COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-4
ARRÊT AU FOND
DU 16 FEVRIER 2023
N°2023/37
Rôle N° RG 19/10986 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BER76
SASU PUROSTAR
C/
[I] [K]
SARL PUROSTAR
SAS GEL D’EAU
SAS MONTEVERDE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de salon de provence en date du 16 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2018000239.
APPELANTE
SASU PUROSTAR, prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 8]
représentée et assistée de Me Stéphanie SIOEN-GALLINA, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMES
Monsieur [I] [K]
né le 09 Juillet 1949 à [Localité 5] (ALGERIE), demeurant [Adresse 1]
représenté et assisté de Me Paul DRAGON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
SARL PUROSTAR prise en la personne de son représentant légal, dont le siège est sis [Adresse 3]
représentée et assistée de Me Paul DRAGON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
SAS GEL D’EAU agissant par son représentant légal en exercice, dont le siège est [Adresse 7]
représentée et assistée de Me Paul DRAGON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
SAS MONTEVERDE, prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 2]
défaillante
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Janvier 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président, et Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller, chargés du rapport.
Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président
Madame Françoise PETEL, Conseiller
Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Février 2023.
ARRÊT
Rendu par défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Février 2023.
Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PRÉTENTIONS DES PARTIES ET PROCÉDURE :
La SARL Purostar a été créée en 1990 par Monsieur [I] [K] pour exercer une activité dans le domaine des ‘matériels de traitements des eaux et d’études dans le domaine du traitement des eaux’.
La SAS Purostar, immatriculée le 3 octobre 2016 au registre du commerce et des sociétés, a pour activité la commercialisation de matériels de traitements des eaux. Son président est Monsieur [O] [Z].
Le 28 décembre 2016, cette dernière a acquis, suite à un compromis signé le 13 septembre 2016, le fonds de commerce détenu par la SARL Purostar, dirigée par Monsieur [I] [K], moyennant un prix de 260 000euros payable comptant et 11 000euros pour le stock de marchandises payable en 11 mensualités de
1 000euros chacune.
Le 29 mars 2017, le séquestre a versé la somme de 214 919,44euros.
Le 27 juin 2017, la SAS Purostar a fait connaître son refus d’apurer le solde de la cession en invoquant une violation de la clause de non-concurrence par Monsieur [K] qui a créé la société Gel d’eau le 11 novembre 2016 pour commercialiser sous l’appellation ‘Gel d’eau’ un produit autrefois commercialisé par la SARL sous l’appellation ‘Perle d’eau’.
Par acte du 16 janvier 2018, la SARL Purostar a assigné la SAS Purostar devant le tribunal de commerce de Salon de Provence afin de la voir condamner à lui payer le solde du prix restant dû de la cession.
Par acte des 26 et 27 mars 2018, la SAS Purostar a fait citer la société ‘Gel d’eau’ pour concurrence déloyale et Monsieur [K] pour violation de la garantie d’éviction.
Par acte du 26 octobre 2018, la SAS Purostar a fait citer en intervention forcée la société Monteverde, constituée le 11 avril 2018, qui aurait repris selon elle la commercialisation des produits ‘Gel d’eau’ suite à la liquidation amiable de la société Gel d’eau intervenue le 20 mars 2018.
Par jugement du 16 mai 2019, le tribunal de commerce de Salon de Provence a condamné la SAS Purostar à payer à la SARL Purostar la somme de
45 080,45euros au titre du solde du prix de cession et la somme de 11 000euros au titre des stocks avec intérêts au taux légal à compter du 16 janvier 2018, condamné la SARL Purostar à payer à la SAS Purostar la somme de 3 653euros en paiement des factures IDEX, ordonné la compensation entre les deux sommes, débouté la SARL Purostar de ses autres demandes, dit qu’il n’y a pas de concurrence déloyale au titre du produit Perle d’eau et débouté la SAS Purostar de ses demandes à ce titre, constaté que le cabinet Roman s’engage à inscrire les cessions de brevet et de marque sur les registres de l’INPI à réception des originaux de l’avenant du contrat de vente, paraphés et signés par l’acquéreur et sans frais, débouté la SAS Purostar de ses demandes autres, ordonné l’exécution provisoire et condamné la SAS Purostar aux dépens.
La juridiction a retenu que le compromis du 12 septembre 2016 a exclu le produit Perle d’eau du transfert d’activité, que le compromis du 13 septembre 2016 limite la cession à l’activité de traitement de l’eau et des études et que la vente est conforme au compromis de sorte que le produit Perle d’eau est exclu de la vente, que Monsieur [K] et la SARL Purostar, pouvaient valablement continuer à exercer une activité de vente de ce produit, que les transferts d’informations relatives au brevet ont été effectués.
Le 8 juillet 2019 la SAS Purostar a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses conclusions déposées et notifiées le 30 novembre 2022, elle demande à la Cour au de:
Vu les articles 331et 367 alinéa 1er du C.P.C.
Vu les articles 1625, 1219, 1240 et 1241 et suivants du Code civil
Confirmer le jugement rendu le 16 mai 2019 par le Tribunal de Commerce de SALON DE PROVENCE seulement en ce qu’il a condamné la SARL PUROSTAR à payer la somme de 3.653€ TTC à la SAS PUROSTAR correspondant aux factures IDEX n°1217 et n°1117 encaissées de manière indue par la SARL PUROSTAR.
Infirmer le jugement rendu le 16 mai 2019 par le Tribunal de Commerce de SALON DE PROVENCE pour le reste,
Et statuant de nouveau,
Juger que la vente du fonds de commerce du 28 décembre 2016 comprenait effectivement la cession de l’activité de commercialisation des produits « PERLE D’EAU ».
Juger que la société GEL D’EAU, puis la société MONTEVERDE, ont commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société PUROSTAR S.A.S.
Juger que Monsieur [K] et la société PUROSTAR S.A.R.L. ont violé la garantie d’éviction à laquelle ils étaient tenus envers la société PUROSTAR S.A.S.
Condamner in solidum la société GEL D’EAU, la société PUROSTAR S.A.R.L., Monsieur [K] et la société MONTEVERDE à payer à la société PUROSTAR S.A.S. la somme de 50.000 € en réparation du préjudice subi.
Ordonner à la société MONTEVERDE de cesser la commercialisation du produit « GEL D’EAU» sous astreinte de 500 € par jour de retard passé un délai de sept jours à compter de la notification de la décision à intervenir.
Ordonner à la société MONTEVERDE de communiquer l’ensemble des informations et documents relatifs au transfert d’activité de la société GEL D’EAU à son profit, et ce, sous astreinte de 500 € par jour de retard passé un délai de sept jours à compter de la notification de la décision à intervenir.
Condamner in solidum la société GEL D’EAU, la société PUROSTAR S.A.R.L, Monsieur [K] et la société MONTEVERDE à payer à la société PUROSTAR S.A.S. la somme de 15.000 € en réparation de son préjudice moral.
Juger que le brevet français n°1256304 publiée le 3 janvier 2014 sous le n°2992568 délivré le 18 janvier 2014 et ayant pour titre « APPAREIL POUR LE TRAITEMENT D’UN LIQUIDE A EPURER » n’a pas été délivré au jour de la signature de l’acte de vente.
Juger que la SAS PUROSTAR était en droit de se prévaloir de l’exception d’inexécution pour refuser de régler le solde de la vente.
Ordonner le transfert du brevet français n°1256304 publiée le 3 janvier 2014 sous le n°2992568 délivré le 18 janvier 2014 et ayant pour titre « appareil pour le traitement d’un liquide à épurer» au profit de la SAS PUROSTAR.
Ordonner l’inscription de la cession du brevet auprès de l’INPI sous astreinte de 500 € par jour de retard passé un délai maximum de 48 Heures à compter de la signification du jugement à intervenir aux frais exclusifs de M. [K] et de la SARL PUROSTAR in solidum
Ordonner sous astreinte de 500 € (M. [K] et la SARL PUROSTAR tenues solidairement) par jour de retard passé un délai maximum de 48 Heures à compter de la signification de l’arrêt à intervenir la communication les dossiers techniques et les plans de fabrication des flottateurs.
Condamner la SARL PUROSTAR et M. [I] [K], de manière solidaire au paiement d’une somme de 270.000 € au titre de la perte de marge nette sur la vente de flottateurs et de la somme de 8.000 € au titre du service après-vente, sommes à parfaire au jour de l’arrêt.
Prendre acte son désistement de la SAS PUROSTAR. Relatif au transfert des noms de domaine www.purostar.fr et www.purostar.com ;
Juger qu’en ne renouvelant pas la marque française PUROSTAR n°3792274, la SARL PUROSTAR a commis une faute ;
Prendre acte du désistement de la SAS PUROSTAR concernant la demande de cession de la marque française PUROSTAR n°3792274 en raison du non-renouvellement de celle-ci par la SARL PUROSTAR ;
Condamner la SARL PUROSTAR au paiement d’une somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la SAS PUROSTAR. ;
SUR L’APPEL INCIDENT DE PUROSTAR SARL
Rejeter la demande de PUROSTAR SARL de remboursement des annuités pour un montant de 1 814 €.
Rejeter la demande de PUROSTAR SARL de remboursement des honoraires du Cabinet ROMAN pour un montant de 1.718 €.
Rejeter la demande de PUROSTAR SARL de paiement d’une indemnité de 10.000 €.
SUR LES DEMANDES RECONVENTIONNELLES
Débouter les intimés de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.
Condamner solidairement et/ou in solidum la société GEL D’EAU, la société PUROSTAR S.A.R.L., Monsieur [K] et la société MONTEVERDE à payer à la société PUROSTAR S.A.S. la somme de 10.000 € en application de l’article 700 du C.P.C., ainsi qu’aux entiers dépens distraits au profit de Maître Stéphanie SIOËN-GALLINA, avocat sur son affirmation de droits.
Elle s’oppose à la thèse selon laquelle les parties seraient convenues d’écarter de la vente le produit ‘Perle d’eau’ au motif que l’acte sur lequel se fonde la SARL n’est pas l’acte de cession mais un document sur lequel les parties signataires ne sont pas identifiées et qui n’est pas conforme à l’article 1375 du code civil qui ne saurait remettre en cause l’acte du 13 septembre 2016 et l’acte de vente du 28 décembre 2016 qui n’opèrent aucune exclusion, que la SARL n’a jamais adressé de courriers en ce sens à la SAS, que la SARL en commercialisant le produit sous un autre nom démontre bien qu’il n’était aucunement exclu de la cession, que la vente du fonds englobe bien le produit ‘Perle d’eau’.
Elle soutient que les deux produits Perle d’eau et Gel d’eau sont en tous points similaires et sont de nature à créer la confusion dans l’esprit du public, que la société Gel d’eau s’est appropriée le fichier clientèle de la SAS Purostar et a démarché sa clientèle.
Elle soutient également qu’il existe une volonté de confusion entre les deux sociétés Purostar et que l’utilisation du nom ‘Gel d’eau’ crée un risque de confusion entre les deux établissements notamment en utilisant la même adresse postale, que l’e.mail de la SARL est utilisé par la société Gel d’eau alors qu’il était compris dans l’acte de cession et que le site internet était également cédé, que le site de la société Gel d’eau constitue une copie du site de la SARL, qu’il s’agit d’agissements parasitaires au sens de l’article 1382 du code civil.
Elle fait valoir que la société Gel d’eau a imité le produit Perle d’eau que l’imitation apparaît incontestable puisque la société GEL D’EAU indique dans son e.mail promotionnel qu’elle vient de « remplacer [le nom PERLE D’EAU] par l’appellation GEL D’EAU », que la société Monteverde entretient cette confusion, que le descriptif du produit « PERLE D’EAU » a été repris dans des termes très proches sur le site Internet précité, aujourd’hui exploité par la société MONTEVERDE.
Elle fait valoir que Monsieur [K] et la SARL ont violé leur garantie d’éviction, que l’obligation de garantir la paisible possession de la chose vendue imposée au vendeur par l’article 1625 du Code civil emporte pour lui celle de s’abstenir de tout acte qui tendrait à priver l’acheteur d’une partie des avantages sur lesquels il devait naturellement compter d’après la destination de la chose et l’état dans lequel elle se trouvait au moment de la vente qu’ils n’ont incontestablement pas respecté cette garantie en créant, juste avant la cession de leur fonds, une société concurrente, que la SARL et Monsieur [K] continuent leur activité ainsi que cela résulte de factures de fournisseurs, Monsieur [K] exerçant également une activité de conseil.
Elle soutient que l’acte de vente prévoit une liste des brevets transmis, qu’aucune liste n’a été jointe à l’acte de vente, qu’il existe un brevet pour des flottateurs déposé par Monsieur [K] qui a été ultérieurement cédé à la SARL mais qui n’a pas communiqué les plans et les documents précis relatifs au brevet à la SAS, qu’elle a subi une perte évaluée à
270 000euros à ce titre.
Enfin, elle indique que Monsieur [K] était titulaire de la marque Purostar qu’il n’a pas réglé la facture de renouvellement de la marque intentionnellement et qu’elle est tombée dans le domaine public lui causant nécessairement un préjudice.
Elle refuse de régler le solde du prix de vente au motif que le brevet n’a pas été délivré à l’appelante au jour de la signature de l’acte de vente comme cela était prévu, qu’il est tout aussi incontestable que le brevet dépourvu de plans est inexploitable, qu’à ce jour, l’appelante ne dispose toujours pas des plans complets lui permettant de fabriquer le flottateur, objet du brevet et ce, malgré les diverses demandes effectuées en ce sens.
Dans leurs conclusions déposées et notifiées le 18 novembre 2022, la SARL Purostar, Monsieur [I] [K] et la société Gel d’eau demandent à la Cour de :
Confirmer le jugement déféré en e qu’il a condamné la SAS Purostar à payer à la SARL Purostar les sommes de 45080,56euros et 11 000euros,
Donner acte à la concluante de son offre de payer à la SAS Purostar la somme de
3 653euros TTC dès le paiement du solde du pris de vente ou subsidiairement ordonner la compensation entre les créances respectives des parties,
Sur son appel incident :
Condamner la société Purostar à payer à la SARL Purostar la somme de 3 532euros au titre des frais du cabinet de propriété intellectuelle pour renouvellement du brevet postérieurement à la cession,
La condamner à une indemnité de 10 000euros à valoir sur les préjudices financiers et moraux subis par le cédant du fait du non encaissement des fonds issus de l’acte de cession
Sur la demande reconventionnelle :
Débouter la société Purostar de toutes ses demandes,
Subsidiairement : Donner acte à la concluante de son offre de régler la somme de 900euros au titre du préjudice allégué du fait de la vente des produits ‘Perle d’eau’,
Dire et juger sans objet les demandes de transfert de brevet et de marque, la société Purostar ayant refusé de signer les avenants à l’acte de cession de nature à formaliser ces transferts,
Dire et juger sans objet les demandes relatives au transfert du nom de domaine, la SA Purostar ayant déjà notifié à l’hébergeur actuel une demande de transfert au profit d’un autre hébergeur,
Condamner la SA Purostar aux entiers dépens et à payer une somme de 5 000euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Ils exposent qu’il n’est pas contesté que le solde du prix de cession n’a pas été réglé, qu’il convient de condamner la SAS Purostar à le faire et à payer de justes dommages et intérêts pour le préjudice financier causé par ce retard.
Ils contestent l’argument tiré du manquement à la clause de non concurrence et de la concurrence déloyale puisque les produits ‘Perle d’eau’ étaient exclus de la vente du fonds de commerce ainsi que mentionné dans le compromis du 12 septembre 2016, que Monsieur [K] a créé une nouvelle société pour commercialiser ce produit, que la SAS Purostar ne justifie pas commercialiser le produit Perle d’eau qui ne fait pas partie de sa gamme, que la société Gel d’eau est en liquidation amiable depuis le 20 mars 2018 et que le chiffre d’affaire sur cette période pour le produit Gel d’eau est de 1 065euros, que le maximum de préjudice évalué par expert s’élève à 900euros.
Sur les activités de conseil de Monsieur [K], ils soutiennent que la cession du fonds de commerce n’emportait nullement l’exclusion d’une activité de conseil.
Sur le transfert de brevet, ils font valoir que Monsieur [K] était titulaire de la marque Purostar et du brevet d’un flottateur qui étaient compris dans la cession, que la SAS n’a entamé aucune démarche pour formaliser la cession du brevet et de la marque, que concernant la marque, elle a laissé périmer ses droits et que concernant le brevet, elle a refusé de signer l’avenant permettant de matérialiser ce transfert, que les plans des flottateurs figurent dans les documents de l’entreprise, qu’elle n’a jamais adressé de courriers en ce sens.
Pour plus ample exposé, la cour renvoie aux écritures déposées par les parties.
La société Monteverde, valablement assignée par acte du 3 octobre 2019 remis à l’étude n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 6 décembre 2022.
MOTIFS :
Le 28 décembre 2016 la SAS Purostar a acquis le fonds de commerce de la SARL Purostar dirigée par Monsieur [K] moyennant une somme de 260 000euros à laquelle s’ajoute une somme de 11 000euros en paiement du stock de marchandises.
Maître [J], rédacteur de l’acte et désigné comme séquestre, a versé la somme de 214 919,44euros. Restent dus un solde de 45 080,56euros et 11 000euros de stock. La SAS Purostar ne conteste pas être redevable de cette somme mais excipe d’une exception d’inexécution.
Il convient de retenir que la créance de la SARL Purostar sur le SAS Purostar au titre du solde de la vente est admise à hauteur des sommes réclamées.
La SARL Purostar sollicite la condamnation à des dommages et intérêts en raison du retard apporté au paiement.
Toutefois en application des dispositions de l’article 1231-6 du code de procédure civile, les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent constituent dans l’intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure. Seul le créancier, qui justifie de la mauvaise foi du débiteur de nature à lui causer un préjudice indépendant de ce retard, peut prétendre à des dommages et intérêts distincts.
La SARL Purostar, qui ne justifie pas d’un préjudice particulier autre que le retard apporté au paiement, doit être déboutée de sa demande à ce titre et il convient de confirmer le jugement de première instance.
Sur la concurrence déloyale exercée par la SARL Purostar et la SAS Monteverde :
L’acte de vente signé entre les parties le 28 décembre 2016 désigne l’objet de la vente comme étant ‘ le fonds de commerce de vente de matériel de traitement d’eau et études sis [Adresse 4] constituant une branche complète d’activité et comprenant l’achalandage, la clientèle, et les éléments d’équipement garnissant le local, le droit au bail … le mobilier, l’outillage, le matériel et le stock servant à l’exploitation… le nom commercial et l’enseigne ‘Purostar’, le droit au numéro de téléphone… ainsi que le site internet Purostar, les adresses Internet se terminant par @Purostar’.
L’acte de cession ne comporte aucune exclusion expresse des activités exercées par la SARL Purostar. Toutefois, le périmètre précis de la cession englobe l’ensemble des activités concernant ‘la vente de matériel de traitement de l’eau et les études y afférent constituant une branche complète d’activité professionnelle’, excluant a contrario la cession de toutes autres activités exercées par la SARL Purostar.
Il appartient au juge d’interpréter le contrat, en cas de dissension entre les parties, d’après leur commune intention et il convient pour se faire de rechercher dans les actes ultérieurs mais également à la lumière des propositions antérieures intervenues entre elles, leur volonté réelle.
Par mail adressé le 21 avril 2016, Monsieur [Z], président de la SAS Purostar, a avisé Monsieur [K] qu’il lui adressait un compromis ‘ sans le paragraphe qui exclu Perle d’eau qui ne servira que pour l’obtention de mon financement’ démontrant que dés cette date, l’accord des parties est d’exclure l’activité Perle d’eau de la cession, le compromis sans cette exclusion ne servant qu’à permettre d’obtenir plus aisément un prêt selon Monsieur [Z] lui-même.
Les parties ont, préalablement à la signature de la cession, établi le 12 septembre 2016 un acte intitulé ‘ compromis pour affaires en cours ou à venir -Révision A -‘ aux termes duquel l’activité de vente du produit ‘Perle d’eau’ est exclue du périmètre de la vente de Purostar ‘car il y a assez d’activité avec le traitement de l’eau’, Monsieur [K] conservant la possibilité de le commercialiser, puis le 13 septembre 2016 un second acte intitulé ‘Compromis de vente de fonds de commerce -révision D -‘ qui mentionne uniquement la vente du fonds de commerce en ce qu’il constitue une branche d’activité.
La branche d’activité du traitement des eaux usées concerne l’ensemble des procédés visant à dépolluer l’eau usée avant son retour dans le milieu naturel ou sa réutilisation, les eaux usées s’entendent des eaux qui à la suite de leur utilisation domestique, commerciale ou industrielle sont de nature à polluer les milieux dans lesquels elles seraient déversées. La SARL Purostar commercialise des dotées de flottateurs afin de permettre de dépolluer les eaux usées. Il s’agit de matériel qu’elle conçoit à dessein pour chaque utilisateur selon leurs contraintes propres et qu’elle fait fabriquer par des sous traitants.
Les perles d’eau, ainsi que les parties le précisent elles-mêmes dans le compromis du 12 septembre 2016, constituent de billes qui absorbent une importante quantité d’eau et sont utilisées directement par les particuliers pour limiter l’arrosage. La SARL Purostar commercialise ce produit après l’avoir importé, sans intervenir dans sa fabrication.
Il est constant que l’activité de commercialisation auprès du grand public de produits importés à savoir les perles d’eau est sans relation directe avec le traitement des eaux usées industriels dans une station de relevage nécessitant pour chaque client des études approfondies du projet et la réalisation de plans.
Les parties, conscientes de la distinction, ont volontairement restreint le périmètre de la vente à la branche de traitement des eaux usées, plus rémunératrice selon leurs propres termes.
Dés lors, la SAS Purostar doit être déboutée de sa demande au titre de la concurrence déloyale et il convient de confirmer le jugement de première instance à ce titre.
Sur la garantie d’éviction :
Le 30 novembre 2016, Monsieur [K] a créé la société Gel d’eau qui a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 6 avril 2022, et qui a commercialisé le produit ‘Gel d’eau’.
La SAS Purostar dénonce une violation de la garantie d’éviction par cette société et son gérant Monsieur [K]. Cependant dans la mesure où l’activité de vente à des particuliers de billes d’eau était exclue de la vente intervenue, Monsieur [K] et la Société Gel d’eau ne peuvent être tenus d’une garantie à ce titre.
La SAS Purostar reproche à la SARL Purostar d’avoir persisté à exercer une activité dans le domaine du traitement de l’eau, nonobstant la clause de non concurrence.
Il est produit aux débats une facture de la société Xylem Water Solution France du 12 juin 2018 concernant une électro-pompe monophasée pour un montant de 752,44euros. La commande de ce produit a été effectuée par la société Purostar domiciliée [Adresse 6] et son numéro RCS étant le 78 377890876 ce qui correspond à l’adresse et le numéro RCS de la SARL Purostar. Cette facture démontre à l’évidence que la SARL Purostar, en violation avec la garantie d’éviction, a conservé une activité relative au traitement des eaux usées.
La SAS Purostar produit également une facture émanant de la société EMTS Environnement située à saint Victoret datée du 2 mai 2018 adressée à Monsieur [K] relative au paiement d’une prestation de formation en matière ‘théorie et démonstration pratiques à la coagulation, la floculation et la flottation’ pour un montant de 4 500euros. La société EMTS exerce une activité de traitement des eaux usées et la coagulation, la floculation et la flottation sont des phénomènes permettant à des masses liquides de former une masse plus compacte voir des flocons pour pouvoir les séparer. Ces phénomènes sont utilisés notamment dans le traitement des eaux usées.
La cession du fonds de commerce comprenant des études sur le traitement des eaux usées inclut nécessairement l’activité de conseil et de formation, en tout point similaire. La SARL Purostar et Monsieur [K] en sa qualité de gérant de la dite société, s’interdisent dans l’acte de cession toute activité identique à celle vendue dans un rayon de 100 km à vol d’oiseau du fonds vendu.
La garantie légale d’éviction interdit au vendeur de détourner la clientèle du fonds cédé, et si le vendeur est une personne morale, cette interdiction pèse non seulement sur elle, mais aussi sur son dirigeant ou sur les personnes qu’il pourrait interposer pour échapper à ses obligations.
La garantie d’éviction, par laquelle le cédant d’un fonds de commerce est tenu de s’abstenir de tout acte de nature à détourner la clientèle du fonds cédé, participe de la garantie du fait personnel en cas de cession d’un fonds de commerce.
Monsieur [K] et la SARL Purostar ont, à une reprise au moins, violé la garantie d’éviction à laquelle ils étaient tenus.
La SAS Purostar sollicite la somme de 50 000euros à ce titre sans justifier du montant du préjudice réellement subi à ce titre. La somme de 10 000euros doit lui être allouée au titre du préjudice moral résultant de cette violation.
Sur les brevets :
L’acte de cession du 28 décembre 2016 mentionne la cession des brevets détenus tant par Monsieur [K] que par la SARL Purostar. La SAS Purostar reproche à Monsieur [K] d’avoir refusé de lui transmettre le brevet français n° 1256304 publié le 3 janvier 2014 sous le n° 2992568 délivré le 18 janvier 2014 ayant pour titre ‘appareil pour le traitement d’un liquide à épurer’.
Toutefois, Monsieur [K] produit deux courriers émanant du cabinet Romans, conseil en propriété industrielle, qui dès le 12 juin 2018 a proposé à la SAS Purostar de signer un avenant à l’acte de vente mentionnant de façon complète et précise le transfert du dit brevet, courrier réitéré le 26 juin 2018 au conseil de la SAS Purostar afin de permettre l’inscription de cette cession et la transmission du brevet et des plans y afférents. Par courrier du 27 juin 2018, la SAS Purostar a informé le cabinet Romans de son refus de ratifier un tel acte en invoquant l’absence de cession antérieure entre Monsieur [K] et la SARL Purostar, préalable nécessaire à une cession entre la SARL et la SAS. Par courrier du 19 juillet 2016, le cabinet Romans a alors transmis l’acte réclamé relatif à cette cession que la SAS Purostar a, par courrier en réponse du 25 juillet 2018, à nouveau refusé de souscrire l’avenant.
Dés lors, il est acquis que le cabinet Roman, mandaté par Monsieur [K] et la SARL Purostar a tenté de palier les carences de l’acte initial de cession afin de régulariser la situation au regard du transfert du brevet et des plans y afférents et seul le refus de la SAS Purostar, sans motif légitime, le problème invoqué de date erronée portée sur le contrat de cession entre Monsieur [K] et la SARL [K] ne faisant pas obstacle à la cession ultérieure à son profit et la réclamation sur les plans des flottateurs étant indépendante du brevet, de signer les annexes qui lui ont été transmises n’ont pas permis cette régularisation. Dés lors cette attitude est seule responsable de la situation préjudiciable qu’elle déplore.
Monsieur [K], qui n’a pas communiqué sur l’existence de ce brevet et son identification lors de la vente, doit conserver la charge des frais de renouvellement au moins jusqu’en 2018 ainsi que les frais de conseil. La SAS Purostar doit lui rembourser la somme de 1 402euros à ce titre.
Sur le transfert des plans afférents au brevet :
La SA Purostar argue d’un défaut de transmission de plans joints au brevet et nécessaires selon elle à l’élaboration des flottateurs lui ayant causé un préjudice commercial conséquent.
Le brevet litigieux a été déposé en 2014 et la SARL Purostar a été créée en 1990. Il résulte de cette simple constatation que la création et la fabrication des flottateurs pouvaient être réalisées en l’absence de transmission du brevet et des plans y afférents qui ne consiste qu’en une amélioration limitée à la conception originale de la surface du fond du flottateur afin de supprimer la partie inférieure en forme d’entonnoir, particulièrement complexe à exécuter et source de déboires pour la remplacer par un fond double avec une zone d’évacuation en forme de rigole, rendant plus aisés les travaux de chaudronnerie sur cette partie.
Dés lors cette innovation, aussi intéressante soit-elle, ne revêt de caractère indispensable pour l’élaboration et la production d’un flottateur et la SAS Purostar même dépourvue des plans rattachés au brevet de 2014, pouvait tout à fait faire exécuter et fabriquer des flottateurs avec un fond en entonnoir ainsi que la SARL Purostar l’a fait de 1990 à 2014.
Le vendeur est tenu par l’obligation de délivrance, de mettre à la disposition de l’acheteur la chose vendue et il appartient au vendeur de s’assurer que l’ensemble des éléments composant le fonds de commerce est transmis et facilement accessible par l’acheteur.
Toutefois si la preuve de la délivrance est à la charge du vendeur, la preuve de la non-conformité est à la charge de l’acheteur. La preuve de la délivrance non conforme pèse sur l’acheteur du fait de la présomption de conformité tenant à la réception sans réserve de la chose par l’acheteur.
Il appartient ainsi à la SAS Purostar, qui argue d’une impossibilité pour elle de concevoir des flottateurs, de rapporter les preuves des spécificités contractuelles sur lesquelles les parties se sont accordées et dont elle réclame l’exécution. La SAS Purostar, pour s’opposer au paiement du solde du prix convenu, ne peut arguer d’une contravention à l’obligation de délivrance sans établir que la chose livrée ne correspond pas à la chose acquise.
Il convient de relever que la cession est intervenue en décembre 2016 et que la SAS Purostar n’aborde cette difficulté, pourtant décrite comme essentiel à sa survie économique, pour la première fois qu’en septembre 2017. Son acceptation sans réserve de la livraison de la société pendant neuf mois équivaut à un agrément de la conformité de la chose livrée et lui interdit de se prévaloir de ses défauts apparents de conformité.
En effet, l’acheteur est déchu du droit de se prévaloir d’un défaut de conformité s’il ne le dénonce pas au vendeur dans un délai raisonnable à partir du moment où il l’a constaté ou aurait dû le constater. En l’espèce, l’acquéreur est un professionnel qui aurait donc dû s’apercevoir du défaut de conformité dès la réception de la chose et émettre des réserves en conséquence.
De surcroît, la SAS Purostar, qui fait état de demande de devis émanant de clients dès février 2017, pouvait, selon son propre raisonnement, constater ce défaut de délivrance dès cette date.
Force est de constater qu’elle n’en a rien été. Le délai raisonnable pour dénoncer ce défaut ne peut s’entendre de 9 mois, nonobstant la complexité de l’affaire vendue alors que la fabrication de flottateurs était l’activité principale de la société.
Il convient de confirmer la décision de première instance et de débouter la SAS de sa demande d’exception d’inexécution.
Sur l’article 700 du code de procédure civile :
La SAS Purostar succombant doit supporter les dépens et l’équité commande de la condamner à payer à Monsieur [K] et la SARL Purostar la somme de 1 500euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs la cour statuant par arrêt rendu par défaut :
Confirme le jugement rendu le 16 mai 2019 par le tribunal de commerce de Salon de Provence sauf en ce qu’il a débouté la SAS Purostar de ses demandes au titre de la violation de la garantie d’éviction,
Statuant à nouveau :
Condamne in solidum Monsieur [K] et la SARL Purostar au paiement d’une somme de 10 000euros à titre de dommages et intérêts à la SAS Purostar en réparation du préjudice subi,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,
Condamne la SAS Purostar à payer à la SARL Purostar et Monsieur [K] la somme de 1 500euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SAS Purostar aux entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT