La nullité du vote d’une AG de copropriétaire peut être obtenue lorsque le syndicat des copropriétaires n’a pas fourni les détails des travaux votés alors que ces derniers avaient déjà débuté et qu’il avait donc nécessairement connaissance de leur coût, de l’entreprise sélectionnée, des modalités techniques etc.
En effet, il lui appartenait de renseigner les copropriétaires à ce sujet afin de leur permettre de voter en toute connaissance de cause, étant souligné que des travaux d’une telle envergure génèrent nécessairement des coûts importants pour la copropriété et le cas échéant, une mise en concurrence.
Action contre les décisions des assemblées générales
Aux termes de l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965, les actions en contestation des décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d’assemblée, sans ses annexes.
Le calcul du délai
Il est constant que le délai imparti par ces dispositions constitue un délai préfix insusceptible d’interruption ou de suspension, dont la méconnaissance entraîne la forclusion. Il est de même constant que ce délai ne débute son cours qu’à la date de la notification régulière du procès-verbal de l’assemblée générale – la charge de la preuve de cette notification reposant sur le syndicat des copropriétaires.
L’article 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965
L’article 25 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, prévoit:
“Ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant :
a) Toute délégation du pouvoir donnée au syndic, au conseil syndical ou à toute personne de prendre un acte ou une décision mentionné à l’article 24. Lorsque l’assemblée autorise le délégataire à décider de dépenses, elle fixe le montant maximum des sommes allouées à ce titre ;
b) L’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, et conformes à la destination de celui-ci ;
c) La désignation ou la révocation du ou des syndics et des membres du conseil syndical ;
d) Les conditions auxquelles sont réalisés les actes de disposition sur les parties communes ou sur des droits accessoires à ces parties communes, lorsque ces actes résultent d’obligations légales ou réglementaires telles que celles relatives à l’établissement de cours communes, d’autres servitudes ou à la cession de droits de mitoyenneté ;
e) La modification de la répartition des charges visées à l’alinéa 1er de l’article 10 ci-dessus rendue nécessaire par un changement de l’usage d’une ou plusieurs parties privatives ;
f) Les travaux d’économies d’énergie ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ces travaux peuvent comprendre des travaux d’intérêt collectif réalisés sur les parties privatives et aux frais du copropriétaire du lot concerné, sauf dans le cas où ce dernier est en mesure de produire la preuve de la réalisation de travaux équivalents dans les dix années précédentes.
Un décret en Conseil d’Etat précise les conditions d’application du présent f.
g) Les modalités d’ouverture des portes d’accès aux immeubles. En cas de fermeture totale de l’immeuble, celle-ci doit être compatible avec l’exercice d’une activité autorisée par le règlement de copropriété ;
h) L’installation d’une station radioélectrique nécessaire au déploiement d’un réseau radioélectrique ouvert au public ou l’installation ou la modification d’une antenne collective ou d’un réseau de communications électroniques interne à l’immeuble dès lors qu’elles portent sur des parties communes ;
i) La délégation de pouvoir au président du conseil syndical d’introduire une action judiciaire contre le syndic en réparation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires ;
j) L’installation ou la modification des installations électriques intérieures ou extérieures permettant l’alimentation des emplacements de stationnement d’accès sécurisé à usage privatif pour permettre la recharge des véhicules électriques ou hybrides rechargeables, ainsi que la réalisation des installations de recharge électrique permettant un comptage individuel pour ces mêmes véhicules ;
k) L’installation de compteurs d’eau froide divisionnaires.
l) L’installation de compteurs d’énergie thermique ou de répartiteurs de frais de chauffage ;
m) L’autorisation de transmettre aux services chargés du maintien de l’ordre les images réalisées en vue de la protection des parties communes, dans les conditions prévues à l’article L .126-1-1 du code de la construction et de l’habitation ;
n) L’ensemble des travaux comportant transformation, addition ou amélioration ;
o) La demande d’individualisation des contrats de fourniture d’eau et la réalisation des études et travaux nécessaires à cette individualisation.”
L’autorisation de réaliser des travaux
L’autorisation doit être expresse (Civ. 3ème, 17 janvier 2007, n° 05-17.119 ; 28 mars 2007, n° 06-11.947, 5 octobre 2010, n° 09-68.982) et est assimilé au défaut d’autorisation la réalisation de travaux excédant l’autorisation accordée (Civ. 3ème, 12 mai 1993, n° 91-17.676). Par ailleurs, l’assemblée générale peut subordonner l’autorisation qu’elle délivre à des conditions particulières qu’elle détermine librement.
La majorité du vote
En outre, l’article 25-1 de la même loi dispose que lorsque l’assemblée générale des copropriétaires n’a pas décidé à la majorité des voix de tous les copropriétaires, en application de l’article 25 ou d’une autre disposition, mais que le projet a recueilli au moins le tiers de ces voix, la même assemblée se prononce à la majorité prévue à l’article 24 en procédant immédiatement à un second vote.
Enfin, aux termes de l’article 17-1-A de la loi du 10 juillet 1965, les copropriétaires peuvent participer à l’assemblée générale par présence physique, par visioconférence ou par tout autre moyen de communication électronique permettant leur identification.
Le vote par correspondance
Les copropriétaires peuvent, par ailleurs, voter par correspondance avant la tenue de l’assemblée générale, au moyen d’un formulaire établi conformément à un modèle fixé par arrêté. Si la résolution objet du vote par correspondance est amendée en cours d’assemblée générale, le votant par correspondance ayant voté favorablement est assimilé à un copropriétaire défaillant pour cette résolution.
En cas de vote par correspondance, le syndic doit, à peine de nullité, expressément prévoir “la passerelle de majorité” de l’article 25-1 (TJ Orléans, 5 mai 2021, n°21/00417).
Exemple d’annulation d’un vote de travaux
En la cause, il ressort des pièces versées par le syndicat des copropriétaires que ce dernier a joint à la convocation à l’assemblée générale du 26 janvier 2022 un schéma exposant un tracé du grillage érigé en 2014 et le nouveau tracé soumis au vote.
S’il soutient que la résolution querellée ne visait qu’à entériner le principe des travaux, force est de constater que ceux-ci avaient déjà débuté en juillet 2020 comme l’atteste le procès-verbal de constat d’huissier du 23 juillet 2020 produit par les demandeurs, lequel démontre qu’une partie de l’ancien grillage avait été déposée et qu’un nouveau tracé était prévu :
“Je constate que cette allée est en plein travaux et qu’une grande partie des grilles qui privatise les espaces verts autour du pignon de l’immeuble Paris Open B ont été déposées. Au moment de notre arrivée, des ouvriers sont en train de remonter une des grilles”.
Dès lors, le syndicat des copropriétaires ne peut valablement soutenir qu’il n’est pas tenu de fournir les détails des travaux alors que ces derniers avaient déjà débuté et qu’il avait donc nécessairement connaissance de leur coût, de l’entreprise sélectionnée, des modalités techniques etc.
En effet, il lui appartenait de renseigner les copropriétaires à ce sujet afin de leur permettre de voter en toute connaissance de cause, étant souligné que des travaux d’une telle envergure génèrent nécessairement des coûts importants pour la copropriété et le cas échéant, une mise en concurrence.
Il apparaît ainsi qu’en faisant adopter le principe des travaux alors que ces derniers étaient déjà en cours d’exécution, le syndicat des copropriétaires a privé les copropriétaires de la possibilité de débattre des modalités de mise en œuvre, en les mettant devant le fait accompli.
En outre, si le syndicat des copropriétaires soutient qu’il ne s’agissait que d’une remise en état antérieur, il ne justifie pas que le nouveau tracé ainsi soumis au vote correspondait à la situation antérieure à l’édification du grillage de 2014.
Enfin, le syndicat des copropriétaires ne peut se dédouaner de son obligation d’information en soutenant que les copropriétaires étant sur place étaient à même de comprendre la teneur des travaux étant relevé qu’en l’absence de toute communication sur ces travaux, les copropriétaires n’étaient pas en mesure de connaître ni le budget, ni le nouveau tracé ni même l’aspect matériel de ces grilles.
Ainsi, c’est à bon droit que les copropriétaires ont soulevé l’imprécision de la rédaction de la résolution pour en demander son annulation, les informations fournies par le syndicat des copropriétaires étant insuffisantes pour leur permettre de voter en toute connaissance de cause.
Par conséquent, l’annulation de la résolution de l’assemblée générale a été prononcée par la juridiction.