C 2
N° RG 21/02601
N° Portalis DBVM-V-B7F-K5HO
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée le :
Me Michaël ZAIEM
la SELARL NICOLAU AVOCATS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
Ch. Sociale -Section B
ARRÊT DU JEUDI 27 AVRIL 2023
Appel d’une décision (N° RG 19/00691)
rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRENOBLE
en date du 07 mai 2021
suivant déclaration d’appel du 09 juin 2021
APPELANTE :
S.A.R.L. du Val d'[Localité 3], prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié audit siège
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par Me Michaël ZAIEM, avocat au barreau de GRENOBLE substitué par Me Peggy FESSLER de la SCP FESSLER JORQUERA & ASSOCIES, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIME :
Monsieur [F] [B]
né le 13 Avril 1986 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Alexia NICOLAU de la SELARL NICOLAU AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE substituée par Me Delphine SANCHEZ MORENO de la SELARL NICOLAU AVOCATS, avocat au barreau de GRENOBLE
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DU DÉLIBÉRÉ :
M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président,
Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère,
M. Pascal VERGUCHT, Conseiller,
DÉBATS :
A l’audience publique du 08 mars 2023,
Mme Hélène BLONDEAU-PATISSIER, Conseillère chargée du rapport et M. Frédéric BLANC, Conseiller faisant fonction de Président, ont entendu les parties en leurs observations, assistés de Mme Carole COLAS, Greffière, en présence d’Elora DOUHERET, greffière stagiaire, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;
Puis l’affaire a été mise en délibéré au 27 avril 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.
L’arrêt a été rendu le 27 avril 2023.
EXPOSE DU LITIGE
M. [F] [B], né le 13 avril 1986, a été embauché le 29 février 2016 par la société à responsabilité limitée (SARL) Boulangerie de l’Arlequin, suivant contrat de travail à durée indéterminée, en qualité de boulanger, coefficient 175 de la convention collective nationale de la boulangerie, pâtisserie, entreprises artisanales.
Au cours des années 2018 et 2019, M. [F] [B] a été placé en arrêt de travail à plusieurs reprises. Durant cette période, plusieurs courriers ont été échangés entre le salarié et la société Boulangerie de l’Arlequin au sujet du paiement d’heures supplémentaires, du paiement des indemnités journalières de sécurité sociale et de compléments de salaire pendant les arrêts de travail ainsi que de la relation conflictuelle entre M. [F] [B] et son chef d’équipe.
Le 19 septembre 2018 M. [F] [B] a été victime d’un accident de travail dans l’entreprise et placé en arrêt de travail pendant trente jours.
A la suite d’une altercation avec le chef boulanger, M. [F] [B] a été placé en arrêt de travail pour cause de maladie du 1er au 5 juin 2019, prolongé jusqu’au 22 juin 2019.
Le 1er juin 2019, M. [F] [B] a déposé plainte auprès de la gendarmerie d'[Localité 3] pour coups et blessures, menaces de mort et harcèlement moral reprochés à son chef d’équipe.
Le même jour, le chef d’équipe a déposé une plainte auprès du commissariat de police de [Localité 4] pour des menaces de mort reprochés à M. [F] [B].
M. [F] [B] a été placé en arrêt de travail du 1er juillet 2019 au 17 novembre 2019.
Par requête en date du 6 août 2019, M. [F] [B] a saisi le conseil de prud’hommes de Grenoble afin d’obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la SARL Boulangerie de l’Arlequin ainsi que le paiement de créances salariales et indemnitaires dont le paiement de rappels de salaire au titre de rappel de salaire et la réparation d’un préjudice résultant de faits de harcèlement moral.
La SARL Boulangerie de l’Arlequin s’est opposée aux prétentions adverses.
Par courrier du 19 novembre 2019, le médecin du travail a indiqué à la société Boulangerie de l’Arlequin que la situation de santé du salarié était «’incompatible avec une activité professionnelle et nécessite un recours aux soins avec arrêt de travail ».
A l’issue de la visite de reprise en date du 29 novembre 2019, le médecin du travail l’a déclaré «’Inapte au poste et à tous les postes dans l’entreprise c’est-à-dire dans la boulangerie et toutes les autres boulangeries de la société’».
Par courrier en date du 11 décembre 2019, la SARL Boulangerie de l’Arlequin a indiqué à M.'[F] [B] être dans l’impossibilité de le reclasser.
Par courrier en date du 13 décembre 2019, M. [F] [B] a été convoqué par la SARL Boulangerie de l’Arlequin à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le’23’décembre 2019.
Par lettre en date du 27 décembre 2019, la SARL Boulangerie l’Arlequin a notifié à M.'[F]'[B] son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, et lui a remis ses documents de fin de contrat.
Par jugement en date du 7 mai 2021, le conseil de prud’hommes de Grenoble a’:
– reconnu que M. [F] [B] a effectué des heures supplémentaires non rémunérées entre 2016 et 2017,
– constaté que la SARL La Boulangerie de I ‘Arlequin a violé plusieurs de ses obligations durant la relation de travail avec M. [F] [B],
– constaté que les éléments versés par M. [F] [B] ne permettent pas de présumer l’existence d’un harcèlement moral,
– prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [F] [B] aux torts de la SARL La Boulangerie de l’Arlequin à la date du 27 décembre 2019,
– dit que cette résiliation judiciaire produit les effets d’un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– condamné la SARL La Boulangerie de l’Arlequin à verser à M. [F] [B] les sommes suivantes :
– 216,51 € brut à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires sur l’année 2016,
– 21,65 € au titre des congés payés afférents,
– 233,50 € brut à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires sur l’année 2017,
– 23,35 € brut au titre des congés payés afférents,
– 500,00 € net à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi suite au manquement de l’employeur à son obligation de maintenir le salaire pendant les arrêts de travail,
– 1 000,00 € net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour déduction réalisée à tort sur le bulletin de paie du mois d’octobre 2018,
– 174,38 € net à titre de reliquat de l’indemnité de licenciement,
– 4 716,64 € brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 471,66 € brut à titre de congés payés afférents,
– 7 267,62 € à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait de la rupture du contrat de travail,
– 1 200,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– rappelé que les sommes à caractère salarial bénéficient de l’exécution provisoire de droit, nonobstant appel et sans caution, en application de l’article R. 1454-28 du code du travail, étant précisé que ces sommes sont assorties des intérêts de droit à compter du jour de la demande et que la moyenne mensuelle des trois derniers mois de salaire à retenir est de 2 422,54 euros.
– ordonné à la SARL Boulangerie de l’Arlequin, en application de l’article L. 1235-4 du code du travail, de rembourser aux organismes concernés les indemnités chômage versées à M.'[F] [B], dans la limite de six mois,
– dit qu’une expédition certifiée conforme du présent jugement sera adressée par le greffe du Conseil à Pôle emploi.
– débouté M. [F] [B] de ses autres demandes.
– débouté la SARL Boulangerie de l’Arlequin de sa demande reconventionnelle.
– condamné la SARL Boulangerie de l’Arlequin aux entiers dépens.
La décision a été notifiée par le greffe par lettres recommandées avec accusés de réception signés le 19 mai 2021 pour la SARL Boulangerie de l’Arlequin et le 20 mai 2021 pour M.'[F] [B].
Par déclaration en date du 9 juin 2021, la SARL Boulangerie de l’Arlequin a interjeté appel à l’encontre dudit jugement.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 11 janvier 2023, la’SARL’Boulangerie de l’Arlequin sollicite de la cour de’:
Réformer les chefs du jugement du conseil de prud’hommes dont appel ;
Statuant à nouveau,
Débouter M. [F] [B] de ses demandes :
– de rappel d’heures supplémentaires non rémunérées entre 2016 et 2017
– de résiliation judiciaire de son contrat de travail
– de dommages et intérêts pour préjudice subi suite au manquement de l’employeur à son obligation de maintenir le salaire pendant les arrêts de travail
– de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour déduction réalisée à tort sur le bulletin – de paie du mois d’octobre 2018
– de reliquat de l’indemnité de licenciement
– d’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents
– de dommages et intérêts au titre du préjudice subi du fait de la rupture du contrat de travail
– de condamnation de la SARL Boulangerie de l’Arlequin au titre d’article 700 du code de procédure civile.
Reconventionnellement, le condamner à verser à la SARL Boulangerie de l’Arlequin la somme de 2.500€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Confirmer le jugement pour le surplus et débouter M. [F] [B] de son appel incident.
Aux termes de ses conclusions notifiées par voie électronique le 11 janvier 2023, M.'[F] [B] sollicite de la cour de’:
Vu la législation sus-citée ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile ;
Vu la jurisprudence citée ;
Vu les pièces produites ;
Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 7 mai 2021 en ce qu’il a reconnu que M.'[F] [B] a effectué des heures supplémentaires non rémunérées entre 2016 et 2017′;
Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 7 mai 2021 en ce qu’il a condamné la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] à verser à M. [F] [B] les sommes de :
– 216,51 € brut à titre de rappel de salaire sur les heures supplémentaires de l’année 2016′;
– 21,65 € brut au titre des congés payés afférents ;
– 233,50 € brut à titre de rappel de salaire sur les heures supplémentaires sur l’année 2017′;
– 23,35 € brut au titre des congés payés afférents ;
Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 7 mai 2021 en ce qu’il a constaté que la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] a violé plusieurs de ses obligations durant la relation de travail avec M. [F] [B], à savoir son obligation de maintenir le salaire du salarié durant ses arrêts de travail et son obligation de ne déduire par mois que 10% du trop-perçu par le salarié ;
Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 7 mai 2021 en ce qu’il a limité le quantum des condamnations intervenues à ce titre ;
Et, statuant à nouveau,
Condamner la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] à verser à M. [F] [B] la somme 1000 € net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de ce manquement ;
Condamner la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] à verser à M. [F] [B] la somme de 2 000 € net à titre de dommages et intérêts en raison de la déduction réalisée à tort sur le bulletin de paie d’octobre 2018 ;
Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 7 mai 2021 en ce qu’il a constaté que les éléments versés par M. [F] [B] ne permettaient pas de présumer l’existence d’un harcèlement moral et que la société n’a pas manqué à ses obligations de prévention des risques professionnels et de sécurité;
Et, statuant à nouveau,
Condamner la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] à verser à M. [F] [B] la somme de 10 000 € net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et financier subi du fait de ce harcèlement moral ;
Condamner la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] à verser à M. [F] [B] la somme de 10 000 € net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et financier subi du fait de la violation par l’employeur de son obligation de prévention des risques professionnels et de sécurité;
Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 7 mai 2021 en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [F] [B] aux torts de la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] à la date du 27 décembre 2019 ;
Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 7 mai 2021 en ce qu’il a dit que la résiliation judiciaire prenait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Et, statuant à nouveau,
Dire et juger que la résiliation judiciaire prend les effets d’un licenciement nul, car intervenu dans un contexte de harcèlement moral, et à titre subsidiaire d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Dire et juger à titre principal que le barème visé à l’article L. 1235-3 du code du travail est inapplicable au licenciement nul et donc pour l’appréciation du préjudice moral, financier et professionnel subi par M. [F] [B] du fait de la rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur ; à titre subsidiaire que ce plafonnement est in conventionnel ou à tout le moins inadéquat pour réparer le préjudice subi par M. [F] [B] du fait de la perte sans cause réelle et sérieuse de son emploi;
Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 7 mai 2021 en ce qu’il a condamné la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] à verser à M. [F] [B] un reliquat d’indemnité de licenciement et une indemnité compensatrice de préavis ;
Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 7 mai 2021 en ce qu’il a limité le quantum des condamnations intervenues au titre du reliquat d’indemnité de licenciement et au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents ;
Et, statuant à nouveau,
Condamner la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] à verser à M. [F] [B] la somme de :
– 410,53€ net à titre de reliquat de l’indemnité de licenciement
– 5 297,94€ brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;
– 529,79€ brut à titre de congés payés afférents ;
Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 7 mai 2021 en ce qu’il a limité le quantum des dommages et intérêts octroyés en réparation du préjudice moral, financier et professionnel subi par M. [F] [B] du fait de la rupture du contrat de travail en raison des manquements de l’employeur;
Et, statuant à nouveau,
Condamner la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] à verser à M. [F] [B] la somme de 17 286,49 € net à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral, financier et professionnel subi du fait de la rupture du contrat de travail, prenant les effets d’un licenciement nul, ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse ;
Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes du 7 mai 2021 en ce qu’il a limité le montant de la condamnation de la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] au titre de l’article 700 du code de procédure civile à la somme de 1 200 € ;
Et, statuant à nouveau,
Condamner, s’agissant de la procédure de première instance, la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] à verser à M. [F] [B] la somme de 2 640 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’au paiement des entiers dépens ;
Condamner, s’agissant de la procédure en cause d’appel la société La Boulangerie du Val d'[Localité 3] à verser à M. [F] [B] la somme de 2 160 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’au paiement des entiers dépens.
Pour un exposé complet des moyens et prétentions des parties, il convient au visa de l’article’455 du code de procédure civile de se reporter aux conclusions des parties susvisées.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 12 janvier 2023.
L’affaire, fixée pour être plaidée à l’audience du 8 mars 2023, a été mise en délibérée au 27 avril 2023.
Par note en délibéré du 10 mars 2023 sollicitée par la cour, la société appelante a confirmé le changement de dénomination de la SARL Boulangerie de l’Arlequin devenue la SARL du Val d'[Localité 3] à compter du 1er janvier 2022 et transmis des écritures rectificatives faisant mention de cette nouvelle dénomination.
Par note subséquente du 14 mars 2023 M. [F] [B] a confirmé ce changement de dénomination intervenu le1er janvier 2022.
MOTIFS DE L’ARRÊT
1 ‘ Sur les prétentions au titre des heures supplémentaires
L’article L.’3121-27 du code du travail dispose que la durée légale de travail effective des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine.
Selon l’article L.’3121-28 du même code, toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.
Aux termes combinés des articles L.’3121-29 et L.’3121-35 du code du travail, les heures supplémentaires se décomptent par semaine, celle-ci débutant le lundi à 0 heure et se terminant le dimanche à 24 heures.
L’article L. 3171-1 du code du travail prévoit que :
L’employeur affiche les heures auxquelles commence et finit le travail ainsi que les heures et la durée des repos.
Lorsque la durée du travail est organisée dans les conditions fixées par l’article L. 3121-44, l’affichage comprend la répartition de la durée du travail dans le cadre de cette organisation.
La programmation individuelle des périodes d’astreinte est portée à la connaissance de chaque salarié dans des conditions déterminées par voie réglementaire.
L’article L. 3171-4 du code du travail dispose qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles
Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Il appartient à la juridiction de vérifier si les heures supplémentaires revendiquées ont été rendues nécessaires par le travail confié au salarié, l’opposition à l’exécution de celle-ci de l’employeur se trouvant alors indifférente.
Le salarié peut revendiquer le paiement d’heures supplémentaires à raison de l’accord tacite de l’employeur. Cet accord tacite peut résulter de la connaissance par l’employeur de la réalisation d’heures supplémentaires par le biais de fiche de pointage et l’absence d’opposition de l’employeur à la réalisation de ces heures.
Aux termes du contrat liant les parties la société du Val d'[Localité 3] rémunère M. [B] pour un volume horaire mensuel de 182 heures.
M. [F] [B], qui ne conteste pas avoir reçu paiement des 30,33 heures supplémentaires mensuelles contractualisées, réclame paiement d’heures supplémentaires non rémunérées effectuées sur la période de décembre 2016 à février 2017.
Aussi, il produit un décompte détaillant entre le 15 décembre 2016 et le 19 février 2017, les heures de début de journée et de fin de journée pour lesquelles il revendique des heures supplémentaires non rémunérées ainsi que ses calculs de rappel de salaire résultant de ces horaires détaillés par semaine et précisant le taux de majoration à 25 %, outre le taux de majorations des heures du dimanche.
En réponse, la société appelante, soutient que le salarié a été rempli de ses droits, mais ne verse aux débats aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, ni aucun décompte du temps de travail du salarié.
En effet, les relevés du système d’alarme de la boulangerie, non signés par le salarié, ne précisent ni l’année, ni le nom du salarié, de sorte qu’ils sont dénués de tout caractère probant quant aux horaires de travail de M. [B].
Il s’ensuit que le principe des heures supplémentaires effectuées mais non payées est acquis.
Aussi, l’employeur conteste en vain l’authenticité du décompte du salarié en soutenant que les relevés du système d’alarme permettent d’imputer de nombreux retards à M. [B] alors que ces relevés sont dénués de valeur probante.
En outre c’est par un moyen inopérant que l’employeur objecte que le salarié n’aurait pas présenté de réclamations pendant l’exécution du contrat de travail, d’autant qu’il ressort, au contraire, des courriers échangés entre les parties, que dès le 27 février 2018, la société avait connaissance de ses réclamations pour lui répondre : «’Pour votre différend sur les heures supplémentaires je vous joins les horaires qui m’ont été fournis pour la confection des paies de décembre, janvier et février’».
En conséquence, il convient de confirmer le jugement dont appel qui a fait droit aux demandes de rappel de salaire sur heures supplémentaires formées par M. [F] [B].
2 ‘ Sur la demande indemnitaire au titre des compléments de salaire pendant les périodes d’arrêt de travail
L’article L.’1226-1’du code du travail’impose, en cas d’absence au travail justifiée par l’incapacité résultant de maladie, une’indemnisation’minimale’qui peut être remplacée par une’indemnisation’plus favorable prévue par la’convention collective’ou l’accord de branche ou par la convention ou l’accord d’entreprise.
L’article 37 de la convention collective nationale de la boulangerie, pâtisserie, entreprises artisanales, qui définit la garantie de maintien de salaire consécutif à une maladie, prévoit une indemnisation pendant 180 jours à partir du 1er jour d’indemnisation par la sécurité sociale, quelle que soit la nature de l’arrêt de travail, pour un montant de 90 % du salaire brut moyen des 3 derniers mois précédant l’arrêt de travail.
Aussi, l’article 37.2 énonce qu’à compter du 181ème jour et jusqu’au 1 095ème jour d’arrêt de travail, le salarié bénéficie des indemnités journalières égales à 60 % du salaire journalier de référence sous déduction des indemnités journalières brutes de la sécurité sociale.
En l’espèce, il ressort des bulletins de paie de M. [B] qu’il a été en arrêt de travail pour maladie du 29 septembre au 15 octobre 2017 et qu’il a perçu les montants dus intitulés «’IJ Prévoyance AG2R du 29.9 au 15.10.2017’» six mois plus tard avec la paie d’avril 2018.
Aussi, sur l’année 2018, il a été placé en arrêt de travail pour maladie et n’a obtenu le paiement de la garantie due qu’avec retard, à savoir avec le salaire de juillet 2018 pour la période du 18 février au 12 mars et du 25 mai au 21 juin, avec un solde de 32,66 euros versé en novembre 2018.
Il est également établi que la société a cessé, à compter du 27 janvier 2019, de maintenir le salaire de M. [B], en arrêt de travail depuis le 16 octobre 2018, et qu’elle n’a régularisé les montants dus qu’après réitération des réclamations du salarié.
L’employeur qui indiquait, à plusieurs reprises, transmettre la demande à son cabinet comptable puis communiquer la copie du décompte effectué par son cabinet comptable, a finalement procédé à une régularisation de 850,30 euros avec le salaire de novembre 2019, puis au paiement d’une somme de 1’885 euros en février 2020 pour la période du 20 novembre 2019 au 29 décembre 2019.
En tout état de cause, il ne justifie d’aucun motif pour expliquer un tel retard de paiement en se limitant à mettre en cause les services de son cabinet comptable.
Par ailleurs, M. [B] justifie des difficultés financières rencontrées pour avoir notamment obtenu deux prêts de son entourage en mars 2018 et juillet 2019.
En conséquence, c’est par une juste analyse des circonstances de l’espèce que la cour adopte que les premiers juges ont estimé la réparation due au titre du préjudice résultant de ces retards de paiement à un montant de 500 euros.
Le jugement entrepris est donc confirmé de ce chef.
3 ‘ Sur la demande indemnitaire au titre d’une retenue sur salaire sur trop-perçu de’septembre 2018 sur le mois d’octobre 2018
Aux termes de’l’article L. 3251-1 du code du travail, l’employeur ne peut opérer une’retenue’de salaire pour compenser des sommes qui lui seraient dues par un salarié pour fournitures diverses, quelle qu’en soit la nature.
Selon l’article L.’3251-3’du même code, il ne peut opérer de’retenue’de salaire pour les avances en espèces qu’il a faites, que s’il s’agit de’retenues’successives ne dépassant pas le dixième du montant des salaires exigibles.
En l’espèce, tel que relevé par les premiers juges, la société Boulangerie de l’Arlequin avait versé à M. [B] avec le salaire de septembre 2018, la somme de 2’069,90 euros à titre d’ «’avance IJ AG2R du 17.7 au 24.9.2018’» alors qu’il n’est pas justifié que le salarié était absent sur cette période, puis qu’elle a retiré ce même montant du salaire brut de M. [B] sur la paie d’octobre 2018 en mentionnant «’IJ AG2R annulation avance 17.7 au 24.8.2018’»,’de sorte que le salaire net payé se trouvait réduit à 269,81 euros.
La retenue du trop perçu étant ainsi supérieure au dixième du salaire exigible en violation des dispositions de l’article L.’3251-3’du même code, M.'[B] est fondé à obtenir réparation du préjudice résultant de ce manquement.
Il justifie des difficultés financières rencontrées et de l’obtention d’une aide financière de la commission d’action sanitaire et sociale en date du 17 décembre 2019 motivée par des «’difficultés pécuniaires’».
En conséquence, c’est par une juste analyse des circonstances de l’espèce que la cour adopte que les premiers juges ont estimé la réparation due au titre du préjudice résultant de cette retenue à un montant de 1 000 euros.
Le jugement entrepris est donc confirmé de ce chef.
4 ‘ Sur le harcèlement moral et le manquement à l’obligation de prévention
L’article L.1152-1 du code du travail énonce qu’aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L’article L.1152-2 du même code dispose qu’aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir les agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.
L’article L. 1152-4 du code du travail précise que l’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.
Sont considérés comme harcèlement moral notamment des pratiques persécutrices, des attitudes et/ou des propos dégradants, des pratiques punitives, notamment des sanctions disciplinaires injustifiées, des retraits de fonction, des humiliations et des attributions de tâches sans rapport avec le poste.
La définition du harcèlement moral a été affinée en y incluant certaines méthodes de gestion en ce que peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en ‘uvre par un supérieur hiérarchique lorsqu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits, à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Le harcèlement moral est sanctionné même en l’absence de tout élément intentionnel.
Le harcèlement peut émaner de l’employeur lui-même ou d’un autre salarié de l’entreprise.
Il n’est, en outre, pas nécessaire que le préjudice se réalise. Il suffit pour le juge de constater la possibilité d’une dégradation de la situation du salarié.
A ce titre, il doit être pris en compte non seulement les avis du médecin du travail mais également ceux du médecin traitant du salarié.
L’article L 1154-1 du code du travail dans sa rédaction postérieure à la loi n°2016-1088 du’8’août 2016 est relatif à la charge de la preuve du harcèlement moral :
«’En cas de litige relatif à l’application des articles L 1151-1 à L 1152-3 et L 1152-3 à L 1152-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des éléments de faits qui permettent de supposer l’existence d’un harcèlement moral l’existence d’un harcèlement.
Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.’».
La seule obligation du salarié est de présenter des éléments de faits précis et concordants, à charge pour le juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble et non considérés isolément, permettent de supposer l’existence d’un harcèlement, le juge ne pouvant se fonder uniquement sur l’état de santé du salarié mais devant pour autant le prendre en considération.
Au cas d’espèce, M. [F] [B] n’établit pas la matérialité des faits suivants’:
– d’avoir été le seul salarié auquel il était demandé de signer ses heures d’arrivée et de départ en réponse à ses demandes en paiement d’heures supplémentaires ;
– d’avoir été stigmatisé et mis à l’écart au sein de l’équipe de travail’;
– de s’être vu sommer de ne pas prendre son poste de travail à sa reprise le 10 avril 2019 et d’avoir reçu des menaces proférées par le chef boulanger,
En effet le courrier du salarié en date du 16 avril 2019 et la main courante du 21 mai 2019 restent insuffisants à établir ces faits en l’absence de tout autre élément pertinent corroborant les déclarations de M. [B].
En revanche il objective les faits suivants’:
– par courrier du 27 février 2018 la société Boulangerie de l’Arlequin lui a annoncé une modification de ses horaires de travail ayant pour effet de réduire ses horaires de nuit et les majorations de la rémunération de ces horaires ;
– par courrier du 27 mars 2018 la société Boulangerie de l’Arlequin lui adresse des reproches au titre d’ un manque de communication pendant son arrêt de travail et un manque d’intérêt pour son poste en écrivant «’Depuis votre départ en février vous ne nous avez pas rendu visite pour nous donner l’évolution de vos problèmes de santé, les possibilités de repris, l’aménagement de vos horaires de travail et éventuellement parler des difficultés que nous affrontons pendant votre absence. Pourtant vous habitez à coté et nous pensions que votre travail et son milieu vous intéressez compte tenu que nous avions été un des premiers à vous donner votre chance à un poste stable’» ;
– par courrier du 8 juillet 2018 en réponse aux demandes en paiement d’heures supplémentaires la société Boulangerie de l’Arlequin exprime des pressions et intimidations du salarié en écrivant « J’ai préféré me dessaisir de votre dossier [‘] Je suis fatigué et je préfère laisser la gestion de votre dossier à un professionnel. Il m’a fait part de [la] façon de procéder et entre autres d’avoir recours à une société d’enquête sur la personne. La loi prévoit d’avertir le titulaire et il m’a assuré de vous en avertir» ;
– par courrier du 30 mai 2018 il a signalé ses difficultés à l’employeur en écrivant’:’« Je pense indispensable de vous répondre au vu de l’évolution de nos relations humaines et professionnelles je souhaite aussi protéger mon intégrité physique et psychologique.'[‘] Je refuse d’être sujet à de la pression ou à une attente particulière, je ne suis pas sur le point de partir ou quitter mon poste donc merci de respecter ce choix. » ;
– selon certificat médical en date du 1er juin 2019, le médecin a relevé des lésions constituées de «’rougeurs avec une trace de griffure sur le bras droit ainsi que de discrètes rougeurs de chaque côte au niveau du cou’», le salarié déclarant avoir été victime d’une agression.
Par ailleurs, M. [B] a fait l’objet de plusieurs arrêts de travail au cours des années 2018 et 2019 jusqu’à la déclaration d’inaptitude par le médecin du travail.
Il résulte de ce qui précède que le salarié établit des éléments de faits précis et concordants qui, pris dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’un harcèlement à son encontre.
En réponse, la société appelante, qui ne développe aucun moyen quant à l’appel incident de M. [F] [B] visant à voir infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a débouté de ses prétentions tendant à l’indemnisation du préjudice résultant d’un harcèlement moral, est réputée s’approprier les motifs du jugement entrepris au visa de l’article 954 du code de procédure civile.
Or, le jugement déféré a considéré que «’les éléments versés par M. [B] ne permettaient pas de présumer l’existence d’un harcèlement moral’» sans analyser les éventuelles justifications de l’employeur pour considérer que les éléments de fait retenus étaient étrangers à tout agissement de harcèlement moral.
En outre, elle ne justifie d’aucune mesure prise en vue de préserver la sécurité et la santé du salarié en dépit de l’alerte reçue le 30 mai 2018.
Eu égard aux éléments de fait pris dans leur globalité matériellement établis par M. [F] [B] auxquels l’employeur n’a pas apporté les justifications suffisantes, il convient d’infirmer le jugement entrepris et de dire que M. [F] [B] a fait l’objet de harcèlement moral ayant eu pour objet ou effet une dégradation de ses conditions de travail, avec un impact sur sa santé.
Il convient de constater que les agissements décrits ont perduré pendant plus d’une année à compter de février 2018 jusqu’à son licenciement le 27 décembre 2019, et qu’ils ont atteint le salarié en générant un préjudice certain sans qu’il soit nécessaire de l’établir par un certificat médical.
La cour évalue que le préjudice en résultant doit être réparé par l’allocation de la somme de’5’000 euros nets à titre de dommages-intérêts.
Le jugement est donc infirmé de chef.
5 ‘ Sur la demande de résiliation judiciaire
Conformément aux dispositions de l’article 1184 du code civil, devenu l’article 1224 du code civil, la condition résolutoire étant toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à son engagement, la partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté peut demander au juge la résolution du contrat.
Les dispositions combinées des articles L.1231-1 du code du travail et 1224 du code civil permettent au salarié de demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur en cas de manquements suffisamment graves de ce dernier à ses obligations contractuelles.
Lorsqu’un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée.
Il appartient au salarié d’établir la réalité des manquements reprochés à l’employeur et de démontrer que ceux-ci sont d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation contractuelle. La résiliation prononcée produit les mêmes effets qu’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il relève du pouvoir souverain des juges du fond d’apprécier si l’inexécution de certaines obligations résultant d’un contrat synallagmatique présente une gravité suffisante pour en justifier la résiliation.
En cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d’effet de la résiliation ne peut être fixée qu’au jour de la décision qui la prononce, sauf si le salarié a été licencié dans l’intervalle de sorte qu’elle produit alors ses effets à la date de l’envoi de la lettre de licenciement.
En l’espèce, les faits de harcèlement moral tels qu’ils ressortent des pièces et des explications fournies, caractérisent des manquements d’une gravité telle que le maintien de la relation contractuelle était impossible.
M. [F] [B] est donc fondé à obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur, à la date du 27 décembre 2019, date à laquelle son licenciement pour inaptitude lui a été notifié.
La décision déférée est donc confirmée de ce chef.
6 ‘ Sur les prétentions afférentes à la rupture
La résiliation judiciaire du contrat étant prononcée aux torts de l’employeur, il convient de faire droit à la demande de M. [F] [B] tendant à voir dire que la résiliation emporte les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, par confirmation du jugement déféré.
Il s’ensuit que le salarié est fondé à obtenir paiement d’une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, outre une indemnité de licenciement.
Au visa des dispositions de l’article R 1234-4 du code du travail, il convient de prendre en compte un salaire moyen de 2’422,54 euros correspondant à la moyenne des trois derniers mois de salaire précédent l’arrêt du travail du 1er juin 2019 et non la moyenne des douze derniers mois de salaire précédents l’arrêt de septembre 2017 tel que revendiqué par le salarié.
Justifiant d’une ancienneté de trois ans et cinq mois à la date du licenciement, M.'[F]'[B]’est fondé à obtenir paiement des sommes suivantes’:
– 327,49 euros à titre de reliquat de l’indemnité de licenciement,
– 4’845,08 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 484,50 euros bruts à titre de congés payés afférents.
Le jugement déféré est donc infirmé de ces chefs.
Par ailleurs, l’article L.1235-3 du code du travail dispose que si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis; et, si l’une ou l’autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux que cet article prévoit.
M. [F] [B] disposait d’une ancienneté, au service du même employeur, de trois années entières et peut donc prétendre, par application des dispositions précitées, à une indemnisation du préjudice né de la perte injustifiée de son emploi comprise entre trois et quatre mois de salaire.
Il revendique l’équivalent de sept mois de salaire sur le moyen tiré de l’inconventionnalité des barèmes alors qu’il n’a pas tiré les conséquences de ses prétentions au titre du harcèlement moral.
Âgé de 33 ans à la date du licenciement, il justifie de son inscription à Pôle Emploi à compter du 6 juillet 2020, de la succession de périodes d’interim entre le 3 août 2020 et le’28’novembre’2021, et de son admission au bénéfice de l’allocation d’aide au retour à l’emploi le 21 avril 2022.
Il convient, par conséquent, par infirmation du jugement déféré, de condamner la société du Val d'[Localité 3] à lui verser la somme de 9’690,16 euros bruts à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié, le salarié étant débouté du surplus de sa demande.
7 ‘ Sur le remboursement des indemnités chômage
Conformément aux possibilités ouvertes par ces dispositions, il conviendra de confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a fait application des dispositions de l’article L.1235-4 du code du travail, et de condamner la société du Val d'[Localité 3] à rembourser aux organismes intéressés les indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement avec effet au 27 décembre 2019, au jour du présent arrêt, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage.
8 ‘ Sur les demandes accessoires
La société duVal d'[Localité 3], partie perdante à l’instance au sens des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, doit être tenue d’en supporter les entiers dépens de première instance et d’appel.
Il serait par ailleurs inéquitable, au regard des circonstances de l’espèce comme des situations économiques des parties, de laisser à la charge de M.'[F]'[B]’l’intégralité des sommes qu’il a été contraint d’exposer en justice pour la défense de ses intérêts, de sorte qu’il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné la société appelante à payer à M.'[B] une indemnité de 1 200 euros au titre des frais exposés et de la condamner à lui payer une indemnité complémentaire de 1’800 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.
En conséquence, la demande indemnitaire de l’employeur au titre des frais irrépétibles qu’il a engagés est rejetée.