Face à des soupçons sérieux de détournement de clientèle par une société tierce, l’article 145 du code de procédure civile se révèle très efficace.
Affaire Lodipro
Il ressort des pièces produites que la société Lodipro vend des produits similaires à ceux vendus par sa concurrente domiciliée à la même adresse, acquis auprès de la même coopérative, le GAFIC, à des clients qui étaient précédemment en relation d’affaires avec la société Cuisinox, à savoir la société La Zoologie, le plus important client de la société Cuisinox, mais également la mairie de [Localité 6], le camping Maguide et le lycée [9].
Elle a également démarché le Lycée professionnel Henri Brulle à qui elle a adressé un devis. Il ressort en outre des pièces produites aux débats que chacune des deux sociétés avait accès au fichier clients de l’autre société dans le cadre d’un partenariat qu’elles avaient mis en place, la société Cuisinox recommandant à ses clients la société Lodipro pour l’acquisition de produits d’hygiène et de propreté et cette dernière mettant en contact ses propres clients avec la société Cuisinox pour l’achat de matériel de cuisine.
Il existait donc des éléments objectifs justifiant la mesure ordonnée sans que celle-ci ne vienne suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve.
La mesure n’a pas un caractère général mais ne vise qu’à permettre à la société intimée d’avoir accès à des documents ayant trait à l’activité récente et concurrente de vente de matériel de cuisine de l’appelante.
En outre, la protection du secret des affaires n’est pas de nature à faire échec à lui seul à la mesure sollicitée. A ce titre l’ordonnance prévoit que l’ensemble des éléments (documents, supports informatiques et /ou tous autres produits) recueillis par l’huissier constatant, sera conservé par lui, en séquestre, jusqu’à ce qu’il en soit autrement ordonné par décision de justice contradictoire ou jusqu’à accord amiable entre les parties. La juridiction commerciale sera ainsi amenée à statuer le cas échéant sur le caractère nécessairement confidentiel ou non des documents saisis.
La présidente du tribunal de commerce a en outre pertinemment relevé qu’il n’était pas demandé à l’huissier de justice de porter des appréciations de fait ou de droit mais seulement de limiter son champ d’investigation à l’objet de sa saisine.
La décision de première instance a dès lors été confirmée.
L’article 145 du code de procédure civile
Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.
L’ordonnance sur requête
Aux termes de l’article 493 du code de procédure civile, l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.
Aux termes de l’article 496 du code de procédure civile, s’il est fait droit à la requête, tout intéressé peut en référer au juge qui a rendu l’ordonnance.