Droit de la Presse : Affaire Dior : diffamation non publique

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Missive à Bernard Arnault

Dans une lettre adressée à Bernard Arnault, l’ancien compagnon du directeur de la communication de Christian Dior Parfums a porté des accusations graves sur les pratiques de la société, qui ont été qualifiées de diffamatoires par les juges.

La missive imputait notamment au directeur de la communication de Christian Dior Parfums  i) d’avoir usé de ses fonctions pour faire obtenir un contrat à la compagne d’un ami avocat, en contrepartie de l’abandon par ce dernier de ses honoraires dans un dossier privé ; ii) de s’être livré à des pratiques douteuses, échanges de contrats, favoritismes, prestations facturées à Dior Parfums alors qu’elles sont utilisées à des fins personnelles, trafics en tout genre tant sur les stocks de produits mis à disposition de la communication, iii) usage de stupéfiants …

Qualité de l’auteur de la diffamation

Les critères de la diffamation s’apprécient différemment selon le genre de l’écrit en cause et la qualité de la personne qui s’y exprime et notamment, avec une moindre rigueur lorsque l’auteur des propos diffamatoires n’est pas un journaliste qui fait profession d’informer mais une personne elle-même impliquée dans les faits dont elle témoigne. Toutefois, il a été retenu que l’auteur de la lettre s’était exprimé sans prudence ni réserves pour formuler des accusations graves et péremptoires dans un courrier adressé aux supérieurs hiérarchiques de son ancien compagnon. Les demandes de vérification des accusations portées sous-entendaient que les faits pouvaient être facilement confirmés et que la justice devrait en être saisie.

L’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 porte sur toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération y compris formulée sous forme déguisée, dubitative ou par voie d’insinuation.

Diffamation non publique

La lettre portait bien atteinte à l’honneur et à la considération du directeur de la communication de Christian Dior Parfums en ce qu’elle  lui imputait la commission de faits précis, susceptibles de faire sans difficulté l’objet d’un débat contradictoire sur la preuve de leur vérité, contraires à la morale communément admise et, pour certains, constitutifs ou susceptibles de constituer des infractions pénales : favoritisme, abus de biens sociaux, fausses factures, trafic de stupéfiants, violences et menaces.

Les imputations diffamatoires peuvent être justifiées lorsqu’il est démontré que leur auteur a agi de bonne foi et notamment qu’il a poursuivi un but légitime, étranger à toute animosité personnelle, et qu’il s’est conformé à un certain nombre d’exigences, en particulier de sérieux de l’enquête, ainsi que de prudence dans l’expression.

Le juges ont retenu que l’ancien compagnon, en rédigeant la missive en cause, n’avait pas pour dessein désintéressé de faire la lumière sur des dérives au sein de la société Christian Dior Parfums et d’épurer celle-ci de telles pratiques, mais était animé d’un but personnel, celui de nuire au directeur de la communication. Il avait donc agi afin d’assouvir une vengeance personnelle à l’égard de son ex compagnon en le stigmatisant auprès de son président-directeur général. Le but légitime, exonératoire de responsabilité, a été écarté.

A noter que l’envoi de la lettre diffamatoire envoyée un an et demi après la rupture sentimentale révèle plutôt l’intensité de l’animosité qui l’a guidée (l’animosité personnelle était donc établie).

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