Ordonnance n 14
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27 Avril 2023
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N° RG 23/00241 –
N° Portalis DBV5-V-B7H-GXEG
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[B] [G]
C/
S.E.L.A.R.L. D’AVOCATS [V] [F]
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Ordonnance notifiée aux parties le :
R E P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
ORDONNANCE DE LA PREMIÈRE PRÉSIDENTE
Contestation d’honoraires d’avocat
Rendue le vingt sept avril deux mille vingt trois
Dans l’affaire qui a été examinée en audience publique le vingt trois mars deux mille vingt trois par Madame Gwenola JOLY-COZ, première présidente de la cour d’appel de POITIERS, assistée de Madame Inès BELLIN, greffière, lors des débats.
ENTRE :
Monsieur [B] [G]
[Adresse 1]
[Localité 2]
comparant en personne
DEMANDEUR en contestation d’honoraires,
D’UNE PART,
ET :
S.E.L.A.R.L. D’AVOCATS [V] [F]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Isabelle NOCENT, avocat au barreau de POITIERS
DEFENDEUR en contestation d’honoraires,
D’AUTRE PART,
ORDONNANCE :
– Contradictoire
– Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– Signée par Madame Gwenola JOLY-COZ, première présidente et par Madame Inès BELLIN, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Par lettre enregistrée le 19 août 2022, Maître [V] [F], membre de la SELARL d’avocats [V] [F], a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Poitiers d’une demande de taxation de ses honoraires à la somme de 600 euros, correspondant au solde des honoraires restant dus.
Par décision du 19 décembre 2022, le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Poitiers a taxé les honoraires de la SELARL d’avocats [V] [F] à la somme de 2 000 euros hors taxes, soit 2 400 euros toutes taxes comprises et enjoint à Monsieur [B] [G] de lui régler la somme de 600 euros toutes taxes comprises après déduction de la somme de 1 800 euros toutes taxes comprises d’ores et déjà réglée.
La décision du bâtonnier a été notifiée à la Monsieur [B] [G] le 30 décembre 2022, lequel a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d’appel de Poitiers le 23 janvier 2023.
L’affaire a été appelée à l’audience du 23 mars 2023.
Monsieur [B] [G] expose avoir confié la défense de ses intérêts à Maître [V] [F], membre de la SELARL d’avocats [V] [F], dans le cadre d’une procédure de liquidation de communauté devant le tribunal judiciaire de Poitiers à la suite d’un autre avocat.
Il déplore que le bâtonnier ait considéré qu’il n’y avait pas urgence et que la convention signée n’aurait pas été discutée.
Il estime au contraire que Maître [V] [F] est intervenu en urgence, ce qui lui aurait permis d’imposer ses conditions et de solliciter des honoraires qu’il estime exagérés au regard du service rendu.
Il soutient que le bâtonnier, en sa qualité de juge taxateur, aurait statué abusivement à défaut d’avoir tenu compte de la qualité de travail de Maître [V] [F], sans justifier de la non recevabilité des manquements dénoncés.
Monsieur [B] [G] fait ainsi valoir que son avocat aurait manqué à son obligation de diligence et de loyauté en conservant les dernières conclusions adverses pendant trois jours, sans lui adresser de copie, ce qui aurait conduit, dans la précipitation, à conserver aux termes des dernières écritures, une incohérence pointée par la partie adverse.
Il soutient que Maître [V] [F] aurait par ailleurs manqué à son obligation de dévouement et de courtoisie en s’engageant à produire un premier projet de conclusions à la fin du mois de juillet 2021 alors qu’il serait resté silencieux du 27 juin au 11 août 2021.
Il fait valoir, en outre, que Maître [V] [F] se serait contenté de reproduire les conclusions de sa prédécesseure et que les échanges avec son conseil avaient pour finalité de réparer les erreurs commises par ce dernier aux termes de ses écritures.
Monsieur [B] [G] estime que les compétences de Maître [V] [F] en droit du partage auraient été insuffisantes et reproche à ce dernier de ne pas avoir répondu à ses interrogations.
Il indique que Maître [V] [F] l’aurait déconseillé de faire appel.
Monsieur [B] [G] sollicite la réduction des honoraires de la SELARL d’avocats [V] [F] à la somme de 1 800 euros toutes taxes comprises, d’ores et déjà réglée.
La SELARL d’avocats [V] [F], représentée à l’audience par son conseil, Maître Isabelle Nocent, fait valoir que Monsieur [B] [G] a saisi Maître [V] [F] de la défense de ses intérêts dans le cadre d’une procédure de liquidation de communauté pendante devant le tribunal judiciaire de Poitiers, succédant à deux cabinets d’avocats.
Elle indique qu’une convention d’honoraires a été signée, laquelle prévoit un honoraire forfaitaire de 2 400 euros toutes taxes comprises pour l’ensemble de la procédure.
Elle fait valoir que Monsieur [B] [G] n’aurait émis aucune contestation sur le montant des honoraires sollicités ou le travail à fournir en vue de l’audience de jugement, tel que détaillé aux termes de la convention d’honoraires.
La SELARL d’avocats [V] [F] indique que Maître [V] [F] aurait accompli l’intégralité des diligences pour défendre au mieux Monsieur [B] [G] et que l’ensemble des jeux de conclusions aurait été revu, corrigé et validé par ce dernier.
Elle fait valoir que la présente juridiction n’a pas à connaitre des manquements reprochés à l’avocat et que Monsieur [B] [G] procèderait par allégations sans se prévaloir d’un quelconque préjudice, alors que le jugement rendu lui donnerait satisfaction.
La SELARL d’avocats [V] [F] indique que Monsieur [B] [G] n’expliquerait pas en quoi la somme facturée au titre des honoraires serait excessive par rapport au travail accomplit dans son dossier.
Elle sollicite la confirmation de la décision du bâtonnier et la condamnation de Monsieur [B] [G] à lui payer la somme de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la recevabilité :
Selon l’article 176 du décret du 27 novembre 1991, la décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel qui est saisi par l’avocat ou la partie par lettre recommandée avec accusé de réception. Le délai de recours est d’un mois à compter de la notification de la décision.
En l’espèce, la décision du bâtonnier a été notifiée à la Monsieur [B] [G] le 30 décembre 2022, lequel a formé un recours entre les mains de la première présidente de la cour d’appel de Poitiers le 23 janvier 2023.
Le recours de Monsieur [B] [G] est donc recevable et régulier en la forme.
Sur le fond :
Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats sont réglées en recourant à la procédure prévue aux articles 174 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991.
Sur la convention d’honoraires :
Il résulte de l’article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, modifié par la loi du 10 juillet 1991 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, que sauf en cas d’urgence ou de force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’avocat conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires, qui précise notamment le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.
A défaut de convention, les honoraires sont fixés au regard de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci, conformément au quatrième alinéa de l’article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971.
En l’espèce, il résulte des pièces produites et des explications données par les parties que Monsieur [B] [G] a confié la défense de ses intérêts à Maître [V] [F], membre de la SELARL d’avocats [V] [F], dans le cadre d’une procédure de liquidation de communauté devant le tribunal judiciaire de Poitiers à la suite d’un autre avocat.
Une convention d’honoraires a été signée par les parties le 22 juin 2021, laquelle prévoit un honoraire complémentaire forfaitaire de base de 2 000 euros hors taxes, soit 2 400 euros toutes taxes comprises pour l’ensemble de la procédure.
Sur la responsabilité de l’avocat :
Il sera rappelé qu’il n’entre pas dans les pouvoirs du juge de l’honoraire de se prononcer sur l’éventuelle responsabilité civile de l’avocat à l’égard de son client, liée au manquement à son devoir de conseil et d’information, ou à une exécution défectueuse de sa prestation. De tels griefs relèvent de la responsabilité professionnelle de l’avocat et non de l’évaluation des honoraires et ils ne peuvent pas non plus justifier une réduction de sa rémunération.
Sur la rémunération de l’avocat :
Il résulte des éléments versés aux débats et des déclarations des parties que la SELARL d’avocats [V] [F] justifie de la rédaction de plusieurs jeux de conclusions, nécessitant préalablement une prise de connaissance des pièces du dossier, de plusieurs échanges avec son client et de l’assistance de Monsieur [B] [G] devant le tribunal judiciaire.
Il y a lieu de constater que la procédure a été menée à son terme.
Les honoraires s’établissent à la somme de 2 000 euros hors taxes, soit 2 400 euros toutes taxes comprises pour l’ensemble de la procédure, sur laquelle Monsieur [B] [G] s’est d’ores et déjà acquitté de la somme de 1 800 euros toutes taxes comprises.
Compte tenu des diligences accomplies par l’avocat, il convient de considérer que les honoraires facturés, d’un montant de 2 000 hors taxes, soit 2 400 euros toutes taxes comprises, sont parfaitement justifiés et conformes à la convention d’honoraires signée par Monsieur [B] [G].
C’est donc à juste titre que le bâtonnier, prenant en considération les diligences accomplies par Maître [V] [F], a estimé que la rémunération réclamée était justifiée et taxé ses honoraires à la somme de 2 400 euros toutes taxes comprises.
L’ordonnance du bâtonnier sera donc confirmée et les honoraires de la SELARL d’avocats [V] [F] seront donc taxés à la somme de 2 400 euros toutes taxes comprises.
Sur l’article 700 du code de procédure civile :
Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en tenant compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
Partie succombante, Monsieur [B] [G] sera condamné à payer à la SELARL d’avocats [V] [F] la somme de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur les dépens :
L’article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
Succombant à la présente instance, Monsieur [B] [G] en supportera les dépens.