Protection des gammes de produits : l’inspiration autorisée

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Il est possible de s’inspirer de la gamme de produits d’un concurrent sans encourir une condamnation pour contrefaçon ou parasitisme.  

La société Ma Bonne Etoile fait fabriquer et commercialise, depuis 2014, des gourdes souples en plastique fin réutilisables, présentant des motifs divers, destinées à tous les âges, qui se remplissent par la base zippée, sous le nom et la marque SQUIZ.

La société Béaba a commercialisé, à compter de 2009, sous la marque BABYPOTE, des gourdes en silicone souple réutilisables, présentant des couleurs unies. Depuis l’année 2018, elle commercialise deux nouveaux produits réutilisables en silicone vendus avec deux embouts, une tétine silicone (6-12mois) et un embout rigide (12 mois +), dénommés BABYSQUEEZ’ et XPORTION.

S’il existait en effet une forte similitude phonétique et visuelle entre les termes SQUIZ et BABYSQUEEZ’ ou XPORTION, il s’avère que le premier est un nom original et que les seconds sont composés du terme ‘squeeze’ qui signifie en anglais ‘presser’, fréquemment utilisé pour un contenant tel un sachet alimentaire se vidant de son contenu par pression manuelle. Ce terme est purement descriptif, et partant à la disposition de tout un chacun.

Par ailleurs, un simple regard sur la présentation de chacune des deux gourdes réutilisables fait apparaître que les produits de l’intimée sont commercialisés de manière très apparente sous la marque BEABA -d’une renommée non contestée- mise en évidence en haut de l’emballage, en caractères gras blancs et majuscules, et apposée en relief sur l’article lui-même, les noms XPORTION et BABYSQUEEZ’ étant inscrits en plus petits caractères sur l’emballage sous la marque BEABA, alors que la gourde de l’appelante est commercialisée sous la marque semi-figurative SQUIZ d’une tonalité orange vif, apposée sur la gourde même de manière centrale, si bien que la reprise phonétique du terme par la société Béaba dans BABYSQUEEZ’ et XPORTION ne suffit manifestement pas à assimiler les deux produits.

A cela s’ajoute que les deux gourdes qui n’ont pas la même forme ni les mêmes coloris et design, qui se distinguent par leur mode de remplissage (par une ouverture à leur base close par un zip pour l’une, par le goulot pour l’autre) et qui ne s’adressent pas forcément aux mêmes usagers, l’une étant à destination des bébés, 1er âge et 2e âge, l’autre des petits et grands à partir de la diversification alimentaire, sont très différentes visuellement et matériellement.

Sur la communication des produits, le fait que chacune des parties mette en avant le caractère ludique, facile à remplir et à nettoyer, lavable avec un goupillon, et pratique pour les compotes, purées et yaourts n’a rien d’étonnant s’agissant de gourdes réutilisables pour bébés et enfants ayant la même fonction, et ne permet pas à l’évidence de considérer que la société Béaba a profité indûment de la communication de la société Ma Bonne Etoile, laquelle en présentant les avantages de son produit ne fait pas montre d’une distinction particulière.

Il en résulte que le risque de confusion allégué entre les produits n’est pas établi avec l’évidence requise en référé pas plus que le fait que la société Béaba, en utilisant le terme générique ‘squeeze’ (presser en anglais) pour décrire une caractéristique de ses produits -qu’elle commercialise sous sa marque BEABA-, ait cherché à se placer dans le sillage de la société Ma Bonne Etoile pour tirer profit de la notoriété de celle-ci.

Pour rappel, l’article 835 alinéa 1er du code de procédure civile dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite désigne toute perturbation résultant d’un fait qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

La concurrence déloyale, fondée sur le principe général de responsabilité édicté par l’article 1240 du code civil, consiste dans des agissements s’écartant des règles générales de loyauté et de probité professionnelle applicables dans les activités économiques et régissant la vie des affaires tels que ceux créant un risque de confusion avec les produits ou services offerts par un autre opérateur, ceux parasitaires visant à s’approprier de façon injustifiée et sans contrepartie une valeur économique résultant d’un savoir-faire, de travaux ou d’investissements ou encore ceux constitutifs d’actes de dénigrement ou de désorganisation d’une entreprise.

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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 3

ARRET DU 07 AVRIL 2021

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/08950 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCACK

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 26 Juin 2020 -Président du TJ de Paris – RG n° 20/51792

APPELANTE

S.A.S. MA BONNE ETOILE prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliée en cette qualité audit siège

[…]

78480 VERNEUIL-SUR-SEINE

Représentée par Me Randy YALOZ, avocat au barreau de PARIS, toque : E0766

INTIMEES

S.A.S. BEABA, venant aux droits de la SASU BEABA DISTRIBUTIONS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[…]

[…]

N° SIRET 352 684 377

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Assistée par Me Clément PUECH, avocat au Barreau de LYON, toque 667

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 08 Février 2021, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Carole CHEGARAY, Conseillère conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Patrick BIROLLEAU, Premier Président de chambre

Carole CHEGARAY, Conseillère

Edmée BONGRAND, Conseillère

Greffier, lors des débats : Olivier POIX

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Patrick BIROLLEAU, Premier Président de chambre et par Olivier POIX, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

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La SAS Ma Bonne Etoile et la SAS Béaba ont pour activité la fabrication et la commercialisation d’articles de puériculture.

La société Ma Bonne Etoile fait fabriquer et commercialise, depuis 2014, des gourdes souples en plastique fin réutilisables, présentant des motifs divers, destinées à tous les âges, qui se remplissent par la base zippée, sous le nom et la marque SQUIZ.

La société Béaba a commercialisé, à compter de 2009, sous la marque BABYPOTE, des gourdes en silicone souple réutilisables, présentant des couleurs unies. Depuis l’année 2018, elle commercialise deux nouveaux produits réutilisables en silicone vendus avec deux embouts, une tétine silicone (6-12mois) et un embout rigide (12 mois +), dénommés BABYSQUEEZ’ et XPORTION.

Estimant que la société Béaba commet des actes de concurrence déloyale et parasitaires en recourant aux noms BABYSQUEEZ’ et XPORTION et à des descriptions similaires pour commercialiser une gamme de produits aux usages similaires à ses gourdes SQUIZ, la société Ma Bonne Etoile a, par acte du 30 décembre 2019, fait assigner en référé les sociétés Béaba et Béaba Distributions -qui ont désormais fusionné- devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins notamment de voir ordonner à la société Béaba l’interdiction de commercialiser les produits litigieux.

Par ordonnance de référé contradictoire du 26 juin 2020, le tribunal judiciaire de Paris a :

— dit n’y avoir lieu à référé,

— condamné la société Ma Bonne Etoile à payer respectivement à la société Béaba et à la société Béaba Distributions la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la société Ma Bonne Etoile aux dépens.

Suivant déclaration du 9 juillet 2020, la SAS Ma Bonne Etoile a interjeté appel de l’ensemble des chefs expressément énoncés de cette ordonnance.

Dans ses dernières conclusions du 22 janvier 2021, la société Ma Bonne Etoile demande à la cour de :

Vu les articles 46 et 834 alinéa 1er du code de procédure civile applicables au jour de la signification,

Vu les articles 1240 et 1241 du code civil,

Vu la jurisprudence précitée,

Vu les pièces versées aux débats,

Vu le caractère protégeable des droits de l’appelante,

Vu la nécessité de faire cesser un trouble manifestement illicite,

Vu les 600 000 euros en dépenses publicitaires de Ma Bonne Etoile dans le développement des produits SQUIZ,

Vu l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 1er décembre 2020,

— infirmer l’ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé le 26 juin 2020 en ce qu’il a :

* dit n’y avoir lieu à référé,

* condamné la société Ma Bonne Etoile à payer respectivement à la société Béaba et à la société Béaba Distributions la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné la société Ma Bonne Etoile aux dépens,

— déclarer la société Ma Bonne Etoile, en sa qualité de titulaire de droits sur le nom commercial et le nom de domaine SQUIZ, et d’exploitant de son produit phare « SQUIZ» depuis 2014, recevable et bien fondée pour introduire la présente action en référé devant le tribunal judiciaire de Paris,

— dire et juger que l’utilisation, la reproduction, la représentation et la diffusion des produits exploités depuis 2018 sous les signes « BABYSQUEEZ’ » et « XPORTION » ainsi que des termes « BABYSQUEEZ’ » et « XPORTION » par la société Béaba, notamment via son site internet ainsi que d’autres plateformes de commercialisation en ligne et auprès de magasins partenaires, constitue un trouble manifestement illicite dont la cessation provisoire est nécessaire,

Par conséquent,

— ordonner provisoirement à la société Béaba SAS de supprimer immédiatement, et dès le prononcé de la décision à intervenir, tous les produits litigieux exploités sous les noms «BABYSQUEEZ’ » et « XPORTION », toutes références, en tout et en partie, aux termes « BABYSQUEEZ’ » et « XPORTION » et toute dénomination reprenant, en tout ou en partie, le terme « Squiz », appartenant à Ma Bonne Etoile, sur tous supports et sous astreinte de 500 euros par infraction constatée et par jour de retard,

— faire interdiction provisoirement à la société Béaba, immédiatement et pour l’avenir, de commercialiser, diffuser et représenter, d’une manière quelconque, les produits exploités sous les noms BABYSQUEEZ’ et XPORTION, ainsi que des termes «BABYSQUEEZ’» et « XPORTION », directement ou par personne interposée, à compter de la décision à intervenir, et sous astreinte de 5000 euros pour chaque violation, suivie d’une astreinte de 500 euros par jour de retard et par produit en cas de poursuite de la violation,

— faire interdiction provisoirement à la société Béaba, à compter de la décision à intervenir, de promouvoir, d’exploiter, de commercialiser, de diffuser et représenter, en quelque lieu que ce soit, et de quelque manière que ce soit, un quelconque échantillon des produits sous les noms BABYSQUEEZ’ et XPORTION (images, produits, références, catalogues), directement ou par personne interposée et sous astreinte de 5000 euros pour chaque violation, suivie d’une astreinte de 500 euros par jour de retard et par produit en cas de poursuite de la violation,

— ordonner à la société Béaba de produire un état détaillé des stocks de tous les produits «BABYSQUEEZ’ » et « XPORTION », sur tous les sites, par référence de produits, des produits vendus sous le nom « BABYSQUEEZ’ » et « XPORTION », jusqu’au jour de la décision à intervenir, certifié et audité par un expert-comptable indépendant, sous astreinte de 500 euros par jour de retard après l’expiration d’un délai de trente jours commençant à courir à compter du prononcé de la décision à intervenir,

— ordonner provisoirement la mise sous séquestre par la société Béaba, sous le contrôle d’un huissier de justice, à ses frais exclusifs, de tous les produits BABYSQUEEZ’ et XPORTION, en sa possession, dans ses locaux ou dans tout autre local lui appartenant ou sous son contrôle où seraient détenus les produits litigieux, sous trente jours après le prononcé de la décision à intervenir, et sous astreinte de 500 euros par jour de retard,

— ordonner provisoirement le rappel, par la société Béaba, sous le contrôle d’un huissier de justice, à ses frais exclusifs, de tous les produits BABYSQUEEZ’ et XPORTION disponibles chez tous les revendeurs des sociétés Béaba ainsi que dans tout autre local où seraient détenus les produits litigieux, sous trente jours après le prononcé de la décision à intervenir, et sous astreinte de 500 euros par jour de retard,

— ordonner à la société Béaba de verser à la société Ma Bonne Etoile, à titre de provision, la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait des actes de concurrence déloyale et parasitaire,

— ordonner à la société Béaba de faire placer sous séquestre auprès d’un huissier de justice, à ses frais exclusifs, les éléments suivants, sous astreinte de 500 euros par jour de retard dans un délai de 30 jours à compter du prononcé de la décision à intervenir :

* la copie, certifiée conforme par un expert-comptable indépendant, de toutes les factures d’achat délivrées par les fabricants et fournisseurs des produits BABYSQUEEZ’ et XPORTION aux sociétés Béaba pour la vente desdits produits litigieux,

* la copie, certifiée conforme par un expert-comptable indépendant, de l’ensemble des factures de vente émises par la société Béaba lors de la vente des produits BABYSQUEEZ’ et XPORTION à ses revendeurs et/ou clients finaux,

Ces éléments devront faire l’objet d’un rapport détaillé par ledit huissier, qui sera communiqué à la société Ma Bonne Etoile et comprenant :

* les quantités totales achetées par référence de produit litigieux, et par année, sans mentionner les informations identifiant les fabricants et fournisseurs et sans le prix d’achat,

* les quantités totales vendues, sur le site internet de vente à distance ainsi que dans tous les magasins du groupe Béaba et chez tous revendeurs ou clients, par référence de produit litigieux et par année, sans mention des informations identifiant les revendeurs et clients, et sans le prix d’achat, dans le respect du secret des affaires,

* les prix de vente fixés,

* le chiffre d’affaire brut de toutes les ventes (sans déduction des frais sauf la TVA), par référence de produit litigieux et par année, sans mention des informations identifiant les revendeurs et clients, et sans le prix d’achat, dans le respect du secret des affaires,

— condamner la société Béaba à une amende civile pour procédure abusive,

— condamner la société Béaba à payer à la société Ma Bonne Etoile la somme de 30 000 euros au titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et abus de droit.

— condamner la société Béaba aux entiers dépens (y compris les frais de constat) et les frais de l’étude perception de NBA Conseil, ainsi qu’à la somme de 6 000 euros pour la première instance et 10 000 euros en instance d’appel, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouter la société Béaba du surplus de ses demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 19 janvier 2021, la SAS Béaba demande à la cour de:

Vu les articles 9, 32-1, 122, 524, 700 et 905-2 du code de procédure civile,

Vu les articles 834, 835, 1240, 1241 et 1844-5 du code civil,

Vu la jurisprudence versée au débat,

Vu les pièces versées au débat,

Vu l’ordonnance du président du tribunal judiciaire de Paris du 26 juin 2020,

— confirmer l’ordonnance rendue le 26 juin 2020 par le président du tribunal judiciaire de Paris en toutes ses dispositions et plus particulièrement en ce qu’elle a :

* dit n’y avoir lieu à référé,

* condamné la société Ma Bonne Etoile à payer respectivement à la société Béaba et à la société Béaba Distributions la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

* condamné la société Ma Bonne Etoile aux dépens,

Y ajoutant,

— débouter la société Ma Bonne Etoile de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires,

— condamner la société Ma Bonne Etoile au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.

MOTIFS

Sur le trouble manifestement illicite provenant des actes de concurrence déloyale et parasitaires allégués :

L’article 835 alinéa 1er du code de procédure civile dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite désigne toute perturbation résultant d’un fait qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

La concurrence déloyale, fondée sur le principe général de responsabilité édicté par l’article 1240 du code civil, consiste dans des agissements s’écartant des règles générales de loyauté et de probité professionnelle applicables dans les activités économiques et régissant la vie des affaires tels que ceux créant un risque de confusion avec les produits ou services offerts par un autre opérateur, ceux parasitaires visant à s’approprier de façon injustifiée et sans contrepartie une valeur économique résultant d’un savoir-faire, de travaux ou d’investissements ou encore ceux constitutifs d’actes de dénigrement ou de désorganisation d’une entreprise.

En l’espèce, la société Ma Bonne Etoile fait valoir qu’elle a construit une image et une identité visuelle identifiable autour de son produit SQUIZ. Elle fait grief à la société Béaba, en passant de BABYPOTE à BABYSQUEEZ’ et XPORTION, d’utiliser un système de noms similaires à son nom original SQUIZ ainsi qu’une communication similaire à la sienne de nature à entraîner un risque de confusion entre les produits des deux sociétés, ce qui constitue des actes de concurrence déloyale et parasitaires à son encontre, la société Béaba tirant ainsi profit des investissements et de la notoriété de SQUIZ pour vendre ses produits.

S’il existe en effet une forte similitude phonétique et visuelle entre les termes SQUIZ et BABYSQUEEZ’ ou XPORTION, il s’avère que le premier est un nom original et que les seconds sont composés du terme ‘squeeze’ qui signifie en anglais ‘presser’, fréquemment utilisé pour un contenant tel un sachet alimentaire se vidant de son contenu par pression manuelle, lequel est purement descriptif, et partant à la disposition de tout un chacun. Un simple regard sur la présentation de chacune des deux gourdes réutilisables fait apparaître que les produits de l’intimée sont commercialisés de manière très apparente sous la marque BEABA -d’une renommée non contestée- mise en évidence en haut de l’emballage, en caractères gras blancs et majuscules, et apposée en relief sur l’article lui-même, les noms XPORTION et BABYSQUEEZ’ étant inscrits en plus petits caractères sur l’emballage sous la marque BEABA, alors que la gourde de l’appelante est commercialisée sous la marque semi-figurative SQUIZ d’une tonalité orange vif, apposée sur la gourde même de manière centrale, si bien que la reprise phonétique du terme par la société Béaba dans BABYSQUEEZ’ et XPORTION ne suffit manifestement pas à assimiler les deux produits. A cela s’ajoute que les deux gourdes qui n’ont pas la même forme ni les mêmes coloris et design, qui se distinguent par leur mode de remplissage (par une ouverture à leur base close par un zip pour l’une, par le goulot pour l’autre) et qui ne s’adressent pas forcément aux mêmes usagers, l’une étant à destination des bébés, 1er âge et 2e âge, l’autre des petits et grands à partir de la diversification alimentaire, sont très différentes visuellement et matériellement. A cet égard, il convient de relever que l’enquête NBA Conseil du 30 octobre 2020 sur laquelle se fonde la société Ma Bonne Etoile pour caractériser le risque de confusion dans l’esprit de la clientèle ne porte que sur la prononciation des appellations des produits en cause.

Sur la communication des produits, le fait que chacune des parties mette en avant le caractère ludique, facile à remplir et à nettoyer, lavable avec un goupillon, et pratique pour les compotes, purées et yaourts n’a rien d’étonnant s’agissant de gourdes réutilisables pour bébés et enfants ayant la même fonction, et ne permet pas à l’évidence de considérer que la société Béaba a profité indûment de la communication de la société Ma Bonne Etoile, laquelle en présentant les avantages de son produit ne fait pas montre d’une distinction particulière.

Il en résulte que le risque de confusion allégué entre les produits n’est pas établi avec l’évidence requise en référé pas plus que le fait que la société Béaba, en utilisant le terme générique ‘squeeze’ (presser en anglais) pour décrire une caractéristique de ses produits -qu’elle commercialise sous sa marque BEABA-, ait cherché à se placer dans le sillage de la société Ma Bonne Etoile pour tirer profit de la notoriété de celle-ci.

En l’absence d’acte de concurrence déloyale et parasitaire manifeste, la société Ma Bonne Etoile ne démontre pas l’existence d’un trouble manifestement illicite. L’ordonnance entreprise sera confirmée de ce chef.

Sur la demande de provision :

L’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En l’absence d’acte de concurrence déloyale et parasitaire manifeste, l’obligation à réparation de la société Béaba est sérieusement contestable, si bien qu’il n’y a pas lieu à référé sur la demande de provision de la société Ma Bonne Etoile.

Sur l’article 700 du code de procédure civile alloué en première instance :

Il résulte de l’extrait K bis de la société Béaba Distributions du 9 octobre 2020 que la société Béaba a absorbé la société Béaba Distributions depuis le 27 novembre 2019, laquelle a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 6 février 2020, si bien que cette dernière était dépourvue de personnalité morale et d’intérêt à agir lorsqu’elle a formulé sa demande d’article 700 du code de procédure civile au mois de mars 2020 devant le premier juge.

En conséquence, il convient d’infirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a alloué à la société Béaba Distributions, indépendamment de la société Béaba, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau, de déclarer irrecevable la demande formée à ce titre par la société Béaba Distributions.

Sur les autres demandes :

Le sort des dépens et de l’indemnité de procédure allouée à la société Béaba a été exactement réglé par le premier juge.

Compte tenu du sens de la présente décision, la société Ma Bonne Etoile sera déboutée de ses demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et d’amende civile formées à hauteur de cour.

La société Ma Bonne Etoile, qui succombe principalement à hauteur de cour, supportera la charge des dépens d’appel et sera condamnée à verser à la société Béaba la somme de 6 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile en plus de l’indemnité déjà allouée en première instance.

Enfin, il convient de rappeler que l’ordonnance du 1er décembre 2020 dont font état les parties au titre d’une procédure d’incident ou encore comme rendue par le conseiller de la mise en état n’est autre qu’une ordonnance du premier président statuant en matière d’arrêt de l’exécution provisoire et de radiation de l’appel, laquelle relève d’une instance autonome ne pouvant donner lieu à indemnisation au titre de l’article 700 du code de procédure civile par le biais de la présente procédure en appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance entreprise sauf en ce qui concerne l’indemnité allouée à la société Béaba Distributions au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau de ce chef,

Déclare irrecevable la demande de la société Béaba Distribution formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant,

Déboute la société Ma Bonne Etoile de ses demandes d’amende civile et de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Condamne la société Ma Bonne Etoile aux dépens d’appel,

Condamne la société Ma Bonne Etoile à verser à la société Béaba la somme de 6 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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