COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 27 AVRIL 2023
N° RG 20/03570 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LWTT
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
c/
[C], [S] [I]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le : 27 avril 2023
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 24 juillet 2020 par le Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de LIBOURNE (RG : 11-19-410) suivant déclaration d’appel du 01 octobre 2020
APPELANTE :
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 2]
Représentée par Me William MAXWELL de la SAS MAXWELL MAILLET BORDIEC, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉ E :
[C],[S] [I]
née le [Date naissance 1] 1962 à [Localité 5]
de nationalité Française
demeurant [Adresse 4]
Représentée par Me Josiane MOREL-FAURY, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistée par Me Annick BATBARE, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 02 mars 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Bérengère VALLEE, conseiller, chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Roland POTEE, président,
Bérengère VALLEE, conseiller,
Emmanuel BREARD, conseiller,
Greffier lors des débats : Séléna BONNET
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
Selon offre préalable acceptée le 27 mai 2015, la société Sygma Banque a consenti à Mme [C] [I] un prêt affecté à la vente par la société Sungold d’une installation solaire photovoltaïque pour un montant de 21 500 euros, portant intérêt au taux nominal contractuel de 5,76% (taux effectif global de 5,80%), remboursable par mensualités de 282,72 euros.
Le 12 mai 2017, sur requête de la SA BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma Banque, à l’encontre de Mme [I], le tribunal de grande instance de Libourne a rendu une ordonnance portant injonction de payer la somme de 21 500 euros en principal avec intérêts au taux contractuel de 5,75%, outre 1897,01 euros au titre de l’indemnité légal conventionnelle et 4,38 euros au titre des frais accessoires.
L’ordonnance a été signifiée le 21 juin 2017.
Par lettre recommandée du 12 juillet 2017, Mme [I] a formé opposition de ladite ordonnance.
Saisi sur incident formé par Mme [I], le juge de la mise en état dudit tribunal s’est déclaré incompétent et a renvoyé l’affaire devant le tribunal d’instance de Libourne par décision du 4 juillet 2019.
Par jugement du 24 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Libourne a :
– déclaré recevable en la forme l’opposition formée par Mme [I],
– dit qu’elle a mis à néant l’ordonnance d’injonction de payer du 12 mai 2017,
– débouté la société BNP Paribas Personal Finance de l’intégralité de ses demandes,
– débouté Mme [I] de ses demandes reconventionnelles,
– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,
– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la société BNP Paribas Personal Finance à régler les dépens de l’instance.
La société BNP Paribas Personal Finance a relevé appel de ce jugement par déclaration du 1er octobre 2020.
Par conclusions déposées le 23 juin 2021, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :
– infirmer le jugement déféré, mais seulement ce qu’il a débouté la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de Sygma Banque de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée aux dépens,
Statuant à nouveau sur ces points,
– débouter Mme [I] de l’ensemble de ses demandes,
– déclarer la déchéance du terme régulière,
En conséquence,
– condamner Mme [I] sur le fondement de l’article L. 311-24 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010, applicable au cas d’espèce, à payer à la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma Banque, au titre du dossier n° 3640 145 401 0600 la somme en principal de 25 679,04 euros, actualisée au 24 novembre 2016, assortie des intérêts calculés au taux contractuel de 5,76% sur la somme de 23 895,13 euros à compter du 24 novembre 2016, date de la déchéance du terme et au taux légal sur le surplus,
Subsidiairement, si la cour confirmait le jugement déféré en ce qu’il a dit que la déchéance du terme n’était pas acquise au profit du prêteur,
– constater en tout état de cause que, malgré mises en demeure et interpellation, Mme [I] n’a effectué aucun règlement depuis le mois de juillet 2016, de sorte que ses manquements contractuels sont incontestables,
Subséquemment,
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma Banque de toutes ses demandes,
Statuant à nouveau,
– prononcer la résiliation judiciaire du contrat formé conclu par les parties le 27 mai 2015, sur le fondement des dispositions des anciens articles 1183 et 1184 du code civil,
– condamner subséquemment Mme [I] sur le fondement de l’article L. 311-24 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010, applicable au cas d’espèce, à payer à la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma Banque, au titre du dossier n° 3640 145 401 0600 la somme en principal de 25 679,04 euros, actualisée au 24 novembre 2016, assortie des intérêts calculés au taux contractuel de 5,76% sur la somme de 23 895,13 euros à compter du 24 novembre 2016, date de mise en demeure et au taux légal sur le surplus,
Très subsidiairement, si la cour, venait à juger, non seulement que la déchéance du terme est irrégulière, mais également que la société BNP Paribas Personal Finance n’est pas fondée à solliciter la résiliation judiciaire du contrat du prêt litigieux,
– constater que Mme [I] n’a effectué aucune règlement depuis juillet 2016,
– réformer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société BNP Paribas Personal Finance de ses demandes au titre des échéances échues impayées,
Statuant à nouveau sur ce point,
– condamner Mme [I] sur le fondement de l’article L. 311-24 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010, applicable au cas d’espèce, à payer à la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma Banque, au titre du dossier n° 3640 145 401 0600 la somme en principal de 15 266,88 euros, ladite somme correspondant à la somme des échéances échues impayées du 10 juillet 2016 au 10 décembre 2020 (soit 54 x 282,72 euros), assortie des intérêts calculés au taux contractuel de 5,76% à compter de cette date,
– condamner Mme [I] sur le fondement de l’article L. 311-24 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010, applicable au cas d’espèce, à payer à la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma Banque, au titre du dossier n° 3640 145 401 0600 la somme en principal de 15 266,88 euros, ladite somme correspondant à la somme des échéances échues impayées du 10 décembre 2021, jusqu’à la date de l’arrêt à intervenir, ladite somme portant intérêt au taux de 5,76% à compter dudit arrêt,
– juger que le contrat litigieux reprendra tous ses effets à compter de l’arrêt à intervenir,
Très très subsidiairement, si la cour infirmait le jugement déféré en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, prononçait la nullité ou la résolution des contrats,
– débouter Mme [I] du surplus de ses demandes,
– ordonner la remise des choses en l’état,
– condamner Mme [I] à restituer à la société BNP Paribas Personal Finance le montant du financement, sous déduction des échéances réglées,
En tout état de cause :
– condamner Mme [I] à payer à la société BNP Paribas Personal Finance venant aux droits de la société Sygma Banque la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [I] aux dépens de première instance et d’appel.
Par conclusions déposées le 30 mars 2021, Mme [I] demande à la cour de :
– confirmer le jugement déféré, en ce qu’il :
* déclare recevable en la forme l’opposition formée par Mme [I],
* dit qu’elle a mis à néant l’ordonnance d’injonction de payer du 12 mai 2017,
* déboute la société BNP Paribas Personal Finance de l’intégralité de ses demandes,
* condamne la société BNP Paribas Personal Finance à régler les dépens de l’instance,
– infirmer le jugement déféré, en ce qu’il prononce :
* déboute Mme [I] de ses demandes reconventionnelles,
* déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
* dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouter la société BNP Paribas Personal Finance de toutes ses demandes, fins et prétentions,
– faire droit aux demandes incidentes et reconventionnelles de Mme [I],
La cour statuant à nouveau
Etant rappelé :
– les deux contrats constituent une opération commerciale unique et sont indivisbles,
– la nullité entraîne de facto la restitution qui est de droit,
– la nullité d’un contrat pour faute entraîne la responsabilité de l’auteur au sens de l’article 1187 du code civil,
A titre principal :
– débouter la société BNP Paribas Personal Finance de son action engagée, sur le fondement de l’article . 311-24 du code de la consommation, faute d’une créance liquide et exigible,
– déclarer irrecevable la demande tendant à la résiliation judiciaire, comme étant une prétention nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile, en tout état de cause, la déclarer mal fondée,
A titre subsidiaire :
– débouter la société BNP Paribas Personal Finance de toute demande financière à l’encontre de Mme [I], sur le fondement des dispositions d’ordre public de l’article L. 121-21 2°, devenu L. 221-18 du code de la consommation au motif de l’absence des modalités sur le délai de rétractation initial (14 jours à compter de la livraison),
– débouter la société BNP Paribas Personal Finance de toute prétention financière sur le fondement de l’article L. 121-24 (ancien) devenu L. 242-5 du code de la consommation, au motif l’irrégularité du formulaire détachable de rétractation,
– prononcer la nullité de l’opération commerciale unique et indivisible du binôme, au motif de la violation des dispositions d’ordre public des articles L. 111-1 du code de la consommation qui précisent les mentions obligatoires devant figurer sur le contrat de vente à peine de nullité,
– débouter la société BNP Paribas Personal Finance de toute demande de restitution des fonds aux motifs de l’irrégularité de l’attestation de fin de travaux qui ne précise en rien la prestation accomplie, mais qui, néanmoins, a déclenché le décaissement des fonds du prêteur au profit de la société venderesse,
– prononcer la résolution de l’opération commerciale unique et indivisible du binôme sur le fondement des dispositions d’ordre public de l’article L. 311-51, devenu L. 312-27 du code de la consommation au motif d’une installation non conforme à sa destination,
A titre très subsidiaire :
– prononcer la déchéance des intérêts du crédit en l’absence de prérogative du démarcheur en violation des dispositions d’ordre public du code de la consommation,
– dire l’absence d’une mise en cause du prestataire de services suite à un jugement de clôture pour insuffisance d’actif sans obstacle aux demandes autres que la nullité du contrat de vente,
En tout état de cause :
– ordonner à la société BNP Paribas Personal Finance de faire procéder à la désinscription de Mme [I] du fichier FICP du prêteur de France dans le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision et sous une astreinte de 250 euros par jour de retard à l’expiration dudit délai,
– condamner la société BNP Paribas Personal France à restituer les sommes perçues du montant arrêté à la somme de (mémoire) dans le délai de 1 mois suivant la signification de la décision à intervenir et sous astreinte de 250 euros par jour de retard à l’expiration dudit délai,
– condamner la société BNP Paribas Personal Finance au paiement de la somme de 5 000 euros (couvrant les deux procédures) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel et de première instance,
– dire qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision à intervenir et en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les retenues par l’huissier instrumentaire, en application des dispositions légales devront être supportées par le défendeur, en plus de l’indemnité mise à sa charge.
L’affaire a été fixée à l’audience rapporteur du 2 mars 2023.
L’instruction a été clôturée par ordonnance du 16 février 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité des demandes
Mme [I] fait valoir que la demande en résiliation judiciaire du contrat de prêt présentée par la banque à titre subsidiaire est nouvelle et doit être déclarée irrecevable en application de l’article 564 du code de procédure civile .
La BNP Paribas Personal Finance soutient que bien que formée pour la première fois en appel, sa demande n’est pas nouvelle en ce qu’elle tend aux mêmes fins que la demande principale tendant à voir constater la déchéance du terme valablement acquise.
Selon l’article 564 du code de procédure civile , à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la Cour , de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation , faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.
L’article 565 du code précité dispose que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent .
En l’espèce, la banque se prévalant de la déchéance du terme intervenue suite au non paiement de plusieurs échéances du contrat de crédit conclu entre les parties le 27 mai 2015 a sollicité en première instance la condamnation de l’emprunteur à titre principal au paiement de la somme de 25.679,04 € outre intérêts contractuels. Elle présente une demande identique devant la Cour ainsi qu’une demande subsidiaire en résiliation judiciaire du contrat et des demandes en paiement qui sont la conséquence de cette dernière.
Il convient de considérer que ces demandent tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, elles sont donc recevables .
Sur la déchéance du terme
Le premier juge a estimé que la société BNP Paribas Personal Finance ne pouvait se prévaloir de la déchéance du terme faute d’avoir préalablement mis l’emprunteur en demeure de régulariser l’arriéré.
La banque, appelante, oppose qu’aucune disposition légale régissant le crédit à la consommation n’exige qu’une mise en demeure précède la déchéance du terme.
Il résulte cependant des dispositions des articles 1134 et 1184 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, que si le contrat de prêt d’une somme d’argent peut prévoir que la défaillance de l’emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf stipulation expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier qu’après la délivrance à l’emprunteur d’une mise en demeure restée sans effet, lui précisant le délai dont il dispose pour faire obstacle à l’exigibilité immédiate de la créance. Cette règle est d’application générale pour tout prêt de somme d’argent, y compris les prêts à la consommation.
Or, en l’espèce, aucune clause du contrat ne dispense de manière expresse et non équivoque le prêteur d’une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme et contenant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle.
Pour soutenir qu’elle a préalablement mis en demeure la débitrice, la BNP Paribas Personal Finance se prévaut de la lettre adressée le 24 novembre 2016, ainsi rédigée:
‘ Votre dossier a été transmis à Neuilly Contentieux pour le recouvrement de la somme de 25.679,04 euros.
Nous vous mettons en demeure de la régler dans les 8 jours. A défaut de règlement amiable, nous engagerons une action judiciaire en paiement à votre encontre (art. L. 311-52 du code de la consommation).
Si une assurance accompagnait votre dossier, celle-ci sera résiliée pour non paiement des primes dans les 40 jours suivant l’envoi de la présente lettre.(…)’
Comme justement relevé par le premier juge, la banque ne justifie pas avoir adressé à l’emprunteur une mise en demeure d’avoir à s’acquitter du paiement des mensualités contractuelles de retard, sous peine de déchéance du terme, précisant le délai pour y faire obstacle. En effet, le courrier du 24 novembre 2016, qui met en demeure Mme [I] de payer dans le délai de 8 jours la totalité des sommes restant dues (capital, intérêts et frais), ne peut s’analyser que comme un courrier prononçant la déchéance du terme et non une mise en demeure préalable à la déchéance offrant un délai de régularisation.
Le premier juge a donc considéré à bon droit qu’en l’absence de production de mise en demeure préalable, la déchéance du terme n’était pas acquise à la société prêteuse.
Sur la résiliation judiciaire du contrat de crédit
L’appelante sollicite à titre subsidiaire la résiliation judiciaire du contrat pour manquements graves de Mme [I] à ses obligations contractuelles.
L’intimée oppose quant à elle la responsabilité du prêteur pour avoir, d’une part, financé l’opération alors que le bon de commande était entaché de nullité et d’autre part, débloqué les fonds alors que la prestation n’était pas totalement achevée.
Il sera examiné en premier lieu la responsabilité du prêteur puis, en second lieu, les manquements de l’emprunteur.
Sur la responsabilité du prêteur
Il est constant que la banque peut voir sa responsabilité engagée sur le fondement des articles 1231 et suivants du code civil, en cas de manquements aux obligations accessoires résultant de la conclusion d’un contrat de crédit affecté, les créances réciproques du prêteur et de l’emprunteur pouvant alors se compenser plus ou moins complètement.
Ainsi, la banque qui s’abstient, avant de verser les fonds empruntés, de vérifier la régularité du contrat principal ou sa complète exécution, commet une faute au détriment de l’emprunteur qui peut en réclamer réparation dès lors qu’il justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
Le contrat principal conclu entre la société Sungold et Mme [I] l’a été à l’occasion d’un démarchage à domicile. Il relève par suite du régime des articles L. 121-17 et suivants du code de la consommation dans leur version applicable au litige issue de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014.
Aux termes de l’article L. 121-18 ancien du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à l’espèce, dans le cas d’un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l’accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues au I de l’article L. 121-17. Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible.
Aux termes de l’article L. 121-17 ancien, paragraphe premier, secundo, du code de la consommation, préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes : lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’État.
Le formulaire type de rétractation mentionné au secundo de l’article L. 121-17 figure ainsi en annexe à l’article R. 121-1 ancien du code de la consommation :
MODÈLE DE FORMULAIRE DE RÉTRACTATION
(Veuillez compléter et renvoyer le présent formulaire uniquement si vous souhaitez vous rétracter du contrat.)
À l’attention de [le professionnel insère ici son nom, son adresse géographique et, lorsqu’ils sont disponibles, son numéro de télécopieur et son adresse électronique] :
Je/nous (*) vous notifie/notifions (*) par la présente ma/notre (*) rétractation du contrat portant sur la vente du bien (*)/pour la prestation de services (*) ci-dessous :
Commandé le (*)/reçu le (*) :
Nom du (des) consommateur(s) :
Adresse du (des) consommateur(s) :
Signature du (des) consommateur(s) (uniquement en cas de notification du présent formulaire sur papier) :
Date :
(*) Rayez la mention inutile.
En application des dispositions de l’article L. 121-21 ancien, alinéas 1 et 2, du code de la consommation, le délai de quatorze jours de rétractation d’un contrat conclu hors établissement court à compter de la réception du bien par le consommateur.
Aux termes de l’article L. 121-25 ancien du même code, les dispositions de la présente section Contrats conclus à distance et hors établissement sont d’ordre public.
Il résulte de l’application combinée de ces textes que le formulaire de rétractation doit à peine de nullité du contrat répondre aux exigences des articles L. 121-17 et suivants du code de la consommation.
En l’espèce, contrairement à ce qu’allègue Mme [I], le bordereau de rétractation figurant à la fin du bon de commande comporte l’adresse à laquelle il doit être expédié si le client souhaite exercer sa faculté de renonciation, à savoir : « L’institut des Nouvelles Energies [Adresse 3]».
En revanche, le formulaire de rétractation figurant au pied du contrat d’achat fait état d’une fausse information sur le délai de rétractation pour être dit de 14 jours « à partir du jour de la commande », alors que le point de départ est le jour de la livraison.
Dès lors, et sans qu’il y ait lieu d’aller plus avant dans l’argumentation des parties, la BNP Paribas Personal Finance a donc commis une faute en finançant un contrat dont la nullité était apparente et en rendant ainsi possible une opération qui n’aurait pas dû recevoir exécution, étant observé que l’irrégularité affectant le bon de commande ressort d’une simple comparaison entre les mentions prescrites par le code de la consommation et celles effectivement portées sur le bon de commande. Elle peut être décelée au moyen d’un contrôle purement formel de l’acte, soit un contrôle qui ne requiert pas d’expertise juridique particulière et qui demeure à la portée d’un établissement bancaire normalement prudent et diligent.
La BNP Paribas Personal Finance invoque toutefois l’absence de préjudice subi par Mme [I]. Si celle-ci affirme que le vendeur n’a pas remis l’attestation de conformité requise pour le raccordement et la signature d’un contrat d’achat d’électricité, force est de constater qu’elle ne produit aucune pièce justificative (constat, courrier ERDF, attestation ou devis) au soutien de cette allégation, alors qu’il apparaît à la lecture de la facture en date du 21 juillet 2015 établie par la société Sungold que celle-ci a facturé les prestations liées au raccordement ERDF.
A défaut de démontrer la réalité de son préjudice, les demandes de Mme [I] concluant au débouté de la demande en paiement de la banque ne peuvent qu’être rejetées, étant ajouté que les demandes en nullité et résolution de ‘l’opération commerciale unique et indivisible du binôme’ ne peuvent prospérer faute de mise en cause du vendeur ou de son liquidateur.
Sur les manquements de l’emprunteur
Aux termes de l’article 1184 ancien du code civil,
‘La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement.
Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté, a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts.
La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.’
En l’espèce, Mme [I] n’a effectué aucun paiement en exécution du contrat de prêt la liant à la BNP Paribas Personal Finance. Celle-ci est donc fondée à solliciter la résiliation judiciaire dudit contrat pour manquements graves de la débitrice à ses obligations contractuelles. Il sera fait droit à la demande en ce sens.
Sur la demande en paiement
Sur la déchéance du droit aux intérêts
L’article L. 311-48 alinéa 2 du code de la consommation dans sa version en vigueur lors de la signature du crédit précise que lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 311-8 et L. 311-9, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.
L’article L. 311-8 alinéa 3 du même code dans sa version en vigueur lors de la signature du crédit prévoit :
« Les personnes chargées de fournir à l’emprunteur les explications sur le crédit proposé et de recueillir les informations nécessaires à l’établissement de la fiche prévue à l’article L. 311-10 sont formées à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention du surendettement. L’employeur de ces personnes tient à disposition, à des fins de contrôle, l’attestation de formation mentionnée à l’article L. 6353-1 du code du travail établie par un des prêteurs dont les crédits sont proposés sur le lieu de vente ou par un organisme de formation enregistré. Un décret définit les exigences minimales auxquelles doit répondre cette formation. »
En l’espèce, Mme [I] invoque une violation des dispositions de l’article L. 311-8 précité en faisant valoir que la banque ne produit pas l’attestation de formation et que dans ces conditions, la déchéance de droit aux intérêts est encourue.
S’il est exact que l’obligation de conservation de l’attestation de formation incombe à l’employeur du salarié, il n’en demeure pas moins que la formation est délivrée par un des prêteurs dont les crédits sont proposés par le vendeur et, dans ces conditions, il appartenait à la banque de s’assurer que le démarcheur qui représentait la société Sungold avait reçu ladite formation à défaut de l’avoir dispensée elle-même.
Il n’est donc pas établi que l’intermédiaire de crédit avait été formé à la distribution du crédit à la consommation et à la prévention de surendettement.
En application de l’article L. 311-48 précité, la BNP Paribas Personal Finance encourt donc la déchéance du droit aux intérêts qui sera prononcée dans son intégralité.
Sur le montant des sommes dues
Cette déchéance totale du droit aux intérêts rend l’emprunteur débiteur du seul capital emprunté dont sont déduits les paiements déjà opérés, à l’exclusion de toute autre somme et notamment des cotisations d’assurance.
Dès lors, aucun versement n’étant intervenu, la dette de Mme [I] s’établit à la somme de 21.500 euros correspondant au capital emprunté à l’origine.
Mme [I] sera condamnée au paiement de cette somme, outre les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Sur les demandes reconventionnelles de Mme [I]
Mme [I] sollicite, en tout état de cause, la condamnation de la BNP Paribas Personal Finance à lui ‘restituer les sommes perçues du montant arrêté à la somme de (mémoire) dans un délai de un mois suivant la signification de la décision à intervenir et sous astreinte par jour de retard à l’expiration dudit délai’. Outre que cette demande n’est pas chiffrée ni fondée juridiquement, Mme [I] ne justifie du paiement d’aucune échéance du prêt. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande en restitution.
De même, Mme [I] ne pourra prétendre à la radiation de son inscription au FICP qu’à compter du jour où elle aura payé intégralement les sommes dues à la banque. Sa demande sera donc rejetée.
Sur les autres demandes
Mme [I], qui succombe, supportera la charge des dépens.
Il apparaît conforme à l’équité de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.