COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 60C
3e chambre
ARRET N°
REPUTE CONTRADICTOIRE
DU 19 MAI 2022
N° RG 21/03887 – N° Portalis DBV3-V-B7F-USRX
AFFAIRE :
Association LES GLENANS Centre nautique
…
C/
[P] [W]
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 01 Août 2013 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS
N° Chambre : 5
N° Section : 2
N° RG : 12/00090
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Franck LAFON
Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES
Me Guillaume NICOLAS de la SCP PIRIOU METZ NICOLAS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX NEUF MAI DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
DEMANDERESSES devant la cour d’appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d’un arrêt de la Cour de cassation (Chambre commerciale financière et économique) du 24 mars 2021 cassant et annulant partiellement l’arrêt rendu par la cour d’appel de PARIS (Pôle 2 chambre 5) le 6 novembre 2018
1/ Association LES GLENANS Centre nautique
[Adresse 17]
[Localité 13]
2/ SA MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
RCS 775 652 126
[Adresse 7]
[Localité 12]
3/ S.A. MMA IARD
RCS 440 048 882
[Adresse 7]
[Localité 12]
Représentant : Me Franck LAFON, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20210236
Représentant : Me Dominique CRESSEAUX de l’ASSOCIATION LECLERE & Associés, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R075,
****************
DEFENDEURS DEVANT LA COUR DE RENVOI
1/ Monsieur [P] [W]
né le [Date naissance 9] 1976 à [Localité 16]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 6]
2/ Monsieur [X] [W]
né le [Date naissance 3] 1941 à [Localité 10]
de nationalité Française
[Adresse 11]
[Localité 10]
3/ Madame [J] [H] épouse [W]
née le [Date naissance 1] 1945 à [Localité 18]
de nationalité Française
[Adresse 11]
[Localité 10]
Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 2166303
DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI
4/ CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES HAUTES-ALPES
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
DEFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI
5/ MAIF
N° SIRET : 775 709 702
[Adresse 8]
[Localité 14]
Représentant : Me Guillaume NICOLAS de la SCP PIRIOU METZ NICOLAS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 255 – N° du dossier 210461
Représentant : Me Averèle KOUDOYOR de la SELARL BALE & KOUDOYOR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1635
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 17 Mars 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Françoise BAZET, Conseiller, et Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-José BOU, Président,
Madame Françoise BAZET, Conseiller,
Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Claudine AUBERT,
Exposé du litige
————
FAITS ET PROCÉDURE
M. [P] [W] et Mme [R] [T], tous deux adhérents de l’association Les Glénans, ont réservé le 16 février 2005 un stage de voile devant se dérouler du 30 juillet au 12 août 2005 dans le secteur de [Localité 15] en Corse. Le 7 août 2005, un empannage sauvage s’est produit sur le bateau où ils se trouvaient et M. [W], touché par l’écoute de la grand-voile au niveau cervical droit, a été victime d’un traumatisme crânien grave avec coma d’emblée.
Par actes des 23, 25 octobre et 7 novembre 2017, Mme [T] et M. [P] [W] avec ses parents, M. [X] [W] et Mme [J] [W], ont fait assigner l’association Centre nautique Les Glénans (ci-après, l’association Les Glénans) et son assureur, la société Covéa Risks, ainsi que la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) des Bouches-du-Rhône devant le tribunal de grande instance de Paris, la Mutuelle Assurance des instituteurs de France (ci-après, la MAIF) étant intervenue volontairement à l’instance.
Par jugement du 30 octobre 2009, le tribunal de grande instance de Paris a :
– dit que l’association Les Glénans était responsable des conséquences dommageables de l’accident,
– avant dire droit sur l’évaluation du préjudice corporel personnel de M. [P] [W] a désigné le docteur [V] en qualité d’expert,
– condamné in solidum l’association Les Glénans et son assureur, la société Covéa Risks, à payer :
à M. [P] [W] la somme de 20 000 euros à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice,
à Mme [T] la somme de 2 030, 55 euros au titre de son préjudice financier et celle de 1 500 euros au titre de son préjudice moral,
à M. [X] [W] et Mme [J] [W] la somme de 2 084,79 euros au titre de leur préjudice financier,
aux requérants la somme de 500 euros, soit 2 000 euros, au titre des frais irrépétibles.
Par arrêt du 12 décembre 2011, la cour d’appel de Paris a confirmé cette décision.
Le docteur [V] a déposé son rapport le 30 avril 2010.
L’association Les Glénans a sollicité, par requête auprès du président du tribunal de commerce d’Ajaccio, l’application de la convention de Londres de 1976 et des articles L5121-3 et suivants du code des transports permettant au propriétaire d’un navire de limiter sa responsabilité lorsque les dommages se sont produits à bord du navire, en constituant un fonds d’indemnisation destiné à la réparation des sinistres matériels et/ou corporels causés par celui-ci.
Par ordonnance du 14 août 2012, le président du tribunal de commerce a fait droit à cette demande. Les consorts [W] et Mme [T] ont assigné leurs adversaires en rétractation de cette décision. Par ordonnance du 4 février 2013, le président du tribunal de commerce d’Ajaccio a dit que le plafond d’indemnisation applicable s’établissait à un million de Droits de Tirage Spéciaux (DTS).
Par jugement du 1er août 2013, le tribunal de grande instance de Paris a, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– dit que la convention de Londres du 19 novembre 1976 était applicable au litige,
– dit que le plafond d’indemnisation concernant le sinistre du 7 août 2005 s’établissait à la somme d’un million de DTS,
– condamné in solidum l’association Les Glénans et la société Covéa Risks à payer :
à M. [P] [W] les sommes de 39 134, 22 euros au titre de son préjudice patrimonial et de 83 566 euros au titre de son préjudice extrapatrimonial,
à la CPAM des Bouches-du-Rhône les sommes de 74 510, 61 euros au titre des dépenses de santé et indemnités journalières et de 164 332, 11 euros au titre de la rente invalidité et des arrérages échus,
à Mme [J] [W] et M. [X] [W] la somme de 3 000 euros chacun au titre de leur préjudice moral,
à la MAIF la somme de 10 671, 39 euros au titre de son recours subrogatoire,
– déclaré irrecevable la demande de Mme [T],
– condamné in solidum l’association Les Glénans et la société Covea Risks à payer au titre des frais irrépétibles la somme de 800 euros chacun à Mme [J] [W] et M. [X] [W], la somme de 1 000 euros chacune à la CPAM et à la MAIF, la somme de 2 500 euros à M. [P] [W].
Par arrêt du 7 septembre 2015, et par arrêt de rectification d’erreur matérielle du 14 décembre 2015, la cour d’appel de Paris a :
– infirmé le jugement à l’exception de ses dispositions relatives à l’application de la Convention de Londres du 19 novembre 1976, au plafond d’indemnisation applicable, aux demandes de Mme [T], aux frais de l’article 700 du code de procédure civile alloués à Mme [J] [W] et M. [X] [W] ainsi qu’aux dépens,
Statuant à nouveau,
– condamné in solidum l’association Les Glénans et la société Covéa Risks à verser :
à M. [P] [W] la somme de 136 431, 52 euros, déduction faite de l’avance sur recours effectuée par la MAIF en réparation de son préjudice corporel, outre intérêts, les sommes de 1 732, 84 euros au titre des frais irrépétibles en première instance et 4 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,
à Mme [J] [W] et M. [X] [W] la somme de 1 500 euros chacun au titre de leur préjudice moral,
à la CPAM la somme de 119 987, 10 euros en remboursement des prestations versées à la victime ainsi que les arrérages à échoir de la rente dont le capital constitutif est de
119 421, 36 euros, le tout outre intérêts au taux légal, et la somme complémentaire de
1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
à la MAIF les sommes de 10 671, 39 euros au titre de son recours subrogatoire et de
1 500 euros au titre des frais irrépétibles,
– dit n’y avoir lieu à faire application de l’article 700 au profit de Mme [T],
– débouté M. et Mme [X] et [J] [W] de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné in solidum l’association Les Glénans et la société Covéa Risks aux dépens de première instance et d’appel.
Par arrêt du 14 juin 2017, la chambre commerciale de la Cour de cassation a cassé et annulé, sauf en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes de Mme [T], l’arrêt du 7 septembre 2015, renvoyé les parties devant la cour d’appel de Paris, autrement composée, et mis hors de cause Mme [T] dont la présence devant la cour de renvoi n’est plus nécessaire à la solution du litige.
La Cour de cassation a jugé, au visa des articles L. 5121-5 du code des transports et 6, § 1 a) i) et b) i) de la Convention LLMC, dans sa rédaction antérieure à celle issue du Protocole modificatif du 2 mai 1996, ‘qu’il résulte de ces textes qu’en droit interne, la limite de responsabilité du propriétaire d’un navire d’une jauge inférieure à 300 tonneaux est égale, pour les créances pour lésions corporelles, à 166 500 DTS et, pour les autres créances, à 83 500 DTS et que, si le montant du premier plafond est insuffisant pour régler la totalité de l’indemnité due à la victime de lésions corporelles, le solde de cette indemnité est, dans la limite du second plafond, payé en concurrence avec les autres créances ou en totalité s’il n’existe pas d’autres créances’ ; que ‘pour limiter le droit à indemnisation des consorts [W] au seul plafond applicable aux créances pour morts et lésions corporelles, sans cumuler celui-ci avec le plafond d’indemnisation applicable aux autres créances, l’arrêt retient qu’il n’existe pas d’autres créances que celles pour lésions corporelles’; et ‘qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que la totalité des indemnités qu’elle allouait aux victimes et aux tiers payeurs, subrogés dans les droits de l’une d’entre elles, excédait ce plafond, de sorte que ces dernières pouvaient prétendre à être indemnisées dans la limite globale des deux plafonds, le solde de l’indemnité devant être payé dans la limite du plafond applicable aux autres créances, même en l’absence d’autres créances, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés’.
Moyens
Motivation
SUR QUOI
Restent en débat le plafond de limitation de responsabilité de l’association Les Glénans et le montant des préjudices.
Sur le plafond de garantie
Il résulte de articles L. 5121-5 du code des transports et 6, § 1 a) i) et b) i) de la Convention LLMC, dans sa rédaction antérieure à celle issue du Protocole modificatif du 2 mai 1996, que pour les navires d’une jauge inférieure à moins de 300 tonneaux, les limites de la responsabilité du propriétaire du navire sont de 166 500 unités de compte pour les créances de dommages corporels et de 83 500 unités de compte pour les autres créances, comprenant
les dommages matériels.
Ainsi qu’il résulte de l’arrêt de la Cour de cassation du 24 mars 2021, le solde de l’indemnité due aux victimes de créances corporelles doit être payé dans la limite du plafond
applicable aux autres créances, en concurrence le cas échéant avec celles-ci, ce qui signifie que ce double plafond est applicable même lorsqu’aucune créance de dommage matériel n’a été invoquée.
L’association Les Glénans ne saurait être suivie lorsqu’elle indique que la Cour de cassation a commis une erreur dans l’arrêt précité en ajoutant à la loi alors que la Cour avait déjà affirmé ce principe dans une précédente décision du 26 juin 2019 (Com., 26 juin 2019, pourvoi n 18-12.450, 18-12.249), sur pourvoi, notamment des sociétés MMA.
Il convient donc de considérer que l’indemnisation des préjudices s’effectuera dans la limite du plafond total de 250 000 DTS, correspondant à l’addition des deux plafonds, si la première limitation à 166 500 DTS est atteinte.
L’article 8 de la Convention LLMC précitée dispose que : ‘la conversion s’effectue suivant la valeur de cette monnaie à la date où le fonds a été constitué, le paiement effectué ou la garantie équivalente fournie conformément à la loi de cet Etat.’
La seule date à appliquer en l’espèce est celle de la constitution du fonds. Il avait été créé par ordonnance du président du tribunal de commerce d’Ajaccio du 14 août 2012, mais les consorts [W] ayant agi en rétractation de cette décision, ce n’est que par décision du 4 février 2013, rétractant l’ordonnance précédente et disant y avoir lieu à la constitution d’un fonds d’indemnisation que ce fond a été effectivement et définitivement créé.
C’est donc à la date du 4 février 2013 qu’il convient de se placer pour procéder à la conversion des DTS.
L’article 11 de la Convention LLMC prévoit que le fonds est constitué à concurrence du montant tel qu’il est calculé selon les dispositions des articles 6 et 7 applicables aux créances dont cette personne peut être responsable, augmenté des intérêts courus depuis la date de l’événement donnant naissance à la responsabilité jusqu’à la constitution du fonds.
L’association Les Glénans et ses assureurs (les appelants) ont procédé à un calcul du montant des DTS à partir de leur valeur et du taux de change du dollar US à l’euro le 4 février 2013 et en y ajoutant les intérêts ayant couru du 7 août 2005 (date de l’accident) au 4 février 2013, calcul qui ne fait l’objet d’aucune critique de la part des consorts [W].
Cette évaluation sera donc entérinée. Le montant du premier plafond s’établit ainsi à 217 989,52 euros (188 892,78 euros + 29 096,74 euros d’intérêts), et le montant cumulé des deux plafonds à 327 311,58 euros (DTS +intérêts).
Sur l’évaluation du préjudice de M. [P] [W]
Deux postes de préjudice ne sont pas discutés : les dépenses de santé futures, que le tribunal a évaluées à la somme de 1 292,23 euros, et les frais divers évalués à 809,97 euros, sommes qui seront donc confirmées.
Les conclusions de l’expert judiciaire sont les suivantes :
‘a. Au titre des séquelles de l’accident dont a été victime M. [W] le 7 août 2005 :
– des séquelles neuropsychologiques avec lenteur idéatoire, troubles de la mémoire, une désinhibition responsable d’une certaine familiarité, des modifications du caractère avec irritabilité, impulsivité, labilité émotionnelle,
– sur le plan psychique, une certaine anxiété ainsi qu’une agoraphobie,
– sur le plan neurologique, une amyotrophie de la jambe droite, une asymétrie de la commissure labiale, ainsi qu’une épilepsie post traumatique.
b. Déficit fonctionnel temporaire total du 7 août 2005 au 19 octobre 2005,
c. Déficit fonctionnel temporaire partiel de 66 % jusqu’au 31 janvier 2007,
d. Déficit fonctionnel temporaire partiel de 40 % jusqu’au 7 août 2008,
e. Consolidation fixée au 7 août 2008 ,
f. IPP séquellaire : 20 % ,
g. Souffrances endurées : 4,5/7
h. Préjudice esthétique : 1/7
i. Préjudice d’agrément : gêne dans certaines activités de loisirs et impossibilité de conduire jusqu’à la récupération de son permis de conduire,
j. Préjudice sexuel : gêne jusqu’à la consolidation,
k. Incidence professionnelle : M. [W] est apte à exercer son métier habituel mais à un niveau moindre en terme de rentabilité, efficacité, rapidité,
l. Besoins en aides humaines : avant consolidation à hauteur de trois heures par jour pendant cinq mois outre une aide pour les trajets,
m : soins futurs : traitement anti-épileptique.’
M. [P] [W], né le [Date naissance 9] 1976, était âgé de 32 ans lorsque son état a été consolidé le 7 août 2008.
Les préjudices seront liquidés en tenant compte de ce qu’en application de l’article 25 de la loi du 21 décembre 2006, le recours subrogatoire des tiers payeurs s’exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu’ils ont pris en charge.
Les dépenses de santé actuelles
M. [P] [W] sollicite la confirmation du jugement qui lui a alloué 810 euros au titre de séances de psychothérapie. Contrairement à ce qu’indiquent les appelantes, il justifie avoir bénéficié de 27 consultations au coût unitaire de 30 euros. Ces soins ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale. Il s’agit d’une dépense utile nécessitée par l’accident, il convient de faire droit à la demande.
Le jugement sera confirmé de ce chef.
Le déficit fonctionnel temporaire
Le tribunal a alloué de ce chef une somme de 9 066 euros. M. [P] [W] sollicite une somme de 11 291,50 euros, sur la base de 750 euros par mois d’incapacité. Les appelantes sollicitent la confirmation du jugement.
Il est plus adapté de réparer ce préjudice sur la base de 25 euros par jour, soit :
– sur la période de DFT de 100% du 7 août 2005 au 19 octobre 2005, 73 jours x 25 euros = 1 825 euros
– sur la période de DFT de 66% du 20 octobre 2005 au 31 janvier 2007, 468 jours x 25 euros x 66% = 7 722 euros
– sur la période de DFT de 40% du 1er février 2007 au 7 août 2008, 553 jours x 25 euros x 40% = 5 530 euros.
Le total s’établit à la somme de 15 077 euros. Toutefois, M. [P] [W] demandant une somme de 11 291,50 euros (pour n’avoir notamment retenu que 6 mois et 6 jours de DFT à 40% entre le 1er février 2008 et le 7 août 2008, alors que la première date est le 1er février 2007), et la cour ne pouvant statuer ultra petita, il lui sera alloué la somme de 11 291,50 euros.
Les pertes de gains professionnels actuels
Le tribunal a alloué de ce chef une somme de 10 752 euros. M. [P] [W] sollicite 13 069 euros, les appelantes offrent 5 588,46 euros.
M. [P] [W] indique qu’il n’a subi aucune perte de salaire jusqu’au 30 septembre 2007, la CPAM lui ayant versé des indemnités journalières, mais qu’à compter du 1er octobre 2007, le passage en régime d’invalidité a entraîné une perte. Il soutient que cette perte se compose de salaires pour 7 547 euros, de retraite complémentaire pour 2 616 euros et d’épargne retraite pour 2 906 euros, soit un total de 13 069 euros.
Pour établir ces montants, M. [P] [W] a repris l’attestation que lui a établie son employeur, lequel s’est livré à une analyse de l’ensemble des pertes subies sur une période d’invalidité à 60% pendant un an.
C’est à tort que le tribunal a tenu compte de pertes de salaire postérieures à la date de consolidation, alors qu’elles ne peuvent être prises en compte que dans le cadre de l’indemnisation des pertes de gains futurs.
L’attestation précitée de l’employeur est également critiquable sur ce point puisqu’elle calcule des pertes sur une durée d’un an alors que celles-ci doivent être évaluées du 1er octobre 2007 au 8 août 2008.
En réalité, l’employeur de M. [P] [W] a établi deux attestations, la première porte la date du 15 février 2008 (pièce 84 de M. [P] [W]), la seconde celle du 25 juillet 2008 (pièce 94), et leur auteur explique dans cette dernière que les variations entre les deux proviennent de l’augmentation de la rémunération de l’intéressé en mars 2008 et d’une erreur dans le calcul de la pension versée par la CPAM car il avait considéré à tort que celle-ci était de 6 895 euros net alors qu’il s’agissait d’un montant brut.
La cour retiendra que dans l’attestation du 15 février 2008, l’employeur évalue la perte annuelle de salaire à 5 804 euros (tenant compte de la rente versée par la CPAM), soit une perte mensuelle de 483,66 euros.
M. [P] [W] ayant bénéficié d’une augmentation à compter du 1er mars 2008, la perte antérieure, du 1er octobre 2007 au 28 février 2008, est de 2 418,30 euros (483,66 x 5 mois).
Dans l’attestation du 25 juillet 2008, l’employeur évalue la perte annuelle de salaire à 7 547 euros (tenant compte de la rente versée par la CPAM), soit une perte mensuelle de 628,91 euros.
La perte du 1er mars 2008 au 7 août 2008 est de 3 286,56 euros ((628,91 x 5 mois) + (628,91/31 x 7 jours).
Au total la perte de salaire sur la période du 1er octobre 2007 au 7 août 2008 s’établit donc à la somme de 5 700,36 euros (2 418,30 + 3 286,56).
Ainsi que justement observé par les appelantes, M. [P] [W] n’a subi aucune perte au titre du régime général de retraite puisque pour l’ouverture de ses droits un trimestre travaillé, même à temps partiel, est considéré comme un trimestre complet et que le montant de ses droits sera quant à lui calculé sur la base de ses 25 meilleures rémunérations annuelles, postérieures à ses 40 ans.
S’agissant de la perte subie du chef du régime de retraite complémentaire, la perte de points était chiffrée à 102 points dans l’attestation de l’employeur de février 2008 et est passée à 168 points dans celle de juillet 2008. La perte financière alléguée de ce chef est ainsi passée de 1 586 euros à 2 616 euros.
Les appelantes affirment que la valeur du point serait de 100 euros, sans produire la moindre justification. Le calcul opéré par l’employeur sera donc retenu.
Sur la période du 1er octobre 2007 au 28 février 2008, la perte s’établit donc à la somme de 1 586/12 x 5 mois = 660,83 euros.
Sur la période du 1er mars 2008 au 7 août 2008, la perte de 2 616 sur 12 mois, soit 218 euros par mois s’établit à la somme de ((218 x 5 mois) + (218/31 x 7 jours)) = 1 139,22 euros.
Au total la perte de ce chef est de 1 800,05 euros.
M. [P] [W] sollicite enfin, au titre de la perte ‘d’épargne retraite’ la somme de 2 906 euros.
Les appelantes exposent que cette prétention correspond à la différence entre l’épargne retraite qu’il aurait constituée s’il avait continué à travailler à temps plein et celle qu’il a effectivement réalisée en travaillant à 60%, augmentée des fruits au taux de 5% que cette somme aurait produits pendant 34 années et c’est à raison qu’elles soutiennent qu’il ne saurait être fait droit à cette demande qui aboutirait à une double indemnisation puisque cette somme pourra à nouveau être placée à 5% et produire des intérêts pendant 34 ans.
En conséquence, et comme proposé par les appelantes, l’épargne manquée étant de 476 euros selon l’attestation de l’employeur de M. [P] [W] de février 2008, seule cette somme lui sera allouée. Les appelantes indiquent qu’il convient d’y ajouter les intérêts qu’elle aurait produits jusqu’à ‘la date de l’arrêt à intervenir’, elles ont cependant arrêté le calcul de ces intérêts en 2010 alors que le présent arrêt est rendu en 2022.
La somme de 476 euros placée pendant 16 ans à 5% aurait rapporté 380,80 euros d’intérêts.
Il sera donc alloué à M. [P] [W] la somme de 856,80 euros (476 + 380,80).
La perte de gains professionnels actuels est donc de 8 357,21 euros (5 700,36 + 1 800,05 + 856,80).
La tierce personne temporaire
Le tribunal a alloué de ce chef à M. [P] [W] la somme de 5 508 euros. M. [P] [W] sollicite 6 885 euros. Les appelantes s’opposent à la moindre indemnisation à ce titre, faisant valoir que selon les propres déclarations de M. [P] [W], cette aide lui aurait été apportée par sa compagne Mme [T] qui a été indemnisée au titre de son préjudice économique par le jugement du 30 juillet 2009, en sorte que ce poste ne saurait être réparé deux fois.
L’expert a indiqué qu’avant consolidation M. [P] [W] avait bénéficié d’une aide à hauteur de trois heures par jour pendant cinq mois.
M. [P] [W] confirme que l’aide lui a été apportée par sa compagne, à raison de 3h/jour, pendant 153 jours, soit, sur la base de 15 euros de l’heure, un préjudice de 6 885 euros.
S’il est exact que le jugement du 30 juillet 2009 a alloué à Mme [T] une somme de 2 030,55 euros au titre de son préjudice financier, il résulte de la lecture de cette décision qu’il s’agissait de frais de transport ou de trajet, sa demande au titre de sa perte de gains du fait de l’assistance apportée à M. [P] [W] ayant été rejetée.
L’analyse des appelantes selon laquelle l’assistance d’une tierce personne a déjà été réparée est donc inexacte.
A titre subsidiaire, les appelantes font valoir que la somme allouée à M. [P] [W] devra être calculée sur la base d’un taux horaire de 8 euros, infiniment subsidiairement de 8,48 euros (salaire horaire applicable en juillet 2005 selon les grilles de salaires figurant dans les avenants de la convention collective des salariés du particulier employeur).
L’aide apportée à M. [P] [W] était une aide non spécialisée. Elle sera justement indemnisée sur la base d’un taux horaire de 10 euros. Sera donc allouée à M. [P] [W] la somme de 4 590 euros, soit 153 jours x 3h x 8,48 euros.
Les souffrances endurées
Le tribunal a alloué la somme de 15 000 euros de ce chef. M. [P] [W] sollicite 18 000 euros, les appelantes demandent la confirmation du jugement.
Evaluées par l’expert à 4,5/7, le préjudice résultant des souffrances a été justement fixé à la somme de 15 000 euros.
Les pertes de gains professionnels futurs
Il s’agit des pertes subies après la consolidation, soit après le 7 août 2008.
Il n’y a pas lieu d’écarter des débats les pièces 123 et 148 produites par les consorts [W] puisqu’ils ont enfin communiqué leur traduction en français (pièce 149).
Le tribunal a évalué ce poste de préjudice à la somme de 104 344,70 euros, mais déduction faite de la rente versée par la CPAM, aucune somme ne restait due à M. [P] [W]. Ce dernier sollicite la somme de 171 545,17 euros, les appelantes considèrent qu’il ne justifie d’aucune perte de gains futurs.
S’agissant de la période du 8 août 2008 au 1er octobre 2008 M. [P] [W] l’a intégrée par erreur dans le calcul de ses pertes de gains professionnels actuels. Ainsi qu’il a été dit ci-dessus, dans l’attestation du 25 juillet 2008, l’employeur évalue la perte annuelle de salaire à 7 547 euros (tenant compte de la rente versée par la CPAM), soit une perte mensuelle de 628,91 euros. Par conséquent, sur la période susvisée, le préjudice est de 1 724,43 euros ((23 jours x 628,91/31) + (2 mois x 628,91)).
La perte de retraite complémentaire a été évaluée ci-dessus à la somme mensuelle de 218 euros. En conséquence, sur la période du 8 août 2008 au 1er octobre 2008 elle est de 443,03 euros ((23 jours x 218/31) + (2 mois x 218)).
Si M. [P] [W] produit des attestations démontrant qu’il a quitté l’emploi qu’il occupait en France au sein de la même entreprise depuis 2004 en raison de difficultés relationnelles liées à ses séquelles, il lui appartient de prouver que sa rémunération en Espagne est inférieure à celle qu’il aurait pu percevoir en restant dans son emploi d’origine.
M. [P] [W] produit une estimation réalisée par le responsable des ressources humaines de la société Solvay, selon laquelle sa rémunération ‘théorique’ nette aurait dû s’élever en 2008 à 38 309 euros pour une activité à 100%. Toutefois, cette estimation ne tient pas compte de l’impôt sur le revenu.
Il a quitté cette entreprise en novembre 2008 et travaille depuis en Espagne, à Barcelone, toujours en qualité d’ingénieur chercheur. Il a d’abord travaillé au sein de la société Cetaqua puis, puis, courant 2018, a intégré la société Aquatec, qui appartient au même groupe.
Pour évaluer son préjudice, M. [P] [W] compare le revenu perçu en 2009 en Espagne, soit 30 903 euros et celui qu’il aurait perçu en France de 38 309 euros, soit un différentiel de 7 406 euros qu’il capitalise sur la base de l’euro de rente viagère pour un homme âgé de 34 ans selon la table de capitalisation de la Gazette du palais publiée en 2004.
Ce faisant, M. [P] [W] compare des sommes qui ne peuvent pas l’être puisqu’en France le revenu cité est un net imposable, avant impôt, alors que comme l’indiquent les appelantes, sans être démenties, le revenu perçu en Espagne est net d’impôts.
M. [P] [W] a fini par verser aux débats ses avis d’imposition sur les salaires perçus de 2005 à 2008.
Il en résulte qu’en 2008 il a déclaré 30 402 euros de salaire et 6 685 euros de rente, soit une somme de 37 087 euros et a payé la somme de 4 701 euros au titre de l’impôt sur le revenu.
Ainsi, même en retenant, en 2008, un salaire annuel de 38 309 euros, tel qu’évalué par l’ancien employeur dans le cadre d’une activité à 100%, il conviendrait d’en déduire la somme minimum de 4 701 euros pour établir le revenu après impôt qui serait donc de 33 608 euros.
Or, les revenus net d’impôt perçus en Espagne sont les suivants :
– en 2009 : 30 903,75, soit une perte de 2 704,25 euros
– en 2010 : 33 055,07 euros, soit une perte de 552,93 euros.
S’agissant des années postérieures, de 2011 à 2020, M. [P] [W] a perçu des salaires nets d’impôts dont le montant était supérieur au salaire attendu en 2008 en France.
La perte s’établirait donc à 3 257,18 euros.
Toutefois, par décision du 2 août 2007, M. [P] [W] a été placé, à compter du 1er octobre 2007, en invalidité de catégorie 1 et a bénéficié d’une rente d’un montant annuel à cette date de 6 895,23 euros. Cette rente a cessé de lui être versée le 1er octobre 2015.
Il est indiqué dans l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 6 novembre 2018 que la CPAM a versé à M. [P] [W] la somme de 45 476,49 euros sur la période du 1er octobre 2007 au 1er octobre 2014 et celle de 6 496,64 euros du 1er octobre 2014 au 1er octobre 2015, soit une créance totale de 51 973,13 euros.
La rente ayant commencé à être versée avant la consolidation, le 7 août 2008, les arrérages versés du 1er octobre 2007 jusqu’à la consolidation s’établissent à la somme de 3 229,30 euros ((315,80 x 10 mois) + (315,80/31 x 7 jours)) Ainsi, à compter de la consolidation, le 7 août 2008, la CPAM a versé à la victime la somme de 48 743,83 euros (51 973,13 – 3 229,30).
Ainsi la perte de gains professionnels futurs de M. [P] [W] d’un montant de 1 724,43 + 443,03 + 3 257,18 soit 5 424,64 euros, a été compensée par la rente versée par la CPAM.
Le solde des sommes versées par la CPAM s’établit en conséquence à la somme de 43 319,19 euros (48 743,83 – 5 424,64) et sera à déduire des sommes allouées M. [P] [W] au titre de l’incidence professionnelle puis éventuellement du déficit fonctionnel permanent.
L’incidence professionnelle
Le tribunal a évalué ce poste de préjudice à la somme de 80 000 euros dont il a déduit la créance de la CPAM, allouant à M. [P] [W] la somme de 19 961,99 euros. M. [P] [W] sollicite de ce chef une somme de 80 000 euros. Les appelantes offrent 15 000 euros, et subsidiairement 30 000 euros.
Ce poste a pour objet d’indemniser non la perte de revenus mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle comme le préjudice subi en raison de la dévalorisation sur le marché du travail, de la perte d’une chance professionnelle ou l’augmentation de la pénibilité, de la nécessité de devoir abandonner sa profession au profit d’une autre. Ce poste doit également inclure les frais de reclassement professionnel, de formation, de changement de poste.
M. [P] [W] rappelle qu’il est ingénieur en physique des matériaux, titulaire d’un doctorat, qu’à la date de l’accident il était employé par le groupe Solvay en qualité de chargé de recherche depuis le 12 janvier 2004, qu’en 2008 il bénéficiait d’un coefficient 460 et aurait dû percevoir une rémunération brute annuelle de 50 407 euros pour un emploi à taux plein. Il indique qu’il est évident que sa créativité, qualité essentielle dans son domaine d’activité, a diminué et qu’en outre jusqu’à fin octobre 2008, il ne travaillait toujours qu’à 60%. Il fait valoir que l’accident a indéniablement ‘mis un coup d’arrêt à son évolution de carrière’, car sans lui, il aurait atteint le niveau 550 (coefficient de la convention collective nationale des industries chimiques) de chef de service et pourrait prétendre à un salaire annuel de 91 000 euros bruts, alors qu’il ne perçoit actuellement que 44 167 euros bruts dans son emploi en Espagne. Il rappelle la motivation du jugement dont appel qu’il considère comme parfaitement adaptée.
Il résulte de l’expertise que M. [P] [W] était apte à exercer son métier habituel mais à un niveau moindre en terme de rentabilité, efficacité, rapidité. Plus précisément, l’expert, au titre des séquelles neuropsychologiques, a retenu une lenteur idéatoire, des troubles de la mémoire, un certain degré de désinhibition responsable d’une certaine familiarité et des modifications du caractère avec irritabilité, impulsivité, labilité émotionnelle.
M. [P] [W] n’était âgé que de 32 ans lorsque son état a été consolidé. Compte tenu des séquelles de l’accident, il a dû quitter l’emploi qu’il occupait en France et, même s’il a retrouvé un emploi en Espagne, il est établi qu’il a subi et subira une augmentation de la pénibilité au sein de son emploi, quel qu’il soit, compte tenu notamment des modifications de son caractère, sources de complications dans les relations professionnelles, et d’une perte de créativité (découlant de sa perte d’efficacité et de rapidité).
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a évalué ce préjudice à la somme de 80 000 euros.
Le solde de la créance de la CPAM étant de 43 319,19 euros, à déduire de ce poste, les appelantes seront condamnées de ce chef au paiement à M. [P] [W] de la somme de 36 680,81 euros (80 000 – 43 319,19).
Le déficit fonctionnel permanent
Le tribunal a évalué ce préjudice à la somme de 48 000 euros. M. [P] [W] sollicite la confirmation de la décision de ce chef, les appelantes considèrent qu’une somme de 40 000 euros réparera suffisamment ce préjudice.
Le DFP de M. [P] [W] est de 20%.
L’évaluation du tribunal sera confirmée, la somme de 48 000 euros étant adaptée tant au taux de DFP qu’à l’âge qu’avait M. [P] [W] à la consolidation.
Toutefois, sachant qu’il n’est pas discuté que la victime a perçu de la MAIF, dans le cadre de la garantie ‘dommages corporels’ de son contrat d’assurance, une somme de 6 400 euros le 23 août 2007, pour laquelle il a signé une quittance subrogatoire, cette indemnité doit être déduite de celle qui lui est allouée à hauteur de 48 000 euros, soit un solde dû de 41 600 euros.
Le préjudice d’agrément
Le tribunal a alloué de ce chef une somme de 10 000 euros à M. [P] [W], lequel réclame 20 000 euros, les appelantes offrant de lui verser 5 000 euros.
L’expert a indiqué que ce préjudice était léger dans la mesure où M. [P] [W] était apte à s’adonner à un certain nombre d’activités de loisirs que pouvait pratiquer un homme de son âge. Il a cependant retenu qu’il était gêné pour faire de la course à pied et pour les longues marches.
M. [P] [W] invoque une gêne supplémentaire dans la pratique de la trompette et de la guitare, qu’il avait évoquée lors de l’expertise mais que l’expert n’a pas retenue.
M. [P] [W] ne justifie pas avoir pratiqué une activité musicale.
Eu égard à la gêne subie dans les activités sportives, telle que retenue par l’expert, le jugement sera confirmé en ce qu’il lui a alloué une somme de 10 000 euros de ce chef.
Le préjudice esthétique permanent
Le tribunal l’a évalué à la somme de 1 500 euros, les appelantes sollicitent la confirmation de ce chef, M. [P] [W] demandant une somme de 1 800 euros.
Ce préjudice a été évalué à 1/7 par l’expert. Il est dû à la cicatrice de trachéotomie, à la discrète asymétrie faciale et à la discrète lenteur motrice.
Ce préjudice sera justement réparé par l’allocation d’une somme de 1 800 euros, le jugement étant infirmé de ce chef.
La somme totale allouée à M. [P] [W] s’établit à la somme de 132 231,72 euros.
Les préjudices des victimes par ricochet
La cour observe que si l’arrêt du 6 novembre 2018 a été cassé par la Cour de cassation dans sa décision du 24 mars 2021 notamment en ce qu’il avait condamné les sociétés intimées à payer aux parents de M. [P] [W] la somme de 2 084,79 euros au titre de leur préjudice matériel, ceux-ci ne forment aucune demande de ce chef dans le dispositif de leurs conclusions qui seul saisit la cour.
Le tribunal a alloué aux parents de M. [P] [W] une somme de 3 000 euros chacun en réparation de leur préjudice moral. Ils sollicitent une somme de 3 000 euros chacun. Les appelantes demandent à la cour de leur accorder une somme de 1 500 euros chacun.
L’angoisse éprouvée par les parents de M. [P] [W] en conséquence de l’accident sera justement réparée par l’octroi d’une somme de 2 000 euros à chacun.
Les demandes de la CPAM
Aux termes des dispositions de l’article 634 du code de procédure civile, les parties qui ne formulent pas de moyens nouveaux ou de nouvelles prétentions sont réputées s’en tenir aux moyens et prétentions qu’elles avaient soumis à la juridiction dont la décision a été cassée. Il en est de même de celles qui ne comparaissent pas.
La cour doit donc statuer sur les demandes formées par la CPAM devant la cour d’appel de Paris aux termes de ses conclusions du 14 décembre 2017. La caisse sollicitait alors ‘la condamnation in solidum des sociétés appelantes à lui payer la somme de 74 510,61 euros au titre des indemnités journalières servies et des frais d’hospitalisation pris en charge, et de 164 897,85 euros correspondant à la rente capitalisée (129 763,35 euros) et aux arrérages échus (34 619,36 euros), à due concurrence de l’indemnité réparant le préjudice corporel de la victime, outre intérêts et capitalisation’ sur ces sommes, ainsi que celles de 1 055 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion et de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Les appelantes ne contestent pas le montant de la créance de la CPAM au titre des indemnités journalières et des frais d’hospitalisation. Ils soutiennent en revanche qu’il n’est pas justifié que l’attribution de la rente invalidité soit une conséquence de l’accident et observent qu’en tout état de cause la demande au titre de la capitalisation doit être rejetée puisque la pension a cessé d’être versée à compter du 1er octobre 2015.
Il convient de faire droit à la demande de la CPAM du chef des indemnités journalières et frais d’hospitaliers, correspondant à une somme de 74 510,61 euros.
Il résulte de l’arrêt de la cour d’appel de Paris que la CPAM avait versé une attestation d’imputabilité de sa créance datée du 26 avril 2012, ainsi qu’une attestation définitive des débours du 15 mars 2016, erronée puisque comprenant la capitalisation de la rente qui n’était plus versée depuis le 1er octobre 2015.
Toutefois, la production d’une attestation d’imputabilité suffit à faire la preuve du lien direct entre l’attribution de la rente, qui constate la diminution de la capacité de travail de M. [P] [W] d’au moins 66,66%, et l’accident dont il a été victime.
La rente a cessé de lui être versée en raison de son aptitude personnelle à retrouver une situation professionnelle normale.
Ainsi qu’il a été exposé ci-dessus, il résulte de l’arrêt de la cour d’appel de Paris que la créance de la CPAM au titre de la rente ne s’établit pas à la somme de 164 897,85 euros mais à 51 973,13 euros, puisqu’elle n’a été versée que du 1er octobre 2007 au 1er octobre 2015.
Les appelantes seront condamnées in solidum au paiement de cette somme de 51 973,13 euros, outre celle de 74 510,61 euros, soit 126 483,74 euros au total au profit de la CPAM des Hautes Alpes, ainsi que de la somme de 1 055 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion.
La somme de 126 483,74 euros produira intérêts à compter de la première demande de la CPAM et les intérêts seront capitalisés dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.
L’ajout de cette somme à celle déjà allouée à M. [P] [W] (132 231,72) et à ses parents (4 000), dépasse le seuil du premier plafond de garantie (217 989,52 euros), en sorte qu’il convient d’y ajouter le second plafond, la CPAM étant subrogée dans les droits de M. [P] [W] et agissant bien en indemnisation des préjudices corporels subis par celui-ci.
Les demandes de la MAIF
Le tribunal avait alloué à la MAIF la somme de 10 671,39 euros au titre de son recours subrogatoire. Les appelantes sollicitent la confirmation du jugement en ce qu’il a fait droit à cette demande mais demandent à la cour de la déduire de celles revenant à M. [P] [W] au titre des préjudices qu’elle a contribué à indemniser.
Le 23 août 2007, la MAIF a versé à M. [W] la somme de 6400 euros en application de la garantie dommages corporels et cette somme a été déduite de celle allouée à la victime au titre du déficit fonctionnel permanent.
La MAIF a également payé les honoraires du docteur [Y] qui a assisté M. [P] [W] lors de l’expertise judiciaire du 22 janvier 2010 et ce, pour un montant total de 730 euros.
De plus, la MAIF a réglé les frais d’avocat de M. [P] [W], précisément les honoraires de Maître [C] pour un montant de 777,40 euros et les honoraires de maître [E] pour un montant de 811,83 euros. Les frais de l’expertise judiciaire ordonnée par le tribunal ont été acquittés par la MAIF et ce pour un montant de 800 euros. De même, les frais du bilan neuropsychologique réalisé en avril 2010 par M. [P] [W] ont été entièrement pris en charge par la MAIF pour la somme de 200 euros. Elle a également pris en charge les frais d’huissier de justice exposés par M. [P] [W] dans le cadre de l’affaire en première instance et ce pour un montant de 767,16 euros (soit 510,20 + 256,96).
Ainsi, suite à l’accident survenu le 7 août 2005, la MAIF a versé à son assuré la somme totale de 10 671,39 euros (soit : 185 + 6 400 + 730 + 777,40 + 811,83 + 800 + 200 + 767,16 ).
Les appelantes ne contestant pas devoir cette somme, il sera fait droit à la demande de la MAIF à hauteur de la somme de 10 671,39 euros.
Sur les autres demandes
Les sociétés appelantes demandent que soit ordonnée aux consorts [W] et à la CPAM la restitution des sommes qu’elles ont versées en vertu du jugement assorti de l’ exécution provisoire du 1er août 2013, avec les intérêts à compter de cette décision. A supposer qu’elles soient créancières de l’une ou l’autre de ces parties au terme de la présente décision, celle-ci constituera le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement ; les sommes versées devant être restituées portent intérêt au taux légal à compter de la notification valant mise en demeure ; il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu de statuer sur la demande à ce titre des sociétés appelantes.
Les sociétés intimées seront condamnées in solidum aux dépens de première instance et d’appel.
Elles seront condamnées à payer aux consorts [W], unis d’intérêt, la somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et celle de 2 500 euros à la MAIF.
Dispositif
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire ;
Vu l’arrêt de la Cour de cassation du 24 mars 2021 ;
Statuant dans les limites de la cassation, confirme le jugement entrepris en ce qu’il a :
Condamné in solidum l’association Centre Nautique Les Glénans et les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à payer à la MAIF la somme de 10 671,39 euros
L’infirme en toutes ses autres dispositions.
Statuant à nouveau et ajoutant :
Dit que le plafond d’indemnisation concernant le sinistre du 7 août 2005 s’établit à la somme totale de 327 311,85 euros (250 000 DTS + intérêts).
Condamne in solidum l’association Centre Nautique Les Glénans et les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à payer :
à M. [P] [W] les sommes suivantes :
– 1 292,23 euros au tire des dépenses de santé futures
– 809,97 euros au titre des frais divers
– 810 euros au titre des dépenses de santé actuelles
– 11 291,50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire
– 8 357,21 euros au titre des pertes de gains professionnels actuels
– 4 590 euros au titre de la tierce personne temporaire
– 15 000 euros au titre des souffrances endurées
– 36 680,81 euros au titre de l’incidence professionnelle
– 41 600 euros au titre du déficit fonctionnel permanent
– 10 000 euros au titre du préjudice d’agrément
– 1 800 euros au titre du préjudice esthétique permanent.
à M. [X] [W] la somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral,
à Mme [J] [W] la somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice moral,
à la CPAM des Hautes Alpes :
– la somme de 126 483,74 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de sa première demande, les intérêts étant capitalisés dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil
– la somme de 1 055 euros au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion,
Dit que les sommes allouées aux consorts [W] produiront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Rejette le surplus des demandes indemnitaires.
Condamne in solidum l’association Centre Nautique Les Glénans et les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles à payer aux consorts [W] la somme de 6 000 euros et à la MAIF la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Rejette la demande de la CPAM des Hautes Alpes au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne in solidum l’association Centre Nautique Les Glénans et les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Marie-José BOU, Président et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier,Le Président,