COUR D’APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
Arrêt du Jeudi 01 Juin 2023
N° RG 21/01420 – N° Portalis DBVY-V-B7F-GX4Z
Décision déférée à la Cour : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de THONON LES BAINS en date du 28 Juin 2021, RG 20/00051
Appelant
M. [N] [H]
né le [Date naissance 1] 1966 à [Localité 5], demeurant [Adresse 3]
Représenté par la SELARL CHAMBET NICOLAS, avocat au barreau d’ANNECY
Intimée
S.A. BNP PARIBAS, dont le siège social est sis [Adresse 2] prise en la personne de son représentant légal
Représentée par la SAS MERMET & ASSOCIES, avocat postulant au barreau de THONON-LES-BAINS et Me Nicolas BAUCH-LABESSE de l’AARPI TARDIEU GALTIER LAURENT DARMON associés, avocat plaidant au barreau de PARIS
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l’audience publique des débats, tenue le 28 mars 2023 avec l’assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,
Et lors du délibéré, par :
– Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente
– Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,
– Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,
Exposé du litige
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EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte authentique du 11 septembre 2009, M. [N] [H] et Mme [Y] [P] ont acquis une maison d’habitation sise à [Localité 6]. Pour financer cette acquisition, ils ont sollicité l’octroi d’un prêt immobilier auprès de la BNP Paribas.
Préalablement à l’émission de l’offre de prêt, ils ont sollicité le 22 avril 2009 leur admission au contrat d’assurance collective souscrit par la BNP Paribas auprès de la société Cardif en garantie du remboursement dudit prêt et plus précisément :
– pour M. [H] les garanties décès et perte totale et irréversible d’autonomie à hauteur de 100 %,
– pour Mme [P] les mêmes garanties à hauteur de 30 %.
Le 1er juillet 2009, M. [H] et Mme [P] ont été acceptés au bénéfice de l’assurance choisie.
Suivant offre émise le 03 juillet 2009, et acceptée le 17 juillet 2009, M. [H] et Mme [P] ont souscrit un prêt immobilier auprès de la BNP Paribas pour un montant de 448 351,91 CHF, soit une contre-valeur à cette date de 293 791,84 euros, remboursable sur une durée de 300 mois au taux nominal de 2,95 % l’an, le montant des trimestrialités étant de 6 351 CHF.
Le 13 février 2017, un avenant au contrat d’assurance avec la Cardif a été régularisé après renégociation du contrat de prêt.
Au mois d’août 2018, M. [H] s’est vu diagnostiquer un myélome multiple (cancer de la moelle osseuse). Il a été placé en arrêt de travail à compter du 20 juillet 2018.
M. [H] a sollicité la prise en charge des échéances de son prêt immobilier par l’assurance Cardif, qui, par téléphone, lui aurait été refusée, faute pour lui d’avoir souscrit la garantie correspondante.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er août 2019, le conseil de M. [H] a mis en cause la responsabilité contractuelle de la BNP Paribas en ce qu’elle n’aurait pas alerté celui-ci sur l’absence de garanties prises au titre de l’incapacité de travail et de l’invalidité, et ses conséquences. Cette mise en demeure a été réitérée le 3 septembre 2019.
Par courrier du 22 octobre 2019, la BNP Paribas a rappelé à M. [H] qu’il n’avait souscrit que l’assurance décès – PTIA et qu’aucune suite favorable à sa demande ne serait donnée.
C’est dans ces conditions que, par acte délivré le 13 décembre 2019, M. [H] a fait assigner, selon la procédure à jour fixe, la BNP Paribas devant le tribunal de grande instance de Thonon-les-Bains pour obtenir, sur le fondement de la responsabilité contractuelle et au titre de la perte de chance d’avoir pu souscrire une assurance adaptée, la condamnation de la banque à lui verser les échéances payées par lui depuis son arrêt maladie, ainsi que la prise en charge de 90 % des trimestrialités à venir jusqu’à la fin de son arrêt de travail.
La BNP Paribas s’est opposée aux demandes.
Par jugement contradictoire rendu le 28 juin 2021, le tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains a :
constaté le caractère diffamatoire des écrits retranscrits en pages 12, 13, 14 et 18 des dernières conclusions de M. [H] reprises ci-après :
– page 12 : «le bulletin de refus à l’assurance perte d’emploi produit par la BNP Paribas est en effet un faux (pièce adverse n°4)»,
– page 13 : «une telle malhonnêteté ne saurait être tolérée. En effet, sachant pertinemment qu’elle avait omis de proposer une adhésion perte d’emploi à son client, cette dernière n’a pas hésité pour les besoins de la cause à produire un faux document …»,
– page 14 : «au-delà de la responsabilité civile, la BNP Paribas a incontestablement engagé sa responsabilité pénale puisqu’elle s’est rendue coupable du délit de faux et usage de faux prévu à l’article 441-1 du code pénal»,
– page 18 : «il est inadmissible qu’un organisme financier tel que la BNP Paribas puisse produire en justice de faux documents pour servir sa cause au préjudice de simples particuliers».
ordonné leur suppression desdites conclusions,
rejeté la demande tendant à voir écarter des débats la pièce n°4 produite par la BNP Paribas,
constaté que l’action engagée par M. [H] à l’encontre de la BNP Paribas est prescrite depuis le 17 juillet 2014,
déclaré en conséquence irrecevable l’action engagée par M. [H] à l’encontre de la BNP Paribas,
dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
condamné M. [H] aux dépens,
dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire.
Par déclaration du 06 juillet 2021, M. [N] [H] a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions notifiées le 04 octobre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé des moyens, M. [H] demande en dernier lieu à la cour de:
infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains le 28 juin 2021 en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
procéder à la vérification d’écriture portant sur la signature et la mention manuscrite apposées sous le nom de M. [H] sur la pièce n°31 (pièce adverse n°4), au besoin par toute mesure d’instruction utile,
constater que la pièce adverse n°4 est un faux document,
en conséquence, écarter la pièce adverse n°4 des débats et l’argumentation qui en découle,
constater que la prescription n’est pas acquise,
constater que la BNP Paribas a manqué à son obligation d’éclairer M. [H] sur l’adéquation des risques couverts,
condamner la BNP Paribas à verser à M. [H] la somme de 47 559,37 euros, pour la période de juillet 2018 à mai 2021 outre intérêts à compter de la signification de l’assignation au titre de sa perte de chance d’avoir pu souscrire une assurance adaptée,
débouter la BNP Paribas de l’intégralité de ses demandes,
condamner la BNP Paribas à verser à M. [H] la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts,
condamner la BNP Paribas à verser la somme de 8 000 euros à M. [H] au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
condamner la BNP Paribas aux entiers dépens.
Par conclusions notifiées le 20 décembre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé des moyens, la BNP Paribas demande en dernier lieu à la cour de:
Principalement,
confirmer purement et simplement le jugement déféré
Subsidiairement et statuant à nouveau,
à titre liminaire,
dire et juger irrecevable la demande de voir procéder à une vérification d’écritures ainsi qu’à toutes mesures d’instructions utiles,
vu l’article 41, alinéa 5, de la loi du 29 juillet 1881, ordonner la suppression par cancellation ou tout autre procédé à la diligence du greffe des propos diffamatoires à l’encontre de la BNP Paribas identifiés au sein des conclusions signifiées par M. [H],
débouter la demande incidente de vérification d’écritures, de rejet de la pièce n°4 produite par la BNP Paribas, et la demande indemnitaire afférente,
Au fond, à titre principal,
dire et juger M. [H], irrecevable car prescrit en son action en responsabilité à l’encontre de la BNP Paribas,
A titre subsidiaire,
dire et juger M. [H] mal-fondé en son action à l’encontre de la BNP Paribas,
débouter M. [H] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre de la BNP Paribas,
En tout état de cause,
condamner M. [H] au paiement de la somme de 8 000 euros à la BNP Paribas au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
L’affaire a été clôturée à la date du 27 février 2023 et renvoyée à l’audience du 28 mars 2023, à laquelle elle a été retenue et mise en délibéré à la date du 1er juin 2023.
Motivation
Dispositif
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains le 28 juin 2021, sauf en ce qu’il a :
– constaté que l’action engagée par M. [N] [H] à l’encontre de la BNP Paribas est prescrite depuis le 17 juillet 2014,
– déclaré en conséquence irrecevable l’action engagée par M. [N] [H] à l’encontre de la BNP Paribas,
Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,
Déclare recevable l’action engagée par M. [N] [H] à l’encontre de la BNP Paribas,
Déclare recevable la demande de vérification d’écriture de M. [N] [H],
Déboute M. [N] [H] de sa demande d’expertise en écriture,
Déboute M. [N] [H] de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de la BNP Paribas,
Condamne M. [N] [H] à payer à la BNP Paribas la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [N] [H] aux entiers dépens de l’appel.
Ainsi prononcé publiquement le 01 juin 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente