Décision de justice sur la Confidentialité

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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRET DU 17 FEVRIER 2023

(n° , 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/05590 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBWCP

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Février 2020 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 19/65567

APPELANTE

SARL PERPETUAL EMOTION

agissant poursuites et diligences en la personnde de son gérant domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN – DE MARIA – GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

INTIMEES

S.A. ORANGE SA

[Adresse 2]

[Localité 5]

N° SIRET : 380 129 866 ( RCS NANTERRE)

S.A. ORANGE BUSINESS SERVICES

[Adresse 1]

[Localité 6] / France

N° SIRET : 345 039 416 ( RCS BOBIGNY)

représentées par Me Vincent VILCHIEN, avocat au barreau de PARIS, toque : R120

Assistées de Me Arnaud CONSTANS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant M. Denis ARDISSON, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Denis ARDISSON, Président de chambre

Mme Marion PRIMEVERT, Conseillère

Mme Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère

Qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : M.Damien GOVINDARETTY

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère pour le Président empêché, et par Damien GOVINDARETTY, Greffier présent lors de la mise à disposition.

Vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 12 février 2020 qui, avec exécution provisoire, a limité la condamnation des sociétés Orange et Orange Business Services (‘la société Orange’) à payer à la société Perpetual eMotion, au titre d’une ‘prestation vidéo’, la somme de 95.010 euros toutes taxes comprises avec intérêts à partir du 25 juin 2019 pour 47.505 euros, et du 9 septembre 2019, pour 47.505 euros, débouté la société Perpetual eMotion de ses demandes de dommages et intérêts au titre d’une prestation de ‘dispositif immersif’ sur le fondement de la rupture du contrat, ou subsidiairement, sur la rupture de pourparlers, et condamné la société Orange à payer les dépens et à verser à la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu l’appel interjeté le 20 mars 2020 par la société Perpetual eMotion ;

* *

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 14 Mars 2022 pour la société Perpetual eMotion aux fins d’entendre en application des articles 1103, 1113, 1172, 1224, 1226, 1231-1, 1240 et 1710 du code civil, L. 151-1, L. 441-10 et L. 442-1 du code de commerce :

1. La Vidéo ‘ demandes au titre de la rupture illégale de la relation contractuelle

‘ Confirmer le Jugement en ce qu’il a dit qu’il existait une relation contractuelle entre Orange SA, Orange Business Services et Perpetual eMotion au titre de la Vidéo ;

‘ Confirmer le Jugement en ce qu’il a condamné in solidum Orange SA, Orange

Business Services à payer à Perpetual eMotion une somme de 95.010 euros TTC,

assortie des intérêts prévus à l’article L. 441-10 du Code de commerce (anciennement L. 441-6 du Code de commerce) ;

– infirmer le Jugement en ce qu’il a rejeté la demande de Perpetual eMotion tendant au paiement de l’indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros prévue par l’article susmentionné (ensemble l’article D. 441-5 du Code de commerce), et, statuant à nouveau, condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services au paiement de l’indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros ;

‘ Infirmer le Jugement en ce qu’il a rejeté les demandes de Perpetual eMotion tendant au paiement du travail supplémentaire qu’Orange avait d’ailleurs accepté de prendre à sa charge et, statuant à nouveau, condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer la somme de 10.000 euros HT à ce titre ;

‘ Infirmer le Jugement en ce qu’il a rejeté les demandes de Perpetual eMotion tendant à la réparation de son préjudice d’image (voir ci-dessous, dans la partie sur le dispositif immersif) ;

‘ Infirmer le Jugement en ce qu’il a rejeté les demandes de Perpetual eMotion tendant au recouvrement des frais bancaires supplémentaires (affacturage) que VRrOOm a dû engager pour faire face à cet impayé d’Orange soit la somme de 813,33 euros et, statuant à nouveau, condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services au paiement de cette somme,

2. Le Dispositif Immersif ‘ demandes au titre de la rupture illégale de la relation contractuelle, et, à titre subsidiaire, au titre de la rupture illégale des pourparlers

2.1 A titre principal, sur la relation contractuelle

‘ Infirmer le Jugement en ce qu’il a dit qu’il n’existait pas de relation contractuelle entre Orange SA, Orange Business Services et Perpetual eMotion au titre de la Vidéo ;

Statuant à nouveau

‘ Dire et juger qu’une relation contractuelle existe entre Orange SA et Orange Business Services au titre du Dispositif Immersif ;

‘ Dire et juger que c’est fautivement que, par courrier électronique du 9 septembre 2019, Orange a résolu unilatéralement le contrat ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 241.700 1.500.000 euros au titre du gain manqué sur les frais de management contractuellement prévus et qui auraient été dus si le contrat n’avait pas été abusivement rompu ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 338.876,52 euros au titre de la perte de chance de la rémunération contractuelle correspondant à la gestion des droits d’exploitation s’élevant à 15% du montant des coûts d’exploitation du Dispositif Immersif et qui auraient été dus si le contrat n’avait pas été abusivement rompu ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 80.000 euros au titre du préjudice d’image subi du fait de la rupture abusive du contrat ;

‘ Subsidiairement, si la Cour devait rejeter les demandes au titre du gain manqué,

Condamner in solidum Orange et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 50.000 euros HT (soit 60.000 euros TTC) au titre des prestations effectuées au titre du Dispositif Immersif, suivant une estimation au temps passé

2.2 A titre subsidiaire, sur la rupture des pourparlers

‘ Infirmer le Jugement en ce qu’il a dit qu’Orange SA, Orange Business Services avaient pu, sans faute, rompre les pourparlers avec Perpetual eMotion au titre du Dispositif Immersif,

Dire et juger que c’est fautivement que, par courrier électronique du 9 septembre 2019, Orange a mis fin aux pourparlers avec Perpetual eMotion ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 80.000 euros au titre du préjudice d’image subi du fait de la rupture abusive des pourparlers ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 50.000 euros HT (soit 60.000 euros TTC) au titre des prestations effectuées au titre du Dispositif Immersif, suivant une estimation au temps passé ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 32.478,25 euros au titre de la perte de chance de travailler sur d’autres projets.

3. A titre subsidiaire, demandes fondées sur le droit des pratiques restrictives de concurrence

Si la Cour devait rejeter tout ou partie des demandes formulées ci-dessus :

‘ Infirmer le Jugement en ce qu’il a dit que la société Orange SA, Orange Business Services n’avaient pas méconnu l’article L. 442-1 du Code de commerce ;

Statuant à nouveau

‘ Dire et juger qu’ Orange SA et Orange Business Services ont méconnu l’article L. 442-1 (I) du Code de commerce en obtenant de Perpetual eMotion des avantages dépourvus de toute contrepartie ;

Sur la Vidéo :

‘ Condamner in solidum Orange SA, Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion une somme de 95.010 euros TTC, assortie des intérêts prévus à l’article L. 441-10 du Code de commerce (anciennement L. 441-6 du Code de commerce) ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services au paiement de l’indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros prévue par l’article L. 441-10 du Code de commerce ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion une somme de 10.000 euros HT au titre du travail supplémentaire dû aux changements de cahier des charges;

Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion une somme de 813,13 euros au titre des agios.

Sur le Dispositif Immersif :

‘ Condamner in solidum Orange et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 1.500.000 euros au titre du gain manqué sur les frais de management contractuellement prévus et qui auraient été dus si le contrat n’avait pas été abusivement rompu ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 338.876,52 euros au titre de la perte de chance de la rémunération contractuelle correspondant à la gestion des droits d’exploitation s’élevant à 15% du montant des coûts d’exploitation du Dispositif Immersif et qui auraient été dus si le contrat n’avait pas été abusivement rompu ;

‘ Condamner in solidum Orange et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 80.000 euros au titre du préjudice d’image subi du fait de la rupture abusive du contrat ;

‘ Subsidiairement, si la Cour devait rejeter les demandes au titre du gain manqué, Condamner in solidum Orange et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 50.000 euros HT (soit 60.000 euros TTC) au titre des prestations effectuées au titre du Dispositif Immersif, suivant une estimation au temps passé.

4. En tout état de cause

‘ Confirmer le Jugement en ce qu’il a débouté Orange SA et Orange Business Services de leurs demandes ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 20.000 euros au titre du temps passé à tenter de régler ce litige ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 2.803,20 euros au titre des frais et honoraires déboursés pour une procédure de médiation ;

‘ Condamner in solidum Orange SA et Orange Business Services à payer à Perpetual eMotion la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

‘ Condamner in solidum Orange et Orange Business Services aux entiers dépens ;

* *

Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 19 septembre 2022 pour la société Orange et Orange Business Services afin d’entendre, en application des articles 1124 et suivants et 1231-1 du code civil, et L. 442-1 du code de commerce :

Recevoir la société Orange SA et Orange Business Services et leurs écritures, les disant bien fondées ;

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– condamné in solidum la société Orange SA et Orange Business Services à payer à la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») la somme de 95.010 euros TTC avec intérêts calculés à partir du 25 juin 2019 pour 47.505 euros et le 9 septembre 2019 pour 47.505 euros ;

– Débouté la société Orange SA et Orange Business Services de leurs demandes reconventionnelles ;

– Condamné in solidum la société Orange SA et Orange Business Services à payer à la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamné in solidum la société Orange SA et Orange Business Services aux dépens de l’instance ;

de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– Débouté la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») de ses autres demandes au titre du Dispositif Crypte et travail additionnel ;

– Débouté la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») de l’ensemble de ses demandes d’indemnisation du fait d’une rupture des négociations sur le Dispositif Immersif ;

– Débouté la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») de ses demandes d’indemnisation au titre de pratique restrictive de concurrence au visa de l’article L.442-1 du Code de commerce ;

Et, statuant à nouveau :

Sur le Dispositif Crypte,

– Juger que la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») ne démontre pas l’existence de fautes contractuelles imputables aux sociétés Orange SA et Orange Business Services au titre du Dispositif Crypte ;

– Juger, en revanche, que la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») a commis de graves fautes contractuelles justifiant la résiliation du contrat à ses torts exclusif en raison :

– De son incapacité à délivrer à Orange SA et Orange Business Services une vidéo correspondant aux objectifs définis contractuellement

De son incapacité à négocier des droits d’exploitation correspondant aux besoins formulés par Orange SA et Orange Business Services ;

– Juger qu’en raison de l’urgence, la résiliation intervenue par notification du 9 septembre 2019 n’est pas fautive en l’absence de mise en demeure préalable, au visa de l’article 1226 du Code civil ;

– Débouter la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») de l’ensemble de ses demandes ;

Sur le Dispositif Immersif,

-A titre principal,

– Juger qu’aucune relation contractuelle ni pourparlers n’existaient entre Orange SA,

Orange Business Services et la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») au titre du Dispositif Immersif, les échanges intervenus correspondant uniquement à un accompagnement de la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») par Orange SA et Orange Business Services dans le cadre d’une réponse à appel d’offres ;

– Juger que les échanges entre Orange SA, Orange Business Services et la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») ont pu démontrer que cette dernière n’avait pas d’expérience dans le domaine de l’organisation d’expositions et rencontrait des difficultés pour préparer un Business Plan satisfaisant à ce titre ;

– Juger que les échanges entre Orange SA, Orange Business Services et la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») n’ont pas permis à Orange d’obtenir des « avantages injustifiés » susceptibles d’être sanctionnés au visa de l’article L.442-1 du Code de commerce ;

– Par conséquent, juger que le rejet de la candidature de la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») par Orange SA et Orange Business Services n’est pas fautive puisque reposant sur de justes motifs ;

– Subsidiairement,

– Juger que seules des pourparlers existaient entre Orange SA, Orange Business Services et la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») au titre du Dispositif Immersif, à l’exclusion de tout contrat ;

– Juger que les échanges entre Orange SA, Orange Business Services et la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») ont pu démontrer que cette dernière n’avait pas d’expérience dans le domaine de l’organisation d’exposition et rencontrait des difficultés pour préparer un Business Plan à ce titre ;

– Juger que les échanges entre Orange SA, Orange Business Services et la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») n’ont pas permis à Orange d’obtenir des « avantages injustifiés » susceptibles d’être sanctionnés au visa de l’article L.442-1 du Code de commerce ;

– Par conséquent, juger que le rupture des pourparlers entretenus entre la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») et la société Orange SA et Orange Business Services n’est pas fautive puisque reposant sur de justes motifs ;

– Débouter la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») de l’ensemble de ses demandes

Sur la demande reconventionnelle d’Orange SA et d’Orange Business Services,

– Condamner la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») à payer à Orange SA et Orange Business Services la somme de 90.199,21 euros HT, au titre des surcoûts qu’elles ont dû exposer pour faire face aux défaillances de Perpetual eMotion (« VRrOOm ») dans le cadre du Dispositif Crypte ;

– Condamner la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») à payer à Orange SA et Orange Business Services la somme de 80.000 euros chacune, à titre de réparation de l’atteinte portée à leur image à l’égard du Diocèse de [Localité 9] et de [Localité 9] Musées ;

En tout état de cause,

– Condamner la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») au paiement de la somme de 45.000 euros à chacune des sociétés Orange SA et Orange Business Services, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– Condamner la société Perpetual eMotion (« VRrOOm ») aux entiers dépens de l’instance, dont distraction à Me Vincent Vilchien, avocat constitué, conformément aux dispositions

de l’article 699 du Code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR,

La cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties.

Il sera succinctement rapporté que, à la suite de l’incendie de la cathédrale Notre-Dame de [Localité 9], la société Orange a annoncé par un communiqué de presse du 16 avril 2019 son intention de proposer à la Fondation du Patrimoine, sa participation à des actions pour la promotion du monument.

Le 18 avril 2019, la société Orange est entrée en relation avec la société Perpetual eMotion – au nom commercial ‘VRrOOm’ avec pour activité la production, la distribution et l’exploitation de films de réalité virtuelle -, puis le 15 mai 2019, la société Orange a adressé à la société Perpetual eMotion une ‘expression de besoin’ pour la réalisation d’une vidéo-son de la cathédrale avant l’incendie d’une durée de trois à quatre minutes avec une résolution d’image de 1920 pixels par 1080 devant être projetée au sein de la [7] à l’occasion d’une exposition organisée par [Localité 9] Musées et intitulée ‘Notre-Dame de [Localité 9], de Victor Hugo à [Localité 10]’.

Le 24 mai 2019, les parties ont convenu d’un ‘accord de confidentialité’ pour régir leurs relations pour ‘le projet’, définies en liminaire, ainsi :

‘Orange se propose d’orchestrer un dispositif innovant qui offrira au public une expérience ancrée sur File de l'[Localité 8] et ses environs faisant notamment appel à des technologies irnmersives. L’ambition du projet est de proposer une alternative au public de la Cathédrale pendant la reconstruction, ainsi que d’envisager une expérience augmentée amenée à perdurer au-delà de la reconstruction (‘le Projet’).

Les Parties souhaitent étudier l’opportunité et les conditions, notamment éditoriales, techniques, commerciales et financières, de mettre en oeuvre le Projet.

Les Parties ont été et seront, dans ce cadre de la négociation du Projet, amenées à se communiquer mutuellement des informations confidentielles ayant trait à leurs activités respectives, programmes, programmations, services, technologies, produits et projets et/ou leurs stratégies et plans de développement, actuels ou futurs.’

Enfin, la société Orange a émis une seconde ‘expression de besoin’ pour la réalisation d’un ‘dispositif immersif’ du public permettant ‘d’Offrir une expérience multisensorielle projetant les visiteurs au c’ur de la cathédrale’ et qu’elle a communiquée à la société Perpetual eMotion 28 mai 2019, cette dernière ayant élaboré une proposition commerciale pour cette réalisation et une offre de budget qu’elle a communiquées par courriel du 14 juin 2019.

Puis le 25 juin 2019, la société Orange a accepté le devis de la société Perpetual eMotion pour la production et la mise en place du dispositif technique de la vidéo moyennant le prix de 79.175 euros hors taxes (95.010 euros TTC), dont 50% payable à la signature, et représentatif des réalisations d’une première vidéo de quatre minutes pour 39.525 euros HT, d’une bande d’annonce de trente secondes pour un montant de 3.500 euros HT et d’une bande son et l’acquisition et l’installation sur site du matériel nécessaire pour la diffusion pour 36.150 euros HT.

Après une première version de la vidéo livrée le 8 juillet 2019, la société Perpetual eMotion a réalisé sur la base de critiques de la société Orange deux autres versions livrées les 30 juillet puis le 9 août 2019, et tandis que la société Orange avait réclamé le 7 juillet 2019 une réalisation en résolution 4K, la société Perpetual eMotion lui a présenté un devis de 93.950 euros HT au lieu des 79.175 euros convenus.

Le 9 août 2019, la société Orange a communiqué à la société Perpetual eMotion un modèle de ‘business plan’ à réaliser pour le développement du ‘projet immersif’ en partenariat avec des entreprises proposées par la société Perpetual eMotion, cette dernière ayant recueilli de différentes entreprises le prix et les prestations qu’elles devaient apporter pour ce projet et sur les bases desquels la société Perpetual eMotion a établi deux versions du ‘business plan’ remis à la société Orange le 27 août puis le 9 septembre 2019.

En réponse à un courriel du 9 septembre 2019 par lequel la société Perpetual eMotion demandait des informations sur la poursuite du projet immersif et réclamait le paiement du prix convenu pour la foumiture de la vidéo, la société Orange a répondu le même jour qu’elles étaient déçues de la prestation de la vidéo et a notifié leur décision de mettre un terme à la collaboration.

Ayant vainement mis en demeure la société Orange le 10 octobre 2019 puis le 13 novembre 2019 de régler la facture et les frais exposés pour la conduite du projet immersif ainsi que le paiement de dommages et intérêts fondés sur la rupture du contrat, la société Perpetual eMotion l’a assignée aux mêmes fins le 15 novembre 2019.

1. Sur la fourniture de la prestation de la vidéo de la crypte

– sur les torts dans la résiliation du contrat

Pour entendre infirmer le jugement en ce qu’il a retenu sa responsabilité dans la rupture de ce contrat, la société Orange se prévaut des réserves qu’elle a successivement émises lors de la visualisation des trois vidéos les 8 juillet, 30 juillet puis le 9 août 2019 estimant qu’elles étaient trop lentes, ou qu’elles comprenaient des ‘redites’, qu’une image de l’orgue et de la flèche faisait défaut, ou qu’elles n’étaient pas assez ‘émotionnelles’, la société Orange mettant aux débats une appréciation de la qualité de ces vidéos qu’elle a confiée à l’agence de communication Track. La société Orange oppose encore le fait que la société Perpetual eMotion n’a pas été en mesure d’acquérir les droits d’exploitation pour les diffusions envisagées par Orange.

Au demeurant, connaissance prise par la cour des courriels des sociétés Orange et des quelques images de la vidéo commentées par l’agence Track sur leur qualité, il ne se déduit pas la preuve que les rendus étaient significativement éloignés de la demande, ni que la société Perpetual ne pouvait remédier aux quelques critiques, qu’elle a par ailleurs corrigées, ni non plus l’impossibilité de la société Perpetual eMotion d’acquérir les droits d’exploitation utiles à la vidéo au moment de son élaboration et de ses versions successives, et tandis que la demande de production d’images au format 4K constitue indiscutablement un changement de cahier des charges puisqu’elle nécessitait de rechercher d’autres sources d’images et un autre montage, le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu les torts de la société Orange dans la rupture du contrat.

– sur les chefs de préjudice

Si la responsabilité de la société Orange est retenue, il est cependant constant que le trailer et les prestations pour le son de cette vidéo n’ont pas été réalisés par la société Perpetual eMotion, de sorte que seule est due la somme correspondant à la confection de la vidéo convenue au devis au prix de 39.525 euros augmenté des taxes.

Le jugement sera infirmé de ce chef, et la somme retenue par la cour sera assortie des intérêts prévus à l’article L. 441-10 du code de commerce ainsi que du paiement de l’indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros prise en application de l’article D. 441-5 du code de commerce.

2. Sur les prestations attachées au dispositif immersif

– sur l’existence et l’objet du contrat

La société Orange conclut à la confirmation du jugement en ce qu’il a débouté la société Perpetual eMotion, en soutenant qu’elles n’étaient pas liées par un contrat, la société Perpetual eMotion ayant seulement accepté de poursuivre les négociations après une présélection d’entreprises, et que si elle a effectivement été l’interlocuteur unique d’un consortium pour avancer le projet de ‘dispositif immersif’, elle a supporté les risques inhérents à une présentation détaillée de l’offre devant être soumise à la société Orange qui conservait la faculté de conclure le contrat suivant la prescription de l’article 1112 du code civil disposant que ‘L’initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres’. Enfin, elle conclut que déçue par la réalisation de la vidéo par la société Perpetual eMotion, elle était de bonne foi fondée à ne pas la retenir pour le dispositif immersif.

Pour sa part, la société Perpetual eMotion conclut à l’infirmation du jugement qui l’a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts en soutenant que la société Orange s’est engagée à lui confier la conduite du projet immersif ainsi que du ‘consortium’ d’entreprises pour le réaliser.

Elle se prévaut de l’accord de confidentialité précité, de la proposition commerciale pour cette réalisation et de son offre de budget qu’elle a communiqués par courriel du 14 juin 2019 ainsi que des échanges de courriels entre les parties matérialisant l’accord de la société Orange, en particulier le message SMS dans lequel un représentant de la société Orange lui a indiqué le 20 juin 2019 :

‘Hello [W]. Tu l’as entendu, c’est go! [‘] je peux te rappeler demain pour debrief’ On va enclencher mais je serai particulièrement attentif au fait qu’on contractualise cela proprement et asap’

Elle met encore en avant un courriel du 2 juillet 2019 dans lequel le même représentant de la société Orange lui indiquait :

‘Je peux te l’écrire moi si ça t’aide. Il s’agit à ce stade d’une présélection : oui à un consortium dirigé par VRrOOm. La décision finale détaillée qui fera l’objet d’une contractualisation sera prise le 23 juillet : on saura à ce moment là lesquels de tes partenaires sont dans le consortium (pour Demute, Forum des Images, Solidanim et Backlight ça semble évident ; pour Toro bleu c’est probable mais je l’ignore encore à ce stade.’

Enfin elle met aux débats le constat d’huissier qu’elle a fait établir le 20 janvier 2022 établissant que la société Orange s’est appropriée différents éléments du business plan qu’elle avait réalisé ainsi que ses projections financières.

Sur ce, d’après l’objet de l’accord de confidentialité du 24 mai 2019 tel qu’il est précité ci-dessus, la cour déduit la preuve d’un échange de volonté des parties sur les éléments essentiels à la misson confiée à la société eMotion de concevoir le projet immersif, étant d’une part rappelé que l’accord sur le prix en matière de contrat d’entreprise n’est pas une élément essentiel, et d’autre part relevé que cet accord était antérieur à l’appel d’offres auquel la société Orange prétend avoir soumis cette prestation et pour lequel elle n’indique par ailleurs pas celles des entreprises qui étaient en concours avec la société Perpetual eMotion.

Et d’après les nombreux courriels échangés entre les parties, la réalisation d’un prototype du dispositif mis en démonstration à la cité de l’architecture à [Localité 9] le 26 juillet 2019, puis le recueil des données utiles à l’élaboration du business plan que la société Orange a confié à la société eMotion auprès des sociétés Solid’Anim, Demute, Backlight et Emissive, et enfin, d’après les business plan élaborés et successivement remis les 27 août et 9 septembne 2019, la société Perpetual eMotion rapporte la preuve qu’elle a satisfait à cette mission.

En revanche, il ne se déduit ni des termes de l’accord de confidentialité, ni des courriels échangés ultérieurement entre les parties, la preuve que la candidature de la société Perpetual eMotion était acquise pour la réalisation du projet ‘immersif’ elle-même, le courriel du représentant de la société Orange émis notamment le 5 juillet 2019 lui rappelant notamment que ‘le Go ultime sera donné par le N°2 d’Orange à l’issue du pitch du 23/07 (…) jusqu’ici tout va bien’ mais la partie n’est pas gagnée ».

Il s’en déduit que la responsabilité contractuelle de la société Orange dans la rupture du contrat sera retenue, mais seulement dans son objet visant à la conception du projet immersif, et non dans la réalisation et l’exploitation du projet, de sorte que la société Perpetual ne peut prétendre aux indemnisations sur ces fondements et qu’elle réclame au principal au titre du gain manqué sur les frais de management ou de la perte de chance de la rémunération contractuelle correspondant à la gestion des droits d’exploitation.

En revanche, et sur la base des prestations correspondant à l’élaboration du ‘business plan’ et l’estimation au temps passé, la cour fera droit à la demande de condamnation de la société Orange à payer à la société Perpetual eMotion la somme de 60.000 euros toutes taxes comprises.

Alors enfin que la société Perpetual eMotion ne caractérise par l’atteinte à son image qu’elle réclame à hauteur de 80.000 euros de dommages et intérêts la société Orange se serait rendue responsable dans la limite des torts qui sont reconnus ci-dessus, le jugement sera aussi confirmé en ce qu’il rejeté ce chef de demande.

3. Sur les dépens et les frais irrépétibles

Alors que la société Orange succombe à l’action, le jugement sera confirmé en ce qu’il a statué sur les frais irrépétibles et les dépens et statuant de ces chefs en cause d’appel, elle sera condamné aux dépens et à acquitter la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement en ce qu’il a débouté la société Perpetual eMotion de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice d’image et condamné les sociétés Orange et Orange Business Services aux dépens et au titre des frais irrépétibles ;

L’infirme pour le surplus

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne les sociétés Orange et Orange Business Services à payer à la société Perpetual eMotion les sommes de

39.525 euros augmentés des taxes, au titre de la fourniture de la vidéo, assortie des intérêts à compter du 10 octobre 2019 dans les conditions de l’article L. 441-10 du code de commerce,

40 euros prise en application de l’article D. 441-5 du code de commerce.

60.000 euros de dommages et intérêts au titre des prestations effectuées pour le projet de ‘dispositif immersif’ ;

Condamne les sociétés Orange et Orange Business Services aux dépens ;

Condamne les sociétés Orange et Orange Business Services à payer à la société Perpetual eMotion la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER LA CONSEILLÈRE POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ

 

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