Dans le cadre d’un divorce, la possession paisible d’oeuvre d’art n’emporte pas droit de propriété.
Régime de la séparation de biens avec société d’acquêts
M. [V] et Mme [M] mariés sous le régime de la séparation de biens avec société d’acquêts, sont actuellement en instance de divorce.
Dans le cadre de la procédure, la jouissance du domicile conjugal a été attribuée à Mme [M] par ordonnance de non-conciliation du 11 février 2016 confirmée par arrêt de la cour d’appel.
M. [V] est gérant de la SARL Synergie Finance Consultants qui revendique des meubles situés à l’ancien domicile conjugal et actuel domicile de Mme [M].
Action en restitution d’oeuvres d’art
Par acte en date du 30 septembre 2020, la SARL Synergie Finance Consultants a fait assigner Mme [M] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Toulouse pour obtenir sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile, l’autorisation dans un délai de 15 jours suivant la décision à intervenir, d’accéder à son local d’habitation pour permettre, par tel mandataire au choix de la société requérante, le déménagement des oeuvres d’art du domicile conjugal.
Droit de propriété sur les oeuvres en cause
Il n’est pas contestable que la SARL Synergie Finance Consultants a payé les meubles, sculptures et peintures litigieux. Il n’est pas non plus contestable qu’ils ont été livrés directement par les fournisseurs au domicile conjugal des époux [V] dès leur acquisition et qu’ils y sont toujours entreposés à défaut de preuve contraire. Il n’est pas justifié de l’erreur de livraison invoquée.
Il est également incontestable, au vu des échanges de mails entre M. [V] et la société les Héritiers qui a livré les meubles visés à la facture du 16 décembre 2013 qu’elle a été un premier temps libellée au nom des époux à leur adresse personnelle et qu’il s’agit bien de meubles devant meubler un logement au sens de l’article 534 du code civil puisqu’ils sont destinés à une salle à manger et un salon.
La propriété de la SARL Synergie Finance Consultants sur ces meubles n’étant pas établie avec certitude, le caractère évident de l’obligation de restitution n’est donc pas démontré.
Dans ces conditions, concernant les peintures et sculptures pour lesquelles Mme [M] ne justifie pas d’une contestation sérieuse de la propriété de la SARL Synergie Finance Consultants, leur restitution s’impose.
07/03/2023
ARRÊT N°157/2023
N° RG 21/04391 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OOHN
CBB/CD
Décision déférée du 24 Août 2021 – Président du TJ de TOULOUSE ( 20/01467)
Mme [N]
[I] [M] ÉPOUSE [V]
C/
S.A.R.L. SYNERGIE FINANCE CONSULTANTS
CONFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
3ème chambre
***
ARRÊT DU SEPT MARS DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANTE
[I] [M] ÉPOUSE [V]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Frédéric DAGRAS de la SELAS ALTIJ, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIMÉE
S.A.R.L. SYNERGIE FINANCE CONSULTANTS
Représentée par son gérant, M. [F] [V], domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Philippe DUPUY de la SELARL DUPUY-PEENE, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C. BENEIX-BACHER, Présidente, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. BENEIX-BACHER, président
E.VET, conseiller
A. MAFFRE, conseiller
Greffier, lors des débats : I. ANGER
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par C. BENEIX-BACHER, président, et par I. ANGER, greffier de chambre
FAITS
M. [V] et Mme [M] mariés sous le régime de la séparation de biens avec société d’acquêts, sont actuellement en instance de divorce.
Dans le cadre de la procédure, la jouissance du domicile conjugal a été attribuée à Mme [M] par ordonnance de non-conciliation du 11 février 2016 confirmée par arrêt de la cour d’appel.
M. [V] est gérant de la SARL Synergie Finance Consultants qui revendique des meubles situés à l’ancien domicile conjugal et actuel domicile de Mme [M].
PROCEDURE
Par acte en date du 30 septembre 2020, la SARL Synergie Finance Consultants a fait assigner Mme [M] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Toulouse pour obtenir sur le fondement de l’article 835 du code de procédure civile, l’autorisation dans un délai de 15 jours suivant la décision à intervenir, d’accéder à son local d’habitation pour permettre, par tel mandataire au choix de la société requérante, le déménagement de cinq biens mobiliers (une sculpture «’Wrapping Rouge’» de [L] [G], une oeuvre peinte «’Esprit Paris’» de [E] [O], une oeuvre peinte «’Freedom help me Tokyo’» de [E] [O], une peinture sur aluminium «’Games 1 LP’» de [X] [D], et une peinture sur aluminium «’Hommage to LP’» de [X] [D]), sous astreinte de 300€ par jour de retard jusqu’au complet déménagement des oeuvres et la désignation de la SCP Lopez Malavialle pour dresser tel procès verbal de constat d’authentification des biens et de leur enlèvement.
Par ordonnance contradictoire en date du 24 août 2021, le juge a’:
– ordonné à Mme [M] d’autoriser l’accès de son local d’habitation pour permettre par tel mandataire au choix de la SARL Synergie Finance Consultants le déménagement des biens mobiliers suivants’:
* une sculpture dénommée «’Wrapping Rouge’» de [L] [G],
* une oeuvre peinte dénommée «’Esprit Paris’» de [E] [O],
* une oeuvre peinte dénommée «’Freedom help me Tokyo’» de [E] [O],
* une peinture sur aluminium dénommée «’Games 1 LP’» de [E] [O],
* une peinture sur aluminium dénommée «’Hommage to LP’» de [X] [D],
* une table ovale de 220 x 110 chêne marqueterie soleil + socle inox,
* deux lustres Murano : 8 lumières opaline blanc,
dans un délai de deux mois suivant la signification de la présente décision et à défaut sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard pendant trois mois,
– dit que Mme [M] sera prévenue de la date retenue par la SARL Synergie Finance Consultants une semaine avant la date d’enlèvement prévue par email, sms ou courrier;
– désigné la SCP Lopez Malavialle huissier de justice à Toulouse pour dresser tel procès-verbal de constat d’authentification des biens et de leur enlèvement ;
– rejeté la demande concernant les 6 chaises ;
– débouté Mme [M] de ses demandes ;
– condamné Mme [M] à payer à la SARL Synergie Finance Consultants une somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné Mme [M] aux dépens.
Par déclaration en date du 27 octobre 2021, Mme [M] a interjeté appel de la décision. L’ensemble des chefs du dispositif de la décision sont critiqués à l’exception du rejet de la demande concernant les 6.
A l’audience du 27 juin 2022 à laquelle l’affaire avait été appelée, l’ordonnance de clôture rendue le 20 juin 2022 a été reportée contradictoirement au 16 janvier 2023, l’affaire ayant été renvoyée à l’audience du 23 janvier 2023.
L’ordonnance de clôture a donc été rendue le 16 janvier.
Mme [M] a cnclu le 18 janvier 2022 sans solliciter le rabat de l’ordonnance de clôture expliquant par un courrier annexé qu’elle avait récemment retrouvé des documents permettant de faire la lumière sur la propriété des meubles réclamés par la SARL Synergie Finance Consultants. Elle demandait à la cour d’admettre alors qu’il soit répondu par note en délibéré.
La SARL Synergie Finance Consultants a répliqué par conclusions du 20 janvier 2023 qu’elle soulevait l’irrecevabilité de ces conclusions tardives.
En effet en vertu de l’article 802 du code de procédure civile, aucune conclusions ne peut être admises passée la date de l’ordonnance clôture. En l’espèce, les parties ont été avisées par la cour à l’audience du 27 juin 2022 que l’affaire était renvoyée avec rabat de l’ordonnance de clôture et une nouvelle date de clôture fixée au 16 janvier 2023.
Dans ces conditions, les conclusions de Mme [M] du 18 janvier 2023 seront rejetées des débats de même que celles au fond de la SARL Synergie Finance Consultants en réplique en date du 20 janvier 2023.
Il sera donc statué sur les conclusions précédentes qui sont donc considérées comme les dernières conclusions avant ordonnance de clôture pour’:
– Mme [M] en date du 23 juin 2022,
– la SARL Synergie Finance Consultants du 17 juin 2022.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Mme [M], dans ses dernières écritures en date du 23 juin 2022 demande à la cour au visa des articles 255 et suivants, 534, 1921 et suivants, 2276 du code civil, 238 bis du code général des impôts, 122, 563 et suivants, 905-2 du code de procédure civile, de’:
– juger irrecevable la demande de condamnation à une provision formulée par la SARL Synergie Finance Consultants, demande soulevée tardivement et postérieurement au délai d’appel incident de 1 mois,
– en tout état de cause, juger irrecevable – comme prétention nouvelle – la demande formulée par la SARL Synergie Finance Consultants, en ce qu’elle sollicite la condamnation de Mme [M] à une provision de 48.317,94€,
– infirmer et réformer l’ordonnance de référé du 24 août 2021 des chefs expressément critiqués,
– juger de l’existence de contestations sérieuses,
– débouter la SARL Synergie Finance Consultants de l’ensemble de ses demandes et prétentions
– condamner la SARL Synergie Finance Consultants à payer à Mme [M] la somme de 10.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– condamner la SARL Synergie Finance Consultants à payer à Mme [M] la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la SARL Synergie Finance Consultants aux entiers dépens.
Elle soutient l’existence de contestations sérieuses en ce que :
– elle oppose la possession de bonne foi des meubles revendiqués en application de l’article 2276 du code civil, en l’absence de preuve de la propriété revendiquée par la SARL Synergie Finance Consultants’; la preuve de la détention de mauvaise foi n’est pas démontrée,
– les peintures lui ont été offertes en cadeaux de Noël par M. [V] gérant de la SARL Synergie Finance Consultants (cf la facture), la table ovale et les lustres Murano ont été livrés au domicile conjugal et non au siège de la société, il s’agit donc de cadeaux de la société aux époux pour l’ameublement de leur domicile’; le chèque du 4 mars 2014 de 13 836,52€ de l’entreprise «’Les Héritiers’» est un faux, il n’a pas été encaissé et il ne correspond pas aux achats de la table et des lustres Murano’; les sommes inscrites au bilan ne correspondent donc pas’; les lustres ne pouvaient être destinés à la décoration des bureaux de la société,
– elle oppose les règles du régime matrimonial s’agissant de meubles meublants et acquêts de communauté réputés appartenir aux époux interdisant la restitution à la société en application de l’article 534 du code civil, dont la nature et la destination sont incompatibles avec un usage professionnel,
– elle réfute l’argument suivant lequel la société Synergie Finance Consultants et les époux [V] ont procédé à l’aménagement de leur intérieur au même moment et la société Les Héritiers se serait trompée dans les factures’; il est démontré seulement que l’acompte a bien été payé par la société mais, il ne s’agit que d’un devis (facture pro forma) dont l’intégralité était les travaux réalisés dans l’appartement [Adresse 2]’;
– la SARL Synergie Finance Consultants a fait refaire les factures pour faire passer ces frais en amortissement, M. [V] avait l’habitude de faire passer les frais du domicile en frais de la société’: il en a été ainsi de canapés, fauteuils, tapis,
– la demande de restitution s’inscrit dans la procédure de divorce, M. [V] cherchant à éviter tout partage avec son épouse, alors qu’elle bénéficie de la jouissance gratuite du logement et des meubles meublants,
– subsidiairement, l’action est prescrite depuis le 11 février 2019 soit 3 ans après l’ordonnance de non conciliation en application de l’article 2276 code civil,
– force est de constater que toutes les acquisitions ont fait l’objet d’amortissement ou, d’avantage fiscal alors qu’elles se trouvaient physiquement dans l’appartement personnel du gérant,
– l’appel incident est tardif donc irrecevable (5 mois après les premières écritures)’; il s’agit d’une demande nouvelle irrecevable’; elle conteste l’existence d’un contrat de dépôt auquel elle aurait consenti,
– d’autant que si comme la société le soutient, ces meubles sont entrés en comptabilité et bénéficient du régime de l’article 238 du CGI, alors que depuis 2015 ils sont à leur domicile.
La SARL Synergie Finance Consultants, dans ses dernières écritures en date du 17 juin 2022, demande à la cour au visa des articles 1217 du code civil et 835 du code de procédure civile, de’:
– confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance de référé du 24 août 2021,
– y ajoutant, à défaut de restitution des oeuvres d’art et meubles meublants dans le délai de quinze jours à compter de la signification de la décision à intervenir, condamner Mme [M] au paiement d’une provision de 48 317,94 € au bénéfice de la SARL Synergie Finance Consultants,
– condamner Mme [M] aux intérêts sur cette somme depuis la demande de restitution du 20 juin 2019,
– débouter Mme [M] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– condamner Mme [M] au paiement d’une somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [M] aux entiers dépens de l’appel.
Elle soutient:
– Sa qualité de propriétaire des biens meubles
*en apportant la preuve de cette qualité’:
*en démontrant l’absence de don manuel
*ou l’absence d’incidence d’acquêts de communauté contradictoire avec le don manuel ou cadeau,
– En conséquences de sa qualité de propriétaire elle fait valoir’:
* l’ absence de prescription de 3 ans qui ne s’applique qu’en cas de vol ou perte ce qui n’est pas le cas en l’espèce à la comparaison des constats d’huissier établis par chacun des époux
*la restitution des biens meubles s’agissant d’une obligation de faire dans le cadre d’un contrat de dépôt et à défaut elle sera condamnée à la réparation des conséquences de l’inexécution soit le paiement de la somme de 48 317,9€ qui constitue une demande accessoire qui correspond à la valeur des meubles qui ne peuvent être restitués dès lors que Mme [M] affirme qu’ils ne sont plus en sa possession;
– Le rejet de la demande de dommages et intérêts de Mme [M] en ce qu’elle n’est pas justifiée.
MOTIVATION
L’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
Devant le juge des référés, sur le fondement de ce texte, celui qui se prévaut d’une obligation dont il demande l’exécution doit justifier de son caractère évident au contraire de celui qui la conteste qui doit seulement établir que sa contestation n’est pas fantaisiste mais est seulement de nature à faire naître un doute raisonnable sur l’existence de l’obligation revendiquée.
En l’espèce , la SARL Synergie Finance Consultants revendique la propriété des meubles par la production de’:
– 4 factures à son nom établies de 2009 à 2011 concernant des sculptures (9700€ et 12 000€), des peintures (15000€’) et une facture du 16 décembre 2013 d’un montant de 13 836,52€ concernant l’achat d’une table ovale, 2 lustres et 6 chaises,
– des justificatifs des paiements de ces factures opérés par elle apparaissant en immobilisation au bilan de l’année de leur acquisition ce qui démontre le rapprochement effectué par l’expert comptable avec les relevés de comptes (même s’ils ne peuvent plus être fournis).
Elle explique que les accusations de Mme [M] relatif à des abus de biens sociaux sont imaginaires’; en effet, pour le domicile conjugal et l’aménagement des locaux de la société M. [V] en sa qualité de gérant a fait intervenir la même société qui par erreur a le 16 décembre 2013 facturé aux époux ce qui devait l’être à la société.
Elle revendique la restitution en vertu d’un dépôt et s’oppose à l’argumentation adverse relative à l’existence d’un don manuel en l’absence de la réunion des conditions légales soit – la remise du bien en ce que les oeuvres d’art n’ont pas été livrées au domicile – l’irrévocabilité du dessaisissement du donateur par cette même remise – l’acceptation du donataire et la condition de fond indispensable qu’est l’intention libérale du donateur.
En conséquence de sa qualité de propriétaire elle fait valoir l’absence de prescription de 3 ans qui ne s’applique qu’en cas de vol ou perte, ce qui n’est pas le cas en l’espèce à la comparaison des constats d’huissier établis par chacun des époux ou l’absence d’incidence d’acquêts de communauté’: la présomption d’acquêts n’a de valeur qu’entre époux et n’est donc pas opposable à la société qui peut donc les revendiquer.
Mme [M] oppose l’article 2276 du code civil faisant état d’une possession de bonne foi depuis l’acquisition des meubles et peintures en vertu de dons manuels et fait en outre valoir que la facture du 16 décembre 2013 d’un montant de 13 836,52€ vise l’achat d’une table ovale, 2 lustres et 6 chaises meublants la salle à manger et le salon.
Il n’est pas contestable que la SARL Synergie Finance Consultants a payé les meubles, sculptures et peintures litigieux. Il n’est pas non plus contestable qu’ils ont été livrés directement par les fournisseurs au domicile conjugal des époux [V] dès leur acquisition et qu’ils y sont toujours entreposés à défaut de preuve contraire. Il n’est pas justifié de l’erreur de livraison invoquée.
Il est également incontestable, au vu des échanges de mails entre M. [V] et la société les Héritiers qui a livré les meubles visés à la facture du 16 décembre 2013 qu’elle a été un premier temps libellée au nom des époux à leur adresse personnelle et qu’il s’agit bien de meubles devant meubler un logement au sens de l’article 534 du code civil puisqu’ils sont destinés à une salle à manger et un salon. La propriété de la SARL Synergie Finance Consultants sur ces meubles n’étant pas établie avec certitude, le caractère évident de l’obligation de restitution n’est donc pas démontré.
Et, au surplus, en vertu de l’ordonnance de non-conciliation du 11 février 2016 confirmée en appel, Mme [M] a été autorisée à jouir gratuitement du domicile conjugal et du mobilier du ménage au titre du devoir de secours. Ces éléments constituent donc une contestation sérieuse à la demande de restitution de la SARL Synergie Finance Consultants des meubles meublants le domicile des époux [V] soit la table ovale, 2 lustres Murano et 6 chaises. La décision sera donc infirmée en ce qu’elle n’a rejeté que la restitution des seules chaises.
Mme [M] soutient également qu’elle est personnellement possesseur de bonne foi au sens de l’article 2276 du code civil qui institue donc à son profit une présomption de titre. Or, d’une part, elle ne justifie pas d’un don manuel en l’absence de preuve de l’intention de donner de la part de la SARL Synergie Finance Consultants dès lors qu’elle a maintenu dans sa comptabilité ces meubles en immobilisations. Et d’autre part, même s’il n’est pas justifié d’un contrat de dépôt écrit s’agissant de meubles d’une valeur de plus de 1500€, sa possession est équivoque dès lors qu’elle est commune aux époux et ne peut donc valoir titre à son seul profit. La présomption de l’article 2276 du code civil ne constitue donc pas une contestation sérieuse de la propriété et donc de l’obligation de restituer le mobilier revendiqué. Et les dispositions du contrat de mariage, à supposer applicables dans la présente instance, ne sont pas opposables aux tiers.
Dans ces conditions, concernant les peintures et sculptures pour lesquelles Mme [M] ne justifie pas d’une contestation sérieuse de la propriété de la SARL Synergie Finance Consultants, leur restitution s’impose.
La demande en paiement d’une provision «’à défaut de restitution des oeuvres d’art et meubles meublants dans le délai de quinze jours à compter de la signification de la décision à intervenir’», s’analyse en une demande nouvelle qui n’est pas justifiée par l’évolution du litige en l’absence de preuve de la disparition des objets, la condamnation sous astreinte constituant une pression pour l’exécution de la décision.
Les parties succombant toutes deux elles devront prendre à leur charge les dépens pour moitié chacune.
PAR CES MOTIFS
La cour
– Déclare irrecevables les conclusions de Mme [M] du 18 janvier 2023 et cellesde la SARL Synergie Finance Consultants du 20 janvier 2023.
– Confirme l’ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 24 août 2021 en ce qu’elle a :
* ordonné à Mme [M] d’autoriser l’accès de son local d’habitation pour permettre par tel mandataire au choix de la SARL Synergie Finance Consultants le déménagement des biens mobiliers suivants’:
-une sculpture dénommée «’Wrapping Rouge’» de [L] [G],
-une oeuvre peinte dénommée «’Esprit Paris’» de [E] [O],
-une oeuvre peinte dénommée «’Freedom help me Tokyo’» de [E] [O],
-une peinture sur aluminium dénommée «’Games 1 LP’» de [E] [O],
-une peinture sur aluminium dénommée «’Hommage to LP’» de [X] [D], dans un délai de-deux mois suivant la signification de la présente décision et à défaut sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard pendant trois mois,
* dit que Mme [M] sera prévenue de la date retenue par la SARL Synergie Finance Consultants une semaine avant la date d’enlèvement prévue par email, sms ou courrier ;
* désigné la SCP Lopez Malavialle huissier de justice à Toulouse pour dresser tel procès-verbal de constat d’authentification des biens et de leur enlèvement ;
*condamné Mme [M] à verser à la SARL Synergie Finance Consultants une somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
– L’infirme pour le surplus et statuant à nouveau’:
– Déboute la SARL Synergie Finance Consultants de sa demande en restitution d’une table ovale de 220 x 110 chêne marqueterie soleil et son socle inox, deux lustres Murano de 8 lumières opaline blanc chacun et 6 chaises retapissées.
– Déclare irrecevable la demande de la SARL Synergie Finance Consultants en paiement d’une provision.
– Vu l’article 700 du code de procédure civile, déboute les parties de leur demande.
– Dit que les dépens seront laissés à la charge des parties pour moitié chacune.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
I. ANGER C. BENEIX-BACHER