Sanction d’une pratique
La pratique des titres de presse people consistant à entretenir une ambiguïté sur la réalité des faits annoncés a été sanctionnée. A ainsi été jugé fautif le fait d’annoncer, par un sous-titre accrocheur imprimé en caractères gras et de grande taille, le mot « oui » dans un encadré de couleur rouge, dévoilant un prétendu projet de mariage intéressant Charlotte Casiraghi et Gad Elmaleh. Ces derniers ne se sont ni l’un ni l’autre exprimés en ce sens.
Le ton affirmatif et l’absence de toute équivoque dans la formulation de titres « chocs » relatifs à un mariage de Charlotte Casiraghi, dans le but d’attiser la curiosité non seulement des lecteurs mais encore des simples passants, ont été jugés par eux-mêmes attentatoires à l’intimité de la vie privée (peu important qu’en se reportant au contenu de cet article, l’information transmise soit différente, le mariage annoncé étant celui du frère de Charlotte Casiraghi).
Intimité de la vie privée
L’immixtion dans l’intimité de la vie privée de Charlotte Casiraghi sans que puisse être invoquée la légitimité du débat d’intérêt général, a été retenue. Celle-ci n’est en effet pas destinée à régner sur la Principauté de Monaco en ce qu’elle n’arriverait qu’en huitième position dans l’ordre des successibles, si bien que son éventuel mariage n’a pas été jugé comme intéressant l’actualité.
Vie privée v/ droit à l’information
Pour rappel, les articles 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et 9 du code civil garantissent à toute personne, quelles que soient sa notoriété, sa fortune, ses fonctions présentes ou à venir, le respect de sa vie privée et de son image. L’article 10 de la Convention garantit l’exercice du droit à l’information des organes de presse dans le respect du droit des tiers.
La combinaison de ces deux principes conduit à limiter le droit à l’information du public d’une part, pour les personnes publiques, aux éléments relevant de la vie officielle, et d’autre part, aux informations et images volontairement livrées par les intéressés ou que justifie une actualité ou un débat d’intérêt général.
Ainsi chacun peut s’opposer à la divulgation d’informations ou d’images ne relevant pas de sa vie professionnelle ou de ses activités officielles et fixer les limites de ce qui peut être publié ou non sur sa vie privée, ainsi que les circonstances et les conditions dans lesquelles ces publications peuvent intervenir.
Evaluation du préjudice
La seule constatation des violations de vie privée et du droit à l’image engendre un préjudice dont le principe est acquis, le montant de l’indemnisation étant évalué par le tribunal en considération des arguments invoqués et des éléments d’appréciation produits.
Il a été jugé que Charlotte Casiraghi subit l’étalage d’informations sur sa vie privée présentées de manière à entretenir l’équivoque, dans un seul souci mercantile, ce qui entretient d’évidence le sentiment de harcèlement qu’elle allègue de la presse dite « à scandale ».
Les juges ont « déploré le sentiment de dépossession de son intimité auquel participe la publication d’une photographie captée lors d’une promenade familiale qui tend, par le sentiment de traque qu’elle entraîne, à la priver de l’exercice de la liberté d’aller et venir à laquelle elle est en droit de prétendre quelle que soit sa notoriété ». La diffusion nationale du magazine, l’accroche de couverture qui élargit l’effet de la publication litigieuse au-delà du lectorat curieux, le soin que la jeune femme doit apporter à la protection d’une image qui lui assure le soutien financier d’un sponsor professionnel, ont octroyé la somme de 6.000 € à Charlotte Casiraghi.
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