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement sur les dommages-intérêts pour pratiques concurrentielles déloyales, pour trouble commercial, et sur la demande reconventionnelle,
Confirme pour le surplus, sauf à préciser que l’interdiction d’usage des logos et charte graphique de la société [L] sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée à compter de la signification du jugement, est prononcée à l’égard de la société AE&D,
statuant à nouveau sur les points infirmés,
Condamne la société AE&D à verser à la société [L], à titre de dommages-intérêts pour pratiques concurrentielles déloyales, la somme de 67.239,43 euros,
Condamne la société AE&D à verser à la société [L], à titre de dommages-intérêts pour trouble commercial, la somme de 10.000 euros,
Condamne la société [L] à verser à la société AE&D la somme de 23.119,67 euros,
Déboute les parties de leurs autres demandes,
Condamne la société AE&D à payer à la société [L] la somme de 6.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens d’appel.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur François THOMAS, Président et par M.Hugo BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,